Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
Citée comme témoin au procès en nullité de la condamnation de Jeanne d'Arc, en 1456, Isabelle, la femme du laboureur de Domrémy, Gérardin d'Épinal, déclara que Jeanne «se confessait volontiers et souvent», et elle indiqua dans son témoignage comment elle le savait : « comme elle le vit, car cette Jeannette la Pucelle était sa commère et avait tenu sur les fonts baptismaux un de ses fils, Nicolas » .
Le parrainage servait donc d'argument. Il devait rendre plausible le fait qu'Isabelle voyait souvent sa commère Jeanne.
This essay examines three kinds of documents which provide insight into some neglected aspects of the social uses of godparenthood. 1) The depositions in Joan of Arc's reconciliation trial allow the author to describe the extent to which ties between spiritual kin were part of« public » knowledge, part of discourse and hearsay in the village. 2) Late medieval synodal statutes seem to show that specialists of canonical law took social practices into account when formulating the religious « necessity » to baptize as early as possible. They found ways of combining even a private baptism through the midwife (in case of an emergency) with a subsequent representative ritual including name giving and godparents. 3) The inquisitor Jacques Fournier's « ethnological eye » demonstrates the use of spiritual kinship in the famous shepherd society of Montaillou. Face to face with the inquisitor, spiritual kinship was utilized as a legitimizing denomination for a dangerous friendship. In everiday practice god- and coparenthood served to ritualize friendship as a part in the economy of gifts and recognition, obligingness and obligation.
* Je remercie Florence et Gérald Chaix d'avoir traduit mon texte et d'avoir été ainsi les premiers lecteurs critiques de la version française.
1. Procès en nullité de la condamnation de Jeanne d'Arc, Pierre Duparc éd., Paris, 1977, t. 1, pp. 282-283 ; trad. fr., Paris, 1983, t. 3, p. 270 ; voir aussi l'étude juridique de P. Duparc (t. 5, Paris, 1988). J'ai substitué dans la traduction de P. Duparc le terme de «commère» à celui de « marraine » pour respecter l'original latin commater.
2. Sur le parrainage au début du Moyen Age, voir Angenendt, A., Kaiserherrschaft und Kônigstaufe. Kaiser, Kônige und Pàpste als geistliche Patrone in der abendlàndischen Missiongeschichte (Arbeiten zur Frùhmittelalterforschung, 15), Berlin-New York, 1984;Google Scholar Jussen, B., Patenschaft und Adoption im fruhen Mittelalter. Kûnstliche Verwandtschaft als soziale Praxis (Verôffentlichungen des Max-Planck-Instituts fur Geschichte, 98), Gôttingen, 1991;Google Scholar Lynch, J., Godparents and kinship in early médiéval Europe, Princeton, 1986;Google Scholar id., «Spirituale vinculum. The vocabulary in spiritual kinship in early médiéval Europe», dans T.F.X. Noble, J.J. Contreni, Religion, culture andsociety in the early middle âges. Studies in honour of R.A. Sullivan, Kalamazoo, 1987, pp. 181-204 ; sur les premiers témoignages concernant le parrainage, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 153-158 ; sur le témoignage le plus ancien concernant une compaternitas, ibid. p. 200 ss.
3. On trouve une description très utile dans J. Pitt-Rivers, «Kinship III. Pseudo-kinship», dans International encyclopedia of the social sciences, t. 8, 1968, col. 408-413 ; les chercheurs anglo-saxons nomment le plus souvent le parrainage : « ritual kinship » ; avec ce terme, on ne prend pas en compte le fait que chaque forme de parenté, lorsqu'elle a une réalité sociale, est rituellement constituée, définie et représentée ; le terme souvent employé de « parenté spirituelle » a également des inconvénients, car on fait alors sienne la version des auteurs ecclésiastiques dont la réalité était plutôt la prédication et le discours théologique que le parrainage et les pratiques sociales mises en oeuvre par ses utilisateurs. Naturellement, à côté de ces représentations spirituelles, ceux-ci avaient aussi des intérêts temporels concrets et notamment matériels.
4. Cf., par exemple J. Pitt-Rivers, « Pseudo-kinship », op. cit. ; étude précise de Hart, D.V., Compadrinazgo. Ritual Kinship in the Philippines, Dekalb (Illinois) 1977, pp. 159–195,Google Scholar qui donne un aperçu comparatif des résultats de la recherche ethnologique.
5. Il y avait à tout le moins ici, il est vrai, dans les décisions ecclésiastiques une confusion, dans la mesure où les règles de l'inceste appliquées au parrainage n'ont pas été constituées seulement en étendant par analogie celles appliquées à la parenté de sang et d'alliance, mais pour ainsi dire en les prolongeant. Étaient concernés par la prohibition de l'inceste, non seulement les parties prenantes au baptême, mais encore leurs conjoints et leurs enfants. Il faut en particulier souligner que nous ne devons pas conclure de cette prohibition de l'inceste à un tabou de l'inceste, à une « popular aversion toward the products of incest » (J. Lynch, Godparents, op. cit., p. 241). Pour le Moyen Age, nous ne pouvons pas dire grand-chose sur la manière dont on a effectivement évité de tels mariages, mais on a de bonnes raisons de penser qu'on n'a plutôt rien fait pour les éviter (cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 26-38) ; J. Lynch, Godparents, op. cit., pp. 234-257 a montré qu'il s'agissait de prohibitions imposées « d'en haut » et prononcées par Byzance. Dans la recherche ethnologique, l'opinion autrefois largement répandue d'un tabou de l'inceste est en partie réfutable ; on trouvera une vue d'ensemble dans D.V. Hart, Compadrinazgo, op. cit., pp. 190-192.
6. Cf. Rimbert, VitaAnskarii 7, G. Waitz éd. (MGH SS rer. Germ. 55, Hanovre 1884, pp. 3- 79, voir p. 26) à propos du parrainage de Louis le Pieux en faveur de Harald de Danemark : ipse de sacro fonte suscepit sibique infilium adoptavit; Dhuoda, Manuel pour mon fils — Dhuoda, Liber manualis VIII, 15, P. Riche éd. (Sources chrétiennes, 225), Paris, 1975, p. 3202-6 : Nec hocpraetereundum est, fili, de illo qui te, ex meis suscipiens brachiis, per lauacrum regenerationis filium adoptauit in Christo; en outre infra, n. 105.
7. A dire vrai, l'étude de ce que nous devons imaginer des adoptiones médiévales n'est pas très avancée ; la thèse de Jack Goody, L'évolution de la famille et du mariage en Europe (trad. fr.), Paris, 1985, selon laquelle ces formes n'auraient tout simplement pas existé n'est pas restée sans contestation ; de même, les chercheurs qui concluent sur la base de formulations apparemment antiques recueillies dans les formulaires que de telles formes auraient existé au Moyen Age sous des formes comparables à la pratique antique simplifient également certainement ; on trouvera une analyse des adoptiones mérovingiennes dans B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 47-130.
8. Voir la définition dans J. Pitt-Rivers, « Pseudo-kinship », op. cit., p. 408.
9. J'ai décrit cet aspect dans le troisième chapitre de mon livre, Patenschaft, op. cit., pp. 131- 311 ; dans certaines situations, on peut cependant discerner une tentative de représenter une parenté analogique comme une parenté fictive, lorsque les protagonistes ont attribué également à un lien de parrainage une influence sur les comportements de possession et d'héritage (voir les exemples de Praetextatus de Rouen et de Childebert II, ibid. pp. 187-188 et 247-251).
10. Ainsi par exemple on se doit aujourd'hui encore dans certaines régions de Grèce de prendre comme parrains des enfants les témoins du mariage, mais cette obligation est contournable ; cf. Campbell, J.K., Honour, family and patronage. A study of institutions and moral values in a Greek mountain community, Oxford, 1964, pp. 222–223.Google Scholar
11. Il en était ainsi à Florence au xve siècle; C. Klapisch-Zuber donne plusieurs modèles de comportement très différents (cf. infra n. 16), qui avaient chacun plusieurs variantes possibles (” Au péril des commères. L'alliance spirituelle par les femmes à Florence », dans P. Toubert éd., et al. Femmes, mariage, lignages au Moyen Age, Mélanges en l'honneur de Georges Duby, 1992, sous presse) ; je remercie Christiane Klapisch-Zuber de m'avoir confié son manuscrit.
12. Au XVe siècle, les Florentins faisaient une utilisation relativement libre de ces formes: C. Klapisch-Zuber, « Péril », art. cit. ; sur Montaillou, cf. infra notes 113 à 130 ; on trouvera des exemples pour le Haut Moyen Age dans B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 266-270; on peut comparer avec la présentation de D.V. Hart, Compadrinazgo, op. cit., pp. 176-177, non pas pour y emprunter des informations que l'on transposerait au Moyen Age mais pour y trouver les possibilités que les témoignages médiévaux taisent éventuellement ; selon lui, aujourd'hui en Amérique latine ou aux Philippines, les parrains doivent payer les frais et la robe de baptême, parfois le repas et les boissons, les musiciens pour la fête, un cadeau au filleul ; en revanche, un an plus tard, dans beaucoup de régions, les parents invitent les parrains à une coûteuse ablution rituelle des mains suivie d'un repas. D'après cette recherche, les cadeaux des parrains au filleul sont plutôt rares.
13. David Sabean par exemple montre dans le deuxième volume, encore inédit, de son étude sur la parenté dans le village souabe de Neckarhausen (Property, production and family in Neckarhausen 1700-1870, t. 1, Cambridge, 1990; t. 2 en préparation) que les relations de parrainage étaient transmissibles «par héritage», c'est-à-dire qu'un couple choisissait d'abord un seul et même parrain pour tous ses enfants, lequel, en cas de décès, était remplacé par son fils. Je remercie David Sabean de m'avoir confié son manuscrit.
14. Cf. n. 5 ; on trouvera des exemples empruntés aux recherches ethnologiques en Amérique latine dans D.V. Hart, Compadrinazgo, op. cit., pp. 166-167 ; pour les exemples tirés de Montaillou, cf. infra, note 138-142.
15. Voir le cas de Jeanne d'Arc, cf. infra, n. 58 ; dans les témoignages francs, anglo-saxons ou irlandais du Haut Moyen Age, on en trouve à peine un exemple.
16. C. Klapisch-Zuber, « Péril », art. cit., a montré qu'à Florence, au XVe siècle, on choisissait les parrains et les marraines d'après des conceptions concurrentes : par le truchement des parrains, on créait donc les relations extra-familiales, à l'intérieur de sa couche sociale, par le truchement des marraines, les relations intra-familiales et les relations de patronage. Vers 1500, cet aspect particulier des parrainages féminins avait disparu : cf. aussi Klapisch-Zuber, C., « Compérage et clientélisme à Florence (1360-1520) », dans Ricerche storiche, 15, 1985, pp. 123–133.Google Scholar
17. Voir Bossy, J., «Blood and baptism: kinship, community and christianity in Western Europe from the fourteenth to the seventeenth centuries », dans Baker, D. éd., Sanctity and secularity: the church and the world, [Studies in Church History 10], Oxford, 1973, pp. 129–143, p. 134.Google Scholar
18. Tels les rois du Haut Moyen Age (par exemple lors du baptême des Mérovingiens de Neustrie : Mérovée, Samson et Clothaire II, cf. Jussen, Patenschaft, op. cit., p. 79, p. 178 ss, 205 ss et 229 ss), et apparemment aussi les laïcs comme le montrent les pénitentiels ; les sources sont présentées dans M. Rubellin, «Entrée dans la vie, entrée dans la chrétienté, entrée dans la société: autour du baptême à l'époque carolingienne », dans Les entrées dans la vie. Initiation et apprentissages. XIIe Congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public (Nancy, 1981), Nancy, 1982, pp. 31-51, voir pp. 38-39, et les notes 26 et 27).
19. C'est ce que montrent par exemple les témoignages francs du Haut Moyen Age ; voir les travaux cités supra n. 2 ; c'est ce que montrent aussi, en Styrie, les registres de baptême de l'époque moderne, cf. P. Becker, Leben, Lieben, Sterben. Die Analyse von Kirchenbùchern (Halbgraue Reihe zur historischen Fachinformatik, 5), St. Katharinen, 1989, p. 33 et pp. 66-69.
20. Voir: pour Florence, C. Klapisch-Zuber, «Péril», art. cit. ; pour Modène, ibid., n. 8; voir le comportement des parents de Jeanne d'Arc et les cas pris à Montaillou (cf. infra, § 2 et 4) ; on trouvera des exemples des recherchés ethnologiques, sous une forme résumée, dans D.V. Hart, Compadrinazgo, op. cit., pp. 161-166.
21. C'est le cas à Neckarhausen à l'époque moderne (cf. D. Sabean, Property, op. cit., t. 2, chap. 1) ; on trouvera des exemples empruntés aux recherches ethnologiques dans D.V. Hart, Compadrinazgo, op. cit., pp. 164-166.
22. On trouvera des exemples dans Agnellus, Liber pontificalis ecclesiae Ravennatis, O. Holder-Egger éd. (MGH SS rer. Lang., Hanovre 1878, pp. 265-391, voir p.294); Pierre le Chantre, Summa desacramentis et animae consiliis, 1.3, c.2, § 334, J.-A. Dugauquier éd., (Analecta mediaevalia Namurcensia, 16), Louvain-Lille 1963, p. 404; Jonas de Bobbio, Vita Columbani, 1. I, c. 14, B. Krusch éd. (MGH SS rer. Germ. 37, Hanovre-Leipzig, 1905, pp. 1-294, voir p. 174) ; B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 26 et 296 (Agnellus), p. 31 (P. le Chantre), pp. 288- 289 (Colomban).
23. C'est ce qu'ont montré par exemple Nutini et Bell pour Tlaxcala, Nutini, H.G., Bell, B., Ritual kinship. The structure and historical development of the compadrazgo System in rural Tlaxcala, Princeton, 1980, pp. 56–57;Google Scholar le chroniqueur Grégoire de Tours donne un exemple pour le Haut Moyen Age : lorsqu'on lui reprocha le parrainage en faveur de son neveu Clothaire, le roi de Neustrie, Gontran, avança comme argument l'élément «officiel” (c'est-à-dire explicite), à savoir que personne ne doit refuser une proposition de parrainage ; le chroniqueur tait dans sa relation des événements l'élément «non officiel» (implicite), à savoir que Gontran avait donné au préalable son accord; sur ce point, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 251-254.
24. Voir les exemples de la n. 22 ; en refusant le parrainage d'un fils de roi, saint Amand a joué une véritable « partie de poker » : avec un bon argument, il a décliné ce parrainage jusqu'à ce que le roi finisse par améliorer le ton et les conditions ; sur ce point, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 293-294 ; J. K. Campbell, Honour, op. cit., p. 222 raconte qu'un père s'est soustrait à l'obligation contractée à l'égard d'un parrain « légitime » selon l'usage, en posant la question spécieuse de savoir « if he would mind surrendering his right on this occasion because X has asked him if he might hâve that honour », parce que « as X is an important man he fears to give him offense ».
25. Cf. pour Leipzig, Zwahr, H., Zur Konstituierung des Prolétariats als Klasse. Strukturuntersuchung tiber das Leipziger Prolétariat wàhrend der industriellen Révolution (Akademie der Wissenschaften der DDR. Schriften des Zentralinstituts fur Geschichte, 56), Berlin, 1978, pp. 163– 189,Google Scholar notamment pp. 167-170 ; pour Neckarhausen, cf. D. Sabean, Property, op. cit., t. 2, chap. 1 ; pour Florence, cf. supra, n. 16.
26. C'est ce qu'a montré par exemple S.D. White, Custom, kinship and gifts to saints. The « laudatio parentum » in western France 1050-1150, Chapel Hill-Londres, 1988, pp. 55, 71, 120 ; pour le Moyen Age, dans des groupes de parenté fondés sur l'affinité et la consanguinité ; c'est encore plus frappant avec les parentés de parrainage, telles qu'elles apparaissent par exemple à Montaillou (cf. infra, § 4).
27. Voir le chapitre « La croyance et le corps », dans Bourdoeu, P., Le sens pratique, Paris, 1980, pp. 111–134;Google Scholar M. Weber, Wirtschaft und Gesellschaft, t. 1, J. Winckelmann éd., Cologne- Berlin, 1974, par exemple p. 195, appelle cela « eingelebt » (acclimaté).
28. Par Pierre Bourdieu au premier chef. C'est dans une perspective comparable à celle de Bourdieu (ou en faisant leur pour partie ses analyses), mais plus résolument historique, que travaillent les auteurs de l'ouvrage collectif: Emotionen und matérielle Intéresser). Sozialanthropologische und historische Beitràge zur Familienforschung, H. Medick et D. Sabean éds (Veroffentlichungen des Max-Planck Instituts fiir Geschichte, 75), Göttingen, 1984 ; trad. angl., Interests and Emotions. Essays on the study offamily and kinship, Cambridge, 1984.
29. J'ai traité quelques cas dans Patenschaft, op. cit., pp. 291-295.
30. J'ai tenté de les exploiter dans Patenschaft, op. cit., pp. 271-311.
31. Cf. Procèsen nullité, op. cit., t. 1, pp. 244-315, la question p. 250; trad. fr., op. cit., t. 3, pp. 232-298, et notamment p. 238.
32. Ibid., t. 1, p. 292 (témoin n° 23) et t. 3, p. 279 ; les 18 autres : n° 2, 5, 6, 8, 14, 17, 20, 22, 24 à 34.
33. Je ne m'occupe pas ici des différents points de vue développés par la recherche sur le statut de la famille d'Arc et renvoie sur ce point au commentaire de P. Duparc dans Procès en nullité, op. cit., pp. 132-142.
34. D'après le Procès de condamnation de Jeanne d'Arc, P. Tisset éd., 3 vols, Paris, 1960.
35. Les témoins n° 5 et n° 23 (Jean Moen et Michel le Buin) ont passé leur jeunesse avec Jeanne d'Arc à Domrémy et demeuraient ailleurs au moment de l'audition ; le témoin n° 20 (Jean Colin) était «curé de l'église paroissiale de Domrémy et chanoine de l'église collégiale Saint- Nicolas de Brixey au diocèse de Toul, prêtre» (Procès en nullité, op. cit., t. 1, p. 286, trad. fr., t. 3, p. 273), selon le protocole, il ne relate que ses rencontres avec Jeanne à Vaucouleurs, où il a apparemment reçu sa confession (ibid.); le témoin n° 2, curé de Montiers-sur-Saulx en 1456, a grandi à Domrémy, a en croire ses réponses : ce qu'il raconte sur la jeunesse de Jeanne découle de sa propre vision des choses, mais il était plus jeune que celle-ci (Procès en nullité, op. cit., pp. 255-257, trad. franc., op. cit., pp. 243-245).
36. Dans l'ordre, les témoins sont : 1. Jean Morel ; 2. Dominique Jacob ; 3. Béatrice Estellin ; 4. Jeannette le Royer ; 5. Jean Moen ; 7. Jeannette Thiessellin ; 9. Thevenin le Royer ; 10 Jaquier de Saint-Amant; 11. Bertrand Lacloppe; 12. Perrin Drappier; 13. Gérard Guillemette; 14. Hauviette de Syonne; 15. Jean Waterin; 16. Gérardin d'Epinal; 17. Simonin Musnier; 18. Isabelle d'Epinal ; 19. Mengette Joyart ; 20 Jean Colin ; 21. Colin (fils de Jean Colin de Greux) ; 23. Michel le Buin ; 34. Jean Jaquard.
37. Les parrains portant un numéro étaient en même temps témoins.
38. Un certain Jean le Langart fut nommé par la marraine Béatrice, un Jean Lingue fut nommé par Jeanne elle-même; d'après Duparc, P., Procès en nullité, op. cit., t. 5, p. 134,Google Scholar c'était bien la même personne.
39. Jean Morel (témoin n° 1), Béatrice Estellin (n° 3), Jeannette le Royer (n° 4).
40. Voir Procès en nullité, op. cit., t. 1, pp. 268, 269, 271, 273, 279, 284, 287.
41. Il ne savait presque rien de Domrémy, était en outre chanoine dans une autre église et avait plusieurs fois entendu Jeanne d'Arc en confession à Vaucouleurs ; on peut voir par là à quel point le clergé avait de faibles chances de contrôler les prohibitions de l'inceste spirituel ; sur ce décalage des prohibitions de l'inceste par rapport aux pratiques, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 26-38.
42. Procès en nullité, op. cit., t.l, p. 256 ; dans la traduction française (Procès en nullité, op. cit., t. 3, p. 244), la seconde moitié de la phrase manque.
43. Lors de sa réponse à la question 9.
44. Procès en nullité, op. cit., t. 1, p. 277 ; trad. fr., op. cit., t. 3, p. 265.
45. Ibid., pp. 282-283 ; trad. fr., pp. 269-271.
46. Ibid., p. 284; trad. fr., p. 272.
47. Ibid., p. 280; trad. fr., p. 268.
48. Ibid., pp. 275-276; trad. fr., p. 263.
49. Ibid., p. 261 ; trad. fr., p. 249 ; cf. en outre supra les notes 46 et 47.
50. Ibid., p. 292; trad. fr., p. 279; les deux témoins restant (nos 2 et 34) qui ne savaient rien, étaient plus jeunes que Jeanne ; bien que dans le procès de réhabilitation cette mention fréquente de bonnes relations avec Jeanne d'Arc ait eu pour objet évident de donner du poids aux descriptions élogieuses en tous points, les deux témoins n'en restent pas moins des voisins, du même âge que Jeanne, dont les souvenirs concernant maints détails rendent utilisables leurs déclarations.
51. En 1456, Jeanne aurait eu environ 44 ans; si l'on met en relation l'âge des témoins et le nombre des parrains connus, on obtient la liste suivante : — 4-6 parrains connus, âge des témoins : 80, 70, 70 ans — 3 parrains connus, âge des témoins : 50, 46, 45, 40 ans — 2 parrains connus, âge des témoins : 90, 60, 60, 60, 60, 50 ans — 1 parrain connu, âge des témoins : 56, 47, 45, 44, 35 ans
52. Cf. Procès de condamnation, op. cit., pp. 66, 168, 196, 198, voir la citation p. 196 ; trad. fr., op. cit., t. 2, p. 67, 140, 163, 165, voir la citation p. 163.
53. Voir en particulier les réponses à la question 9 chez les parrains n° 1,2,3,4,7, 11, 17; citation de Jeannette Thiesselin (n° 7), Procès en nullité, op. cit., pp. 264-265 ; trad. fr., op. cit., t. 3, p. 252.
54. Cf. G. Krumeich, Jeanne d'Arc in der Geschichte. Historiographie, Politik, Kultur (Beihefte der Francia, 19), Sigmaringen, 1989.
55. Procès de condamnation, op. cit., t.l, p. 40; trad. fr., op. cit., t. 2, p. 40.
56. Voir Procès en nullité, op. cit., t. 1, p. 264 (question 4).
57. Cf. n. 52.
58. Un mot sur l'homonymie: elle ne devrait guère être responsable du traitement privilégié que Jeannette le Royer reçoit dans la mémoire collective du village. Seuls deux témoins (nc 15 et n° 18) indiquent que Jeanne aurait reçu son nom de Jeannette le Royer et de Jeannette Thiesselin, et Jeannette Thiesselin (n° 7) revendiquait cette transmission du nom exclusivement pour elle.
59. Voir par exemple J. Bossy, Blood, op. cit., p. 134: « comparatively large group” et « formai state of friendship between the spiritual kin and the natural kin ».
60. Lynch, J., «Spiritual kinship and sexual prohibitions inearly médiéval Europe», dans Monumenta iuris canonici. Séries C. Subsidia 7, Rome, 1985, pp. 271–288,Google Scholar voir p. 274; la « famille » est en général, dans les sources, plus suggérée que vraiment caractérisée par la terminologie père-mère-enfant.
61. Voir par exemple A. Anoenendt, Kaiserherrschaft, op. cit., p. 104, pp. 266-267.
62. Procès en nullité, op. cit., p. 267 ; trad. fr., op. cit., p. 255.
63. Procès en nullité, op. cit., p. 283 ; trad. fr., op. cit., p. 270.
64. Voir par exemple les statuts de Paris, c. 11, Pontal, O. éd., Les statuts synodaux français du XIIIe siècle, t . l : Les statuts de Paris et le synodal de l'Ouest. XIIIe siècle, (Collection de documents inédits sur l'histoire de France 9), Paris, 1971, p. 57.Google Scholar
65. Voir les statuts de Sisteron des années 1225/1235 c. 4, Pontal, O. éd.. Les statuts synodaux français du XIIIe siècle, t. 2. : Les statuts de 1230 à 1260 (Collection de documents inédits sur l'histoire de France, 15), Paris 1983, p. 189;Google Scholar voir aussi les statuts de Pierre de Sampson (Nîmes, Arles, Béziers, etc.) datant de 1254, c. 13 (ibid., p. 279).
66. C'est lui qui sert de justification à Sisteron ; cf. Sisteron c. 4, O. Pontal éd., op. cit., t. 2, p. 188.
67. Telle est l'opinion courante, dans la formulation ici de J. Bossy, Blood, op. cit., p. 133 : « either of making firm connections between kin, whose relationship would otherwise hâve been to distant to be effective, or of establishing them where they had not existed hitherto ».
68. Telle est l'opinion générale, dans la formulation ici de J. Bossy, Blood, op. cit., pp. 133- 134 : « formai state of friendship », qui « would somewhat resemble that to bloodbrotherhood, or of fraternity in gênerai ».
69. Cf. Luce, S., Jeanne d'Arc à Domrémy. Recherches critiques sur les origines de la mission de la Pucelle accompagnées de pièces justificatives, Paris, 1886, document n° 51, p. 98.Google Scholar
70. Cf. supra, n. 52.
71. Cf. Luce, S., Jeanne, op. cit., document n° 42 (pièce additionnelle), pp. 359–362.Google Scholar
72. Cf. supra, n. 69.
73. En cas de besoin, une relation tout à fait utile comme on le voit à Montaillou.
74. Cf. P. Bourdieu, Le sens pratique, op. cit., pp. 300-303.
75. Cf. supra, n. 16.
76. Voir la description de P. Bourdieu, par exemple dans Le sens pratique, op. cit., pp. 168- 169.
77. Cf. Klapisch-Zuber, C., «Péril», art. cit., et Sabean, D., Property, op. cit., t. 2, chap. 1.Google Scholar
78. Je prendrai un exemple tout récent dans l'étude, par ailleurs très détaillée et très riche de Matthias Benad, Domus und Religion in Montaillou. Katholische Kirche und Katharismus im Ûberlebenskampf der Familie des Pfarrers Petrus Clerici am Anfang des 14. Jahrhunderts (Spàtmittelalter und Reformation. Neue Reihe, 1), 1990, p. 264: «Mais… comme les bergers étrangers pouvaient être livrés sans défense aux chicanes des habitants du lieu ou à l'arbitraire des seigneurs locaux, l'institution traditionnelle du parrainage religieux offrait le cadre d'une solution. La (…) parenté spirituelle était depuis les débuts du Moyen Age de plus en plus identifiée [gleichgesetzt !] à la parenté par le sang et traitée de plus en plus précisément dans les synodes. Les mêmes définitions de l'inceste valaient [galten !] pour elle comme pour la parenté par le sang. L'Église apparaissait ainsi comme le garant de relations sociales élargies ». Cette « identification » a peut-être été le fait des experts de l'Église (et encore pas tous et pas toujours), mais précisément pas celui des laïcs, qui ont toujours utilisé le parrainage plutôt dans d'autres domaines que celui de la parenté par le sang et par alliance, pour laquelle ils ont formé des transferts analogiques partiels et variables en fonction des situations. On doit aussi se demander si une règle «valait” quand l'Église l'établissait, sans qu'il faille s'interroger sur sa mise en application. Sur ce dernier point, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 26-38.
79. Procès en nullité, op. cit., t. 1, p. 250; trad. fr., op. cit., t. 3, p. 238.
80. Procès en nullité, op. cit., t. 1, pp. 253, 258, 260 ; trad. fr., op. cit., t. 3, pp. 241, 246, 248.
81. L'interprétation des termes compater et commater, comme on le fait parfois, par ceux de « comparrain » et de « commarraine » est erronée.
82. C'est ce que suggère l'exploitation des registres paroissiaux du village souabe de Neckarhausen, de 1700 à 1870, que D. Sabean a entrepris dans le second volume de son étude, voir D. Sabean, Property, op. cit., t. 2, chap. 1.
83. Cf. Le synodal de Nîmes, op. cit., chap. 158 [ = statuts de Pierre de Sampson], O. Pontal éd., t. 2, pp. 384-387.
84. Cf. infra, §3.4.
85. Nous ne traiterons pas ce point ici ; sur l'impossibilité à s'y retrouver dans les prohibitions, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 26-38 ; en outre, sur les interdits, cf. J. Lynch, Godparents, op. cit., pp. 219-281.
86. C'est le cas d'abord dans les Statuts de Paris, c. 40, O. Pontal éd., op. cit., t. 1, p. 66 ; Statuts d'Albi, de 1230, c. 55, ibid., t. 2, p. 28 et n. 3 ; Statuts de Bordeaux, de 1234, c. 45, ibid., p. 66; Statuts de Sisteron, de 1225/1235, c. 47, ibid., p. 206; cf. Gaudemet, J., Le mariage en Occident. Les moeurs et le droit, Paris, 1987, p. 231.Google Scholar
87. Cf. Fulgence de Ruspe, Defide ad Petrum (Fulgentii episcopi Ruspensis opéra, J. Fraipont éd. [CCSL 91A], Turnhout, 1968, pp. 709-760, p. 735, lignes 1247-1253) : «Firmisse tene et nullatenus dubites, […] parvulos, qui siue in uteris matrum uiuire incipiunt et ibi moriuntur […], ignis aeterni sempiterno supplicio puniendos», voir, sur ce point, J. J. Gavigan, « Fulgentius of Ruspe on baptism», dans Traditio 5, 1947, pp. 313-322.
88. Dans la prescription d'ouvrir le ventre d'une femme enceinte décédée pour sauver l'enfant comme par exemple dans le Synodal de Nîmes, de 1254, op. cit., c. 19, p. 282, où il est expressément mentionné que les laïcs ne le faisaient manifestement pas de leur plein gré ; Jean Gerson voulait que l'on contrôlât lors des visites pastorales l'application de cette règle, alors qu'il ne dit rien par exemple du non respect des règles de l'inceste, cf. Gerson, J., De visitatione praelatorum (L'oeuvre spirituelle et pastorale), [Oeuvres complètes t. 8], Paris-Tournai, 1971, p. 51:Google Scholar «Item si morientes in puerperio aperiuntur ut infans vivus recipiatur et baptizetur».
89. Voir la présentation résumée donnée par JohanekP., « Die Pariser Statuten des Odo von Sully und die Anfànge der kirchlichen Statutengesetzgebung in Deutschland », Proceedings ofthe seventh international Congress of médiéval canon law, Linehan, P. éd., [Monumenta iuris canonici, Séries C. : Subsidia 8], Rome, 1988, pp. 327–347.Google Scholar
90. Cf., Statuts de Paris, op. cit., c. 7, p. 54 ; de même le Synodal de l'Ouest, op. cit., c. 4, pp. 140-142 ; Statuts de Sisteron, op. cit., c. 4, p. 188 ; Albi, op. cit., c. 31, p. 18 ; Bordeaux, op. cit., c. 2, p. 45 ; le recueil des statuts de Pierre de Sampson, largement répandu, est particulièrement explicite, Nîmes, op. cit., c. 9. 10, pp. 274-276; Jean Gerson (De visitatione praelatarum, op. cit.) voulait lors des visites paroissiales « interroger et enseigner les sages-femmes ».
91. Cf. Statuts de Canterbury, de 1214, c. 36, C. R. Cheney éd. (Councils and synods with other documents relating to the English Church, 2, 1 a. d. 1205-1265, Oxford, 1964, p. 35); Synodal de Nîmes, op. cit., de 1252 (= Pierre de Sampson), c. 18, O. Pontal éd., op. cit., t. 2, pp. 280-282.
92. Cf. Concile de Chalon, en 813, c. 31 (Concilia aevi Karolini 1. 1., A. Werminghoff éd., [MGH Concilia 2.1], Hanovre-Leipzig, 1906, p. 279): Dictum etiam nobis est quasdam feminas desidiose, quasdam vero fraudulenter, ut a viris suis separentur, proprios filios coram episcopis ad confirmandum tenuisse. Unde nos dignum duxit, ut, si qua mulier filium suum desidia aut fraude aliqua coram episcopo ad confirmandum tenuerit, propter fallatiam suam paenitentiam agat, a viro tamen suo non separatur; d'après une histoire extraite du Liber historiae Francorum 31 A, (Fredegarii et aliorum chronica. Vitae sanctorum, B. Krusch éd. [MGH SS rer. Merov. 2], Hanovre, 1888, pp. 215-328, p. 29227-29331), le roi Chilpéric a pu se séparer de sa femme Audovère, parce que celle-ci, grâce à une ruse de Frédégonde, a tenu son propre fils sur les fonts baptismaux ; Hincmar dut une fois trancher dans un procès dans lequel on reprochait à un noble nommé Etienne de refuser de consommer son mariage. Etienne se référa au fait qu'il avait eu auparavant comme concubine une parente de son épouse et qu'il craignait de ce fait de commettre un inceste, cf. Hincmar, ep. 136 (Hincmari archiepiscopiRemensisepistolae, É. Perels éd., [MGH Epp. 8], Berlin 1939, pp. 87-107) ; sur ce point, voir J. DÉvisse, Hincmar. Archevêque de Reims 845-882, 1.1, Genève, 1975, pp. 432-436 ; Dans le Decretum Gratiani C. XXX, É. Friedberg éd., [Corpus iuris canonici 1, É. Friedberg éd.], Leipzig, 1879, col. 1095, il y a un cas très compliqué dans lequel, entre autres, une femme rouée (callide) voulait tenir son propre fils sur les fonts baptismaux ; Pierre le Chantre (Summa desacramentis et animae consiliis3,2% 334, J.-A. Dugauquier éd., [Analecta mediaevalia Namurcensia 16], Louvain-Lille, 1963, p. 404) s'occupe d'un cas dans lequel un père refuse une demande de parrainage, avec l'argument selon lequel le demandeur est déjà le parrain d'un enfant (décédé), et qu'un nouveau parrainage est donc un inceste. S'il se peut que certains de ces cas soient plutôt le produit de l'art raffiné des experts, l'exemple d'Etienne, la tradition concernant Frédégonde, ainsi que la formulation du concile de Chalon permettent cependant de conclure à un « savoir » correspondant chez les laïcs.
93. Cf. Synodal de Nîmes, etc., c. 4, O. Pontal éd., op. cit., t. 2, p. 270.
94. Synodal de l'Ouest, op. cit., c. 4, O. Pontal éd., t. 1, p. 141 ; même lorsqu'un recueil comme celui de Sisteron, c. 4, O. Pontal éd., op. cit., t. 2, réclame la dénomination, il reste toujours assez d'actes rituels qui peuvent être accomplis après le baptême avec les parrains et le prêtre.
95. Jean Gerson, De visitatione praelatorum, op. cit., p. 49.
96. Voir Synodal de Nîmes, etc., chap. 6, O. Pontal éd., op. cit., t. 2, p. 272.
97. Sur la dénomination comme innovation gallicane dans le rite du baptême, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 238-242.
98. Cf. J. Lynch, Godparents, op. cit., pp. 211-213.
99. Tertullien s'était encore prononcé contre un baptême dans « l'âge de l'innocence », Tertullien, cf., De baptismo, 18, 5,Google Scholar J.G.Ph. Borleffs éd. (Quinti Septimi Florentis Tertulliani opéra, t. 1 [CCSL], Turnhout, 1954, pp. 275-295, p. 2932932) ; une génération plus tard, les évêques discutaient déjà en terme de jours ; Cyprien, Ep. 64, 2 (S. Thasci Caecili Cypriani opéra omnia, t. 2, W. Hartel éd., [CSEL 3.2], Vienne, 1871, p. 718) rapporte à propos d'un synode: « Quantum vero ad causant infantium pertinet, quos dixisti intra secundum vel tertium diem quant nati sint constitutos baptizari non opportere et considerandant esse legent circumcisionis antiquae, ut intra octauum diem eum qui natus est baptizandum et sanctificandum non putares : longe aliud in concilio nostro uisum est. In hoc enim quod tu putabas esse faciendum nemo consensit, sed uniuersi potius iudicauimus nulli hominum nato misericordiam Dei et gratiam denegandam ». Il suffit de rappeler le baptême de Constantin sur son lit de mort ; cf. supra, n. 18, les exemples mérovingiens.
100. Ainsi dans le Synodal de Nîmes (= Pierre de Sampson), c. 9, O. Pontaiéd., op. cit., t. 2, p. 274; voir pareillement les Statuts d'Albi, c. 32, op. cit., p. 18; Synodal de l'Ouest, c. 4, O. Pontal éd., op. cit., p. 142.
101. Ladurie, E. LE Roy, Montaillou. Village occitan de 1294 à 1324, Paris, 1975, p. 260.Google Scholar Cf. aussi par exemple, ibid., pp. 176, 251, 310, 501.
102. Sur Pierre Guilhem, voir Le registre d'inquisition de Jacques Fournier, évêque de Pamiers (1318-1325), J. Duvernoy éd., 3 vols, Toulouse, 1965, t. 3, p. 335 ; trad. fr. : Le registre d'inquisition de Jacques Fournier (évêque de Pamiers), 1318-1325, J. Duvernoy éd., 3 vols, Paris- La Haye-New York, 1978, t. 3, p. 1191 ; sur Guillaume Escaunier, ibid., t. 2, p. 9; trad. fr., t. 2, pp. 555-556 ; sur Bélibaste, ibid., t. 3, p. 209 ; trad. fr., t. 3, p. 988 ; sur Pierre Maury, ibid., t. 3, p. 185 ; trad., t. 3, p. 971 ; sur Pierre Clergue, ibid., t. 1, p. 253, trad. fr., t. 1, p. 293.
103. Cf. supra n. 2; quelques exemples: Jean Diacre, Cronica Veneziana, (Cronache venezianeantichissime, t. 1, G. Monticolo éd., [Fonti per la storia d'Italia, 9], Rome, 1890, pp. 57-171, p. 116“) : «ad dilectionis seu pacis vinculum corroborandum » ; Chronica S. Pétri Erfordensis moderna ad a. 1127, (Monumenta Erphesfurtensia saec. XII. XIII. XIV, O. Holder Egger éd., [MGH SS rer. Germ. 42], Hanovre, 1899, pp. 153-206, voir p. 165,8/19): «Rex Lotharius apud Marseburg penthecosten celebrans Udalricum ducem Boemorum in amiciciam recepit et filium eius de sacro fonte baptismatis suscepit»; Vita Faronis episcopi Meldensis 22, J. Mabillon éd. (Acta sanctorum Ordinis sancti Benedicti, t. 2, Paris, 1669 [repr. 1938], pp. 606-625, voir p. 613) : «pro pacto amicitiae filium Chilperici Régis a sacro fonte suscipiens, Baptismatis novus regenerator efficeretur” ; un exemple irlandais, où ce sont toujours ceux qui baptisent qui tiennent le rôle habituellement dévolu aux parrains : Vita sancti Declani episcopi de Ard Mor 5 (Vitae sanctorum Hiberniae, t. 2, C. Plummer éd., Oxford, 1910, pp. 32-59, voir p. 37): «Colmanus baptizauit sanctissimum infantulum, Declanum nomen eiimponens. Etpost baptismum ait[…]Et ilicitofraternitatem tecum habebo, et commendo me sanctitate tue».
104. On en trouve un exemple dans le Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 362; trad. fr.,p. 1124.
105. C'est le thème principal de l'ouvrage d'A. Angenendt, Kaiserherrschaft, op. cit. ; à titre d'exemple, on peut citer le parrainage qu'exerçait le roi de Mercie Wulfhere sur Aethelwealh de Sussex, cité d'après Bede, Historia ecclesiastica gentis Anglorum — Beda der Ehrwùrdige, Kirchengeschichte des englischen Volkes IV, 34, 2 vols, G. Spitzbart éd. (Texte der Forschung, 34), Darmstadt, 1982, p. 356: «a quo etiam egressus de fonte loco filii susceptus est ; in cuius signum adoptionis duas illi provincias donauit, Uectam uidelicet insulam et Meanuarorum prouinciam in gente Occidentalium Saxonum ».
106. Annales Fuldenses sive annales regni Francorum orientalis a. 864-882, G.H. Pertz et F. Kurze (MGH SS rer. Germ. 7, Hanovre, 1891, pp. 1-107, voir p. 99): «Sed imperator […] Gotafridum de fonte baptismatis levavit et, quem maximum inimicum de desertorem regni sui habuerat, consortem regni constituit. Nam comitatus et bénéficia, quae Rorich Nordmannus Francorum regibus fidelis in Kinnin tenuerat, eidem hosti suisque hominibus ad inhabitandum delegavit »; Annalium Fuldensium continuatio Ratisbonensis a. 882, ibid., p. 108: « Duos ibi dies laeti insimul versabant, tum remissis nostris obsidibus de munitione ipse e contrario cum maximis muneribus remissus ad sua. Munera autem talia erant : in auro et argento duo mille libras et LXXX vel paulo plus ; quam libra XX solidos computamus expletam » ; sur ce point, cf. A. Angenendt, Kaiserherrschaft, op. cit., pp. 260-262 et B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 285-286.
107. Die Patenschaft bei Gregor von Tours, libri historiarum X, 28, B. Krusch et W. Levison éds (MGH SS rer. Merov. 1, 1), Hanovre, 19512, pp. 520-522 ; l'interprétation de Childebert, ibid., X, 28, p. 5218“9 ; on trouvera une analyse précise de ce cas très riche du point de vue de l'histoire sociale dans B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 229-270.
108. VitaDeclani, t. 5, op. cit.
109. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 209 ; trad. fr., t. 3, p. 988 ; sur la manière de vivre de Pierre Maury, cf. E. Le Roy Ladurie, Montaillou, op. cit., pp. 119-132.
110. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 307 ; trad. fr., t. 3, pp. 1165-1166. Ce passage est plutôt nébuleux, car les parrains n'avaient en fait aucune place dans la cérémonie du baptême cathare ; c'est peut être la raison pour laquelle Authié, comme cet informateur le mentionne expressément, a expliqué ce qu'était une aumône juste — celle faite à un hérétique — mais pas pour quel parrainage il y a du mérite.
111. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 185 ; trad. fr., t. 3, p. 971.
112. Le fait que Bélibaste prétende que Pierre Maury avait aussi baptisé est curieux : ni la doctrine catholique ni la doctrine cathare, telle qu'on la présentait généralement, ne le permettaient, si on exclut le baptême d'urgence, imprévisible et donc peu utile socialement ; il n'y en a d'ailleurs aucune preuve.
113. Cf. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 243 ; sur la valeur des moutons, voir M. Benad éd., Domus, op. cit., pp. 277-278. Sur l'éventail des cadeaux imaginables, cf. supra, n. 12.
114. Cf. Registre, J. Duvernoy, op. cit., t. 3, p. 268; trad. fr., t. 1, p. 1141.
115. Ibid., p. 243 ; trad. fr., p. 1015..
116. A propos de Planèzes, Guillaume Maurs parle deux fois d'« un de ses compères (cuidam/ cuidem compatri) » ; à propos de Flix, Guillaume Maurs rapporte que Pierre y avait « beaucoup [multos] de compères»; cf. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 2, pp. 175-177; trad. fr., t. 3, pp. 806-807.
117. A un autre endroit, Pierre Maury a plus clairement indiqué cet aspect de formalisation et d'intensification d'amitiés déjà existantes par la formule; «per compaternitas homo acquirat maiores amicicias», Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 228; également, ibid., p. 243.
118. Cf. supra n. 109. Les conteurs permettent parfois de reconnaître cet aspect: le père de Guillaume de Dijon fut ainsi censé avoir « amené » l'empereur Otton 1er à devenir le parrain de son fils « parce qu'il avait été intelligent et résolu » ; cf. Rodolphus Glaber, Vita domni Willelmi abbatis. Nouvelle édition d'après un manuscrit du XIe siècle, Paris, Bibliothèque Nationale, lat. 5390, N. Bulst éd. (DA 30, 1974, pp. 450-487, voir p. 464) : « Tune quoque isdem Rotbertus, ut erat virprudens acstrenuus, suggessit imperatori, utfilium, quem ei uxorsua […] peperat, catecuminum fieriper manum imperialem preciperet. Quod ille libenter annuens […]».
119. On trouvera une analyse détaillée de ces pratiques sur la base des récits de Grégoire^ de Tours et des vies de saints du Haut Moyen Age dans B. Jussen, Patenschaft, op. cit., notamment pp. 271-311.
120. Le fait qu'il avait peut-être un fils ressort du Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 191 ; cf. M. Benad, Domus, op. cit., p. 298.
121. Sur la farine, cf. Registre, J. Duvernoy, op. cit., t. 2, p. 176 ; sur l'habillement des hérétiques, ibid., t. 2, p. 38.
122. Cf. Registre, J. Duvernoy, op. cit., t. 2, p. 69: Pierre Maury et Arnaud Sicre payent la fête de Noël pour Bélibaste et sa concubine Raymonde.
123. Sur ce point, cf. B. Jussen, Patenschaft, op. cit., pp. 276-277 et 299-301, cf. note 150.
124. Voir la description du baptême cathare donnée par J. Duvernoy, Le catharisme, t. 1, La religion des cathares, Paris, 1976, pp. 143-170.
125. Cf. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 307 ; trad. fr., t. 3, p. 1165.
126. Je reprends ici chaque fois l'appréciation du statut social donnée par E. Le Roy Ladurie.
127. Cf. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 1, p. 253 ; trad. fr., t. 1, p. 293.
128. Ibid., t. 2, p. 224; trad. fr., t. 2, p. 480.
129. Cf. E. LE Roy Ladurie, Montaillou, op. cit., p. 378.
130. Voir Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 3, p. 160; trad. fr., t. 3, p. 952.
131. Ibid., t. 2, p. 177; trad. fr., t. 3, p. 807.
132. Ibid., t. 2, p. 209; trad. fr., t. 3, p. 988.
133. Ibid., t. 2, p. 194; trad. fr., t. 3, p. 978.
134. Ibid., t. 2, p. 487 ; trad. fr., t. 3, p. 883.
135. Ibid., t. 3, p. 160; trad. fr., t. 3, p. 952.
136. Ibid., t. 2, p. 175 ; trad. fr., t. 3, p. 806.
137. Ibid., t. 2, p. 30; trad. fr., t. 3, pp. 758-759; ibid., t. 2, p. 175; trad. fr., t. 3, p. 806.
138. Ibid., t. 2, p. 175 ; trad. fr., t. 3, p. 806.
139. Ibid., t. 2, p. 9 ; trad. fr., t. 2, p. 555.
140. Voir par exemple Guerreau-Jalabert, A., « Sur les structures de parenté dans l'Europe médiévale », Annales ESC, 36, 1981, pp. 1028–1049,Google Scholar qui souligne p. 1038 qu'il n'existe pas de relation avunculaire.
141. Cf. Registre, J. Duvernoy éd., op. cit., t. 2, p. 10; trad. fr., t. 2, p. 556.
142. Cf. supra n. 133.
143. M. Benad, Domus, op. cit., p. 94, n. 21, a attiré, à juste titre, l'attention sur le fait que cette compaternité peut aussi désigner la relation entre celui qui baptisait et les parents. Mais que cela puisse signifier ici « ami intime », tout à fait indépendamment d'une constitution rituelle, ne me paraît pas vraisemblable faute de preuve indiscutable. Dans une de ses histoires (Decameron, septième jour, troisième histoire), Boccace a explicité cette technique de la désignation «convenable » d'une liaison amoureuse.
144. Synodal de Nîmes, O. Pontal éd., op. cit., c. 154, p. 384.
145. Cf. supra, n. 103.
146. Febvre, L., «Comment reconstituer la vie affective d'autrefois? La sensibilité et l'histoire », Annales d'Histoire sociale, 3, 1941 Google Scholar (repr. id., Combats pour l'Histoire, Paris, 1965, pp. 221-239, voir pp. 223-224), voir aussi Luhmann, N., Soziale Système. Grundriss einer allgemeinen Théorie, Francfort-sur-le Main, 1984, notamment p. 253.Google Scholar
147. Cf. H. Medick et D. Sabean, Emotionen und matérielle Interessen in Familie und Verwandtschaft, op. cit., pp. 27-54.
148. Cf. Formulae Turonenses, op. cit., n° 25, p. 1496/7: «Pactum inter parentes. Caritatis studio et dilectionis affectu inter propinquos decet»; d'après cette réflexion, il n'est pas utile de déclarer la caritas «moins empreinte de sentiment” parce qu'elle est une «norme objective de comportement» (comme le fait R. Schneider, Brùdergemeinde, op. cit., p. 119); il se peut au contraire que son effet stabilisateur réside dans le fait qu'elle a l'un et l'autre trait en même temps.
149. Définition de N. Luhmann, System, op. cit., p. 319 qui me semble également acceptable dans le contexte d'autres méthodes sociologiques que celles utilisées par N. Luhmann.
150. Cf. Vita Trudonis, op. cit., c. 19, p. 290: «quidam vir religiosus nomine Godmundus, cuius etiam filium vir Dei a sacro fonte susceperat, postulavit ab eo, ut domum suum visitaret, ut sua etiam benedictione consecraret » ; Vita Fidoli, op. cit., c. 10, p. 43031-33: « Praemissa postulatione, ut domum ipsius visitaret unici obtinuit caritas. In cuius nomine fides intégra lagenam meri vini uberius servaverat plena » ; sur la façon dont Pierre Maury entretient son réseau de relations de parrainages, cf. supra, notes 115-121.
151. P. Bourdieu, Le sens pratique, op. cit., p. 219.
152. Cf. supra, n. 103.