Published online by Cambridge University Press: 04 May 2017
Peu avant sa mort, survenue en 1910, Louis Bourgault-Ducoudray, professeur d'histoire de la musique au Conservatoire de Paris, reçut un jour la visite d'un invité peu commun. Celui-ci, raconte Bourgault-Ducoudray dans une lettre non datée, était membre de l'Action française, mouvement monarchiste pour lequel le professeur, quoique officiant dans une institution républicaine, éprouvait une sympathie voilée. Le but de cet émissaire singulier ? Consulter le musicien sur un projet de soirée associant littérature et musique, et ce au bénéfice de la ligue nationaliste Si le professeur multiplia d'abord les mises en garde, soulignant les risques de l'entreprise dans une saison déjà largement surchargée et où les nombreuses manifestations se faisaient concurrence, il en vint peu à peu à livrer le fond de sa pensée sur le projet et le principe même du concert mis au service de l'idéologie nationaliste:
Selon moi, l'Action francaise, comme la Patrie francaise, devrait chercher dans Fart et particulièrement dans l'art musical moins un moyen de recette qu'un moyen de propagande par le sentiment. Puisque l'idée de patrie est battue […] il importe de formuler avec toute la puissance qu'il comporte les augures du sentiment national. Je lisais dans le Gaulois, cette définition du nationalisme : le sentiment profond, les traditions, les rêves, les énergies de toute une race. Savez-vous l'unique moyen de formuler cela ? C'est la musique chorale […]. Organisez un culte musical de la patrie et de la tradition franchise et donnez une audition de musique patriotique au Trocadéro […]. Vous affirmerez avec une puissance de rayonnement incomparable l'idée que nous servons.
This article is about the endeavor of both nationalist leagues and other political groups to control the “performative context” of concerts for propagandistic purposes between the Dreyfus Affair and the First World War. As it shows, they already understood basic concepts concerning “performance” that would be articulated only much later by anthropologists and poststructuralist theorists. Primary among these is that performance is a cultural presentation rendered meaningful through context, or that it is “situated” socially, which determines the connotations of what is presented. To aid in the perception of such resonances, a specific performance can be consciously “keyed” to place it within a particular schema of comprehension or “interpretive frame”. Thus political groups, on both Right and Left, in order to communicate their conceptions of French culture, brought politically significant texts, as well as varieties of communal experience, to bear on the artistic statement.
1. Je remercie Michael Strasser d'avoir attiré mon attention sur cette lettre, conservée à la Bibliothèque nationale, Département de la Musique. Le contenu de ce document penche en faveur d'une date antérieure à 1910, après la fondation de l'Action française et la grâce présidentielle accordée à Dreyfus (celuici devait attendre son entière réhabilitation jusqu'en 1906). Louis BourgaultDucoudray, compositeur et historien, avait signé la pétition antidreyfusarde qu'avait fait circuler l'Action française, de même que bon nombre d'autres musiciens, dont Vincent d'Indy, Augusta Holmès, Albert Carré (directeur de l'Opéra Comique), Henri GauthierVillars (Willy de son nom de critique) et Pierre de Bréville. Je tiens à remercier Christophe Charle qui m'a généreusement prêté ses exemplaires photocopiés des pétitions contre Dreyfus.
2. Bibliothèque nationale, Département de la Musique, Lettres autographes, Bourgault Ducoudray.
* (N. d. T.) L'article de Jane F. Fulcher repose sur un champ lexical extrêmement serré dont la traduction ne peut rendre compte que partiellement. Il joue d'abord sur le couple de termes performance/performative, le premier étant d'usage courant en anglais pour désigner tout ce qui relève de la représentation théâtrale, de l'exécution musicale et de la célébration d'une cérémonie ou d'un rite, tandis que le second, d'emploi ordinairement plus technique, renvoie, comme son équivalent français « performatif », à certaines énonciations qui accomplissent ce qu'elles disent (voir cidessous le renvoi aux théories d'Austin). Performance ayant un autre sens en français, nous avons rendu le terme anglais selon les cas par « mise en scène », « exécution (musicale) », ou par le verbe «jouer » tout en réintroduisant parfois le mot dans sa valeur anglaise , et performative tantôt par « d'exécution », tantôt par « performatif ».
La seconde difficulté touche aux termes key et keying. Le premier désigne à la fois l'objet matériel ouvrant une serrure, la tonalité (majeure ou mineure) d'un morceau musical et la légende d'une carte. Si la valeur prédominante est évidemment celle de « tonalité », les deux autres ne sont pas radicalement exclues. Quant au verbe to key, il est d'usage courant dans les situations où l'on adapte un discours à un auditoire, ou bien où l'on harmonise deux coloris. La seule des références théoriques invoquées par l'article qui soit à ce jour disponible en français, à savoir l'ouvrage de Goffman, Erwing, Les cadres de l'expérience, trad. fr. d'I. Joseph et al, Paris, Éditions de Minuit, 1991 Google Scholar, traduit key et keying respectivement par « mode » et « modalisation ». Ces termes ne nous étant pas apparus les plus adéquats pour le présent article, nous avons adopté une solution bâtarde : to key est généralement traduit par « harmoniser », à prendre en son sens technique musical (combiner une mélodie avec d'autres parties ou avec des suites d'accords, ou encore composer un accompagnement pour un chant), keying par « harmonisation », et key par « procédure d'harmonisation », mais nous avons parfois joué sur plusieurs termes, « clé », « tonalité », ou « harmoniques ».
3. Sur le concept de «contexte performatif” (performative context) et d'« harmonisation de l'exécution » (” keying » of performance), voir Bauman, Richard, Story, Performance, and Event : Contextual Studies of Oral Narrative, Cambridge, Cambridge University Press, 1986, pp. 1–10 CrossRefGoogle Scholar ; et, Folklore, Cultural Performance, and Popular Entertainments, R. Bauman (éd.), Oxford, Oxford University Press, 1992, pp. 45-46 ; Erving Goffman, Les cadres de l'expérience, op. cit., p. 19 : «Je soutiens que toute définition de situation est construite sur des schémas d'organisation qui structurent les événements du moins ceux qui ont un caractère social et notre propre engagement subjectif. Le terme de “cadre” désigne ces éléments de base. L'expression “analyse des cadres” est de ce point de vue un mot d'ordre pour l'organisation de l'expérience » ; et, pp. 52-53 : « Le concept central de l'analyse des cadres est celui de mode (key). Par mode, j'entends un ensemble de conventions par lequel une activité donnée, déjà pourvue d'un sens par l'application d'un cadre primaire, se transforme en une autre activité qui prend la première pour modèle mais que les participants considèrent comme sensiblement différente. On peut appeler modalisation (keying) ce processus de transcription. L'analogie avec la pratique musicale est délibérée […] On peut maintenant risquer une définition détaillée de la modalisation : une transformation systématique a lieu sur un matériau signifiant selon un schème d'interprétation sans lequel la modalisation serait dépourvue de signification ».
On trouvera ces concepts utilisés de manière différente et centrée sur le rituel dans Feidman, Martha, « Magic Mirrors and the Séria Stage: Thoughts Toward a Ritual View », Journal of the American Musicological Society, vol. XIVIII/3, automne 1995, pp. 423–483 CrossRefGoogle Scholar.
Sur la « performativité », au sens de la théorie proposée par J. L. Austin des actes de langage (speech acts) qui analyse la différence entre « énonciations constatives » (constative utterances) et « énonciations performatives » (performative utterances), soit entre celles qui disent et celles qui font, voir Kramer, Lawrence, Music and Cultural Practice, 1800-1900, Berkeley, University of California Press, 1990, p. 7 Google Scholar.
4. Sur les incursions de la droite dans le domaine de la culture française, voir Herman LeboviÇS, La « vraie France », les enjeux de l'identité culturelle, trad. fr. G. de Laforcade, Paris, Éditions Belin, 1995. Sur la riposte de la République, voir Mandell, Richard, Paris 1900: The Great World's Fair, Toronto, The University of Toronto Press, 1967 Google Scholar.
5. Les relations entre Ligue de la Patrie française et Ligue de l'Action française sont étudiées en détail dans l'ouvrage de JeanPierre Rioux, Nationalisme et conservatisme. La Ligue de la Patrie française, Paris, Éditions Beauchesne, 1977. Sur les conceptions de Barrés qui considère une nation culturellement unifiée comme l'analogue d'une grande oeuvre d'art, c'estàdire née d'un même « esprit national », voir Caroll, David, French Literary Fascism, Nationalism, AntiSemitism, and the Ideology of Culture, Princeton, Princeton University Press, 1995, pp. 35 Google Scholar et 73. D. Caroll analyse aussi en détail (pp. 16 et 40) l'imbrication étroite entre art et politique dans la pensée de Barrés, à savoir le rôle de l'art dans la « mythologisation de la politique » qui en découle.
6. La Schola Cantorum était à l'origine une société visant à promouvoir la musique religieuse et le chant grégorien en particulier, fondée à l'initiative de Charles Bordes, qui s'assura bientôt la collaboration d'Alexandre Guilmont et de Vincent d'Indy. Elle se mua progressivement en école de musique de plein exercice, se définissant entre autres par opposition aux faiblesses alléguées du Conservatoire national. Au moment où l'affaire Dreyfus bat son plein, elle conjoint opposition au Conservatoire et à la Iip République ellemême, d'Indy devenant son unique directeur en 1903. Pour une histoire complète, sinon objective, de cette institution, voir Vincent D'Indy, La Schola Cantorum en 1925, Paris, Éditions Bloud et Gay, 1927. Entre autres innovations, la Schola introduit dans son programme la symphonie, que le Conservatoire de Paris tenait pour un genre intrinsèquement inférieur et bannissait donc des études. L'enseignement de d'Indy en la matière, qui insiste surtout sur les classiques viennois, fait des symphonies de Beethoven l'exemple le plus élevé de « musique pure ». Son modèle symphonique était donc dérivé de Beethoven même si d'Indy interprétait de manière particulière l'oeuvre du compositeur et les implications historiques de son art. Pour d'Indy, comme pour son professeur Franck, le statut de la symphonie dérive d'un postulat absolument intangible : elle représente le genre suprêmement expressif, capable de communi quer à la fois sentiments et idées. Comme l'a établi Brian Hait, cellesci étaient de nature morale et politique, et la symphonie ressortit donc à un genre : exhortation à la vertu permettant d'améliorer la société (voir Brian Hart, The Symphony in Theory and Practice in France, 19001914, Ph. D., Indiana University, 1994). En effet, là encore, on voit dans la « tradition » un corpus canonique de grandes oeuvres ayant vocation à « enseigner » par les leçons morales et élevées qu'elles ont pour mission de délivrer. Comme d'Indy voyant dans la connaissance de cette « musique pure » pleine d'élévation un préalable nécessaire à l'étude de la musique appliquée aux paroles, celleci, dans sa majeure partie, n'apparaissait qu'à la fin du cursus. C'est donc seulement au terme de leurs études que les élèves de la Schola en arrivaient aux genres essentiels pour le Conservatoire : opéra, oratorio et cantate (voir B. Hart, The Symphony…, op. cit., p. 82). Le Conservatoire devait finalement se ranger à certaines des innovations de la Schola répertoire et pédagogie en les intégrant dans son cursus lorsque Fauré, dont les orientations étaient plus historiques, en eut pris la direction en 1905.
7. Voir Jean Marnold, « Le Conservatoire et la Schola », Mercure de France, 1902, pp. 105-106.
8. Lionel de la Laurencie, « Le mouvement musicographique », Mercure de France, juin 1907, p. 659.
9. Jann Pasler, « Building a Public for Orchestral Music. Les Concerts Colonne », communication dans le cadre des conférences « Concert et Public : mutations de la vie musicale en Europe de 1780 à 1914», Gôttingen, MaxPlank Institut fur Geschichte, 2729 juin 1996. Sur les concerts Wagner donnés par Lamoureux, voir Kahane, Martine et Wilde, Nicole (éds). Wagner et la France, Paris, Herscher, 1983, p. 50 Google Scholar. Sur Colonne et Lamoureux, se reporter à Malherbe, Charles, Trente ans de concerts, 1873-1903, Paris, Kugelmann, 1903 Google Scholar. Sur le patriotisme républicain, on verra Agulhon, Maurice, La République, 1880-1932, vol. 1, Paris, Librairie Hachette, 1990, pp. 13–14 Google Scholar.
10. Comme Annegret Fauser me l'a suggéré, le cercle wagnérien français avait probablement ouvert la voie, ou du moins défriché le terrain, en cherchant à répandre les doctrines et la musique de Wagner par des « lecturesconcerts » données dans des salons privés. Et il est significatif que pour ces premiers concerts, la Schola ait recruté son public au sein de ce groupe qui, outre d'Indy et Debussy, comprenait aussi des sympathisants anarchistes et symbolistes. Les « Orphéons », ces grands choeurs masculins d'ouvriers placés sous le patronage du gouvernement, constituaientils un autre précédent ? Certains l'ont suggéré, mais il faut se souvenir que leurs organisateurs cherchaient à produire un effet sur les exécutants euxmêmes plutôt que sur un public plus large. Sur ces sociétés, voir Jane F. Fulcher, « The Orphéon Societies: “Music for the Workers” in Second Empire France », International Revieu of the Aesthetics and Sociology of Music, vol. X/I, 1979, pp. 47-56.
11. Voir Holquist, Michael et Clark, Katherina, Mikhail Bakhtin: A Biography, Cambridge. Harvard University, 1984, p. 207 Google Scholar.
12. Sur les désillusions des premiers dreyfusards et le déclin de la « mystique républicaine », voir Compagnon, Antoine, La Troisième République des lettres. De Flaubert à Proust, Paris, Éditions du Seuil, 1983, p. 121 Google Scholar. Pour les échos que rencontre le discours de d'Indy dans la presse nationaliste et catholique, voir par exemple Lionel de la Laurencie, « Un musicien de chez nous», L'Occident, 1904, et id., «L'Euvre de Vincent d'Indy», Durendal. Revue catholique d'Art et de Littérature, avril 1902, p. 205.
13. Voir, par exemple, les louanges que, dans son volume de septembre 1908 (p. 257 ss), l'Action française décerne à d'Indy pour ses efforts en faveur du passé musical français. Sur le Cours de composition musicale de d'Indy, on se reportera à la Revue critique des Idées et des Livres, juilletseptembre 1908. Il faut cependant se souvenir, qu'à la différence de la Ligue de la Patrie française, l'Action française est loin d'approuver l'intérêt profond que porte d'Indy à la musique allemande (élément d'une tradition universelle) et particulièrement son insistance sur Wagner.
14. Camille Mauclair, «La Schola Cantorum et l'éducation morale des musiciens», La Revue, août 1901, p. 256.
15. Jean Marnold, «Le Conservatoire et, la Schola», Mercure de France, 1902. pp. 105-106.
16. Sur les mises en garde de Mauclair concernant la Schola, voir son article, « La réaction nationaliste en art et l'importance de l'homme de lettres », Revue mondiale, 15, janvier 1905. pp. 151-174.
17. Vuillermoz, Émile, «Le Dictionnaire», Mercure musical, 1er mars 1906, p. 549 Google Scholar.
18. Dans un article ultérieur paru en 1909 dans le Mercure de France, et polémiquement intitulé « La Schola et le Conservatoire », Vuillermoz devait aller plus loin encore. 11 y accuse expressément la Schola d'incarner l'esprit réactionnaire dans son approche de l'art mais aussi dans ses visées politiques (p. 235). Aux yeux de Vuillermoz, l'enseignement de la Schola est grevé d'« une foule de considérations morales, politiques, religieuses, et sociales du plus fâcheux effet ». Plus précisément encore, il accuse collectivement cette institution d'être ouvertement non seulement nationaliste mais aussi antisémite et idéologiquement antidreyfusarde. Avec une puérile jactance, elle aurait commis l'impardonnable péché de subordonner les questions esthétiques à des préoccupations qui eussent dû demeurer extérieures à la musique (ibid., pp. 240-241). Entre les deux articles de Vuillermoz, Louis Laloy, grand soutien et ami de Debussy avait exprimé une opinion similaire dans les pages de la Grande Revue, puisqu'en 1907, il y avait signé un article sur les « factions » du monde musical français, qui accordait une très large place à la Schola (” Les partis musicaux en France », La Grande Revue, 25 décembre 1907, p. 792). Il fustige le penchant particulier de d'Indy à l'allégorie morale et l'esprit de la Schola en général, qu'il assimile à celui d'une secte. Car tout y prend une allure sacrée, tout y est mystique, et seules les oeuvres qui se plient à son canon rituel méritent louange.
19. Voir Christophe Charle, « La science et les savants : le début de l'âge d'or ? », dans Gervereau, Laurent et Prochasson, Christophe (éds), L'affaire Dreyfus et le tournant du siècle (1894-1910), Paris, Musée d'Histoire contemporaine/Bdic, 1994, pp. 66–71 Google Scholar.
20. Antoine Compagnon, La Troisième République des lettres…, op. cit., pp. 119 et 142.
21. Il y avait déjà longtemps que la Iiie République ellemême voyait dans l'éducation le moyen de produire de bons citoyens, c'estàdire des patriotes à la mode républicaine. Dans le climat de l'après affaire Dreyfus, la « science » et la « vérité » parées de toutes leurs connotations dreyfusardes étaient censées illuminer la nation et lui accorder leur protection : la République mit alors en oeuvre une politique éducative d'inspiration socialiste, dont témoignent les universités populaires, entre autres institutions destinées à répandre l'éducation et la culture chez les ouvriers (voir RebÉRioux, Madeleine, La République radicale ? 1898-1914, Paris, Éditions du Seuil, 1975, p. 37 Google Scholar). Face au défi lancé par la Schola, la République s'efforce désormais aussi d'intégrer la musique dans son système éducatif, à plusieurs niveaux et selon des modalités diverses. Parmi les thèmes qui devaient marquer le discours musical tenu lors de l'Exposition de 1900, l'éducation se taillerait donc une place importante. Certains spécialistes, telle Ellis, Katherine (dans Music Criticism in NineteenthCentury France, Cambridge, Cambridge University Press, 1995 CrossRefGoogle Scholar), affirment qu'il existait un corpus canonique en France dès le milieu du 19e siècle. Il faut cependant prendre garde que ce canon était le fait d'un petit groupe de savants et de critiques et que, bien que la Société des Concerts du Conservatoire en fît exécuter certaines pièces dans la salle du Conservatoire, ce canon ne bénéficiait d'aucune reconnaissance institutionnelle au sein de celuici.
22. Pour la liste complète des membres de la commission, voir le compte rendu d'Alfred Bruneau, « La musique française », article signé par un ancien membre de la commission. dans la Revue d'Histoire et de Critique musicale, mars 1901, pp. 110-111. Sur la collaboration de A. Bruneau avec Zola, et sur la manière dont il fut amené à intervenir dans l'Affaire, voir, du même, « Souvenirs », Revue internationale de Musique française, vol. 7, février 1889, pp. 882, et A l'ombre d'un grand coeur, Paris, Charpentier, 1932. En raison de son rôle dans l'affaire Dreyfus, Bruneau jouissait d'un prestige public peutêtre exagéré, et il devait continuer d'en tirer profit fort longtemps encore : chevalier de la Légion d'Honneur en 1895, il est promu en 1904 au rang prestigieux d'officier; en 1911 c'est grâce aux relations nouées avec Clemenceau pendant l'Affaire, qu'il est, racontetil dans ses mémoires. nommé Inspecteur général des BeauxArts. Les bénéfices de l'Affaire ne devaient pas s'arrêter là puisqu'en 1919, Bruneau est promu commandant de la Légion d'Honneur et élu en 1925 à l'Académie des beauxarts.
23. Sur la notion de « fiction clé » (master fiction), voir Wilentz, Sean (éd.), Rites of Power: Symbolism, Ritual, and Politics Since the Middle Ages, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 1985, p. 3 Google Scholar. En 1900, WaldeckRousseau annonce explicitement que la nation est à la veille « d'une bataille décisive visant à arracher à la réaction son arme favorite» (voir R. Mandell, Paris 1900…, op. cit., p; 103). Il entreprend sur le champ de réduire le pouvoir de ceux qui avaient été au sein de l'Église ses adversaires les plus virulents du temps de l'affaire Dreyfus, à savoir les membres de la congrégation des assomptionnistes ; et pour des raisons d'opportunité politique, sitôt refermées les portes de l'Exposition, on assiste au début d'une campagne anticléricale encore plus massive et virulente.
24. Voir Jackson, Julian, The Popular Front in France: Defending Democracy, Cambridge, Cambridge University Press, 1988, p. 2 Google Scholar.
25. Voir Anderson, R. D., France, 1870-1914, Londres, Routledge et Kegan Paul, 1977, p. 89 Google Scholar.
26. Touchard, Jean, La gauche en France depuis 1900, Paris, Editions du Seuil, 1968, p. 28 Google Scholar, et R. D. Anderson, France…, op. cit., p. 3.
27. Bruneau, Alfred, La musique, française. Rapport sur la musique en France du XII au XXe siècle. La musique à Paris en 1900 au théâtre, au concert, à l'Exposition, Paris, Charpentier, 1901, p. 73 Google Scholar.
28. Bruneau avait joué un rôle essentiel dans les dispositifs encadrant la première représentation de la Louise de Charpentier à l'Opéra Comique, au moment où se déroulait l'Exposition universelle. Dans son Rapport sur l'Exposition, il présente Louise comme l'apogée de la « Tradition française » du « réel » et du « populaire ». Dans son livre Musiques d'hier et de demain (Paris, Bibliothèque Charpentier, 1900), il avait déjà préparé son effet en portant aux nues le « Couronnement de la Muse » du même Charpentier, une « fête » qui fut ensuite incorporée dans Louise. Aux yeux de Bruneau, l'oeuvre unit la poésie de l'art, du travail, des foules en liesse, le tout n'étant rien moins qu'« un réveil heureux de l'esprit national ». Un esprit national bien entendu aux antipodes de celui que vantait à cor et cri la droite antidreyfusarde. C'est un savant plus respecté et sans doute plus exigeant qui prend le relais dans la diffusion de ces idées, celuilà même qui devait devenir une figure de premier plan dans l'institution musicale universitaire, Maurice Emmanuel. Dans l'un de ses articles, intitulé « La vie réelle en musique » et paru le 15 juin 1900 dans la Revue de Paris (pp. 841-883), organe politiquement conservateur mais sans oeillères, il centre son propos sur la manière dont Charpentier évite le mystère (au sens médiéval du terme), la légende (de connotation germanique), les mensonges et les conventions, inaugurant ainsi une « musique démocratique ». Tout comme Bruneau, Emmanuel essaie de fonder l'esthétique de Charpentier sur des valeurs ancrées dans le passé français, à ceci près qu'il fait surtout appel à la Révolution, la référence capitale pour les dreyfusards, et à l'Exposition. Aussi, à propos de la « fête » de Charpentier, renvoietil à une récente publication de Constant Pierre, conservateur de la Bibliothèque du Conservatoire, Musique des fêtes et cérémonies de la Révolution française (éditée par l'Imprimerie nationale en 1899). Pour Emmanuel, Louise comme les oeuvres de la Révolution propose un message de nature morale, qui met en garde contre les capacités de destruction du plaisir purement sensuel. Sur les motivations complexes de l'oeuvre de Charpentier, et les « distorsions » de lecture suscitées par cet encadrement de textes, voir Jane F. Fulcher, « Charpentier Operatic “Roman musical” as Read in the Wake of the Dreyfus Affair », NineteenthCentury Music, vol. Xvi/2, automne 1992, pp. 161-180.
29. En 1848 et en 1870, au concert ou à l'Opéra, on vit souvent le drapeau tricolore figurer sur la scène, pour associer, de la manière sans doute la plus élémentaire, la patrie avec l'oeuvre que l'on jouait. L'innovation de la nouvelle droite nationaliste réside dans une version plus ritualiste de ces associations avec la nation. Sur les théories de Victor Turner concernant la conception transformationnelle (tranformative) du rituel, voir C. Alexander, Bobby, Victor Turner. Ritual as Social Change, Atlanta, Géorgie, Scholars's Press, 1991, pp. 16–17 Google Scholar.
30. Au nombre des titulaires de la chaire d'histoire de la musique à la Schola, on trouve André Pirro, spécialiste de Bach, et Michel Brênet (pseudonyme de Marie Bobilier), qui faisait autorité pour la musique d'Ancien Régime.
31. Voir Michel BrÊnet, « La musicologie », dans Masson, PaulMarie (éd.), Rapport sur la musique française contemporaine, Paris, Armand et Stein, 1913, pp. 18–19 Google Scholar. Sur le Collège de France, voir Christophe Charle, « Le Collège de France », dans Nora, Pierre (éd.), Les lieux de mémoire, II, La nation, Paris, Éditions Gallimard, 1986, pp. 389–390 Google Scholar et 398. Combarieu avait été l'un des organisateurs du Congrès d'histoire musicale de 1900, qui se tint à Paris en même temps que l'Exposition universelle.
32. Jules Combarieu, « L'organisation des études d'histoire en France dans la seconde moitié du XIXe siècle », Revue musicale, 1906, p. 502.
33. Ibid.
34. La conception que propose Combarieu du sentiment national apparaît dans une autre de ses conférences sur l'histoire de la musique, qui parut dans un numéro ultérieur de la Revue musicale. Voir Jules Combarieu, « Comment la musique s'estelle formée ? », Revue musicale, 1910, pp. 488-496. Article lui aussi férocement antischoliste, qui rappelle par moment le rapport de Bruneau, l'un et l'autre voyant dans la « chanson populaire » l'origine de la musique française.
35. Prochasson, Christophe, « Sur l'environnement intellectuel de Georges Sorel : l'École des Hautes Études Sociales (1899-1911)», Cahiers Georges Sorel, 3, 1985, p. 17 CrossRefGoogle Scholar.
36. lbid.
37. Ibid., pp. 17-20.
38. Au printemps 1902, dans le cadre de cette institution, il avait donné une série de conférences où il mettait en valeur la période révolutionnaire et sa musique. Voir Fisher, James, Romain Rolland and the Politics of Intellectual Engagement, Berkeley, University of California Press, 1988, p. 93 Google Scholar.
39. C. Prochasson, « Sur l'environnement intellectuel… », art. cité, pp. 28-29 ; voir aussi Rolland, Romain, « Musique », dans L'École des Hautes Études Sociales 1900-1910, Paris, Félix Alcan, 1911, pp. 69-70 Google Scholar. Comme le souligne Rolland, l'institution dispensait aussi bien des cours réguliers qui se poursuivaient d'une année sur l'autre que des conférences ponctuelles sur tel ou tel sujet.
40. Théodore Reinach et Louis Laloy donnent des conférences consacrées à la musique grecque et, pour le second, au chant grégorien ; A. Gastoué et Pierre Aubry traitent de la musique médiévale, Henri Expert et Michel Brênet de celle de la Renaissance ; quant au 17e, c'est le domaine d'Henri Quittard, Lionel de la Laurencie, Henri Prunières, PaulMarie Masson, André Pirro et Romain Rolland ; le siècle suivant revient à Pirro, Rolland, Charles Malherbes, Julien Tiersot, PaulMarie Masson et Frédéric Hellouin ; et le 19e, à Tiersot, Malherbes, d'Indy (sur Franck), Paul Landormy, Jean Chantavoine, Henri Lichtenberger, Lionel Dauriac (sur Wagner), Romain Rolland, et Calvocoressi (sur la musique russe). Par ailleurs, Julien Tersot aborde la chanson populaire, Maurice Emmanuel la musique tonale classique : fugue, sonate, symphonie, Frédéric Hellouin les nationalités musicales et la critique musicale. Ce dernier ensemble de conférences est ultérieurement publié sous le titre d'Essai de critique de la critique musicale (Paris, A. Joanin et Cie, 1906). D'autres cycles sont consacrés à la musique non occidentale, ou encore à « Esthétique et technique musicale » (cellesci avecla participation de d'Indy).
41. Sur le salon, voir C. Prochasson, « Sur l'environnement intellectuel… », art. cité, pp. 26-28.
42. Pour la liste complète des concerts donnés dans ce cadre, voir R. Rolland, « Musique », art. cité, pp. 77-78.
43. Depuis l'époque de l'affaire Dreyfus, d'Indy dénonçait sans relâche tous les établissements éducatifs publics, et en particulier ceux qui se consacraient à la musique, puisque c'étaient eux qui faisaient office d'instances de légitimation dans le monde de la musique.
44. L'École devait continuer de jouer un rôle de premier plan dans le monde musical, même après le départ de Romain Rolland. Son école de musique devait avoir à sa tête le savant plutôt versatile Louis Laloy. Sa relation étroite avec Debussy dont il avait guidé l'évolution intellectuelle explique sans doute largement la participation de celuici aux activités de l'institution. Durant la première guerre, d'autres compositeurs continuèrent de prendre part aux conférences. C'est là par exemple que Milhaud donna pendant le conflit sa conférence à la mémoire d'Albéric Magnard.
45. R. Rolland, « Musique », art. cité, pp. 7576.
46. Voir Jane F. Fulcher, « D'Indy's “Drame antijuif and its Meaning in Paris, 1920 », The Cambridge Opéra Journal, novembre 1990, pp. 295-319. Sur la symphonie n° 2 du même compositeur, se reporter à B. Hart, The Symphony…, op. cit., pp. 82-103 et 433-434, ainsi qu'à Castera, René de, «La symphonie en si bémol de M. Vincent d'Indy », L'Occident, mars 1904, pp. 174–175 Google Scholar.
47. Voir Jane F. Fulcher, « Charpentier's Operatic “Roman Musical”, as Read in the Wake of the Dreyfus Affair », art. cité.
48. Le cas de Magnard ainsi que celui d'autres compositeurs qui s'engagèrent dans la bataille culturelle et politique de cette période est abordé dans les chapitres 2 et 4 de mon livre, Fulcher, Jane F., French Cultural Politics and Musical Aesthetics front the Dreyfus Affair to the First World War, New York, Oxford University Press Google Scholar (à paraître).
49. Ibid. Voir en particulier, dans le chapitre 4, l'étude consacrée à l'« Hommage à Rameau » de Debussy (premier volume de ses Images pour piano), ses trois Chansons de Charles d'Orléans, ainsi que ses Images pour orchestre ; elle porte aussi sur quelques oeuvres de Satie, les Préludes flasques (pour un chien) et les Véritables préludes flasques.
50. On voit par exemple L'effort prendre le contrepied de l'interprétation de Beethoven par d'Indy, entre autres dans un article intitulé « Un poète », paru le 10 novembre 1910, qui révèle un impact particulièrement net des conceptions de Romain Rolland. Par ailleurs, tout comme Bruneau, le journal considère en général que l'art, le grand autant que le populaire, pouvait demeurer « proche de la vie », sans abandonner sa vocation à l'éducation et à l'élévation des âmes.
51. Le 16 janvier 1913, le quotidien socialiste l'Humanité se fait l'écho de la nouvelle tentative au Théâtre des Arts de Jacques Rouché, futur directeur de l'Opéra. L'article faisait l'éloge de ces concerts illustrés, où l'on voyait des musiciens en costume d'époque interpréter des oeuvres du passé, tout en suggérant des relations entre passé et présent (l'une de celles qu'évoquait le journal avait tenté de donner un échantillon du corpus français en juxtaposant des extraits de Lully et Fauré). Technique ingénieuse qui suscitait l'approbation de l'Humanité, et dans laquelle elle voyait une tentative qui, allant audelà de la simple assimilation par le peuple de la culture bourgeoise, visait à donner à celuici une connaissance du patrimoine national, lui conférant ainsi conscience et donc pouvoir. Loin de s'intéresser au seul « grand art » le journal assurait aussi la promotion d'un art plus populaire, qui donnait à entendre la poésie et la musique issues des diverses provinces françaises, donnant ainsi aux ouvriers accès au folklore français, et contrant ainsi l'association de celuici aux seules couches paysannes que proposait l'extrême droite. La gauche, autant que la droite, organisait aussi des concerts à valeur pratique et politique. Ainsi par exemple du concert vocal, annoncé par l'Humanité le 12 janvier 1913, qui était organisé par la Chambre syndicale des coiffeurs de Paris et présentait de véritables artistes de tous genres.
52. Voir MarguÉRite, Jean, Les fêtes du peuple : l'oeuvre, les moyens, le but, Paris, Les Fêtes du peuple, 1921 Google Scholar.
53. Sur Doyen, Albert, voir Prochasson, Christophe et Rasmussen, Anne, Au nom de la Patrie : les intellectuels et la première guerre mondiale (1910-1919), Paris, Éditions de la Découverte, 1996, pp. 51–52 Google Scholar, 149, 234, et 278. C. Prochasson situe Doyen du côté du milieu de Créteil avant la guerre, au sein donc d'une mouvance qui comprend socialistes, « vitalistes » et syndicalistes révolutionnaires.
54. Pour la fête selon Rolland, Romain, se reporter à son Théâtre de la Révolution, Paris, Éditions Albin Michel, 1972 Google Scholar. Bien qu'il s'en inspirât, les conceptions de Doyen concernant le théâtre populaire puisaient aussi à un autre fonds, lié à d'Indy et à la Schola Cantorum. En effet, bien que de nature nouvelle, les fêtes, telles qu'il les concevait, recouraient aux légendes traditionnelles ou à des mystères médiévaux, rappelant en cela la Légende de saint Christophe, l'opéra de d'Indy. Quant à l'aspect visuel, il devait reposer sur des lignes simples et décoratives, mais, comme dans la Louise de Charpentier, avec des costumes modernes. Et, comme dans certains passages de cet auteur, il fallait que l'action adoptât le modèle wagnérien, « tout intérieur et symphonique ».
55. La manière dont nous articulons herméneutique et cadrage s'inspire des analyses de Lawrence Kramer concernant la fenêtre herméneutique dans Music and Cultural Practice…. op. cit., pp. 5-6.
56. Pour une liste complète des programmes joués lors des fêtes du peuple, voir Jean MarguÉRite, Les fêtes du Peuple, op. cit., p. 4. Au programme d'autres célébrations figurent des lectures de Maupassant et Vallès, un trio de Beethoven, un fragment du Triomphe de la liberté de Doyen, ainsi que l'« Hymne à la paix », inspiré du largo du Xerxès de Haendel.
57. Bien que le livret de Wagner ait incontestablement fait l'objet d'une traduction en français, il est probable que l'auditoire n'en pouvait comprendre les paroles.
58. Sur le continuum qui va de l'efficacité au divertissement, voir Schechner, Richard, Essays on Performance Theory, 1970-1976, New York, Drama Book Specialist, 1977, p. 75 Google Scholar.
59. Le terme de « performance culturelle » (cultural performance) est employé ici au sens que lui donne Gérard Béhague (citant Milton Singer) dans Richard Bauman (éd.), Folklore, Cultural Performance, and Popular Entertainments, op. cit., p. 174 : « Segments d'activités dans lesquels les membres d'un groupe social donné voient un résumé de leur culture et qu'ils peuvent exposer à des visiteurs aussi bien qu'à euxmêmes ».
60. Sur l'« invention de la tradition” en France pendant la première guerre mondiale, au sens consacré par la collection que dirigent Hobsbawm, Éric et Ranger, Terrence, The Invention of Tradition, Cambridge, Cambridge University Press, 1983 Google Scholar, voir Ekstein, Modris, Le sacre du printemps : la Grande Guerre et la naissance de la modernité, trad. frse M. Leroy Battistelli, Paris, Éditions Pion, 1991 Google Scholar.
61. Gérard Béhague analyse la notion d'«ethos» lié à une «“performance” culturelle” dans R. Bauman (éd.), Folklore, Cultural Performance, and Popular Entertainment s, op. cit., p. 177.
62. Johnson, James, Listening in Paris: A Cultural History, Los Angeles, University of California Press, 1995 Google Scholar. Sur la performance comme processus, voir Turner, Victor, The Anthropology of Performance, New York, Paj Publications, 1986, p. 78 Google Scholar.
63. Sur la notion de fenêtre herméneutique, voir cidessus L. Kramer, Music and Cultural …, op. cit., p. 5. Cet ouvrage insiste aussi sur l'élément dynamique dans la production du sens, par opposition aux « structures cognitives » (cognitive structures) qui définissent la conception de James Johnson. Pour l'importance des supports matériels et des conditions d'accès au sein de l'histoire de la lecture, la référence est ici à Chartier, Roger, par exemple dans Forms and Meanings. Texts, Performances and Audiences from Codex to Computer, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 1995 Google Scholar.
64. Pour une analyse de la musique populaire, dont la dimension de phénomène culturel exige la prise en compte du contexte, voir Tagg, Philip, « Musicology and the Semiotics of Popular Music », Semiotica, 66, 1987, pp. 279–298 Google Scholar.
65. Ce sont sans doute les textes d'Adorno qui incarnent le mieux la position essentialiste sur cette question. Celuici pose en effet une relation absolue entre style et idéologie. Sur le processus de transposition d'un cadre de signification à un autre schéma d'interprétation, voir E. Goffman, Les cadres de l'expérience, op. cit., pp. 53-54.
66. C'est à Roger Charrier et Jacques Revel que l'on doit le développement du concept d'appropriation dans le cadre de l'histoire culturelle. Voir entre autres Chartier, Roger, Les usages de l'imprimé (XVe-XIXe siècle), Paris, Fayard, 1987 Google Scholar.
67. Sur la culture politique et ses composantes, voir Serge Bernstein, « La culture politique », dans JeanPierre Rioux et JeanFrançois Sirinelli (éds), Pour une histoire culturelle, Paris, Éditions du Seuil, 1997, pp. 371-386, ainsi que JeanFrançois Sirinelli et Éric Vignes, « Introduction : des cultures politiques », dans Sirinelli, JeanFrançois (éd.), Histoire des droites en France, vol. II, Cultures, Paris, Éditions Gallimard, 1992, pp. 1–11 Google Scholar.