Les meurtres d’enfants font partie des crimes les plus intolérables. Ils suscitent l’indignation de toute la société d’autant plus lorsqu’ils sont commis par le père ou la mère de l’enfant, se dénominant dès lors sous le terme de « filicide ». Resnick et al. ont distingué en 1969, 5 types de filicides, dont celui de « Filicide-Vengeur », c’est-à-dire un filicide commis par un parent dans une dynamique de vengeance à l’égard de l’autre parent, avec majoritairement le suicide du parent–auteur dans les heures suivant les faits, se qualifiant ainsi de « filicide-suicide ». Nous vous présentons un cas de filicide-suicide vengeur, ayant des atypicités séméiologiques. Il s’agit d’un homme de 38 ans père de deux enfants de 5 et 7 ans en cours de séparation après 10 ans de vie maritale. Il est retrouvé décédé au rez-de-chaussée à son domicile, en partie carbonisé, avec une plaie thoracique autoinfligée (seppuku), les corps de ses deux enfants sont quant à eux découverts dans la chambre conjugale, entièrement calcinés. Nous soulignons une mise en scène étrange avec incendie de l’intégralité du domicile familial et mise en évidence à l’entrée de la maison d’une sacoche noire, à l’abri du feu, contenant des lettres d’adieu adressées à l’entourage proche ainsi que des photographies familiales, évoquant le syndrome de Sardanapale, inspiré d’un Roi illustre qui se suicida en mettant le feu à son palais avec sa famille et ses domestiques. Par l’étude des données médico-légales, des écrits du défunt et des auditions des proches de la famille au cours de l’enquête policière, associée à une revue de la littérature concernant ce type de crime spécifique, nous essayerons de dégager des hypothèses conceptuelles psychiatriques afin de tenter d’expliquer un tel passage à l’acte et d’envisager des actes préventifs. Les homicides infantiles représentent une part non négligeable de la mortalité infantile. Les filicides suicides vengeurs comme celui que nous présentons sont commis exclusivement au cours d’une procédure de séparation entre les parents. Étant donné l’augmentation du nombre de divorces à l’heure actuelle, on peut se demander si l’incidence de ce crime, difficilement compréhensible, n’augmenterait pas significativement au cours des années à venir ?
Annexe : L’examen des lieux mettait en évidence une mise en scène du décès avec présence d’une sacoche à l’arrière de la boîte aux lettres du domicile sur laquelle étaient posées deux bougies (Fig. 1). À l’intérieur de la sacoche étaient relevées des photographies de mariage du couple et des enfants, des relevés bancaires et « des lettres d’Adieu » destinés à l’ex-épouse du défunt, aux parents et beaux-parents.