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L'expérience des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda
Published online by Cambridge University Press: 19 April 2010
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La juridiction pénale internationale est un vieux rêve qui peu à peu devient réalité. Le traité de Versailles de 1919 avait prévu à son article 227 le jugement de l'empereur d'Allemagne Guillaume Il par un tribunal international pour répondre à l'accusation d'«offense suprême contre la morale internationale et l'autorité sacrée des traités». Mais les Pays-Bas ayant refusé de livrer l'accusé, le procès n'eut jamais lieu et Guillaume Il devait mourir en 1941 dans son exil néerlandais. Quant aux articles 228 et 229, ils organisaient le jugement des criminels de guerre et ils trouvèrent une application décevante dans le procès de Leipzig. Les procès de Nuremberg et de Tokyo, après la Seconde Guerre mondiale, ont marqué incontestablement un progrès vers une véritable juridiction pénale internationale. Ils restaient cependant fortement marqués par leur origine et constituaient plutôt l'application de la loi et de la justice des vainqueurs que celle de la communauté universelle des États.
- Type
- Juridiction pénale internationale et droit international humanitaire: les Tribunaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda
- Information
- Copyright
- Copyright © International Committee of the Red Cross 1997
References
1 Bennouna, Mohamed, «La création d'une juridiction pénale internationale et la souveraineté des Etats», Annuaire français de droit international, 1990, pp. 299–306CrossRefGoogle Scholar, notamment p. 300.
2 Ibid., p. 306.
3 Voir Dekker, Ige F., «Criminal responsibility and the Gulf War of 1980–1988: the crime of aggression», Dekker, dans Ige F. et Post, Harry G. (éds.), The Gulf War of 1980–1988, Martinus Nijhoff, Dordrecht, 1992, pp. 249–268Google Scholar, notamment pp. 266–268.
4 Voir notamment Russbach, Olivier, ONU contre ONU, le droit international confisqué, La Découverte, Paris, 1994, p. 312Google Scholar, et «Une justice internationale à la carte», Politique internationale, no 67, printemps 1995, pp. 313–326.
5 Malgré les critiques qu'il a essuyées et la crise qu'il a traversée, le bilan du Tribunal pénal pour le Rwanda n'est pas négligeable. En ce sens: Laucci, Cyril, «Quelques aspects de l'actualité des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda», L'Observateur des Nations Unies, no 2, 1997, pp. 119–137Google Scholar, et notamment, p. 136: «Les résultats enregistrés par le Tribunal d'Arusha montrent qu'il ne fait pas si mal son travail ». Sur les 21 personnes ayant fait l'objet d'un acte d'accusation, 13 ont été arrêtées, alors que le Tribunal pour l'ex-Yougoslavie a mis en accusation 74 personnes dont seulement 7 avaient été arrêtées et transférées à La Haye jusqu'en décembre 1996.
6 Dans un domaine entièrement différent, on peut songer au Tribunal du droit de la mer, prévu dans la Convention de Montego Bay de 1982, qui n'a été établi qu'après l'entrée en vigueur de celle-ci en 1994 et qui n'a pas encore d'affaire inscrite à son rôle. Dans le domaine du droit humanitaire, le sort réservé à la Commission internationale d'établissement des faits, prévue au Protocole I de 1977 (article 90), est également significatif de l'impact de la souveraineté des Etats sur le fonctionnement et l'efficacité des organes juridictionnels ou quasi-juridictionnels, voire de simples organes d'enquête.
7 Certains auteurs minimisent le rôle du Secrétariat de l'ONU dans l'élaboration des Statuts: voir par exemple Weckel, Philippe, «L'institution d'un tribunal international pour la répression des crimes de droit humanitaire en Yougoslavie», Annuaire français de droit international, 1993, pp. 232–261.CrossRefGoogle Scholar En sens contraire, Daphna Shraga et Zacklin, Ralph, «The International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia», European Journal of International Law/Journal européen de droit international, 1994, pp. 360–380Google Scholar, et notamment p. 362.
8 Les pouvoirs du Tribunal pénal pour le Rwanda sont plus limités, puisque l'article 14 du Statut prévoit qu'il devra appliquer le règlement du Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie, en y apportant les modifications qu'il jugerait nécessaires.
9 Voir Hervé Ascensio et Pellet, Alain, «L'activité du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (1993–1995)», Annuaire français de droit international, 1995, pp. 101–136Google Scholar, et notamment p. 119 à propos de la décision de la chambre d'appel dans l'affaire Tadic (2 octobre 1995).
11 L'article 103 peut être invoqué, par exemple, pour écarter l'application des accords d'extradition, à supposer que le transfert et la remise d'un accusé au Tribunal pénal international puissent être assimilés à une extradition.
12 Voir Tavernier, Paul, «Le caractère obligatoire de la résolution 598 (1987) du Conseil de sécurité relative à la Guerre du Golfe», Journal européen de droit international/European Journal of International Law, vol. I, no 1–2, 1990, pp. 278–285.CrossRefGoogle Scholar
13 La composition des chambres, et notamment de la chambre d'appel, pourrait soulever certaines difficultés en raison des dispositions prévues pour la récusation et l'empêchement des juges (article 15 du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie). Par ailleurs, la composition de la chambre d'appel devrait refléter davantage celle des deux Tribunaux et non pas celle du seul Tribunal pour l'ex-Yougoslavie.
14 King, Faïza Patel et Rosa, Anne-Marie La, «The jurisprudence of the Yugoslavia Tribunal: 1994–1996», European Journal of International Law/Journal européen de droit international, 1997, pp. 123–179Google Scholar, notamment 128–142.
15 S/25266 du 10 février 1993, article XV, par. 2. Sur le refus regrettable du procès par contumace, voir Pellet, Alain, «Le Tribunal criminel pour l'ex-Yougoslavie. Poudre aux yeux ou avancée décisive?», Revue générale de droit international public, 1994, pp. 7–60Google Scholar, notamment p. 48, et Tavernier, Paul, «Vers une juridiction pénale internationale?», Thuan, dans Cao Huy et Fenet, Alain, Mutations internationales et évolution des normes, PUF, Paris, 1994, pp. 137–154.Google Scholar
16 Ascensio, Selon H. et Pellet, A. (op. cit. (note 9), p. 110)Google Scholar, l'article 61 constitue «un succédané imparfait du jugement par contumace». Quant à F. Patel-King et La Rosa, A.-M., elles soulignent les problèmes juridiques que cette procédure soulève (op. cit. (note 14), p. 142).Google ScholarKlip, A. (infra, note 20)Google Scholar critique sévèrement la procédure de l'article 61, aussi bien du point de vue de l'accusé que de celui des témoins.
17 Voir notre rapport au colloque de la Société française pour le droit international, Strasbourg, mai 1997, Drzemcewski, Andrew et Tavernier, Paul, L'exécution des «décisions» des instances internationales de contrôle dans le domaine des droits de l'homme (à paraître), Éditions Pedone.Google Scholar
18 Éric David s'était montré sceptique quant au caractère pratique d'une telle absence de publicité: «Le Tribunal international pénal pour l'ex-Yougoslavie», Revue belge de droit international, no 2, 1992, pp. 565–598, notamment pp. 590–591.
19 Force de stabilisation [de l'OTAN] pour la Bosnie-Herzégovine.
20 Voir Tavernier, Paul, «Le droit à un procès équitable dans la jurisprudence du Comité des droits de l'homme des Nations Unies», Revue trimestrielle des droits de l'homme, no 25, 1996, pp. 3–22Google Scholar, notamment pp. 13 et 14.
21 Klip, André, «Witnesses before the international criminal tribunal for the former Yugoslavia», Revue internationale de droit pénal, vol. 67, 1996, pp. 267–295Google Scholar; Leigh, Monroe, «The Yugoslav Tribunal: Use of unnamed witnesses against accused», American Journal of International Law, vol. 90, April 1996, pp. 235–238.CrossRefGoogle Scholar
22 Le Tribunal recherche un équilibre entre les intérêts de l'accusé et ceux des témoins. Il pose cinq conditions assez rigoureuses pour que l'anonymat soit admissible. La décision du Tribunal est accompagnée d'une opinion dissidente fortement charpentée du juge Stephen qui repose sur une conception stricte du procès équitable, proche de la conception anglo-saxonne.
23 La première audition de témoins devant le Tribunal pénal pour le Rwanda a eu lieu le 17 janvier 1997, dans le cadre de l'affaire Akayezu.
24 Pour une analyse approfondie et critique de ces problèmes, voir Ascensio, H. et Pellet, A., op. cit. (note 9), p. 125Google Scholar et suiv.
25 Voir, par exemple, Meron, Theodor, «The continuing role of custom in the formation of international humanitarian law», American Journal of International Law, vol. 90, April 1996, pp. 238–249.CrossRefGoogle Scholar Voir aussi les remarques de Luigi Condorelli dans ses conclusions générales formulées à l'occasion du colloque de Genève d'octobre 1995, dans Luigi Condorelli, Rosa, Anne-Marie La et Scherrer, Sophie, Les Nations Unies et le droit international humanitaire, Éditions Pedone, Paris, 1996, pp. 445–474Google Scholar et notamment p. 466.
26 Interview au journal Le Monde, 30 août 1997.