Published online by Cambridge University Press: 11 October 2017
Dans les écrits narratifs composés au XIIe siècle dans le Nord-Ouest du royaume de France, on voit certains hommes de bonne naissance désignés comme étant des « jeunes », soit individuellement par l'adjectif juvenis, soit collectivement par le substantif juventus. De toute évidence, ces termes sont des qualificatifs précis, utilisés pour marquer l'appartenance à un groupe social particulier. Parfois, ils sont employés à propos de gens d'Église, et notamment pour distinguer une certaine fraction de la communauté monastiqu. Le plus souvent, cependant, ils s'appliquent à des hommes de guerre et servent à les situer dans une étape bien déterminée de leur existence.
page 835 note 1. Je les utilise dans une enquête générale sur la famille aristocratique aux temps féodaux dont la note ici publiée expose quelques points de vue préliminaires.
page 836 note 2. Ainsi, par Orderic Vital, Historia ecclesiastica (H. E.), éd. Leprévost et Delisle, S. H. F., 3, tome II, p. 47, p. 94. Pour l'exploitation des livres III-VII de l'H. E., mes remarques s'appuient sur l'étude inédite de J. Paul, « La famille et les problèmes familiaux en Normandie au XIe siècle d'après VHistoria ecclesiastica d'Orderic Vital », Des, Aix, 1960.
page 836 note 3. H. E., 8 : Robert de Rhuoddan, désigné comme puer jusqu'à ce qu'il soit miles. D'Akbois De Jubainville, Histoire des comtes de Champagne, VII, I. 70 : Baudouin VI, fils du comte de Hainaut, « juvenis etiam miles ».
page 836 note 1. H. E., 4 (II, p. 219) : Richard, fils de Hugues de Chester, «juvenis adhuc liberisque carens » ; H. E., 3 (II, p. 25) : Ernauld de Montreuil, qui en mourant laisse un fils, est appelé vir.
page 836 note 2. Pour exprimer cette notion, « bachelier » semble bien, dans la langue romane, l'équivalent exact de juvenis. L'Histoire de Guillaume le Maréchal (G. M.), éd. P. Meyer, S. H. F., v. 1477 ; Charroi de Nîmes, v. 23-25 ; Chanson de Roland, v. 3018-1020.
page 836 note 3. G. M., v. 1895 ; 1901.
page 837 note 1. « Errer ». G. M., v. 2399, 2444. G. M., v. 1890 :
Que nus qui velt en pris monter
N'arriéra ja trop long sejor…
… Ains s'esmovit en mainte terre
Por pris e aventure quere
Mais souvent s'en revenait riche…
Lambert D'Ardres, Historia comitum Ghisnensium (H. Gh.), 91 : « torniamenta frequentendo, multas provincias et multas regiones… circuivit ».
page 837 note 2. Puis mena si très belle vie
Que plosors en orent envie
En torneiemenz e en guerres
E erra par totes les terres. (G. M., v. 754 ; 2997-8).
page 837 note 3. Notons que les jeunes gens de bonne famille, qui n'étaient pas adoubés mais voués à l'étude des lettres, se trouvaient entraînés dans une errance fort semblable, où la dispute scolastique, occasion de prouesses et de prix, jouait le rôle du tournoi. Le comportement du jeune Abélard, le vocabulaire même qu'il emploie, dans les premières pages de YHistoire de ses malheurs, sont sur ce point fort expressifs.
page 837 note 4. Acta sanctorum, 15 août III, p. 232 A.
page 837 note 5. Aspremont, v. 7515-7516. G. M., v. 2427-32, Henri II confie son fils à Guillaume le Maréchal, qui fait en même temps son éducation et le conduit où il y a des tournois ; G. M., 1959-1967 ; H. Gh., 92.
page 837 note 6. A propos du fils de Guillaume le Maréchal et du comte de Salisbury, G. M. 15884.
page 838 note 1. H. Gh., 91.
page 838 note 2. Le jeune Henri d'Angleterre a su « retenir » les jeunes gens ; à son exemple, les hauts hommes distribuent aux jeunes armes et deniers, G. M. 2673-75, 2679-85.
page 838 note 3. H. E., 5 (II p. 381), 7 (III, p. 190).
page 838 note 4. H. E., 6 (III, p. 4).
page 838 note 5. H. Gh., 92.
page 838 note 6. Cf. la familia de Hugues de Chester, H. E. 6 (III p. 4), dont le chef, in militia promptus, in dando prodigus, entretient jongleurs et prostituées.
page 838 note 7. Lorsque Roger et ses compagnons quittent la maisnie de Hugues de Chester pour se convertir, Orderic Vital les montre revenant quasi de flammis Sodomiae. H. E., 6 (III, p. 16). Sur la dépravation des juvenes, voir, entre autres, Guibert De Nohent, De vita sua (éd. Bourgin) I, 15, p. 57 ; III, 19, p. 220.
page 839 note 1. Fragmenta Gaufredi, Analecta Bollandiana, t . L (1932), p. 110.
page 839 note 2. G. M., v. 1897.
page 839 note 3. H. E., 3 (II, p. 54) : le duc de Salerne reçoit en renfort de electis juvenibus Normanniae aliquos.
page 839 note 4. Charroi de Nîmes, v. 641-646.
page 839 note 5. Richard, fils de Guillaume le Conquérant, mort à la chasse, H. E., 5 (II, 391) ; Hugues, fils de Giroie, juventute florens, meurt blessé par un javelot dans un exercice, H. E., 3 (II, 29) ; Ernauld de Montreuil, qui n'est pas un jeune, meurt en luttant contre un juvenis, H. E., 3 (II, p. 25) ; Guillaume de Guines, strenuissimum quidam militem, sed in flore juventutis apud Colvinam mortuum, H. Gh., 72 ; Simon d'Ardres, jam adultum et juvenem mortuum, H. Gh., 134 ; des quinze hommes formant la bande conduite en Pouille par Guillaume Giroie, deux seulement rentrent au pays natal.
page 839 note 6. H. Gh., 122.
page 839 note 7. M. G. H./S. S. XVI, p. 511-512.
page 840 note 1. Henri le Jeune cbien erra an e demi», G. M. 2444; H. Gh., 91. Arnould de Guines multas regiones fere per biennium non omnino sine patri auxilio et patrocinio circuivit.
page 840 note 2. H. Gh., 92.
page 840 note 3. Robert Courte-Heuse, H. E., 5 (II p. 381) ; le fils aîné de Guillaume le Maréchal, accompagné d'un autre jeune, soutient le parti du roi de France que combattait son père, G. M., 15884. Au XIe siècle, le fils de Robert le Pieux, avec une troupe de socii de son âge, ravage les terres paternelles, Raoul Glaber, Historiarum libri quinque, III, 9.
page 840 note 4. H. Gh., 93. Arnould d'Ardres préfère aller en d'autres pays propter torniamentorum studium et gloriam, plutôt que de rester dans le pays où il n'y a pas de guerre ; G. M., 2391 (Henri le jeune) :
En Angleterre sejornèrent
Près d'un an qu'ils ne s'atornèrent
A nule riens fors a pleidier
Ou a bois ou a tornoier
Mais al giemble rei pas ne ploust
Tel sejor, anceis H desplout
ses compaignons ensement
Ennuia molt très durement
Car ester plus lor pleùst
Qu'a sejomez, s'estre pleûst
Quer bien saciez, ce est la somme
Que lonc sejor honist giemble homme
page 841 note 1. G. M., 2404 : Henri II donne congé à son fils de partir ; Guillaume le Maréchal, jeune, demande congé à son père, G. M., 1391-1394.
page 841 note 2. H. E., 5 (II, p. 457), Ansould de Maule, fils aîné, est rappelé de la croisade par son père vieilli ; il revient, se marie et lui succède. Les autres fils sont loin de la maison. V. aussi H. E. 5, II p. 463.
page 841 note 3. H. Gh., 63 ; Annales Cameracenses, M. Gh., S. S. XVI, p. 511-512.
page 841 note 4. Dans les pays du sud-ouest, le vieux seigneur procédait de son vivant à la dispositio de sa succession. V. Historia pontificum et comitum Engolismensium, 26, 31, 36.
page 841 note 5. Historia pontificum et comitum Engolismensium, 30.
page 844 note 1. H. Gh., 122.
page 844 note 2. H. Gh., 96.
page 845 note 1. H. E., 3, 3-18.
page 845 note 2. « Untersuchungen zu Frûhzeit der franzôsischen Fürstentums », dans Die Welt als Geschichte, 1960, p. 116-118.
page 845 note 3. H. Gh., 9-11.
page 846 note 1. Nelli, R., L'erotique des troubadours, Toulouse, 1963, p. 108 et ss.Google Scholar
page 846 note 2. H. Gh., 93.