Le pastoralisme, activité traditionnelle des peuples turco-mongols de Sibérie et d’Asie centrale, a créé des discontinuités qui ont structuré l’espace apparemment homogène de la steppe. Par leurs parcours de nomadisation stables et réguliers, les éleveurs découpent l’espace en pâtures saisonnières, appréciant la qualité des terres en fonction des besoins du bétail et relativement à une saison donnée. L’analyse du fonctionnement des diverses formes de pastoralisme nomade pratiquées au tournant des XIXe et XXe siècles par les Turkmènes, les Kazakhs, les Kirghizes, les Khakasses, les Bouriates, les Touvas, les Mongols et les Iakoutes permet d’affiner ce modèle et d’identifier plusieurs types de nomadisme, suivant des critères fondés sur le mode de résidence, la forme des parcours, la fréquence et l’amplitude des nomadisations. Interrogeant plusieurs idées reçues, l’auteur montre que, si le bétail est bien le moteur du nomadisme, il n’existe pas de corrélation univoque, synchronique ni diachronique, entre le degré de mobilité des hommes et celui des espèces élevées. Pastoralisme et nomadisme sont deux phénomènes liés, mais ils ne peuvent être confondus.