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Expulsions collectives: définition et portée de leur interdiction dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme

Published online by Cambridge University Press:  27 March 2019

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Résumé

L’article considère l’interdiction des expulsions collectives dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. La Cour adopte un point de vue réaliste qui permet d’inclure dans cette interdiction les expulsions au sens strict et les actes de non-admission, exigeant aux États d’agir toujours de bonne foi. Or, elle n’y inclut pas les expulsions implicites, et rabaisse significativement la protection conventionnelle par l’exclusion de l’exigence d’un entretien individuel. La possibilité de son application extraterritoriale et l’impossibilité d’écarter la responsabilité étatique sur la base d’accords avec des États tiers montrent cependant la portée large accordée à l’interdiction.

Abstract

This article considers the prohibition of collective expulsion in the case law of the European Court of Human Rights. The court takes a realistic point of view that includes in the prohibition both collective expulsion in the narrow sense and acts of collective non-admission. It also requires states to act always in good faith. However, European case law does not prohibit implicit expulsion and significantly reduces treaty protection by excluding the requirement of an individual interview. The possibility of its extraterritorial application and the impossibility of excluding state responsibility on the basis of agreements with third states show, however, the broad scope given to the prohibition.

Type
Articles
Copyright
Copyright © The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 2019 

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References

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2 Règles internationales sur l’admission et l’expulsion des étrangers, rapporteurs Louis J-D Féraud-Giraud et Ludwig von Bar, Institut de Droit International, 9 septembre 1892 [Règles internationales sur l’admission].

3 Parmi beaucoup d’autres: Maal, [1903] 10 Recueil des sentences arbitrales 731 (Commission mixte des réclamations Pays-Bas-Venezuela); Boffolo, [1903] 10 Recueil des sentences arbitrales 529 (Commission mixte des réclamations Italie-Venezuela); Oliva, [1903] 10 Recueil des sentences arbitrales 608 (Commission mixte des réclamations Italie-Venezuela); Nottebohm (Liechtenstein c Guatemala), [1955] Cour internationale de Justice [arrêt]; Yeager v Islamic Republic of Iran, [1987] 17 Iran-United States Claims Tribunal Reports 92 (Tribunal des réclamations Iran-États-Unis).

4 Pour ne citer que quelques arrêts classiques: Fong Yue Ting v United States, [1893] 149 US 698 (United States Supreme Court); Nishimura Ekiu v United States, [1892] 142 US 651 (United States Supreme Court); Harisiades v Shaughnessy, [1952] 342 US 580 (United States Supreme Court); Musgrove v Chun Teeong Toy, [1981] AC 272 (Privy Council); Attorney-General for Canada v Cain, [1906] AC 542 (Privy Council); Johnstone v Pedlar, [1921] 2 AC 262 (Privy Council).

5 Condición jurídica y derechos de los migrantes indocumentados, [2003] Cour IDH (série A, n° 18) au para 168 (avis consultatif); Vélez Loor c Panamá, [2010], Cour IDH (série C, n° 218) au para 97; Nadege Dorzema y otros c República Dominicana, [2012], Cour IDH (série C, n° 251) au para 155; Familia Pacheco Tineo, [2013], Cour IDH (série C, n° 272) au para 129; Derechos y garantías de niñas y niños en el contexto de la migración y/o en necesidad de protección internacional, [2014], Cour IDH (série A, n° 21), avis consultatif au para 39. Sur l’expulsion des étrangers à la lumière du système interaméricain des droits de l’homme, voir Fernando Arlettaz, Expulsión de extranjeros y derecho de asilo en el Sistema Interamericano, Mexico, Centro Nacional de los Derechos Humanos, 2015; Fernando Arlettaz, “Perspectiva interamericana sobre la afectación de la libertad de menores en el contexto de procesos migratorios” (2016) 9 Anuario Colombiano de Derecho Internacional 197.

6 Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, Union interafricaine des droits de l’homme, Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, Rencontre africaine des droits de l’homme, Organisation nationale des droits de l’homme au Sénégal et Association malienne des droits de l’homme c. Angola, Communication 159/96, onzième rapport annuel d’activité (1997–98) au para 20.

7 Parmi beaucoup d’autres, Abdulaziz, Cabales et Balkandali c Royaume-Uni, no 9214/80, 9473/81 et 9474/81, [1985], CEDH au para 67; Moustaquim c Belgique, no 12313/86, [1991], CEDH au para 43; Vilvarajah et autres c Royaume Uni, no 13163/87, 13164/87, 13165/87, 13447/87 et 13448/87, [1991], CEDH, au para 102; Chahal c Royaume Uni, no 22414/93, [1996], CEDH au para 73; Ahmed c Autriche, no 25964/94, [1996], CEDH au para 38; Bouchelkia c France, no 23078/93, [1997], CEDH au para 48; Boujlifa c France, no 25404/94, [1997], CEDH au para 42. Voir également la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme citée tout au long de cet article.

8 Ce point est clairement expliqué dans Daniel Kanstroom, “Deportation as a Global Phenomenon: Reflections on the Draft Articles on the Expulsion of Aliens” (2016) Harvard Human Rights Law Journal ILC Forum Essays 1. Il est également développé dans Bas Schotel, On the Right of Exclusion: Law, Ethics and Immigration Policy, Oxford, Routledge, 2012; voir aussi Ayelet Shachar, The Birthright Lottery: Citizenship and Global Inequality, Massachusetts, Harvard University Press, 2009. Marie-Bénédicte Dembour présente cette même idée sous une autre forme quand elle compare l’approche de la Cour européenne des droits de l’homme (qui traiterait les migrants tout d’abord comme des étrangers et secondairement comme des êtres humains) et l’approche de la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme (qui les traiterait tout d’abord comme des êtres humains et secondairement comme des étrangers). Marie-Bénédicte Dembour, When Humans Become Migrants: Study of the European Court of Human Rights with an Inter-American Counterpoint, Oxford, Oxford University Press, 2015.

9 Règles internationales sur l’admission, supra note 2, arts 14 et 17.

10 Ibid, voir en particulier les arts 21, 28, 30–41.

11 Ibid, arts 23–24.

12 Ibid, arts 26, 27.

13 Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 4 novembre 1950, 213 RTNU 221 (entrée en vigueur le 3 septembre 1953) [Convention européenne].

14 Art 4 du projet: “1. Tout étranger résidant régulièrement sur le territoire d’une Haute Partie Contractante ne peut être expulsé que s’il menace la sécurité de l’État ou a contrevenu à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. 2. Tout étranger résidant régulièrement depuis plus de deux ans sur le territoire de l’une des Parties Contractantes ne peut faire l’objet d’une mesure d’expulsion qu’après avoir été admis, à moins de motifs impérieux touchant à la sécurité de l’État, à faire valoir les raisons qu’il peut invoquer contre son expulsion et à présenter un recours effectif à cet effet devant une instance nationale au sens de l’article 3 de la Convention. 3. Tout étranger résidant régulièrement depuis plus de dix ans sur le territoire de l’une des Parties Contractantes ne peut être expulsé que pour des raisons touchant à la sécurité de l’État ou si les autres raisons mentionnées au paragraphe 1 du présent article revêtent un caractère particulier de gravité.”

15 Rapport explicatif du Protocole n° 4 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention (16 septembre 1963) au para 34 [Rapport explicatif du Protocole n° 4].

16 Art 3: “1. Les ressortissants des Parties contractantes résidant régulièrement sur le territoire des autres Parties ne peuvent être expulsés que s’ils menacent la sécurité de l’État ou ont contrevenu à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. 2. Ceux d’entre eux qui résident régulièrement depuis plus de deux ans sur le territoire de l’une des Parties contractantes ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’expulsion qu’après avoir été admis, à moins de motifs impérieux touchant à la sécurité de l’État, à faire valoir les raisons qu’ils peuvent invoquer contre leur expulsion, à présenter un recours à cet effet et à se faire représenter devant une autorité compétente ou devant une ou plusieurs personnes spécialement désignées par l’autorité compétente. 3. Les ressortissants des Parties contractantes, résidant régulièrement depuis plus de dix ans sur le territoire de l’une d’elles, ne peuvent être expulsés que pour des raisons touchant à la sécurité de l’État ou si les autres raisons mentionnées au paragraphe 1 du présent article revêtent un caractère particulier de gravité.”

17 Bernardette Roiney, Elizabeth Wicks et Clare Ovey, The European Convention on Human Rights, Oxford, Oxford University Press, 2014 à la p 563.

18 Rapport explicatif du Protocole n° 4, supra note 15 au para 35.

19 Art 1 du Protocole n° 7: “1. Un étranger résidant régulièrement sur le territoire d’un État ne peut en être expulsé qu’en exécution d’une décision prise conformément à la loi et doit pouvoir: a) faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion, b) faire examiner son cas, et c) se faire représenter à ces fins devant l’autorité compétente ou une ou plusieurs personnes désignées par cette autorité. 2. Un étranger peut être expulsé avant l’exercice des droits énumérés au paragraphe 1. a), b) et c) de cet article lorsque cette expulsion est nécessaire dans l’intérêt de l’ordre public ou est basée sur des motifs de sécurité nationale.”

20 Convention américaine relative aux Droits de l’Homme, 22 novembre 1969, 1144 RTNU 183 (entrée en vigueur le 18 juillet 1978). Art 9.2, selon l’original espagnol: “Es prohibida la expulsión colectiva de extranjeros.”

21 Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, 27 juin 1981, 1520 RTNU 217 (entrée en vigueur 21 octobre 1986). Art 12.5: “L’expulsion collective d’étrangers est interdite. L’expulsion collective est celle qui vise globalement des groupes nationaux, raciaux, ethniques ou religieux.” Comme on aura l’occasion de le voir, la définition d’expulsion collective de la Charte n’est pas identique à celle développée par la Cour européenne.

22 Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 12 décembre 2007, 326-C JO 391 (entrée en vigueur dans sa version actuelle le 1 décembre 2009). Art 19.1: “Les expulsions collectives sont interdites.”

23 Projet d’articles sur l’expulsion des étrangers et commentaires y relatifs, Doc A/69/10 (2014) para 44, texte adopté par la Commission du droit international à sa soixante-sixième session, en 2014, et soumis à l’Assemblée Générale dans le cadre de son rapport sur les travaux de ladite session [Projet d’articles sur l’expulsion des étrangers]. Le rapport sera reproduit dans l’Annuaire de la Commission du droit international, vol I(2) (2014). L’Assemblée Générale des Nations Unies a pris note de ce projet (résolution A/RES/69/119 du 10 décembre 2014). L’art 9 est ainsi libellé: “Interdiction de l’expulsion collective. 1. Aux fins du présent projet d’articles, l’expulsion collective s’entend de l’expulsion d’étrangers en tant que groupe. 2. L’expulsion collective des étrangers est interdite. 3. Un État peut expulser concomitamment les membres d’un groupe d’étrangers, à condition que la mesure d’expulsion soit prise à l’issue et sur la base d’une appréciation de la situation particulière de chacun des membres qui forment le groupe conformément au présent projet d’articles. 4. Le présent projet d’articles est sans préjudice des règles de droit international applicables à l’expulsion des étrangers en cas de conflit armé impliquant l’État expulsant.”

24 Soit parce qu’il possède la nationalité d’un autre État, soit parce qu’il ne possède aucune nationalité. Voir Déclaration sur les droits de l’homme des personnes qui ne possèdent pas la nationalité du pays dans lequel elles vivent, Résolution 40/144 de l’Assemblée Générale des Nations Unies (13 décembre 1985), art 1.

25 Maurice Kamto, Expulsion des étrangers: Rapport préliminaire sur l’expulsion des étrangers, Doc NU A/CN.4/554 (4 avril 2005) au para 8 [Kamto, Rapport préliminaire].

26 Ibid.

27 Ibid au para 13.

28 Commission du droit international, Expulsion des étrangers: Étude du Secrétariat, Genève, 2006 au para 67.

29 Ibid aux paras 83–84; Maurice Kamto, Expulsion des étrangers: Deuxième rapport sur l’expulsion des étrangers, Doc NU A/CN.4/573 (2006) aux paras 159–61 [Kamto, Deuxième rapport].

30 Commission du droit international, supra note 28, aux paras 85–87; Kamto, Deuxième rapport, supra note 29 aux paras 176–77.

31 Voir en ce sens Commission du droit international, supra note 28 au para 75; Giorgio Gaja, “Expulsion of Aliens: Some Old and New Issues in International Law” dans Cursos Euromediterráneos Bancaja de Derecho Internacional, vol. 3, 1999, aux pp 290–91; Kamto, Deuxième rapport, supra note 29 aux paras 171–73.

32 Kamto, Deuxième rapport, supra note 29 au para 172.

33 Ibid aux paras 166, 170.

34 Commission du droit international, supra note 28 au para 68.

35 Le Tribunal d’indemnisation Iran-États-Unis a connu de plusieurs demandes qui se rapportaient à des cas d’expulsion implicite. Short v Iran, [1987] 76 Iran-United States Tribunal Reports 85 (Tribunal des réclamations Iran-États-Unis); International Technical Products Corporation and ITP Export Corporation v Iran, [1985] 9 Iran-United States Claims Tribunal Claims Reports 18 (Tribunal des réclamations Iran-États-Unis); Rankin v Iran, [1987] 17 Iran-United States Claims Tribunal Reports 147 (Tribunal des réclamations Iran-États-Unis). La Commission d’indemnisation Érythrée-Éthiopie a examiné la demande de l’Éthiopie, qui soutenait que l’Érythrée était responsable de l’expulsion implicite d’Éthiopiens contraire au droit international. Réclamation de l’Éthiopie n° 5: Mauvais traitement des populations civiles, [2004] Commission d’indemnisation Érythrée-Éthiopie [arrêt partiel].

36 Commission du droit international, supra note 28 au para 184.

37 Kamto, Deuxième rapport, supra note 29 aux paras 155–58.

38 Roiney, Wicks et Ovey, supra note 17 à la p 562.

39 Andric c Sweden, no 45917/99, [1999], CEDH [Andric]. Les précédents des organes européens sont cités en version française, sauf quand il n’y a que la version anglaise disponible (comme c’est le cas pour l’affaire Andric).

40 Andric, au para 1 de la section du droit applicable. La traduction de l’original anglais a été prise de la reproduction de cette définition dans des arrêts postérieurs de la Cour.

41 Becker c Danemark, no 7011/75, [1975], ComEDH. L’affaire concernait le rapatriement d’un groupe d’environ deux cents enfants vietnamiens par les autorités danoises. La Commission a déclaré le grief présenté sous l’art 3 de la Convention européenne manifestement mal fondé et celui présenté sous l’art 4 du Protocole n° 4 incompatible ratione materiae avec la Convention.

42 KG c Federal Republic of Germany, no 7704/76, [1977], ComEDH. L’affaire concernait l’expulsion d’environ 120 apatrides tsiganes. La Commission a déclaré irrecevables les griefs fondés sur les arts 3 et 14 de la Convention européenne et 4 du Protocole n° 4.

43 O. et autres c Luxembourg, no 7757/77, [1978], ComEDH [O. et autres]. L’affaire concernait l’expulsion de trois nationaux néerlandais du Luxembourg. La Commission a déclaré manifestement mal fondés les griefs présentés sous les arts 8, 10 et 11 de la Convention européenne et 4 du Protocole n° 4. Elle a aussi déclaré irrecevable pour non-épuisement des recours internes le grief présenté sous l’art 8 au nom des sociétés commerciales appartenant aux personnes expulsées.

44 Albaks et autres c Pays-Bas, no 4209/88, [1977], ComEDH. L’affaire concernait 23 requérants de nationalité surinamaise qui alléguaient avoir été l’objet d’une expulsion collective. La Commission a déclaré le grief présenté sous l’art 4 du Protocole n° 4 manifestement mal fondé.

45 O et autres, au para 1.4 de la section du droit applicable.

46 Andric, au para 1 de la section du droit applicable.

47 La Cour a par conséquent déclaré manifestement mal fondé le grief présenté sous l’art 4 du Protocole n° 4. Elle a aussi déclaré manifestement mal fondé le grief présenté sous l’art 3 de la Convention européenne. La Cour a atteint des conclusions semblables relativement à l’art 4 du Protocole n° 4 dans d’autres affaires concernant des croato-bosniens expulsés par la Suède: Maric v Sweden, no 45922/99, [1999], CEDH (défaut manifeste de fondement); Juric v Sweden, no 45924/99, [1999], CEDH (défaut manifeste de fondement); Pranjko v Sweden, no 45925/99, [1999], CEDH (non-violation); Majic v Sweden, no 45918/99, [1999], CEDH (non-violation).

48 Berisha et Haljiti c ex-République Yougoslave de Macédoine, no 18670/03 [2005], 2005-VIII CEDH 407 au para 2 [Berisha et Haljiti] de la section du droit applicable. La Cour a déclaré irrecevable pour défaut manifeste de fondement les griefs énoncés sous les arts 3 et 13 de la Convention européenne et 4 du Protocole n° 4. Dans une décision postérieure sur la même affaire, elle a déclaré irrecevable pour non-épuisement des recours internes les griefs énoncés sous les arts 6.1 et 6.3 de la Convention européenne. Berisha and Haljiti v Former Yugoslav Republic of Macedonia, no 18670/03, [2007], CEDH.

49 Voir la même définition d’expulsion collective utilisée dans l’affaire Andric répétée dans des arrêts et décisions postérieurs (la plupart analysés en détail tout au long de cet article). Čonka c Belgique, no 51564/99, [2002], 2002-I CEDH 47 au para 59 [Čonka]; Fedorova et autres c Lettonie, no 69405/01, [2003], CEDH au para C de la section du droit applicable; Berisha et Haljiti, supra note 48 au para 2 de la section du droit applicable; Sultani c France, no 45223/05, [2007], 2007-IV CEDH 55 aux paras 81–84 [Sultani]; Ghulami c France, no 45302/05, [2009], CEDH au para 2.c de la section du droit applicable [Ghulami]; Dritsas et autres c Italie, no 2344/02, [2011], CEDH au para 7 [Dritsas]; Kostadinovic c Bulgarie, no 4512/02, [2012], CEDH au para 46; Hirsi Jamaa et autres c Italie [GC], no 27765/09, [2012], 2012-VII CEDH 1 aux paras 166–67 [Hirsi Jamaa]; MA c Chypre, no 41872/10, [2013], 2013-IV CEDH 215 au para 245 [MA]; Géorgie c Russie (I) [GC], no 13255/07, [2014], 2014-IV CEDH 1 au para 167 [Géorgie c Russie (I)]; Khlaifia et autres c Italie, no 16483/12, [2015], CEDH au para 154 [Khlaifia]; Khlaifia et autres c Italie [GC], no 16483/12, [2016], CEDH au para 237 [Khlaifia, GC]; Shioshvili and other v Russia, no 19356/07, [2016], CEDH au para 68 [Shioshvili]; Berdzenishvili and other v Russia, no 14594/07, 14597/07, 14976/07, 14978/07, 15221/07, 16369/07 et 16706/07, [2016], CEDH au para 79 [Berdzenishvili]; ND et NT c Espagne, no 8675/15 et 8697/15, [2017], CEDH au para 98 [ND et NT]. Dans d’autres affaires la Cour ne reproduit pas littéralement la définition, mais elle s’en sert de manière implicite. Dorochenko v Estonia, no 10507/03, [2006], CEDH au para 7 de la section du droit applicable; Mikolenko v Estonia, no 10664/05, [2008], CEDH au para 4 de la section du droit applicable; Abdi Ahmed and others v Malta, no 43985/13, [2014], CEDH au para 86; Sharifi et autres c Italie et Grèce, no 16643/09, [2014], CEDH au para 214 [Sharifi].

50 Projet d’articles sur l’expulsion des étrangers, supra note 23, art 9. Le commentaire du projet reconnaît expressément que la définition d’expulsion collective est inspirée de la jurisprudence de la Cour européenne.

51 Čonka, supra note 49 au para 59. Sur l’affaire Čonka voir Jean-Yves Carlier, “La détention et l’expulsion collective des étrangers” (2003) 58 Revue Trimestrielle des Droits de l’Homme 198; Ángel G Chueca Sancho, “El derecho internacional prohíbe las expulsiones colectivas de extranjeros” (2002) 1 Revista de Derecho Migratorio y Extranjería 9.

52 Čonka, supra note 49 au para 59.

53 Ibid au para 7, opinion partiellement concordante et partiellement dissidente du juge Velaers.

54 Ibid, opinion partiellement concordante et partiellement dissidente du juge Jungwiert à laquelle se rallie le juge Küris.

55 Ibid au para 41. En plus de la violation de l’art 4 du Protocole n° 4 la Cour a trouvé une violation des arts 5.1, 5.4 et 13 de la Convention européenne (ce dernier combiné avec l’art 4 du Protocole n° 4). Elle a par contre écarté une possible violation de l’art 5.2 de la Convention.

56 MA, supra note 49 au para 254. La Cour a déclaré qu’il n’y avait pas de violation de l’art 4 du Protocole n° 4. Elle a déclaré les plaintes sous les arts 2 et 3 de la Convention européenne incompatibles ratione personae avec la Convention, mais elle a trouvé une violation des arts 5.1, 5.4 et 13 (en relation avec les arts 2 et 3) de la Convention. La Cour a analysé une situation identique, du point de vue de l’art 4 du Protocole n° 4, et est arrivée à la même conclusion dans: HS and other v Cyprus, no 41753/10, [2015], CEDH; KF v Cyprus, no 41858/10, [2015], CEDH; AH and JK v Cyprus, no 41903/10 et 41911/10, [2015], CEDH.

57 Davydov c Estonie, n° 16387/03, [2005], CEDH au point 4 de la section du droit applicable. La suggestion des autorités estoniennes était la manière de montrer que le refus de titre de séjour n’interrompait pas la vie familiale de l’intéressé (sa femme et leur enfant étaient, comme le requérant, de nationalité russe). La Cour a écarté toute violation de l’art 4 du Protocole n° 4, ainsi que des arts 8 et 14 de la Convention européenne et à l’art 4 du Protocole n° 7.

58 ND et NT, supra note 49 au para 60. La Cour a décidé à l’unanimité (avec une opinion dissidente limitée au montant de l’indemnisation à verser aux requérants) que l’Espagne avait violé l’art 4 du Protocole n° 4 et l’art 13 de la Convention européenne combiné avec l’art 4 du Protocole n° 4. La Cour a déclaré irrecevable le grief que les requérants invoquaient sous l’art 3 et l’art 13 combiné avec l’art 3 de la Convention. L’affaire fait l’objet d’un renvoi devant la Grande Chambre.

59 Dritsas, supra note 49 au para 7. La Cour a déclaré la requête manifestement mal fondée par rapport à l’art 4 du Protocole n° 4. Elle a également conclu au non-épuisement des voies internes concernant les arts 3, 9, 10 et 11 de la Convention et à l’incompatibilité ratione materiae concernant l’art 5 de la Convention.

60 Hirsi Jamaa, supra note 49. Beaucoup de commentaires ont été publiés sur cet arrêt. Voir spécialement Irini Papanicolopulu, “Hirsi Jamaa v. Italiy” (2013) 107:2 AJIL 417; Maarten Den Heijer, “Reflections on Refoulement and Collective Expulsion in the Hirsi Case” (2013) 25:2 Intl J Refugee L 265; Jasmine Coppens, “The Law of the Sea and Human Rights in the Hirsi Jamaa and Others v. Italy Judgment of the European Court of Human Rights” dans Yves Haeck et Eva Brems, dirs, Human Rights and Civil Liberties in the 21st Century, Dordrecht, Springer, 2014, 179.

61 Hirsi Jamaa, supra note 49 au para 175.

62 Ibid au para 177.

63 Ibid au para 180.

64 Ibid aux paras 185–86. Voir dans le même sens l’opinion concordante du juge Pinto de Albuquerque. Dans l’affaire, en plus de la violation de l’art 4 du Protocole n° 4, la Cour a trouvé une violation de l’art 3 et de l’art 13 de la Convention européenne, tant par rapport à la violation de l’art 3 de la Convention que par rapport à la violation de l’art 4 du Protocole n° 4.

65 Den Heijer, supra note 60 aux pp 283–84.

66 Sharifi, supra note 49 aux paras 210–13.

67 Khlaifia GC, supra note 49 au para 243.

68 ND et NT, supra note 49 au para 104.

69 Géorgie c Russie (I), supra note 49. Voir, en général, Bill Bowring, “Georgia, Russia and the Crisis of the Council of Europe: Inter-State Applications, Individual Complaints, and the Future of the Strasbourg Model of Human Rights Litigation” dans James Green et Christopher Waters, dirs, Conflict in the Caucasus: Implications for International Legal Order, London, Palgrave Macmillan, 2010, 114; voir aussi Bjôrn Arp, “Georgia v. Russia” (2015) 109 AJIL 167.

70 L’affaire Géorgie c Russie (I), a été la première dans une série de trois affaires portées par la Géorgie contre la Russie devant la Cour européenne des droits de l’homme. La deuxième concernait l’occupation de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie par la Russie en 2008. Pour l’instant, il n’y a qu’une décision concernant l’admissibilité (Géorgie c Russie (II), no 38263/08, [2011], CEDH). La troisième affaire était relative à la détention de quatre enfants en Ossétie du Sud, mais la requête a été retirée après leur libération (Géorgie c Russie (III), no 61186/09, [2010], CEDH). La Géorgie a aussi traduit la Russie devant la Cour internationale de Justice pour une supposée violation de la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, 21 décembre 1965, 660 RTNU 1 (entrée en vigueur le 4 janvier 1969). La Cour internationale de Justice s’est déclarée incompétente en raison du non-épuisement des négociations, qui est une exigence préalable au recours juridictionnel imposée par la propre convention (Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c Fédération de Russie), [2011] CIJ Rec 70 [exceptions préliminaires]).

71 La plupart des requêtes présentées devant la Cour sont des requêtes individuelles qui relèvent de l’art 34 de la Convention européenne. Or, selon l’art 33, tout État partie peut soumettre à la Cour tout manquement à la Convention et à ses protocoles que cet État croit imputable à un autre État partie. Il y a cependant une différence fondamentale entre les procédures relevant de l’art 33 et celles relevant de l’art 34. En effet, les requêtes individuelles peuvent être présentées par toute personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers “qui se prétend victime d’une violation par l’une des Hautes Parties contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses protocoles” (art 34). Par contre, les requêtes interétatiques ne supposent pas forcément l’existence de victimes concrètes ni d’un préjudice spécifique de la part de l’État qui présente la requête. Le point a été abordé dans les précédents des systèmes européen et américain. Irlande c Royaume-Uni, no 5310/71, [1978], CEDH au para 159; France, Norvège, Danemark, Suède, Pays-Bas c Turquie, no 9940/82, 9941/82, 9942/82, 9943/82 et 9944/82, [1983], CEDH au para 3 de la section sur le droit applicable decision; Chypre c Turquie, no 25871/94, [1996], CEDH au para IV de la section sur le droit applicable. Danemark c Turquie, no 34382/97, [1999], CEDH au para 1 de la section sur le droit applicable; Chypre c Turquie, no 25781/94, [1996], CEDH au para 4 de la section sur le droit applicable; Informe n° 11/07, Caso interestatal 01/06: Nicaragua c Costa Rica, [2007], Comm IDH au para 194. Voir en général Søren C Prebensen, “Inter-State Complaints Under Treaty Provisions: The Experience under the European Convention on Human Rights” dans Gudmundur Alfredsson, dir, International Human Rights Monitoring Mechanisms, Amsterdam, Brill, 2001, 439.

72 Berdzenishvili, supra note 49.

73 Shioshvili, supra note 49.

74 Géorgie c Russie (I), supra note 49 au para 178.

75 Ibid au para 175. La Cour a aussi déclaré que la détention des ressortissants géorgiens avait supposé la violation des arts 5.1, 5.4 et 3 de la Convention européenne. Elle a trouvé une violation de l’art 13 de la Convention européenne , par rapport aux arts 5.1 et 3 de la Convention européenne , et a déclaré que la Russie avait failli à son obligation de fournir toutes facilités nécessaires à la Cour afin qu’elle puisse établir les faits de la cause comme le veut l’art 38 de la Convention européenne. En revanche, la Cour a conclu à l’absence de violation de l’art 1 du Protocole n° 7, parce qu’elle n’avait pas de preuves que les ressortissants géorgiens expulsés étaient des migrants résidant régulièrement en Russie, et a écarté une possible violation de l’art 13 de la Convention européenne en combinaison avec l’art 4 du Protocole n° 4 et de l’art 5.4 de la Convention européenne car le constat de violation de l’art 4 du Protocole n o 4 et de l’art 5.4 de la Convention européenne en eux-mêmes impliquerait déjà l’absence de recours effectifs et accessibles. Il est aussi intéressant de mentionner l’opinion de la juge Tsotsoria qui qualifie les mesures adoptées par la Russie comme des représailles illégales. Géorgie c Russie (I), opinion en partie dissidente de la juge Tsotsoria.

76 Le septième requérant n’avait pas introduit de grief relatif à l’art 4 du Protocole n° 4.

77 Berdzenishvili, supra note 49 aux paras 81–82. La Cour a aussi déclaré une violation de l’art 5.1 et 5.4 de la Convention européenne relativement à deux des sept requérants et une violation de l’art 3 de la Convention européenne en raison des conditions de détention. La Cour a déclaré une violation de l’art 13 combiné avec l’art 3 de la Convention européenne dans le cas des trois requérants par rapport auxquels elle avait trouvé une violation de l’art 3; mais elle a écarté l’existence d’une violation de l’art 13 combiné avec l’art 5.1 de la Convention européenne. La Cour a écarté l’existence d’une violation de l’art 1 du Protocole n° 7 et de l’art 14 de la Convention européenne combiné avec l’art 6 de la Convention européenne et l’art 1 du Protocole n° 7. Six des sept requérants s’étaient aussi plaints sous l’art 6.1 de la Convention européenne; la Cour a déclaré que l’article n’était pas applicable.

78 Shioshvili, supra note 49 aux paras 70–72. La Cour a aussi trouvé une violation de l’art 2 du Protocole n° 4, et de l’art 3 et de l’art 13 par rapport à l’art 3 de la Convention européenne. La Cour a déclaré que les allégations de violation de l’art 14 par rapport aux arts 3 et 13 de la Convention européenne étaient manifestement mal fondées. Dans les trois affaires géorgiennes, le juge russe, Dmitry Dedov, a joint une opinion dissidente très critique avec la décision de la majorité. Selon ce juge, la Cour aurait dû tenir compte du contexte de “forte opposition politique” entre les parties. Pour lui, il n’y aurait pas eu d’expulsion collective contraire à l’art 4 du Protocole n° 4: il y aurait eu simplement une fin de la tolérance des autorités russes vis-à-vis les géorgiens qui résidaient illégalement dans le territoire, comme conséquence des tensions politiques mentionnées. Et, selon la jurisprudence de la Cour citée par ce même juge, la tolérance des autorités ne fait pas naître un droit de commettre des actes prohibés et, par conséquent, les autorités peuvent mettre fin à cette tolérance quand ils veulent. Géorgie c Russie (I), supra note 49, opinion dissidente du juge Dedov. Berdzenishvili, opinion dissidente du juge Dedov; Shioshvili, supra note 49, opinion dissidente du juge Dedov.

79 Commission du droit international, supra note 28 au para 73.

80 ND et NT, supra note 49 au para 104.

81 Ibid aux paras 53–54.

82 Khlaifia, supra note 49 aux paras 153–58. La Chambre a aussi conclu à la violation de l’art 13 de la Convention européenne combiné avec l’art 4 du Protocole n°4. Elle a aussi trouvé des violations des arts 3, 5.1, 5.2, 5.4 et 13 (combiné avec l’art 3) de la Convention européenne. Voir aussi les opinions individuelles: opinion concordante de la juge Keller; opinion en partie dissidente des juges Sajó et Vuċiniċ (avec une dissidence sur la violation de l’art 4 du Protocole n° 4); opinion en partie dissidente du juge Lemmens (avec une dissidence sur le montant de la satisfaction équitable).

83 Khlaifia GC, supra note 49 au para 241.

84 Ibid au para 251. Le juge Raimondi, qui avait fait partie de la majorité dans l’arrêt de Chambre, a émis une opinion concordante pour expliquer pourquoi il avait changé d’avis et avait voté, dans l’arrêt de la Grande Chambre, pour la non-violation de l’art 4 du Protocole n° 4.

85 Ibid au para 247.

86 Ibid.

87 Ibid. La Grande Chambre a partagé le point de vue de la Chambre sur la violation de l’art 13 combiné avec l’art 3 de la Convention européenne mais elle a écarté une possible violation de l’art 13 de la Convention européenne combiné avec l’art 4 du Protocole n° 4. La Grande Chambre a aussi trouvé des violations aux arts 5.1, 5.2 et 5.4 de la Convention européenne. La Grande Chambre a déclaré, par contre, qu’il n’y avait pas eu de violation de l’art 3 de la Convention européenne.

88 Hirsi Jamaa, supra note 49 au para 185. Dans ce passage, la Cour avait en effet indiqué que le personnel à bord des navires militaires italiens “n’était pas formé pour mener des entretiens individuels,” suggérant de cette manière qu’un entretien individuel était nécessaire.

89 Khlaifia GC, supra note 49 au para 42, opinion en partie dissidente du juge Serghides.

90 Ibid au para 11, opinion en partie dissidente du juge Serghides.

91 Ibid au para 12.b, opinion en partie dissidente du juge Serghides.

92 Ibid au para 12.d, opinion en partie dissidente du juge Serghides.

93 Carlier, supra note 51, aux pp 208–09 [l’italique nous appartient].

94 Dans Sultani, la Cour a exclu toute violation des arts 3 de la Convention européenne et 4 du Protocole n° 4 et a déclaré que les griefs présentés sous les arts 6 de la Convention européenne et 1 du Protocole n° 7 étaient incompatible ratione materiae avec la Convention européenne. Dans Ghulami la Cour a déclaré manifestement mal fondées les allégations faites sous l’art 3 et l’art 13 combiné avec l’art 3, tous de la Convention européenne ; et sous l’art 4 du Protocole n° 4. M Ghulami avait été effectivement déporté au moment de l’arrêt de la Cour. M. Sultani aurait dû être déporté dans le même vol que M. Ghulami, mais sa déportation avait été suspendue par une décision provisoire de la Cour de Strasbourg adoptée sous l’art 39 du règlement (c’est pour cette raison que la Cour a fait, dans son arrêt, une déclaration hypothétique selon laquelle l’expulsion ne serait pas constitutive d’une violation de l’art 4 du Protocole n° 4). Dans deux autres affaires, la Cour avait analysé une situation semblable (décision individuelle exécutée de manière collective) concernant l’expulsion de plusieurs personnes de nationalité bosnienne par l’Italie. La Cour avait déclaré recevable le grief fondé sur l’art 4 du Protocole n° 4 dans la première affaire (Sulejmanovic et Sultanovic c Italie, no 57574/00, [2002], CEDH). Puis, suite à un accord par lequel le gouvernement italien s’était engagé à réinstaller les expulsés en Italie, la Cour a rayé du rôle les deux requêtes (Sulejmanovic et autres et Sejdovic et Sulejmanovic c Italie, no 57574/00 et 57575/00, [2002], CEDH).

95 MA, supra note 49 au para 254.

96 Sur le concept de juridiction voir Frederick A Mann, “The Doctrine of Jurisdiction in International Law” dans Recueil des Cours de l’Académie de Droit International, La Haye, Martinus Nijhoff Publishers, 1964, 10; Frederick A Mann, “The Doctrine of Jurisdiction in International Law, Twenty Years Later” Recueil des Cours de l’Académie de Droit International, La Haye, Martinus Nijhoff Publishers, 1984, 186; Cédric Ryngaert, Jurisdiction in International Law, Oxford, Oxford University Press, 2008.

97 Sur les interceptions voir United Nations High Commissioner on Refugees (UNHCR) Executive Committee, Protection Safeguards in Interception Measures, Conclusion n° 97 (2003), online: <http://www.unhcr.org/refworld/docid/3f93b2894.html>; UNHCR, Global Consultations on International Protection/Regional Meetings: Key Conclusions and Recommendations (2001), online: <http://www.unhcr.org/refworld/docid/3b36f2cb4.html>; Anja Klug et Tim Howe, “The Concept of State Jurisdiction and the Applicability of the Non-Refoulement Principle to Extraterritorial Interception Measures” dans Bernard Ryan et Valsamis Mitsilegas, dirs, Extraterritorial Immigration Control, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2010, 65.

98 M c Danemark, no 17392/90, [1992], CEDH au para 1 de la section du droit applicable. Affaire concernant une demande d’asile dans l’ambassade danoise en République Démocratique Allemande. La Commission, bien qu’elle ait refusé la requête pour défaut manifeste de fondement, a accepté le principe selon lequel l’activité des agents diplomatiques et consulaires peut engager la responsabilité de l’État.

99 Mabel Pereira Montero c Uruguay, Comité des Droits de l’Homme, CCPR/C/18/D/106/1981 (31 mars 1983) au para 5; Juan Raúl Ferreira c Uruguay, [1983], Comm. IDH, rapport 18/83 aux paras 1–4.

100 Loizidou c Turquie [GC], no 15318/89, [1995], CEDH au para 62 (exceptions préliminaires); Loizidou c Turquie [GC], no 15318/89, [1996], CEDH aux paras 49–57 [Loizidou I]. Affaire relative à l’occupation de Chypre par la Turquie.

101 Chypre c Turquie [GC], no 25781/94, [2001], 2001-IV CEDH 237 aux paras 69–80. Affaire relative à l’occupation de Chypre par la Turquie.

102 Al-Skeini et autres c Royaume-Uni [GC], no 55721/07, [2011], 2011-IV CEDH 199 aux paras 143–50. La Cour a déclaré que le Royaume-Uni avait exercé un pouvoir effectif sur le territoire irakien comme puissance occupante.

103 La Cour internationale de Justice a déclaré que les activités militaires d’Israël comme puissance occupante des territoires palestiniens donnaient lieu à sa responsabilité non seulement sous le droit international humanitaire mais aussi sous le droit international des droits de l’homme. Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, [2004], CIJ Rec 136. Le même critère dans l’affaire du Congo. Affaire relative aux activités armées sur le territoire du Congo (République Démocratique du Congo c Ouganda), [2005], CIJ Rec 168 [Congo c Ouganda].

104 Le Comité des Droits de l’Homme a également considéré qu’Israël était responsable de violations commises dans les territoires occupés. Observations finales du Comité des Droits de l’Homme – Israël, Comité des Droits de l’Homme, CCPR/C/79/Add.93 (18 août 1998) au para 10. La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples a déclaré le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda responsables de violations de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples commises sur le territoire du Congo. Democratic Republic of Congo c Burundi, Rwanda and Uganda, Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, Communication 227/99 (29 mai 2003) aux paras 68ff. La Commission interaméricaine des Droits de l’Homme a trouvé que les États-Unis étaient responsables des violations de la Déclaration Américaine des Droits et Devoirs de l’Homme commises lors des activités militaires à Grenade en 1983. Coard et al c United States, [1999], Comm IDH rapport 109/99 au para 37.

105 Banković et autres c Belgique et 16 autres États contractants [GC], no 52207/99, [2001], 2001-XII CEDH 361 au para 75 [Banković et autres]. La Cour a déclaré irrecevable la requête contre les États européens membres de l’OTAN signalés comme responsables du bombardement d’un bâtiment de la radio-télévision serbe pendant la crise du Kosovo en 1999.

106 Rick Lawson, “Life after Bankovic: On the Extraterritorial Application of the European Convention on Human Rights” dans Fons Coomans et Menno Kamminga, dirs, Extraterritorial Application of Human Rights Treaties, Antwerp, Intersentia, 2004, 83 à la p 97; voir aussi Gérard Cohen-Jonathan, “La territorialisation de la juridiction de la Cour européenne des droits de l’homme” (2002) 52 Revue trimestrielle des droits de l’homme 1055; Alexander Orakhelashvili, “Restrictive Interpretation of Human Rights Treaties in the Recent Jurisprudence of the European Court of Human Rights” (2003) 14 EJIL 529; Guy S Goodwin-Gill, “The Extra-Territorial Reach of Human Rights Obligations: A Brief Perspective on the Link to Jurisdiction” dans Laurence Boisson de Chazournes et Marcelo Kohen, dirs, International Law and the Quest for Its Implementation, Leiden/Boston, Brill, 2010, 289; Ralph Wilde, “The ‘Legal Space’ or ‘Espace Juridique’ of the European Convention on Human Rights: Is It Relevant to Extraterritorial State Action?” (2005) Eur HR L Rev 10 at 11524; Michal Gondek, “Extraterritorial Application of the European Convention on Human Rights: Territorial Focus in the Age of Globalisation” (2005) Nethl Intl L Rev 52 at 349–87.

107 Issa and others c Turkey, no 31821/96, [2004], CEDH aux paras 72–82. La Cour a eu affaire à des arrestations illégales et des exécutions extrajudiciaires de plusieurs bergers kurdes par des soldats turcs sur le territoire irakien, qui auraient pu supposer (si les faits auraient été suffisamment prouvés) une forme d’exercice de la juridiction turque.

108 Öcalan c Turquie [GC], no 46221/99, [2005], 2005-IV CEDH 47 au para 91. Affaire relative à une extradition irrégulière du Kenya en Turquie par la police turque. La Cour a souligné que le requérant avait été effectivement sous le contrôle des autorités turques à partir du moment de son transfert.

109 Al-Saadoon et Mufdhi c Royaume-Uni, no 61498/08, [2010], 2010-II CEDH 151 aux paras 128ff [Al-Saadoon]. Affaire relative à l’administration d’une prison sur le territoire irakien par des autorités britanniques. La Cour a trouvé que la prison était sous un contrôle total et exclusif de ces autorités.

110 Le Comité des Droits de l’Homme a accepté que la détention irrégulière d’une personne par des forces sous le contrôle d’un État dans le territoire d’un autre État suppose un exercice de la juridiction par le premier État dans la mesure où il a un contrôle effectif sur la personne détenue. López Burgos c Uruguay, Comité des Droits de l’Homme, CCPR/C/13/D/52/1979 (29 juillet 1981) au para 12; Celiberti de Casariego c Uruguay, Comité des Droits de l’Homme, CCPR/C/13/D/56/1979 (29 juillet 1981) au para 10. Le critère du contrôle effectif est aussi mentionné dans l’Observation générale n° 31. La nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, Comité des Droits de l’Homme, CCPR/C/21/Rev.1/Add.13 (26 mai 2004) au para 10.

111 Ilaşcu et autres c Moldova et Russie [GC], no 48787/99, [2004], 2004-VII CEDH 1 [Ilaşcu et autres c Moldova et Russie]. La Cour a tenu la Moldavie et la Russie pour responsables des violations des droits de l’homme en Transnistrie, un territoire théoriquement sous la juridiction moldave mais de facto sous le contrôle d’un gouvernement auto-proclamé avec l’appui de la Russie.

112 Xhavara c Italie et Albanie, no 39473/98, [2001], CEDH au para 1 de la section du droit applicable. L’affaire était relative à la mort en haute de mer d’un groupe d’immigrants, suite à la collision du bateau qui les transportait avec un navire de guerre italien qui voulait les empêcher de gagner les côtes italiennes. La Cour, quoiqu’elle ait déclaré la requête irrecevable pour d’autres raisons, a accepté le principe de l’exercice de la juridiction par l’Italie.

113 Medvedyev et autres c France [GC], no 3394/03, [2010], 2010-III CEDH 1 aux paras 65–67 [Medvedyev].

114 Armando Alejandre and others c Cuba, [1999], Comm IDH rapport 86/99 au para 23. La Commission a trouvé Cuba responsable de la violation de plusieurs droits consacrés par la Déclaration Américaine des Droits et Devoirs de l’Homme (1948) pour l’abattage d’un avion civil dans un espace international. Voir aussi les précédents du Comité contre la Torture cités infra.

115 Medvedyev, supra note 113 au para 67.

116 Hirsi Jamaa, supra note 49 aux paras 173–78. Sur cette problématique voir Klug et Howe, supra note 97.

117 Ibid au para 81.

118 Ibid au para 77.

119 Ibid au para 178. Dans le même sens, voir Luis López Guerra, “Inmigración y derechos humanos” (2015) 2 Democracia e sicurezza 6.

120 Voir JHA, affaire du Comité contre la Torture relative à l’interception de migrants en haute mer suivie de leur privation de liberté sous le contrôle d’un État contractant mais sur le territoire d’un autre État. Quoique le Comité ait déclaré la requête inadmissible pour des raisons procédurales, il a accepté théoriquement la possibilité qu’un État voie sa responsabilité engagée pour l’exercice de facto de la juridiction dans un espace international ou sur le territoire d’un État tiers. JHA c Espagne, Comité contre la Torture, CAT/C/41/D/323/2007 (21 novembre 2008) au para 8.2 [JHA]. Voir Kees Wouters et Maarten Den Heijer, “The Marine I Case: A Comment” (2010) 22 Intl J Refugee L 1; Ruth Weinzierl et Urszula Lisson, Border Management and Human Rights: A Study of EU Law and the Law of the Sea, Berlin, German Institute for Human Rights, 2007; Andreas Fischer-Lescano, Tillmann Löhr et Timo Tohidipur, “Border Controls at Sea: Requirements under International Human Rights and Refugee Law” (2009) 21 Intl J Refugee L 256.

121 ND et NT, supra note 49 au para 51.

122 Ibid au para 51.

123 L’affaire JHA du Comité contre la Torture, déjà citée, concernait l’exercice de facto de la juridiction non seulement en haute mer, mais aussi sur le territoire d’un État tiers. Dans Sonko le même Comité a accepté la possibilité de responsabilité de la part d’un État pour des activités dans les eaux territoriales d’un État tiers. L’affaire concernait la dévolution au Maroc de quatre migrants qui avaient essayé d’arriver à l’enclave espagnole de Ceuta en nageant, dont un était mort pendant le déplacement. Sonko c Espagne, Comité contre la Torture, CAT/C/47/D/368/2008 (25 novembre 2011) au para 10.3.

124 Voir une analyse générale dans Christopher Borgen, “Resolving Treaty Conflicts” (2005) 37 Geo Wash Intl L Rev 37 at 573–648.

125 Hirsi Jamaa, supra note 49 au para 129 [l’italique nous appartient].

126 Prince Hans-Adam II du Liechtenstein c Allemagne [GC], no 42527/98, [2001], 2001-VIII CEDH 43 au para 47. Bosphorus Hava Yollari Turizm ve Ticaret Anonim Sirketi c Irlande [GC], no 45036/98, [2005], 2005-VI CEDH 173 au para 154; Al-Saadoon, supra note 109 au para 128.

127 Slivenko c Lettonie [GC], no 48321/99, [2003], 2003-X CEDH 289 au para 120. Dans la décision préalable relative à l’admissibilité de l’affaire la Cour avait montré un point de vue plus nuancé en affirmant que l’accord lui-même “imposait à la Lettonie d’observer les principes du droit international en vue de protéger les droits des personnes concernées par sa mise en application” (Slivenko c Lettonie [GC], no 48321/99, [2002], 2002-II CEDH 493 au para 62). Cette affirmation, en effet, suggérait que si les droits consacrés par la Convention européenne gardaient leur force normative face au traité antérieur c’était parce que ce traité antérieur l’ordonnait, et non parce que la Convention européenne devait prévaloir face à tout traité antérieur.

128 Règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

129 MSS c Belgique et Grèce [GC], no 30696/09, [2011], 2011-I CEDH 121 [MSS]. Suivant le point de vue de Strasbourg, la Cour de justice de l’Union européenne a adopté le même critère. NS c Secretary of State for the Home Department et ME et autres c Refugee Applications Commissioner [GC], C-411/10 et C-493/10 [2011], Cour de justice de l’Union européenne.

130 Traité sur l’Union Européenne (version consolidée), 26 octobre 2012, 326-C JO 13; Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (version consolidée), 26 octobre 2012, 326-C JO 47.

131 Sur les obligations integrals voir Fragmentation du droit international: Difficultés découlant de la diversification et de l’expansion du droit international, Rapport du Groupe d’étude de la Commission du droit international, établi sous sa forme définitive par Martti Koskenniemi, Doc NU A/CN.4/L.682 (2006) au para 248; voir aussi Ineta Ziemele, “Case-Law of the European Court of Human Rights and Integrity of International Law” dans Rosario Huesa et Karel Wellens, dir, L’influence des sources sur l’unité et la fragmentation du droit international, Bruxelles, Bruylant, 2006; Borgen, supra note 124.

132 Sharifi, supra note 49. Le juge Lemmens a joint une opinion concordante relative à un aspect purement technique concernant une exception préliminaire (opinion concordante du juge Lemmens).

133 Dans l’analyse préliminaire de l’affaire, la Cour a décidé de rayer du rôle la requête dans la mesure où elle concernait trente et un des trente-cinq requérants, car la perte de contact de ces trente et un requérants avec leur représentant supposait, pour la Cour, leur intention de ne pas continuer la procédure. La Cour n’a donc retenu que quatre requérants (tous de nationalité afghane).

134 Sharifi, supra note 49 aux paras 217–25. La Cour a condamné l’Italie pour violation de l’art 4 du Protocole n° 4. La Cour a aussi trouvé une violation par l’Italie de l’art 3 de la Convention européenne et de l’art 13 de la Convention européenne combiné avec l’art 3 de la Convention européenne et 4 du Protocole n° 4. La Cour a condamné la Grèce pour violation de l’art 13 combiné avec l’art 3 de la Convention européenne.