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La catastrophe de Tchernobyl, en avril 1986, a réveillé brutalement dans le monde la terreur du nucléaire, un peu assoupie depuis l'accident de la centrale américaine de Three Mile Island, à Harrisburg, en 1979. Le passage du nuage radioactif au-dessus de plusieurs pays, les erreurs commises dans l'information du public et les mesures contradictoires prises par les gouvernements intéressés ont beaucoup contribué à troubler les esprits. Mais l'aspect le plus préoccupant de l'affaire est sans doute l'impréparation des autorités soviétiques et leurs errements dans l'alerte et dans celui de l'évacuation des populations immédiatement menacées. On ne saura probablement jamais où se situent les véritables responsabilités, mais il est acquis que, pendant plusieurs jours, le sort de dizaines de milliers de personnes s'est joué dans une grande confusion. D'après la presse soviétique elle-même, l'ordre de réunir les moyens d'évacuation aurait été donné dans la soirée du 26 avril, alors que 1'accident s'était produit dans la nuit du 25 au 26. Les premières évacuations eurent lieu dans l'après-midi du 27. Certaines localités proches de la centrale ne furent complètement évacuées que dans les premiers jours du mois de mai.
(1) En mars 1979, un accident survenu à la centrale nucléaire de Three Mile Island, en Pennsylvanie, conduisit les autorités à envisager une évacuation qui aurait pu concerner 650 000 personnes ou plus. En fin de compte on se contenta de mesures partielles, mais 200 000 personnes environ avaient évacué spontanément le site. Divers aspects de la crise ont été présentés de façon synthétique par Augustin, B. et Fauve, J.-M. in L'accident nucléaire de Harrisburg : analyse d'une crise (Paris, Sofedis, 1979).Google Scholar
(2) Les travaux américains dans ce domaine ont été introduits en France par Chandessais, C. A. in Alertes et évacuations (Paris, Centre d'études psychosociologiques des sinistres et de leur prévention, 1975)Google Scholar, document ronéo, avec un système de références difficilement exploitable. Pour une synthèse en langue anglaise, cf. Mileti, D. S., Drabeck, T. E., Hass, J. E., Human System in Extreme Environments (Boulder, The University of Colorado, Institute of Behavioral Science, 1975), pp. 35 sq.Google Scholar
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(4) La question était au cœur d'un récent colloque organisé par le Secrétariat d'État à l'Environnement et l'association germes : « Les experts sont formels : controverses scientifiques et décisions politiques dans le domaine de l'environnement » (Arc-et-Senans, 11–12–13 septembre 1989). Travaux non encore publiés au moment où cet article était remis à la publication.
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(7) Certains des éléments de cet article sont tirés d'une thèse pour le doctorat ès-lettres et sciences humaines soutenue par l'auteur à Paris X-Nanterre en 1984 : « Essai sur la réponse sociale à une catastrophe. La Soufrière de Guadeloupe en 1976 ». En raison des engagements pris au moment de l'enquête, cette thèse n'a pas été et ne sera pas publiée en l'état.
(8) Raïffa, H., Analyse de la décision. Introduction au choix en avenir incertain (Paris, Dunod, 1973). pp. 215 sq.Google Scholar
(9) Les phénomènes de panique, en tout cas, s'avèrent beaucoup plus rares et localisés qu'on ne le croit généralement. Ils ont été d'abord étudiés par les psychologues, notamment par Wolfenstein, Martha, Disaster : A psychological essay (Glencoe, Ill., Free Press, 1957)Google Scholar, puis par les sociologues américains spécialisés dans l'étude des désastres, à partir de 1960.
(10) Il s'agit des dommages qui pourraient résulter, pour les personnes, non pas du danger qui a justifié la mesure de sécurité, mais de la mise en æuvre de celle-ci. Or 1'expérience montre que les évacuations ne produisent que rarement de tels effets. Ce fut le cas en Guadeloupe, en 1976, où on n'enregistra que quelques accidents sans gravité. Confirmé par Hans, S. M. et Sell, T. C., dans une étude portant sur un nombre important de cas : Evacuations Risks. An evaluation (Las Vegas, U.S. Environmental Protection Agency. Office of Radiation Programs. National Environmental Research Center, 1975).Google Scholar
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(12) Sur le marché des valeurs mobilières cotées à la bourse de Paris, une variation de plus de 7% sur la dernière cotation entraîne la suspension momentanée de celle-ci. Il en est de même sur le marché à terme d'instruments financiers (MATIF) pour une variation de plus de deux points. Dans les deux cas, il s'agit de provoquer certaines interventions de nature à assurer la sécurité du marché.
(13) C'est généralement le cas, comme le montrent S. M. Hans et T. C. Sell dans leur étude précitée (note 10).
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(21) De nombreux aspects de cette responsabilité sont examinés, in « Colloque sur les risques naturels et technologiques majeurs : aspects juridiques ». Droit et Ville, no 20 et 21, Revue de l'Institut des études juridiques de l'urbanisme et de la construction [Université des sciences sociales de Toulouse] (Paris, Librairies techniques, 1985).Google Scholar
(22) C'est la phase dite de la recherche du bouc émissaire, décrite notamment par Drabek, T. E. & Quarantelli, E. L., Scapegoats, villains and disasters, Transaction, 4 03 1967.Google Scholar
(23) On suppose ici que ce label est conféré par l'autorité responsable de la gestion de la crise. Mais les experts peuvent également avoir été affectés à la surveillance permanente du risque. Il y a là, parfois, des sources de conflits entre experts concurrents.
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(25) Cette idée paraît partagée en France, bien qu'elle semble en partie illusoire. Voir l'opinion de Gérondeau, M., ancien directeur de la Sécurité civile, in Futuribles [Paris], 11 1979, pp. 92–93.Google Scholar
(26) Lagadec, P., Le défi du risque technologique majeur, Futuribles, 11 1979, p. 14.Google Scholar
(27) Cela résulte de nos entretiens avec le préfet de la Guadeloupe, que nous avions amené à réfléchir sur cette hypothèse et sur d'autres. Voir notre thèse précitée, pp. 469 sq.
(28) Les faits sont relatés par le décideur lui-même, le préfet Monestier, J., in La catastrophe, I'élu et le préfet, sous la direction de G. Gilbert (Grenoble, Presses universitaires, 1990), pp. 76sq.Google Scholar
(29) Sur divers aspects de ce conflit, voir Barrère, M., Imbroglio scientífico-politique à la Soufrière, La Recherche, no 74 (janvier 1977), pp. 102sq.Google Scholar
(30) La gravité des faits n'est connue que parce que les documents en question sont tombés dans le domaine public au terme du délai de trente ans.
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(34) En rappelant que les avis ne se sont pas opposés au moment précis où était prise la décision, H. Tazieff ne se trouvant pas alors sur place.
(35) C'est bien l'ensemble du diagnostic qui fut remis en cause en novembre 1976, pour presque toutes les techniques utilisées, que les initiés soient français ou étrangers. Cela rend cette erreur collective encore plus surprenante.
(36) Samson, G., Histoire du Japon (Paris, Fayard, 1988), p. 69.Google Scholar