Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
Comme cela est assez fréquent, la présente recherche a trouvé son origine dans un constat de carence. En 1979, Emmanuel Le Roy Ladurie et Gilbert Gadoffre m'ont fait l'honneur de m'inviter à participer au colloque de Loches de l'Institut Collégial Européen dont le thème était « Y a-t-il une nouvelle histoire ? ». Dans ce cadre, il m'a été demandé de m'exprimer sur les apports de l'histoire économique à la nouvelle histoire. Devant la difficulté, pour ne pas dire l'impossibilité, d'une réponse valable à cette question, j'envisageais une synthèse des tendances actuelles de l'histoire économique.
The present study is based on the perusual of some 15,000 articles and the content analysis of 3,000 articles from a total of 72 journals. This material allowed us to determine the main approaches used, subjects treated, and geographic areas discussed over the last thirty years of economic history. It also provided a basis for an evaluation of the growth in the periodical literature concerning the whole of (recent and not so recent) economic history since 1900.
To complete this analysis, it was necessary to compare this material with that concerning other disciplines; this required extending the number of journals examined from 72 to 137. Comparative study showed that economic history is a dynamic branch of the social sciences. This fact is corroborated by the rapid growth in the stock of articles concerning economic history from 300 in 1900 to more than 22,000 in 1985.
1. Y a-t-il une nouvelle histoire ?, Actes du colloque de juillet 1980 sous la direction d'Emmanuel LE ROY Ladurie et de Gilbert Gadoffre, Loches-en-Touraine, Bulletin 1980 de l'Institut Collégial Européen.
2. Harte, N. B., « Trends in Publications on the Economie and Social History of Great Britain and Ireland, 1925-1974 », Economie History Review, Second Séries, vol. XXX, n° 1, février 1977, pp. 20–41 Google Scholar. Sur les grandes tendances de l'histoire économique en Angleterre et aux États- Unis, voir également Gras, N. B. S., « The Rise and Development of Economie History », Economie History Review, vol. I, 1927-1928, pp. 12–34 Google Scholar. Rees, F., « Récent Trends in Economie History », History, vol. XXXIV, 1949, pp. 1–14 Google Scholar. Cole, A. H., « Economie History in the United States : Formative Years of a Discipline », Journal of Economie History, vol. XXVIII, 1968, pp. 556–589.Google Scholar
3. P. Bairoch, « Les tendances de l'histoire économique “contemporaine” », dans Y a-t-il une nouvelle histoire ?, op. cit., pp. 51-59.
4. C'est en tout cas le qualificatif utilisé par les manuels les plus répandus. Et notamment, Bouvier, J., Initiation au vocabulaire et aux mécanismes économiques contemporains (XIXe-XXe siècle), Paris, 1972 Google Scholar. Niveau, M., Histoire des faits économiques contemporains, première édition, Paris, 1964.Google Scholar
5. Voici les principales études récentes axées sur l'analyse de contenu des disciplines en sciences humaines : Histoire Économique, Économie ET Histoire : Harte, N. B., « Trends in Publications of the Economie and Social History of Great Britain and Ireland, 1925-1974 », The Economie History Review, Second Séries, vol. XXX, n° 1, février 1977, pp. 20–41 Google Scholar. Fletcher, J., « A View of the Literature of Economies », The Journal of Documentation, vol. 28, n” 4, décembre 1972, pp. 283–295 Google Scholar. Lee, C. H., Social Science and History. An Investigation into the Application of Theory and Quantification in British Economie and Social History, Londres, 1983 Google Scholar. Srague, D. N., « A Quantitative Assessment of the Quantification Révolution », Canadian Journal of History. Annales canadiennes d'Histoire, vol. XIII, Issue 2, août 1978, pp. 177–192 Google Scholar. Autres Disciplines EN Sciences Humaines : Haijar, S. G., Bowman, J. S. et Brzezinski, S. J., « La littérature de sciences politiques : revues professionnelles de quatre pays », Revue internationale des Sciences sociales, vol. XXIX (1977), n° 2, pp. 353–358.Google Scholar
6. C. H. Lee, op. cit., p. 44.
7. D. N. Sprague, op. cit., p. 177.
8. C. H. Lee, op. cit., p. 47.
9. N. B. Harte, op. cit., p. 24.
10. Price, D. J., « Quantitative Measures of the Development of Science », Archives internationales d'Histoire des Sciences, quatrième année, n° 14, janvier 1951, pp. 85–93 Google Scholar. Il s'agit d'un texte d'une communication présentée au vie Congrès international d'histoire des Sciences tenu à Amsterdam en août 1950. La base « statistique » des calculs de Price était assez ténue et concernait, par la force des choses, essentiellement des données d'avant 1937, avec quelques indications sur la période 1948 à 1950.
11. Pour une excellente synthèse de l'historique des recherches en ce domaine voir Rescher, N., Scientific Progress. A Philosophical Essay on the Economies of Research in Natural Science, Pittsburgh, 1978 Google Scholar, chapitre vi « The Historié Accélération of Science : Adams’ Law of Exponential Growth », pp. 55-78. Voir également Gilbert, G. N. et Woolgar, S., « The Quantitative Study of Science : an Examination of the Literature », Science Studies, n” 4, 1974, pp. 279–294 Google Scholar. Parmi les autres précurseurs, il est intéressant de signaler que l'auteur de Sherlock Holmes, A. Conan Doyle, exposa cette loi dans une de ses nouvelles, écrite en 1894, The Great Keinplatz Experiment, où il écrit notamment : « As… the worthy professor's stock of knowledge increased — for knowledge begets knowledge as money bears interest — », N. Rescher, op. cit., p. 55.
12. Notre recherche a été facilitée par la publication (alors que nous avions déjà effectué le travail préliminaire) de l'article bibliographique de Schubert, A., « Quantitative Studies of Science. A Current Bibliography », Scientometrics, vol. 6, n° 1, janvier 1984, pp. 55–60 CrossRefGoogle Scholar ; vol. 6, n° 3, mai 1984, pp. 197-202 ; et vol. 6, n° 5, septembre 1984, pp. 359-368.
13. Machlup, F., The Production and Distribution of Knowledge in the United States, Princeton, 1962 Google Scholar (tableau ix 2).
14. Afin de déterminer le record de publications atteint par un historien économiste (ou très proche de l'histoire économique), nous avons dépouillé les bibliographies (signalées comme complètes des « mélanges » offerts à ce type de chercheur. Nous avons dans chaque cas tenu compte (par extrapolation) des années suivant ces mélanges. Comme il fallait s'y attendre ces bibliographies ne sont pas homogènes, la distorsion la plus importante étant la prise en considération ou la non prise en considération des comptes rendus. Sur la base de 37 mélanges contenant de telles bibliographies*, il apparaît que le maximum de publications serait détenu par Marc Bloch (pourtant fusillé en 1944 par les Allemands à l'âge de 58 ans) avec quelque 1200-1250 publications (1 170 recensées mais le rédacteur signale qu'il doit y avoir quelques oublis) dont un millier de comptes rendus (994 recensés). Si l'on exclut les comptes rendus mais si l'on inclut les notes brèves, préfaces, articles de journaux, le record (de notre dépouillement) est détenu par E. Hobsbawm avec quelque 380-400 publications (363 recensées entre 1936 et 1982). La moyenne des publications sans les comptes rendus (en excluant les quatre cas extrêmes) se situe à 104 (avec une assez bonne dispersion, la dominante étant vers les 90 publications). Le nombre de comptes rendus (pour les 20 bibliographies les fournissant) est plus variable, la moyenne se situant à 72 (en excluant les quatre cas extrêmes).
15. Trmble, V., « Postwar Growth in the Length of Astronomical and other Scientific Papers », Publications of the Astronomical Society of the Pacific, n° 96, décembre 1984, pp. 1 007–1 016.CrossRefGoogle Scholar
16. Ainsi, si l'on adopte l'hypothèse qu'avant 1900 le rythme de croissance des publications a diminué chaque vingt-cinq ans (comme observé de 1900-1925 par rapport à 1925-1950) et ce jusqu'en 1750 et qu'avant 1750 le rythme était stable, on arrive au résultat aberrant que ce serait vers l'an - 4750 que le rythme de publication aurait été de l'ordre d'un article par an. Ce qui impliquerait qu'entre -4750 et 1750 on aurait publié quelque 47 000 articles d'histoire économique auxquels s'ajouteraient 3 800 articles publiés entre 1750 et 1900. Et si, en suivant toujours ce postulat simpliste, on recherche la date vers laquelle on publiait un article chaque dix années, on aboutirait vers l'an —16 000 et s'ajouteraient quelque 49 000 articles. Enfin, si l'on postule, hypothèse encore plus simpliste, que ce ne serait qu'avant 1700 que le rythme se serait stabilisé, la fréquence d'un article par an se situerait vers l'an -21000.
17. Calculs d'après N. B. Harte, op. cit., p. 24.
18. Price, Solla, Science since BabyIon, nouvelle édition, New Haven, 1975, p. 173.Google Scholar
19. Unesco, , Annuaire statistique 1984, Paris, 1984, p. vi.Google Scholar
20. Ce type d'estimation se base essentiellement sur les citations. Pour les références en la matière, voir notamment les deux articles suivants (et leur bibliographie) : Helmut Artus, M. von, « Halbwertzeitwissenschaftlicher Literatur-Naturgesetz oder Forschungsartefakt ? », Nachrichten fur Dokumentation, 34, n° 2, avril 1983, pp. 79–86 Google Scholar. Et B. C. Griffith, P. N. Servi, A. L. Anker, M. C. Drott, « The Aging of Scientific Literature : A Citation Analysis », Journal of Documentation, vol. 35, n° 3, septembre 1979, pp. 179-196.
* Liste des chercheurs dont les bibliographies ont été utilisées : R. VON Albertini, H. Ammann, A. Babel, M. Bloch, F. Braudel, H. Brunschwig, J. D. Chambers, R. Davis, M. Dobb, A. Fanfani, L. Febvre, R. Gascon, A. Gerschenkron, W.O. Henderson, L. Henry, E. Hobsbawm, G. Jacquemtns, E. Labrousse, J. de Lacy Mann, F. Lot, F. Lotœ, F. Melis, J. Meuvret, CH. Morazé, H. Pirenne, A.-M. Piuz, M. M. Postan, R. L. Reynolds, R. Romano, R. de Roover, A. Sapori, D. Thorner, J. A. VAN Houtte, J. Vinces Vives, T. S. Willan, H. F. WnxiAmson, G. Zwanowetz.