S'intéressant au débat public québécois concernant l'affaire du mot en « n », survenue en 2020 à l'Université d'Ottawa, cet article vise à déterminer comment les discours de déni du racisme produits par les membres des groupes dominants se maintiennent au sein de l'espace public, malgré les critiques anti-racistes produites par les membres des groupes dominés. En combinant la théorie critique de la race, la théorie de l'injustice et l'ignorance épistémiques et la théorie des actes de discours, cet article propose une analyse critique du discours médiatique québécois sur l'affaire du mot en « n ». Il retrace ainsi les positions dénonçant l'utilisation du mot en « n » comme une insulte raciale et une manifestation du racisme systémique et celles justifiant la nécessité de protéger la liberté universitaire et la liberté d'expression face à une culture de l'annulation menaçant de les censurer. L'analyse du cas québécois révèle que le déni public du racisme reproduit des injustices herméneutiques à l’égard des critiques anti-racistes, particulièrement celles formulées par les communautés noires, et cela à travers un nouveau mécanisme linguistique que je nomme les « déviations illocutoires ».