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Observer, vénérer, servir. Une polémique jésuite autour du Tribunaldes mathématiques de Pékin

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Antonella Romano*
Affiliation:
CNRS

Résumé

Le « Traité sur la préfecture des mathématiques qui est administrée, sur ordre du Roi des Chinois, par le P. Ioannes Adam, profès des quatre voeux de la Société de Jésus » est l’une des principales pièces du dossier « Schall », conservé dans les archives de la Compagnie de Jésus à Rome. Ce mémoire, rédigé en 1649 par le missionnaire portugais de la Compagnie, Gabriel de Magalhães, entend dénoncer l’entrée en fonction d’Adam Schall von Bell, dans l’administration impériale chinoise : la prise en charge du Tribunal des mathématiques, en cautionnant des pratiques superstitieuses et condamnées par le droit canon, est incompatible avec la mission et l’évangélisation de la Chine. La dénonciation de Magalhães ouvre, dans la province jésuite de Chine, une crise de plus de trente ans, que l’histoire de la Compagnie comme l’histoire des sciences européennes en Chine n’ont pas prise en compte jusqu’à ce jour. À examiner de près ce document, on pourra, d’une part, reprendre à nouveaux frais la question de la place des sciences dans l’espace de la mission, manière aussi de nourrir d’autres réflexions sur l’identité jésuite ou l’activité missionnaire. On pourra, d’autre part, interroger une documentation occidentale qui, par-delà l’incompréhension qu’elle révèle des autres mondes, n’en fournit pas moins des descriptions précises et encore peu étudiées par les historiens des sciences. C’est notamment le cas ici de l’organigramme du Tribunal des mathématiques, donné par Magalhães à la fin de son mémoire.

Abstract

Abstract

The “Treatise on the Prefecture of Mathematics, which is managed, by order of the King of the Chinese, by F. Ioannes Adam, professed of the four vows of the Society of Jesus” is one of the main documents in the “Schall file” preserved at the Roman Archive of the Society of Jesus. This memorial, written in 1649 by the Portuguese Jesuit Gabriel de Magalhães, was intended to denounce Adam Schall von Bell’s taking up office in the Chinese civil service : taking charge of the “Court of Mathematics”, which amounted to backing superstitious practices that were condemned by canon law, was incompatible with the task of mission and with the evangelization of China. In the Chinese province of the Society of Jesus, Magalhães’ denunciation opened a crisis that was to last for more than thirty years; this crisis has hitherto been taken into account neither by historians of the Society of Jesus nor by historians of European science in China. Close examination of this document enables one to reconsider the issue of the role of the sciences in the missionary field, which leads to a reconsideration of Jesuit identity and missionary activity. Such Western materials, although they reveal their authors’ deep incomprehension of other worlds, nonetheless provide detailed descriptions that still await study by historians of science. This is the case, in particular, of the organisation chart of the “Court of Mathematics” appended by Magalhães to his memorial.

Type
Science et religion en Chine
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2004

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References

Ce texte n’aurait jamais existé sans le projet de recherche auquel Catherine Jami a cru possible de m’associer. Je la remercie, ainsi que Nicolas Standaert, Frédéric Obringer, Georges Métailié, Ad Dudink, Jacques Proust, Irène Passeron et Pierre-Antoine Fabre pour leur lecture critique. Un dernier remerciement à Julien Dubouloz pour ses compétences de latiniste.

1 - Ce terme reprend, en traduction, celui qui est mobilisé dans les sources sur lesquelles s’appuie cette analyse (voir infra), et tout particulièrement sur le manuscrit qui nourrit cette étude : « Tribunal mathematicarum », dont la translittération du chinois par son auteur, Gabriel de Magalhães, est la suivante : Kin tien xien (Qintianjian ). On analysera longuement ce vocabulaire, ainsi que la fonction qui y correspond. Je conserverai cette terminologie, en rappelant que d’autres traductions sont en usage parmi les historiens des sciences, notamment celles de « Bureau impérial d’astronomie » et de « Tribunal impérial d’astronomie ».

2 - Peterson, Willard J., « Calendar reform prior to the arrival of missionaries at the Ming court », Ming studies, 21, 1968, pp. 4561 Google Scholar.

3 - Sur les conflits entre les jésuites et les astronomes musulmans, qui constituaient l’une des sections du Tribunal depuis la dynastie Yuan (1279-1368), voir Yilong, Huang, « Qingchu tianzhujiao yu huijiao tianwenjia jian de zhengdou » (Les conflits entre astronomes chrétiens et musulmans au début de la dynastie Qing), Jiuzhou xuekan, 5, 3, 1993, pp. 4769 Google Scholar.

4 - Sur le croisement de cultures que produisit cette rencontre, voir Jami, Catherine, Engelfriet, Peter et Blue, Gregory (dir.), Statecraft and intellectual renewal in late Ming China. The cross-cultural synthesis of Xu Guangqi (1562-1633), Leyde, E. J. Brill, 2001 Google Scholar. Il ne faut cependant pas perdre de vue que d’autres jésuites réalisaient dans le même temps un important travail d’évangélisation dans les campagnes. Voir Standaert, Nicolas (éd.), Handbook of christianity in China, vol. 1, Leyde, E. J. Brill, 2001, pp. 380456 Google Scholar [dorénavant Handbook].

5 - D’Elia, Pasquale M., Fonti ricciane. Storia, Rome, La libreria dello stato, 3 vols, 19421949 Google Scholar ; Handbook, op. cit., pp. 180-181.

6 - Voir sur ce point Handbook, pp. 665-667.

7 - De Christiana Expeditione apud China, Augsbourg, Mangium, 1615. On pourra consulter, pour une édition moderne en français, Trigault, Nicolas, Histoire de l’expédition chrétienne au royaume de la Chine, Paris, Desclée de Brouwer, 1978 Google Scholar, dont Joseph Shih commente les changements introduits par N. Trigault. Voir en outre Fezzi, Luca, « Osservazioni sul De christiana expeditione apud Sinas suscepta ab Societate Iesu di Nicolas Trigault », Rivista di storia e letteratura religiosa, 34, 3, 1999, pp. 541566 Google Scholar.

8 - N. TRIGAULT, Histoire de l’expédition chrétienne…, op. cit., Livre Premier, chap. V, pp. 95-96.

9 - Ibid. ; il s’agit du chapitre IX de cette première partie descriptive, p. 150 sq.

10 - « […] Mais rien ne fut si agréable [au président de la Cour des cérémonies] que les propos mis en avant touchant la mathématique, de laquelle, au rapport de la renommée, il avait déjà à Pequin entendu beaucoup de choses. Il promit donc que, quand il reviendrait de son pays à la cour, il mènerait le Père Matthieu [Ricci] avec soi dans la ville royale, afin qu’il corrigeât les fautes des calendriers chinois, qu’eux-mêmes ne niaient pas, en quoi il se pourrait acquérir une grande réputation, pour se rendre l’auteur d’une chose si importante […] » (ibid., p. 333).

11 - Ibid., pp. 408-415.

12 - Ibid., p. 408. Sur « la nouveauté des sciences d’Europe », voir Needham, Joseph, « Chinese astronomy and the Jesuit mission: an encounter of cultures », repris dans Storey, William Kelleher (dir.), Scientific aspects of European expansion, Aldershot, Variorum, 1996, pp. 283302 Google Scholar.

13 - Pour une vue plus détaillée, on renverra aux remarquables synthèses du Handbook, pp. 438-451, 711-737, 689-710 ; Hashimoto, Keizō, Hsü Kuang-ch’i and astronomical reform: the process of the Chinese acceptance of Western astronomy, 1629-1635, Osaka, Kansai University Press, 1988 Google Scholar.

14 - Landry-Deron, Isabelle, La preuve par la Chine. La « Description » de J. B. Du Halde, jésuite, 1735, Paris, Éditions de l’EHESS, 2002 Google Scholar.

15 - Voir CATHERINE JAMI, Handbook, p. 662. Les conditions politiques précises dans lesquelles se trouvent les jésuites de Chine contribuent notablement à définir leur apostolat : avec les autres missionnaires présents dans la zone à partir des années 1620, ils sont les seuls représentants du monde européen et, à ce titre, ne participent pas de l’entreprise de colonisation mise en oeuvre par les puissances européennes. Ce qui signifie, concrètement, qu’une grande partie des activités et ministères qu’ils exercent dans les espaces américains, dans les villes coloniales notamment, ne leur incombe pas. Il serait aussi intéressant de comparer les stratégies missionnaires en Chine et en Inde, où il semble bien aussi que la demande de mathématiciens ait été formulée par les hommes de terrain. Voir LUÍSMIGUEL CAROLINO, « Lux ex Occidente. Un regard européen sur l’Inde au XVIIe siècle. Athanase Kircher et les récits des missionnaires jésuites sur science et religion indiennes », Archives internationales d’histoire des sciences, 52, 148, 2002, pp. 102-121.

16 - Les travaux en cours sur l’histoire de la mission permettent de construire ces nouveaux objets, à partir notamment d’une confrontation des expériences missionnaires internes et externes, et à l’aune de sources aussi riches que les Indipetae (PIERREANTOINE FABRE et BERNARD VINCENT (dir.), Histoire culturelle et histoire sociale : les missions religieuses dans le monde ibérique, à paraître. Il reste à présent à établir la jonction entre cette historiographie et celle des sciences : voir Romano, Antonella, « Science et mission : le cas jésuite », Archives internationales d’histoire des sciences, 52, 148, 2002, pp. 69226 Google Scholar, pour un premier dossier qui va dans cette direction.

17 - Rome, Archivum Romanum Societatis Iesu [ARSI], Jap./Sin. 142 et 143.

18 - S’il est difficile de savoir à quand remonte le classement actuel de ces dossiers, on peut cependant formuler l’hypothèse qu’il constitue un héritage de l’ancienne Compagnie, ce qui tendrait à confirmer l’hypothèse d’une claire conscience, par le centre romain, de l’importance de « l’affaire ».

19 - Väth, Alfons, Johann Adam Schall von Bell s. j. Missionar in China, Kaiserlicher Astronom und Ratgeber am Hofe von Peking, Nettetal, Steyler Verlag, [1933] 1991, pp. 267294 Google Scholar.

20 - Malek, Roman (dir.), Western learning and christianity in China. The contribution and impact of Johann Adam Schall von Bell, s. j. (1592-1666), Nettetal, Steyler Verlag, 1998 Google Scholar.

21 - Sur la querelle ouverte par Yang Guangxian, voir Yi-Long, Huang, « Court divination and christianity in the K’ang-Hsi era », Chinese science, 10, 1991, pp. 120 Google Scholar ; sur la controverse ouverte à l’intérieure de la Compagnie, ID., « L’attitude des missionnaires jésuites face à l’astrologie et à la divination chinoises », in C. JAMI et H. DELAHAYE (dir.), L’Europe en Chine. Interactions scientifiques, religieuses et culturelles aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Collège de France/Institut des hautes études chinoises, 1993, pp. 87-108 ; voir surtout Chu, Pingyi, « Scientific dispute in the imperial court: the 1664 calendar case », Chinese science, 14, 1997, pp. 734 Google Scholar.

22 - Le changement de dynastie s’est accompagné d’un long processus d’inscription des Mandchous dans la tradition culturelle chinoise, opéré par le jeune empereur Kangxi au cours de son long règne (1662-1722). Voir, dans ce même numéro, la contribution de CATHERINE JAMI, « Légitimité dynastique et reconstruction des sciences. Mei Wending (1633-1721) », pp. 701-727 ; ID., « Imperial control and Western learning: the Kangxi Emperor ’ s performance », Late imperial China, 23, 1, 2002, pp. 28-49. En suivant ses analyses, on insistera sur l’utilisation des jésuites par Kangxi, comme élément de permanence et comme facteur de légitimation de sa propre politique.

23 - Le premier document collationné dans le dossier remonte à 1634, ff. 4r.-9v. C’est une lettre adressée par Adam Schall à Théodore Busée, le supérieur de Germanie, datée de Pékin, le 15 septembre 1634. Schall y informe son supérieur des débats théologiques dont il est témoin, ainsi que de l’avancée de la réforme du calendrier, raison de sa présence à Pékin depuis 1630, date de la mort de Johannes Schreck.

24 - Une présentation d’ensemble de ces documents et de ces personnages est proposée par Pih, Irène, Le Père Gabriel Magalhães. Un jésuite portugais en Chine au XVIIe siècle, Lisbonne, Fundação Calouste Gulbenkian/Centro Cultural Português, 1979, chap. 3, pp. 61110 Google Scholar, qui insiste sur la gravité de cette querelle et son importance pour le devenir de l’expérience missionnaire en Chine, ce qu’aucun autre travail n’avait fait avant le sien, remarquable pour la description de ces différents documents et établissant de manière précise la trame chronologique de l’intrigue.

25 - Dans la période qui nous occupe, la mission jésuite de Chine est composée d’un faible effectif d’hommes, réparti sur tout le territoire de l’empire : le nombre de vingt religieux environ est établi selon les informations extraites de JOSEPH DEHERGNE, Répertoire des jésuites de Chine de 1552 à 1800, Rome-Paris, IHSI/Letouzey & Ané, 1973, pp. 346-347, qui indique dix-huit noms pour l’année 1617 et vingt-deux pour 1666. Sur les aspects statistiques de la mission de Chine, voir Standaert, Nicolas, « The Jesuit presence in China (1580-1773): a statistical approach », Sino-Western cultural relations journal, 12, 1991, pp. 417, ici pp. 4-5Google Scholar ; sur les aspects concrets du voyage, Broockey, Liam, « Largos caminhos e vastos mares. Jesuit missionaries and the journey to China in the sixteenth and seventeenth centuries », Bulletin of Portuguese Japanese studies, 1, 1, 2000, pp. 4572 Google Scholar.

26 - Il faut noter la présence, dans le dossier, de plusieurs lettres d’accusation de Schall, dans les mois qui précèdent la rédaction, par Magalhães, du premier mémoire relatif au Tribunal des mathématiques : il s’agit notamment d’un courrier de Buglio, en date du 17 mai 1649, adressé à Manuel Dias, désigné par l’auteur comme vice-provincial ; d’une lettre collective, rédigée en portugais, des pères Furtado, Longobardo, Buglio, Ferrari et de Magalhães, datée du 20 mai 1649, et adressée elle aussi à M. Dias, qui demande explicitement le renvoi de Schall de la Compagnie, « pour le meilleur service de Dieu, le crédit de la Compagnie, et le bien des âmes ». Elle mêle des arguments d’ordre psychologique (sur le caractère de Schall), administratif (sur sa gestion de la maison de Pékin), moral (sur sa sexualité), à la question des fonctions qu’il exerce dans l’administration de la nouvelle dynastie (voir ARSI, Jap./Sin. 142, ff. 44r.-45r).

27 - Tractatus de Mathematices Praefectura quam iussu Regis Sinensis administrat P. Ioannes Adamus Societatis Iesu 4.orum votorum Professus (ARSI, Jap./Sin. 142, ff. 50r.-71v). Le document est signé : « Pè Kim Curiae Regis Sinensis, 5 Augusti, Anni Dni 1649 // Gabriel de Magalhães ». Il est suivi, au folio 68r., d’un Appendix de concursu positivo immediato, et mediato, quo P. Ioannes Adamus ratione officii concurrit ad omnia, quae supra in cap. 2o diximus. Haec cap. 3 ad finem primae Rationis apponi debent (Appendice sur le concours positif indirect et direct par lequel le père Johannes Adam, dans le cadre de sa fonction, concourt à toutes les choses dont nous avons parlé ci-dessus, chapitre 2. Ces choses apposées au chapitre 3, à la fin de la première raison), signé « Pè Kim, 6 septemb. Anno Dni 1649/Gabriel de Magalhães ». « Censura » est à entendre ici comme un avis du supérieur sur le texte transmis à Rome ; ce bref texte vient renforcer le poids de la critique de Magalhães et rappeler que l’opposition à Schall est partagée aussi par d’autres jésuites de la Province, parmi lesquels Furtado lui-même.

28 - Voir Sommervogel, Carlos, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, Bruxelles-Paris, Picard, 1890-1912 Google Scholar, vol. V, col. 307-309 (J. DEHERGNE, Répertoire des jésuites de Chine…, op. cit., pp. 161-162).

29 - Sur ses années en Inde et sa formation universitaire (il a le grade de maître ès arts et ses biographes évoquent ses études de théologie), on ne sait que fort peu de choses, même si un travail sur les catalogues de la province du Portugal devrait permettre de remplir quelques vides. En attendant, voir J. DEHERGNE, Répertoire des jésuites de Chine…, op. cit., ad hominem ; I. PIH, Le Père Gabriel Magalhães…, op. cit., pp. 17-20. Originaire d’un milieu noble, ayant fait ses études auprès des jésuites à Coïmbre, il y fait son entrée à l’âge de seize ans et il semble que son souhait d’être envoyé en mission ait été précoce, dès les années du noviciat. Son départ n’intervient cependant qu’une dizaine d’années plus tard, à un moment où il a achevé son cycle de philosophie.

30 - Voir Zürcher, Erik, « In the yellow tiger ’ s den: Buglio and Magalhães at the court of Zhang Xianzhong, 1644-1647 », Monumenta Serica, L, 2002, pp. 355374 CrossRefGoogle Scholar.

31 - Admis dans la Compagnie en 1623, l’Italien Buglio (1606-1682), né en Sicile, a passé de nombreuses années à enseigner au Collegio Romano, avant de s’embarquer pour la Chine en 1637. Premier missionnaire envoyé dans le Sichuan, en 1640, il est amené à venir à Pékin avec Magalhães, en 1648, et s’engage à ses côtés contre Schall. Parmi ses activités, on soulignera son travail de traduction des oeuvres de saint Thomas en chinois. C. SOMMERVOGEL, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, op. cit., vol. II, col. 363-365 ; J. DEHERGNE, Répertoire des jésuites de Chine…, op. cit., p. 39; Bertuccioli, Giuliano, « Ludovico Buglio », in Luini, A. (dir.), Scienziati siciliani gesuiti in Cina nel secolo XVII. Atti del convegno, Rome, Istituto italo-cinese, 1985, pp. 212146 Google Scholar ; Handbook, p. 613 sqq.

32 - De cet épisode, nous conservons le texte manuscrit adressé par Magalhães à Rome quelques années plus tard : « Relação da perda e destituição da Provincia e Christiandade de Su Chuen e do que os p.es Luis Buglio e Gabriel de Magalhães passarão em su cativ. » (ARSI, Jap./Sin. 127, 36 ff.) ; E. Zü RCHER, « In the yellow tiger’s… », art. cit. ; I. PIH, Le Père Gabriel Magalhães…, op. cit., pp. 29-60.

33 - Il semblerait que ces fonctions n’aient pas été assumées avec beaucoup d’enthousiasme et que, à différentes reprises, les deux hommes aient demandé à être suspendus de cette activité pour pouvoir se consacrer à leur mission de prédication : I. PIH, Le Père Gabriel Magalhães…, op. cit., p. 50.

34 - «National masters of heavenly law», p. 7, selon la traduction de E. Zürcher.

35 - Tractatus…, op. cit. (cf. texte latin en annexe, § 1).

36 - « Capite igitur 1 : Exponam aliqua principia universalia ad tractationis uberiorem intelligentiam » (f. 50r.).

37 - « Cap. 2 : Agam, quae sit praefectura, quid officii, atque oneris habeat P. Ioannes Adamus in illius administratione » (f. 51r.), divisé en cinq articles : « De prima Mathematicis schola » (f. 51v.), «De secunda Mathematicis schola » (f. 55r.), «De tertia Mathematicis schola » (f. 56r.), «De quarta Mathematicis schola » (f. 58v.) ; le cinquième porte sur les fonctions précises de Schall dans cette structure : « Ad quae, praeter ea, quae jam diximus, teneatur ex officio P. Ioannes Adamus ? » (f. 59r.).

38 - « Cap. 3 : Decem rationibus probabo non posse P. Ioannem Adamum hanc Praefecturam administrare » (f. 59v.).

39 - « Cap. 4 : Respondebo aliquibus dubiis a quodam N. Patre huius Missionis in Apologia pro hac Praefectura excitatis » (f. 64r.).

40 - « Supponendum primum est superstitionem esse vanam et inanem religionem, quae Deo venerationem et cultum indebitum defert, aut debitum denegat et detrahit » (f. 50r.)

41 - Cf. texte latin en annexe, § 2.

42 - Voir son Disquisitionum magicarum libri sex, quibus continetur accurata curiosarum artium et vanarum superstitionum confutatio, publié pour la première fois en 1601 et qui connaît de nombreuses rééditions tout au long du XVIIe siècle. Sans doute ne faut-il pas surévaluer l’efficacité de cette lutte, comme en témoigne l’analyse des cours manuscrits de Santo Antãõ de Lisbonne, faite par HENRIQUE LEITÃO, « Pecularities and Impact of the mathematical courses at the Jesuit college of Santo Antaõ in Lisbon », in J. O’MALLEY et alii (dir.), The Jesuits II: cultures, sciences, and the arts, 1540-1773, à paraître.

43 - « Multae superstitiones quae retinentur in Kalendario et quae exercentur in mathematicae Praefecturae scholis, continent haeresim manifestam et multae saltem sapiunt haeresim quae Inquisitores possunt inquirere et punire P. Ioannem Adamum […] » (f. 60v.).

44 - « […] jure Canon. excommunicatus est. Probatur 1o quia in Directorio Inquisitorum […] continetur quaedam constitutio edita a Ioanni XXII in qua Pontifex excommunicatione ferit omnes tenentes libros, scripturasve continentes aliquos ex supra dictis errores, et in eis studentes, nisi infra octo dies aboleant et comburant in totum, vel in partem ; sed P. Ioannes Adamus in sua potestate tenet kalendaria, et omnes libros, quos, sub proximo § retulimus, et in eis studet, in quibus continentur tot tantique errores ac superstitiones » (f. 61r.).

45 - Romano, Antonella, «Modernité de la Ratio Studiorum (Plan raisonné des études). Genèse d’un texte normatif et engagement dans une pratique enseignante », in Ganty, É., Hermans, M. et Sauvage, P. (dir.), Tradition jésuite et pratique pédagogique. Histoire et actualité, Namur-Bruxelles, Presses universitaires de Namur/Éditions Lessius, 2002, pp. 4487 Google Scholar.

46 - Ce sera en effet le cas pour Magalhães, même si l’on peut s’étonner du caractère tardif de cette dernière étape : en 1660, quand il a derrière lui une déjà longue expérience de la mission.

47 - Sur la période de Clavius et la génération de ses « élèves », voir Baldini, Ugo et Napolitani, Pier Daniele (dir.), C. Clavius, Corrispondenza, Université de Pise, préprint, 1992, vol. I/1, pp. 6883 Google Scholar, repris dans Baldini, Ugo, Saggi sulla cultura della Compagnia di gesù (secoli XVI-XVIII), Padoue, CLEUP Éditrice, 2000, pp. 4998 Google Scholar ; Romano, Antonella, La contre-réforme mathématique. Constitution et diffusion d’une culture mathématique jésuite à la Renaissance (1560-1640), Rome, École française de Rome, 1999, pp. 94131 CrossRefGoogle Scholar. Sur les jésuites portugais et leur formation scientifique dans le cadre de la « Aula de Esfera » de Lisbonne, voir De Albuquerque, Luís, A ‘Aula de Esfera’ do Colégio de Santo Antão no seculo XVII, Coïmbre, Junta de Investigações do ultramar, 1972 Google Scholar.

48 - Voir, sur cette question complexe, CHARLOTTE DE CASTELNAU-L’ESTOILE, « Élection et vocation : le choix de la mission dans la province jésuite du Portugal à la fin du XVIe siècle », in P.-A. FABRE et B. VINCENT (dir.), Histoire culturelle et histoire sociale…, op. cit.

49 - Libbrecht, Ulrich, « What kind of science did the Jesuits bring to Chinã », in F. MASINI (dir.), Western humanistic culture presented by Jesuit missionaries (XVIIth-XVIIIth Centuries), proceedings of the conference held in Rome, October 25-27, 1993, Rome, IHSI, 1996, p. 225 Google Scholar.

50 - Voir E. Zürcher, « In the yellow tiger’s… », art. cit. Dans l’ensemble des documents présentés par I. PIH, Le Père Gabriel Magalhães…, op. cit., cette composante apparaît fortement et des éléments de délation ne sont pas totalement absents de ces accusations.

51 - ARSI Jap./Sin. 143, ff. 49r.-90r.

52 - On s’appuiera sur I. Pih pour souligner que les camps que dessine cette longue querelle n’obéissent pas à des logiques d’oppositions nationales, d’où émergerait notamment un « clan » des Portugais.

53 - Même si les deux historiographies ne se sont jamais rencontrées, le fait que les mêmes acteurs interviennent dans les deux affaires renforce l’hypothèse d’une forte interférence entre elles.

54 - « Magistratus qui praesidet sacrifiis et caeteris ceremoniis, quae Rex populusque suos spiritus, ac coelum venerantur » (f. 51r. : La magistrature qui préside aux sacrifices et autres cérémonies, dans lesquelles le Roi et son peuple vénèrent leurs esprits et le ciel).

55 - La première expression latine figure dans l’organigramme, la seconde dans le texte, au f. 51r. Plus loin, on rencontre la traduction latine « Collegium, sive Tribunal coelum venerans », soit « Bureau ou Tribunal de la vénération du ciel » (f. 51v.).

56 - Dans l’organigramme, elle correspond au Lie co (Like ), qu’il désigne en latin par Schola faciens Kalendarium.

57 - Aux ff. 51v.-55r.

58 - « Quatre sortes de questions ou propositions sont contenues dans ces calendriers. La première est celle des propositions qui touche à l’astrologie naturelle et scientifique et qui s’occupe des éclipses du soleil et de la lune, des grandes lunaisons, etc. » (f. 51v. ; cf. texte latin en annexe, § 3).

59 - « […] Et cette science, bien qu’elle soit par son objet moyenne et neutre, dans la mesure où et du moment qu’elle est exercée par cette préfecture et qu’elle est prise en considération par les Chinois et le roi des Chinois, est, à mon avis – et sauf à ce qu’il en soit donné dans l’avenir un meilleur – illicite » (f. 51v. ; cf. texte latin en annexe, § 3).

60 - Cf. texte latin en annexe, § 4.

61 - Cf. texte latin en annexe, § 5.

62 - « In quoque et quomodo P. Ioannes Adamus recurrat ad haec Kalendaria » (f. 54r.-v.).

63 - Aux ff. 55r.-56r., ff. 56r.-58v., ff. 58v.-59r.

64 - « […] aspicere, exspectareque Coeli, solis, lunae, planetarum, cometarum, stellarum, aeris, pluviae et ventorum aspectus, apparentias, impressiones et reliqua meteora ; et quam faustitatem, vel infaustitatem secundum fatales regulas praenuncient ad Regem deferre » (f. 55r. : Examiner et attendre les aspects, les apparences et les impressions du ciel, du soleil, de la lune, des planètes, des comètes, des étoiles, de l’air, de la pluie et des vents, et les autres phénomènes ; et rendre compte au roi quel événement faste ou néfaste ils annoncent selon les règles du destin).

65 - Cf. texte latin en annexe, § 6.

66 - On notera que Duteil, Jean-Pierre, Le mandat du ciel. Le rôle des jésuites en Chine, Paris, Éditions Arguments, 1994, pp. 299300 Google Scholar, fait allusion au document mais sans en souligner les enjeux et sans faire une analyse serrée des sources.

67 - Voir l’excellente édition critique de Ferdinand Verbiest par Golvers, Noël, The « Astronomia Europaea » of Ferdinand Verbiest, S J (Dillingen, 1687). Text, translation, notes and commentaries, Nettetal, Steyler Verlag, 1993 Google Scholar, qui, dans le commentaire du chapitre VIII, en particulier, se livre à une étude précieuse du vocabulaire employé par les jésuites de l’époque. Les remarques qui suivent lui doivent beaucoup. On notera cependant que, excellent connaisseur des archives jésuites de Rome, N. Golvers cite le manuscript de Magalhães, sans s’arrêter sur son intérêt.

68 - La question apparaît d’autant plus pertinente que le Hoei hoei co a été supprimé (et ses membres affectés au Lie co) en 1657. N. GOLVERS, Astronomia Europaea…, op. cit., p. 178, n. 31.

69 - Non qu’il ne faille ajouter à cette analyse de type internaliste d’autres réflexions qui concerneraient notamment la marginalisation croissante des Portugais au sein de la mission jésuite de Chine et l’affaiblissement parallèle du contrôle politique du Portugal sur la pratique missionnaire dans le cadre du Padroado.

70 - PINGYI CHU, « Scientific dispute… », art. cit., p. 26.