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Structures d'un marché de draperie dans le Languedoc au milieu du XVIe siècle

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Extract

L'intérêt pour la consommation textile urbaine et rurale a été renouvelé par J. Heers. Malgré le Colloque de Prato d'avril 1970 et l'article de P. Deyon invitant à une large enquête sur les manufactures lainières, le marché moderne reste moins bien connu que le marché médiéval. Je voudrais avancer ici quelques explications sur le fonctionnement interne du marché en économie ancienne, conçu non pas comme une entité abstraite, mais comme un ensemble de relations concrètes, sociales autant qu'économiques, doté d'une cohérence propre.

Type
Modèles Économiques
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1975

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References

Notes

1. Heers, J., « La mode et les marchés des draps de laine : Gênes et la montagne à la fin du Moyen Age », dans Annales E.S.C., 1971, pp. 10931117 Google Scholar.

2. Aymard, M., « Production, commerce et consommation des draps de laine du xiie au xviie siècle », dans Revue historique, 1971, pp. 512 Google Scholar.

3. Deyon, P., « La concurrence internationale des manufactures lainières aux xvie et xviie siècles», dans Annales E.S.C., 1972, pp. 2032 Google Scholar.

4. Kula, W., Théorie économique du système féodal…, Paris, 1970, chap. iii (La dynamique du court terme), pp. 1683 CrossRefGoogle Scholar.

5. Ch. Portal, Documents sur le commerce des draps à Lavaur au XVIe siècle, Albi, 1915, 122 p. Édition impeccable des registres du notaire Me François Plausoles, A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort, nos 451 et 452. J'ai élargi cette publication par le dépouillement des A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort, nos 232, 233, 235, 236, 240, 241, 242 (Me François Cornon), et 454, 457 (Me Jehan Régis) ; A.D. Tarn, A. Vidal, La vie administrative, économique et sociale de l'Albigeois du XVe siècle à la Révolution (ex. dactylographié s.l.n.d.). Il s'agit d'une sélection classée d'actes notariés tirés de l'étude Malphettes d'Albi. Nous remercions Monsieur l'Archiviste en chef du département du Tarn pour son aide compétente et souriante ; A.D. Hérault, notaires II E 51 /1 et 2 (Me Guillaume Brifaud). Je remercie E. Le Roy Ladurie sans qui cet article n'aurait pas vu le jour.

6. Nous n'avons pas tenu compte des monographies, malgré l'intérêt de certaines (F. Pech, Labastide-Rouairoux, essai historique, t. II, Montpellier, 1950-1951, 8e et 9e parties : l'industrie du drap, pp. 289-392), mais seulement des travaux qui prouvaient la pénétration, sur le marché, des draperies considérées, à savoir :

Pour le Moyen Age : Wolf, Ph., Commerce et marchands de Toulouse (vers 1350-1450), Paris, 1954, pp. 231270 et carte annexe n” 4Google Scholar ; Gourron, M., « Achats en foire d'un marchand drapier d'Anduze (1408-1418)», dans Congrès de la Fédération historique du Languedoc, Carcassonne, 1953, pp. 5977 Google Scholar; Calderan-Giaccheti, H., «L'exportation de la draperie languedocienne dans les pays méditerranéens (1380-1410)», dans Annales du Midi, 1962, pp. 139176 Google Scholar ; Baratier, E., « Le notaire Jean Barrai, marchand de Riez au début du xve siècle », dans Provence historique, 1957, pp. 254274 Google Scholar ; J. Combes, « Les foires en Languedoc au Moyen Age », dans Annales E.S.C., 1958, pp. 231-259 ; E. Baratier et F. Reynaud, Histoire du Commerce de Marseile (1291-1480), t. II, pp. 273-289 et 622-627.

Pour les Temps modernes : R. Collier et J. Billioud, Histoire du Commerce de Marseille (1480-1599), t. III, pp. 457-465 ; R. Gascon, Grand commerce et vie urbaine au XVIe siècle : Lyon et ses marchands, Paris, 1971, 2 vol., pp. 65-73 et 613-619; M. Baulant, Lettres de négociants marseillais: les frères Hermite (1570-1612), Paris, 1953, 196 p . ; P. Masson, Les compagnies du corail…, Paris, 1908, 254 p. ; R. Doucet, « Les de Laran, marchands drapiers à Toulouse au xvie siècle», dans Annales du Midi, 1942, pp. 42-87; J. Esiebe, «Le marché toulousain des étoffes entre 1519 et 1560 », dans Annales du Midi, 1963, pp. 183-194. Et, dans E. Roschach, Archives communales de Toulouse, t. I, Toulouse, 1891, AA 22 n° 130, p. 340.

Mais certains de ces ouvrages (parfois le t. III de l'Histoire du Commerce de Marseille) ne présentent pas toujours une sûreté absolue. La méconnaissance de la draperie, française plus encore que languedocienne, reste profonde, pour le xvie siècle surtout : on rejettera le drap de « Saint-Prix (Allier) » Ubid., p. 458 et n° 4), dont l'association avec Cabardès fait penser à une mauvaise lecture de Saint-Pons. Comment le spécialiste qu'était J. Billioud a-t-il pu attribuer à Roanne (ibid., p. 460) le plus beau et le plus cher drap noir produit en France, se laissant abuser par la fantaisie des graphies occitanes de Rouen ? Trop de monde persiste à croire que Paris tissait au xvie siècle, etc. Puissent les erreurs des bons savants faire pardonner les bévues de l'auteur (non languedocien) de cet article, sans doute aggravées par l'ignorance de la communication (inédite ?) de Ph. Wolff, au Colloque de Prato (1970), Esquisse d'une histoire de la draperie en Languedoc du XIIe au XVIIe siècle. En règle générale, les identifications proposées par les auteurs cités ont servi à l'établissement de nos cartes. Les archives de Montagnac imposaient un nombre réduit de corrections. Voici qu'on y voit un marchand de « Beaucaire ». Mais, quelques folios plus loin, ressuscite notre marchand : le voilà de « Beaucaire… en Sault ». Il ne s'agit donc pas de la célèbre ville de foire, mais de Belcaire, dans les Pyrénées audoises. Selon la même vocalisation, « Beaumont », qui fournit d'ailleurs du drap à Albi, se trouve « en Rouergue » : c'est Belmontsur-Rance. Dès lors on ne peut suivre M. Gouron dans son identification de Combret. Ce petit centre drapant est le village situé sur la Rance en aval de Belmont. Reste le problème du drap de « Séné » (à Albi), « Sénés (à Marseille) : à Montagnac, il est question de « Cène en Lauragais » (AD. Hérault, not., II 51/2, f° 59, 1569). Contre tout autre identification, on proposera donc Cenne-Monestiès. Dans la région, drap de « Cène » deviendra plus tard un terme générique (F. Jaupart, « L'industrie drapière et le commerce des draps dans le diocèse de Carcassonne au xvmc siècle » dans Bul. Soc. d'ét. se. de l'Aude, 1960, pp. 185-218). Ces identifications impliquent un choix personnel. Contre M. Gouron on a assimilé, pour le xvie siècle au moins, « Saint-Chamans » à Saint-Chinian, placé Saint-Affrique en Rouergue, refusé de voir en « Saint-Paul » Saint-Paul - Cap-de-Joux ou de Fenouillet. Certains centres, on espère que ce sont les plus secondaires, défient toute identification sérieuse (” L'Herm », etc.).

7. Cf. les remarques de J. Règne, Histoire du Vivarais, t. II, 1921, appendice 5 : la tannerie et la draperie en Vivarais aux XIVe et XVe siècles, pp. 457-458, 469, et Endrei, W., « Changements dans la productivité de l'industrie lainière au Moyen Age » dans Annales E.S.C., 1971, pp. 12911299 Google Scholar.

8. Blanc, A., Livre de comptes de Jacme Olivier, marchand narbonnais au XIVe siècle, Paris, 1899, 1231 p.Google Scholar, et C. Port, Essai sur l'histoire du commerce maritime de Narbonne, Paris, 1854, 208 p. ; E. Le Roy Ladurie, Les paysans de Languedoc, Paris, 1966, p. 340 s.

9. J. Artières, « Notice historique sur la draperie de Millau (xive-xviiie siècle) », dans Mém. Soc. L. Se. et Arts de l'Aveyron, t. XV, 1899, pp. 264-315.

10. Ph. Wolff, « Midi aquitain et midi méditerranéen », dans Féd. hist. du Languedoc, Carcassonne, 1952, pp. 79-83.

11. Fr. Michel, Histoire du commerce… à Bordeaux, Bordeaux, 2 vol., 1866 et 1870, 535 et 574 p., qui cite d'intéressants circuits économiques « aberrants » (t. I, p. 292, laine espagnole envoyée de Bordeaux à la foire de Niort pour alimenter la fabrique de Castres en 1549)… A rapprocher, à propos des foires de Lyon, des remarques de R. Gascon, op. cit., p. 55 s. (les marchés textiles), et pp. 128-140 ((l'espace commercial de Lyon: 3: le royaume).

12. Bessery, Th., Matériaux pour l'histoire de Lavaur depuis les Origines jusqu'aux Guerres de religion, Lavaur, 1909, pp. 4551 Google Scholar.

13. Vidal, A., « Inventaire d'un marchand drapier en 1586 (Mathieu Vidal de Lavaur) », dans R.du Tarn, X, 1893, pp. 163164 Google Scholar.

14. D'après Ch. Portal, op. cit., et les registres que nous avons dépouillés et auxquels se référeront aussi les analyses suivantes.

15. Ph. Wolff, Commerce et marchands de Toulouse…,p. 125 s. et G. Caster, Le commerce du pastel et de l'épicerie à Toulouse (1450-1561), Toulouse, 1962, p. 87 s.

16. A. Dartigue-Peyrou, La vicomte de Béarn sous le règne d'Henri d'Albret, 1517-1555, Le Puy, 1934, 640 p.

17. Ch. Estienne, La Guide des chemins de France, Paris, 1552, éd. Bonnerot, 1936, pp. 184-185.

18. A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort, 232, f 126 v° (1556), et A.D. Hérault, notaires, II E 51/1, f° 168 (1559). Ce muletier transportait aussi de l'étain à Montagnac (ibid., P 60).

19. Ch. Portal, op. cit. nos 318 à 696, correspondant à A.D. Tarn, Lafage et Cambefort, 452. L'année 1549 n'est pas, bien sûr, idéale : elle sous-estime la part de Rouen, Sorèze, Villefranche…, surestime Orléans, Bourges, Beauvais, Castres.

20. La canne de Lavaur, divisée en huit ans (empans, palmes), mesure 1 805 m.

Cf. I. Bousquel, Table de conversions des anciennes mesures, Albi, 1833 ; en outre, pour l'équivalent des autres cannes, R. Hyvert, « Les anciennes mesures audoises pour les longueurs… », dans Mém. Soc. des Arts et des Se. de Carcassonne, 3e sér., t VI, an. 1942-1943, pp. 197-204.

21. Une seule vente précise « drap gris de Lavaur » (A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 455, f° 59). Mais les métiers du drap étaient représentés (Cf. Ch. Portal, op. cit., n° 235, etc.). Le travail de la toile revêtait toutefois plus d'importance.

22. On manque d'indication pour la plupart des cordelats. Certains provenaient de Pamiers (L.C. 235, f°34v°) ou de Laroque d'Olmes (L.C. 233, f°21).

23. Comparer E. Le Roy Ladurie, op. cit., pp. 122-126 avec J. Combes, art. cité, et E. Baratier, Histoire du Commerce de Marseille, t. II, p. 287 s.

24. Cf. pour le xive siècle déjà, G. Romestan, « Les marchands de Limoux dans les pays de la couronne d'Aragon… », dans Annales du Midi, 1964, pp. 403-414.

25. R. Gascon, op. cit., p. 69 qui parle « de capture par attraction » des foires.

26. A. Vidal, « Le commerce du pastel albigeois aux xvie et xvne siècles », dans Mélanges… du Cinquantenaire de la fondation de la Soc. des Se, A et B.-L. du Tarn, Albi, 1928 ; G. Caster, op. cit., p. 34 s. ; textes irréfutables dans Ch. Pradel, « Un marchand de Paris au xvie siècle (1564-1588)», dans Mém. Ac. Sc, Ins., B.-L. de Toulouse, 9e série, 1 (1889), pp. 327-351 ; 2 (1890), pp. 390-427.

27. A. Vidal, op. cit., note 5.

28. Cf. les conclusions identiques pour le Moyen Age de Ph. Wolff, op. cit., p. 242.

29. A Revel : « bazene », « bleu », « canellé », « clare », « entredeux », « enrougiat », « enfumé », « gris arène », « gris » tout court, « cordelier », ou « cendré », « perligal », « obscur », « luter », « mescle », « noir », « pers », « tanné », « vicomte », « vioulan ».

A Sorèze : « bazene », « bleu », « burel », « clare », « contraint », « entredeux », « enrougiat », « gris », « gris perligal », « jaune », « luter », « mescle », « pers », « vicomte ». Certains de ces draps sont éphémères (” mescle » de Revel), d'autres font une apparition isolée.

30. Vicomte désignait pour les gens de Lavaur sans doute un type de draperie, mais aussi une couleur (drap « couleur de visconte » de Revel, A.D. du Tarn, Lafage et Cambefort 233, f° 78).

31. M. Gouron, art. cité, p. 65, affirme que l'entredeux est une sorte de burel ; cf. Aussi « l'entredeux de teinte » mentionné par E. Le Roy Ladurie, op. cit., p. 341. On peut souligner que certaines appellations traditionnelles remontaient aux xiiie ou xive siècles (Ch. Port Al, Livre-journal de Jean Saval, marchand drapier de Carcassonne (1340-1341), Paris, 1902, et les articles cités note 5).

32. A. Nahlik, « Les techniques de l'industrie textile en Europe orientale du xe au xve siècle, à travers les vestiges de tissus», dans Annales E.S.C., 1971, pp. 1279-1290; W. Endrei, L'évolution des techniques du filage et du tissage du Moyen Age à la révolution industrielle, Paris, 1968, 178 p.

33. « Noir » et « rouge » dominent partout, sauf à Rouen où l'emporte une gamme de coloris gris et bruns. Pour plus de détails, on peut se rapporter à Ch. Portal, op. cit., p. xvii s.

34. Ph. Wolff, op. cit., p. 241.

35. Outre mes recherches personnelles, les travaux remarquables de R. Gourmelon, L'industrie et le commerce des draps à Paris du XIIIe au XVIe siècle, Positions Th. Ec. Chartes, 1950, pp. 61-63, et «Études sur le rayonnement commercial des marchands drapiers parisiens au xvie siècle», dans But. phil. et hist. (jusqu'en 1610)… (1961), Paris, 1963, pp. 265-275.

36. Il faut au préalable résoudre les difficiles problèmes méthodologiques que pose le calcul du prix des tissus d'après les obligations notariées. Quand une vente ne concerne qu'un seul article, ce calcul se réduit à une division. Malheureusement, ce n'est le cas que pour une vente sur dix, à peine. Dans la grande majorité des actes, la transaction porte sur plusieurs tissus, jusqu'à une dizaine. Comment alors tirer parti de ces renseignements ? R. Doucet jugeait la chose impossible. Et il faut effectivement renoncer à traiter les ventes de plus de quatre articles. Mais les ventes portant sur deux à quatre sortes de drap sont utilisables, moyennant certaines précautions (Ph. Wolff, op. cit., p. 426 s., précieux conseils méthodologiques). Deux méthodes semblent possibles. Soit une vente de deux articles ; la première méthode consiste à rechercher la plus proche des ventes uniques du tissu le plus banal. Sur un jour ou deux, il y a peu de chances que le prix ait changé. On obtiendra ainsi une indication recevable sur le prix du tissu le moins courant. Ce procédé a deux inconvénients : il est inutilisable avec certains draps, dont le prix est trop variable pour servir de référence. Le 14 septembre 1560, les consuls de deux villages voisins achètent au même marchand du «drap noir et rouge du Paris», les uns pour 164 s. 8 d., les autres pour 120 s. la canne (A.D. du Tarn, fds Lafage et Cambefort 240, f° 104). Surtout il ne tient pas compte des conditions concrètes de la vente : marchandage, prix « à la tête du client », etc. Utilisée avec précaution, la méthode rend service. La seconde méthode prend appui sur les quelques séries statistiques acceptables qui permettent de dégager, pour une période donnée, un ou plusieurs prix courants, ce que les statisticiens appellent « mode ». S'il y a plusieurs prix courants (correspondant probablement à deux qualités), on obtiendra une fourchette de prix pour le second tissu. Là encore, l'application réclame de la prudence. Si le prix considéré comme connu (tout aussi bien par le « mode » que par vente voisine) porte sur une petite quantité, alors l'article recherché concourt au plus gros de la dette, la marge d'erreur est faible. En cas contraire, il vaut mieux s'abstenir. Par exemple, on voit dans Ch. Portal, op. cit., n° 574 (2 novembre 1549) : 131.5 s. = 4 cannes drap vicomte de Sorèze + 12 pans cordelat blanc. Or le même jour le même marchand vend du cordelat à 32 s. la canne. Le prix du vicomte sera alors de 54 s. 3 d. la canne. Mais, sur l'année 1549, le prix modal du cordelat blanc est de 30 s. Si on l'adopte, le vicomte Sorèze vaudra 55 s. la canne. On remarque que la part du cordelat (48 ou 45 s.) dans la dette (13 1. 5 s.) est faible. L'approximation est sûre. Procédés imparfaits, mais qui valent mieux que des « moyennes » douteuses… ou l'abandon de la recherche.

37. A.N., Minutier central, XX, 71 (inventaire après décès (1543) de Jean Bérault, drapier parisien) : la teinture en noir revenait à 9 s. l'aune (soit presque 1/4 du prix du drap), celle en rouge à 4 s. l'aune (1/8e), celle des frises «de toutes coulleurs » revenait à 15 d. l'aune (prix moyens inconnus). Les cordelats se rapprochent donc des frises (doublures ?) : la couleur est indifférente.

38. Irréfutable démonstration par R. Doucet, art. cité, p. 76. Mise au point décisive dans R. Gascon, op. cit., p. 185 : pour les produits de valeur sous de faibles poids et volume, le pourcentage en valeur par rapport au prix d'achat dépasse rarement 10 %, il est fréquemment audessous de 5 96. Notons que P. Raveau, Essai sur la situation économique et l'état social en Poitou au XVIe siècle, Paris, 1931, qui concluait à l'« énormité » des frais de transport, ne donne qu'un exemple : pour une charge de draps de 146,7 kg valant 300 1., le transport à Lyon en 1570 coûte 20 1. et dure 15 jours. Cela ne fait que 6 2/3 % ad valorem. Autre exemple tiré des archives parisiennes (A.N..M.C. VIII, 138, le 13 octobre 1540) : de Paris à Guingamp, sous 15 jours, pour six ballots de drap (3 charges de cheval) le prix du transport (moins « l'acquit de Paris » ) représente 21 1. pour une valeur de 865 1., soit 21/2 %.

39. R. Doucet, art. cité, pp. 72-74. Pour les pastelliers ; G. Caster, « Les problèmes financiers des exportateurs de pastel toulousain au xvie siècle », Annales du Midi, 1956, pp. 303-315.

40. G. et G. Frêche, Les prix des grains… à Toulouse (1486-1868), Paris, 1967, p. 85 s. et graphique pp. 92-93. G. Frêche a montré l'homogénéité de la conjoncture des prix entre Toulouse et Lavaur, dans « La Conjoncture des prix céréaliers dans le Midi de la France du xvie au xviiie siècle » dans R. Hist. Droit, 1971, p. 249.

41. P. Deyon, «Variations de la production textile aux xvi” et xviie siècles », dans Annales E.S.C., 1963, pp. 939-955.

42. Calculs respectivement pour Meaux et Rouen, d'après R. Doucet, art. cité, tableaux p. 73, pour Paris, J. Estèbe, art. cité, pp. 188 et 193 n° 61.

43. Ch. Portal, op. cit., n° 42 (9 octobre 1547).

44. A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 232, f° 198 (à 6 1. le quintal de laine), f° 284 v° (7 1.

10 . le quintal). Un « drapier » de Lavaur (c'est-à-dire un tisserand) est témoin d'une des transactions. Pour les ventes de laine, ibid., f° 131 (Sorèze), f 155 v° (Puylaurens). On notera la faiblesse des quantités (année 1556).

45. E. Le Roy Ladurie, dans Histoire de Languedoc, sous la direction de Ph. Wolff, Toulouse, Privât 1967, chap. vin, pp. 285-286. Pour une étude plus technique sur les conditions de l'élevage dans les Corbières, P. Cayla, « La draperie dans l'Aude un siècle avant Colbert » dans Mém. Soc. Arts et Se. de Carcassonne, t. VIII, 3e série, 1947-1948, pp. 170-186 (lre et seule partie publiée).

46. M. Aymard, art. cité, R.H., 1971, p. 11.

47. Th. Bessery, Matériaux… (op. cit.), pp. 45-51.

48. G. Caster, op. cit., par exemple Simon Lancefoc p. 157 s. qui prêtait aux cultivateurs de pastel. Cependant il est question en 1550 (A.D. Tarn, fds. Lafage et Cambefort, 454 P 89 v°) d'un procès entre Simon Lancefoc et Pierre Guyot justement. Pourquoi donc, sinon pour pastel ? La thèse de G. Caster serait à préciser sur ce point.

49. Cf. les extraits de correspondances commerciales tirées des « papiers Simon Lecomte », dans Ch. Pradel, art. cité, à notre note 26 et G. Fagniez, L'économie sociale de la France sous Henri IV, Paris, 1897, 428 p., pièces justificatives, pp. 374-389.

50. J. Craeybeckx, Un grand commerce d'importation .- les vins de France aux anciens Pays- Bas (XIIIe-XVIe siècle), Paris, 1958, p. 145.

51. Le drapier parisien J. Rouillé écrivait (17 juillet 1585) à son facteur pastellier à Toulouse (Fagniez, op. cit., pp. 229-230 n.l) : « Je le sais… combien me coûte l'achat des pastels que avez achetés en plus grand nombre que vous ne deviez sans mon mandement ni aveu… Je n'ai jamais gagné 31. t. par balle sur aucuns de vos achats ». Rouillé prétend avoir perdu 10 000 écus soleil depuis 1572 (” en y comprenant les interetz de mon argent couché en pastel qui a demouré plus de six ans sans aucuns prouffietz »). Il eût mieux fait de se cantonner à la draperie, « son estât naturel » !

52. La marchandise de Mathieu Vidal en 1586 est exclusivement languedocienne sans aucune étoffe foraine (A. Vidal, art. cité).

53. R. Doucet, art. cité, p. 67, donne l'exemple d'une vente par de Laran à l'évêque de Lavaur. J. Estèbe, art. cité, pp. 189-191, note : la clientèle des drapiers toulousains est composée « des classes aisées de la société ». Ces drapiers toulousains ne paraissent jamais jouer le rôle d'intermédiaires grossistes entre les parisiens et les marchands de Lavaur qui devaient, comme les de Laran, s'approvisionner aux sources parisiennes. Pourtant il y avait des rapports (des procès !) entre toulousains et vauréens : Sire Guichard Delpech, donné par J. Estèbe pour un grand drapier de luxe, est vers 1556 en procédure contre des merciers de Lavaur (A.D. Tarn L.C. 232, f° 109 v°) : est-ce drap, pastel, effet de commerce, ou autre chose encore ?

54. Fr. Mauro, Le XVIe siècle européen. Aspects économiques. Paris, 1966, p. 173 s.

55. Ch. Portal, op. cit., Introduction pp. III-IX.

56. Outre les études citées à la note 6, en particulier celle d'E. Baratier sur Riez et celle de M. Gouron sur Anduze, pays assez déshérités, on se référera aux travaux de R. Aubenas, « Commerce des draps et vie économique à Grasse en 1308-1309, dans Pr. Hisl., 1959, pp. 201-212, et P. Malausséna, La vie en Provence orientale aux XIVe et XVe siècles…, Paris, 1969, pp. 165-172.

57. A.D. Tarn, fonds Lafage et Cambefort 240.

58. Cf. Le Journal de Masenx, édité par L. De Santi et Aug. Vidal, Deux livres de raison (1517-1560)… Paris-Toulouse 1896, et le commentaire qu'en a donné Le Roy Ladurie, Les paysans… pp. 303-308.

59. P. Raveau, L'Agriculture et les classes paysannes… dans le Haut-Poitou au XVIe siècle, Paris, 1926, 302 p., l'auteur parle de «plaie sociale».

60. G. Zeller, Les Institutions de la France au XVIe siècle, Paris, 1948, p. 236., qui ramène tout à la distinction entre marchés (seigneuriaux) et foires (royales).

61. A.D. Tarn, Lafage et Cambefort 232, f° 47 v°.

62. Ibid., f° 164. Ch. Portal, op. cit., n°3l7. Rien dans Th. Bessery, Matériaux pour l'histoire de Lavaur, Lavaur, 1909 ; Ch. Colin, Histoire de Lavaur jusqu'à la Révolution, Albi, 2e éd. 1944, les ouvrages de Ch. Portal et d'Aug. Vidal, pourtant si au fait du passé de leur pays.

63. Cf. R. Doucet, art. cité, et surtout J. Estèbe, art. cité.

64. La carte est construite d'après la totalité des actes dépouillés. Mais nous avouons n'avoir pu identifier une dizaine de localités.

65. Th. Bessery, « État des effets mobiliers et des archives de Lavaur en 1617 », R. du Tarn, t. XIII, 1896, pp. 240-255, notices sur diverses familles, dont les Audegau et les Duconseil.

66. Il faut noter que jamais le terme « marchand drapier » n'apparaît. Tous sont indifféremment « marchands de Lavaur ». Mais le vocabulaire n'exprime que des différenciations corporatives particulières à chaque ville. Il est donc fluctuant selon l'organisation urbaine résultant des rapports de force (et de leur histoire) à l'intérieur de la bourgeoisie marchande. La simple qualification «marchand de… » traduit le plus souvent, mais pas toujours, un niveau supérieur. La précision « drapier » désigna une spécialisation relative, qui, au xvie siècle, n'indique nullement une moindre envergure économique ou sociale. A Lavaur, si la spécialisation ne reçoit pas de consécration nominale, elle n'en est pas moins souplement inscrite dans la réalité.

67. A. D. Tarn, fds. Lafage, et Cambefort, 235, f 3 v° (1550). On la voit prêter la somme de 100 1.1. à un boucher de Lavaur «pour icelle employer et convertir en profflct au faict de boucherie » ; ibid., t° 15, elle prête encore l.t. à deux marchands ruraux « pour le employer en trafficque de marchandises tant de pastel, bestailh que autres ». Le procureur du Roi en la Jugerie de Villelongue vendait lui-même, en 1550, huit milliers et demi de « coquernes » de pastel moyennant 1550 1. 16 s. 8 d. t. (Ibid., 454, f° 291). La spéculation les connaissait! 68. Comptage sur Ch. Portal, op. cit., indice 1, p. 111, et toutes les archives vauréennes dépouillées.

69. P. Caplavat a un « livre bazane grand » et un « livre long pers » (A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 241, f 15 en 1560), en 1556 il avait un «livre noir neuf» (ibid., 232, f° 45), un « livre de pastel » (ibid., f° 60), etc. Nicolas Cazes avait un « livre bazane petit » et un « livre bazane grand » (ibid., f” 12), Bernard Ulhet un « livre de restes » (ibid., f° 57). Voir aussi pour P. Guyot, Ch. Portal, op. cit., p. XI, n. 8. Ces exemples entre autres, sans qu'on puisse systématiser.

70. A.D. Tarn, fds. Lafage et Cambefort 232, f°215v° (1556). Ce marchand appartient d'ailleurs à la famille vauréenne des Cornon. Les marchands de Lavaur (les merciers) ne vendent que six fois des soieries sur la période.

71. R. Doucet, art. cité, p. 75.

72. P. Jeannin, Les marchands au XVIe siècle, 1957, p. 54.

73. Th. Bessery, op. cit., pp. 45-51.

74. A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 234 et 238 pour les familles Plausoles, Audegau, Maurel…

75. Th. Bessery, op. cit. ; pour une branche des Ulhet (Raymond), A.D. Tarn, fds. Lafage et Cambefort 241, f° 196, pour les Gibbert (Juge de Villelongue, mais d'autres sont marchands), ibid., f° 109, ou 235, f” 3 v°, etc.

76. Ch. Portal, op. cit., p. XIV.

77. G. Caster, op. cit., p. 55 s. Citation, p. 78, du pastellier J. Ferrières « en l'achat des cocquoignes l'on ne peult fere grand chose sans avoir l'argent comptant… le paysent est riche de sorte que ne veullent prendre que testuns neufz, soulz grans, pistolletz ou escutz sol » Plaintes d'acheteur, mais qui ont sans doute une part de vérité.

78. Ch. Portal, Le livre-journal…, Paris, 1902, Pour une parfaite position du problème, E. Baratier, Le notaire Jean Barrai… (art. cité) pp. 258-259.

79. Voir l'étude des termes de paiement faite par Ch. Portal, Le commerce des draps…, pp. IX et 115. Le crédit peut être plus long (A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort, 233, P 31): pour une dette de 25 1. 1 s. 3 d.t., le premier versement de 10 1. t. est à la Madeleine prochaine, soit six mois, le second de 5 l.t. à la Madelaine suivante (dix-huit-mois), et ainsi de suite jusqu'à extinction. La libération dure trois ans et demi.

80. Ibid., 240, f° 152 : une dette de 91.18 s., contractée le 29 octobre 1558 n'est apurée que le 15 février 1567 (exemple entre cent).

81. J. Meuvret, «Circulation monétaire et utilisation économique de la monnaie dans la France du xvie et du xviie siècle », dans Et. d'hist. mod. et cont., t. I, 1947, pp. 15-28 ; et « Circuits d'échange et travail rural dans la France du xvnc siècle », dans Mél. Sapori, t. II, pp. 1127-1142, Milan, 1957.

82. Ch. Portal, op. cit., n° 187 commenté par l'auteur p. V.

83. A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 240, F 119 (1558).

84. Ibid., 232, f° 136 : les deux actes chez le même notaire, sur la même page !

85. A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 454, F 61 v°, nombreux cas. Le marchand ne soumettait pas le seul paysan à cette exigence. Une « demoiselle », veuve d'un ecuyer, devait également s'acquitter en pastel (ibid., 455, F 37 v°).

86. Ch. Portal, op. cit., n° 592 et A.D. Tarn, fds Lafage et Cambefort 232, f° 217 v° (1556).

87. A.N., Minutier Central, VII, 81.

88. J. Heers, La mode…, art. cité, a pourtant apporté une argumentation brillante en faveur de cette thèse psychologique.

89. Il est vrai que pour les années 1432-1441, Ph. Wolff, op. cit., p. 433 concluait d'une comparaison serrée entre prix d'achat et prix de vente des draps : « il apparaît que le marchand ne peut imposer ses prix à sa clientèle ». Différence fondamentale entre la fin du Moyen Age, où le travailleur et consommateur était en position de force, et les Temps Modernes où s'approfondirent les anciennes contradictions moyenâgeuses dans le sens indiqué par notre conclusion.

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92. M. Malowist, « Les changements dans la structure de la production et du commerce du drap au cours du xive et du xve siècle », dans Croissance et Régression en Europe, XIVe-XVIIe siècles, Paris, 1972, pp. 53-62.

93. E. Le Roy Ladurie, op. cit., 2e partie, pp. 135-328.

94. W. Kula, Théorie économique… (op. cit.), p. 49 s.

95. Cf. les conclusions suggestives de J. Estèbe, art. cité, p. 192, sur la «disparition progressive (dans la clientèle) d'une foule de laboureurs, artisans, hôteliers, travailleurs manuels ».