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Les projets de Campanella revus et corrigés par la physique du jeune Leibniz
Published online by Cambridge University Press: 13 April 2010
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On ne retient plus guère aujourd'hui le nom de T. Campanella parmi les philosophes qui ont compté à l'aube du XVIIe siècle. Cet ardent défenseur de Galilée, longtemps emprisonné pour la hardiesse de ses propres idées, a cependant joué un rôle non négligeable dans l'avènement d'une philosophie naturelle affranchie des traditions aristotéliciennes. Je voudrais attirer ciaprès l'attention sur quelques-unes de ses positions qui semblent avoir été prises en compte par Leibniz dans l'élaboration de sa première physique.
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- Dialogue: Canadian Philosophical Review / Revue canadienne de philosophie , Volume 35 , Issue 1 , Winter 1996 , pp. 3 - 14
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- Copyright © Canadian Philosophical Association 1996
References
Notes
1 Cf., à ce sujet, Campanella, T., De libris propriis et recta ratione studendi syntagma, éd. par Naudé, G., Paris, 1642, p. 4–6 et 57–60Google Scholar.
2 Nous renvoyons, dans ce qui suit, au texte publié à Francfort en 1622 (qui contient la lettre dédicace au cardinal Cajétan) et intitulé: Apologia pro Galileo mathematico florentino ubi disquisitur utrum ratio philosophandi quam Galileus celebrat faveat sacris scripturis an adversetur.
3 Cf. Thomasius, Leibniz, Correspondance (1663-1672), texte établi, introduit, traduit, annoté et commenté par Richard Bodéüs, Paris, Vrin, 1993 (ouvragé cite ci-après L-Th), p. 55–58 et 97-117Google Scholar (Lettres IV et VI). Leibniz écrit par ailleurs en 1668: «Aristote lui-même se trouve étonnamment conforme à Galilée» (p. 55).
4 Par exemple, les scolastiques soutiennent l'incorruptibilité des planètes, alors que Galilée entrevoit la possibilité qu'ily ait de l'eau sur les planètes (p. 8). Ils soutiennent que Mars et Vénus, comme le Soleil, tournent autour de la Terre, alors que Galilée envisage que leurs révolutions ont, pour centre, le Soleil (p. 10). Thomas d'Aquin, lui-même, croyait que, sous les équinoxes, il n'y avait pas de vie humaine (p. 13)… Mais, dans tous ces cas, les scolastiques se sont fourvoyés, dit Campanella, parce qu'ils suivaient Aristote. Or, nous n'avons pas à sauver Aristote, dit-il, si nous voulons être Chrétiens (p. 48). D'autre part, leurs opinions à cet égard ne mettaient pas en cause leur fidélité fondamentale aux données révélées. Touchant, par exemple, le mouvement de la Terre, Thomas d'Aquin lui-même, dit Campanella, ne signale pas que ce mouvement serait chose opposée à l'Écriture, mais qu'il serait certes opposé aux théories d'Aristote (p. 37). La vérité sur toutes ces questions, conclut Campanella, ne porte peut-être pas témoignage pro Galileo, mais elle est contra Aristotelem sine dubio (p. 55).
5 Cf., en particulier, L-Th, p. 100 (Lettre VI, §14), 126, n. 39 et 180-191 (commentaire).
6 Sur tout ceci, cf. le dossier dans L-Th, p. 55-210.
7 Cf. L-Th, p. 174-177 (avec la bibliographie).
8 Lettre VI, §3 et 63, dans L-Th, p. 97 et 112.
9 Le texte de Diogène que nous suivons ci-après est celui de Hicks, R. D. (t. II [Loeb Classical Library], Cambridge, MA, Harvard University Press, 1925)Google Scholar. La section de doxographie qui nous intéresse, comme source de Campanella, est empruntée au témoignage tardif d'Alexandre Polyhistor et est truffée de contaminations platoniciennes et stoïciennes.
10 Les citations ci-après sont tirées de l'édition de Francfort, 1617 (procurée par T. Adam), intitulée Prodromus philosophiae instaurandae, id est dissertationis de natura rerum Compendium secunda vera principia.
11 Cf. L-Th, respectivement, p. 111 (Lettre VI, §59), 57 (Lettre IV, §10), 114 (Lettre VI, §67) et 101 (Lettre III, §19).
12 Ibid.
13 Ibid.
14 Cette idée est expressément mise de l'avant dans la Lettre dédicatoire du De sensu rerum et magia libri quatuor (Francfort, 1620), que nous citons ci-après.
15 Cf. L-Th, p. 113 (Lettre VI, §64) et p. 156, n. 222.
16 Cf. à ce sujet, son Astrologicorum libri VI, Leyde, 1620, p. 4-5.
17 Ce texte est cité, dans ce qui suit, d'après l'édition de l'Académie, Sämtliche Schriften und Briefe (SSB), VI, 2.
18 Leibniz fait l'économie de la plupart des thèses coperniciennes que confirme Galilée. II ne table que sur le mouvement (diurne) de la Terre autour de son axe, dont il est convaincu a la suite des travaux de Tycho-Brahé (cf. SSB, VI, 2, p. 221 sqq.; et II, 1, p. 59 et 83), mais non sans faire observer que rien d'important ne serait changé si le mouvement solaire autour de la Terre était réel, plutôt qu'apparent (cf. SSB, VI, 2: Hypothesis, §3 et 55).
19 Ce que dit l'Hypothesis (SSB, VI, 2, p. 255-256).
20 Effet déja signalé à Thomasius en 1670 (cf. L-Th, p. 278: Lettre XIII, §8).
21 Constat dressé, contre Campanella, dès 1669 (cf. L-Th, p. 112: Lettre VI, §63).
22 À ce sujet, cf. L-Th, respectivement, p. 301 (Lettre XIV, §2) et 315 (Lettre XV, §3).
23 Comparez Aristote, De l'âme, II, 7, 418b9-10 et L-Th, p. 278 et 325-326.
24 Cf. déjà, L-Th, p. 107 (Lettre VI, §44).
25 L'analogie, ici, reste frappante, parce que l'éther immanent, comme l'esprit immanent, sont des corps, assumant, l'un et l'autre, le même principe causal à l'égard des corps où ils résident. Et le caractère aristotélico-scolastique de cette perspective est avéré par le fait que, pour Leibniz comme pour Campanella, les corps terrestres, à eux seuls, sont une matière qui exige autre chose qu'elle-même pour agir et que cette autre chose est un principe rigoureusement distinct de la matière ordinaire: l'éther et l'esprit pneumatique ne sont pas des corps au même titre que le reste du corporel, où ils sont immanents.
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