Published online by Cambridge University Press: 25 May 2018
Les Annalesont publié tout récemment de surprenantes réflexions de J. Dupâquier : voilà une critique qui sort des sentiers battus ! Qu'on m'entende bien : s'il a fallu pour le texte de J. D. rouvrir pour la première fois depuis plus de six ans la célèbre rubrique des « Polémiques et Controverses », je n'ai nullement l'intention de suivre J. D. sur un terrain où l'outrance remplace trop souvent l'argument scientifique. Je ne mets pas non plus en cause la sévérité de ses remarques. Le problème n'est pas là.
1. « Statistique et démographie historique. Réflexions sur l'ouvrage d'A. Croix : Nantes et le pays nantais au xvie siècle», Annales E.S.C., 1975, n° 2-3, pp. 394-401.
2. P. Goubert, Beauvais et le Beauvaisis de 1600 à 1730, Paris, 1958-1960, p. 27.
3. A La Remaudière, la série baptismale commence en 1503, mais présente 7 lacunes de un à sept ans jusqu'en 1570 : j'ai alors interrompu le dépouillement. A Saint-Étienne-de-Corcoué, une lacune de 1557 à 1643 s'ajoute à des lacunes d'enregistrement mal discernables, à cause des faibles effectifs, mais certaines: ainsi aucun baptême en 1509. Seule Rochementru était abordable, mais les variations de ses 7 baptêmes annuels sont bien aléatoires…
4. De mon fait, et non de celui du typographe. Toutes les pages indiquées dans cet article sont celles de mon livre. Je profite de l'occasion pour signaler une autre coquille, p. 66, tableau en bas de page : lire Marie 6,3 et non 7,3.
5. Moyenne des baptêmes à Saint-Aignan-de-Grandlieu, 1516-1527 : 29,25 et non 26,7. Je m'étonne par ailleurs, puisqu'il est question de rigueur méthodologique, qu'on puisse, dans le tableau 1 de la page 398 calculer une moyenne « décennale » sur 4 années seulement, dont un chiffre douteux, et ce sans même le signaler (paroisse de Montrelais).
6. Pratiquement toutes sur une ou deux unités.
7. Point sur lequel je reviendrai, comme le fait J. Dupâquier.
8. « Il faut partir d'un état de la population, en l'occurrence les rôles de 1593, qui ne comportent que quelques indications de la profession pour Sainte-Croix, nettement plus heureusement pour Saint-Denis. La recherche d'un complément nous a conduit à noter le nom et la profession de tous les pères, mariés et décédés de ces paroisses dans les cinquante dernières années du siècle. Nous utilisons également les rôles très partiels dressés en 1586 pour les secours aux pauvres, et enfin pour Sainte-Croix la liste des paroissiens dressée entre 1588 et 1593. Il ne reste plus qu'à ranger tous les noms par ordre alphabétique, puis, liste par liste, à collationner toutes les professions… »
De même, j'explique avec précision, p. 211, les raisons de l'exclusion des non-imposés dans le calcul des moyennes : les sources ne permettent pas de faire autrement. Et je conclus : « donc, soulignons-le, il s'agit d'une moyenne de chefs de famille imposés (souligné dans le texte), ce qui tend à réduire les écarts entre les paroisses ». En quoi consiste donc la rigueur historique : à présenter des chiffres « parfaits » obtenus à l'aide de savants et souvent si fragiles taux de correction, ou à dégager les faiblesses des documents et à indiquer dans quelle mesure elles peuvent fausser les résultats ?
9. Après, signalons-le au lecteur qui n'a pu l'apprendre de J. D., un essai avorté : sur plusieurs centaines de familles nantaises bien définies, 4 se révèlent etudiables et une seule complète (pp. 47-49).
10. Croix, A., « La démographie du pays nantais au xvie siècle », Annales de Démographie Historique, 1967, pp. 64–90 Google Scholar.
11. Ces remarques, bien évidemment, ne mettent nullement en cause le travail de J. D. : seul mon livre est ici objet de débat.
12. Quant au reproche de ne pas publier tous mes chiffres, je crains qu'il n'ait fait sourire tous ceux qui ont eu mon livre entre les mains. Aux 216 pages de texte s'ajoutent en effet 88 pages de chiffres, et je pouvais difficilement demander à la VIe Section de l'E.P.H.E., dans les conditions financières qui sont les siennes, de faire un plus gros effort. D'ailleurs, dans cet article de 1967 que J. D. connaît fort bien, j'ajoutais, selon une méthode qui a toujours été la mienne, 8 pages de chiffres (dont ceux des mouvements saisonniers) aux 19 pages de texte. Si reproche il doit y avoir, il me semble qu'en bonne logique il devrait s'adresser aux responsables des crédits de la recherche scientifique.
13. On parle ici des deux creux, de Carême et d'été.
14. Peut-être faut-il préciser qu'on entend ici cycles de 30 ans environ. L'expression, discutable sans doute, est toutefois admise par J. D.
15. Souligné dans le texte.
16. Souligné par moi.
17. Qu'on me pardonne cette longue citation, mais il me paraît grave, surtout quand c'est systématique, de schématiser jusqu'à la déformation une analyse qu'on critique. J'ai donc écrit (p. 175) : « Cette étude exige que l'origine de chaque conjoint soit indiquée… ce qui n'est le cas que pour le registre de Noyal-sur-Brutz. Nous avons cependant considéré comme acceptables les dénombrements effectués dans neuf autres paroisses. Pour trois d'entre elles, Anetz, Campbon et Marsac, toutes les indications d'origine sont celles d'étrangers. Il est donc permis de penser que les autres conjoints sont originaires de la paroisse où se célèbre le mariage. A La Chapelle- Launay, Fégréac et Guenrouet certains actes ne précisent pas l'origine des conjoints, respectivement 15, 6 et 10 %. Nous avons l'intime conviction, fondée sur le fait que ces registres sont très bien tenus et l'origine des étrangers indiquée avec précision, qu'il s'agit là de mariages entre paroissiens indigènes, le curé ayant simplement omis la traditionnelle formule finale : « les deux de la Chapelle » par exemple.
Nous avons la même conviction pour Maumusson et Saint-Mars-du-Désert, mais l'importance numérique des imprécisions, 36 et 30 96, nous oblige en toute honnêteté à considérer leurs résultats avec prudence. Il en sera de même pour Saint-Donatien, où nous n'avons pu nous former une opinion sur les origines non précisées, mais où la proportion d'oublis, 10 % seulement, diminue la portée d'une éventuelle sous-estimation. »
18. Toujours, selon la méthode de J. D., par rapport à la moyenne des dix années antérieures.
19. La chronologie des calamités distingue, précisons-le, documents de première main et ouvrages, et respecte scrupuleusement le vocabulaire de ces diverses sources. Ainsi s'explique la mention tantôt de « mauvaises récoltes » (toutes tirées de la thèse d'H. Lapeyre), tantôt de « famines ».
20. Dernier exemple : J. D. découvre que l'année-récolte est peu utilisable… mais je ne l'utilise à aucun moment de mon livre ! Elle n'apparaît que dans les tableaux annexes, à côté des chiffres par années civiles et ce toujours dans le souci d'éviter tout dogmatisme jusque dans le choix des techniques. Mais plus grave, la lecture de mon introduction méthodologique (p. 73) lui aurait évité toute hésitation : en Pays Nantais, comme d'ailleurs dans toute la Bretagne, l'annéerécolte est particulièrement inadaptée, car aux céréales classiques s'ajoutent le sarrasin et même le mil, inconnus, je le suppose, dans le Vexin Français. Les récoltes sont ainsi beaucoup plus étalées dans l'année.
Relevons également, puisqu'il s'agit toujours de rigueur méthodologique, de singulières techniques dans l'établissement du tableau 2 de la p. 398. Inclure dans la liste des paroisses qui ignorent la crise qu'on leur attribue (Saint-Michel-Chef-Chef), mêler paroisses toutes petites (Nantes St-Laurent : 1, 0 et 11 sépultures !) et très grandes (Nantes St-Nicolas : 116, 150, 202), mêler paroisses à enregistrement médiocre et paroisses où il est très mauvais (Châteaubriant, la Chapelle-sur-Erdre, Saint-Brévin, Saint-Michel-Chef-Chef), et quelle année exacte J. D. a-t-il choisie comme année de crise à Nantes St-Clément où, fait exceptionnel, se succèdent trois années terribles ? Il est dès lors superflu de préciser que, même en acceptant la méthode de J. D., nos chiffres ne correspondent pas avec les siens !
21. « Tout recul des conceptions… lui semble un indice suffisant pour trancher », écrit J. D. Qui partagera cet avis à la lecture de mon chapitre ?
22. Reprenant en cela l'étude magnifique de R. Le Prohon, Démographie du Pays de Léon au XVIIe siècle, Thèse de 3e Cycle, dact., Rennes, 1972.
23. Ceux cités supra notamment.
24. Graph. 58, hors-texte. Je puis aujourd'hui affirmer que ce n'est pas là une exception en Bretagne.