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Oded Rabinovitch, The Perraults: A Family of Letters in Early Modern France, Ithaca, Cornell University Press, 2018, 252 p. - Niel Kenny, Born to Write: Literary Families and Social Hierarchy in Early Modern France, Oxford, Oxford University Press, 2020, xii + 407 p.

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Oded Rabinovitch, The Perraults: A Family of Letters in Early Modern France, Ithaca, Cornell University Press, 2018, 252 p.

Niel Kenny, Born to Write: Literary Families and Social Hierarchy in Early Modern France, Oxford, Oxford University Press, 2020, xii + 407 p.

Published online by Cambridge University Press:  14 February 2024

Laurence Giavarini*
Affiliation:
Laurence.Giavarini@u-bourgogne.fr
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Abstract

Type
Histoire des savoirs à l'époque moderne (comptes rendus)
Copyright
© Éditions de l’EHESS

Si la « famille » existe fortement pour les historiens de l’époque moderne, ce n’est jamais à proprement parler en tant que « famille de lettres ». Du côté des études littéraires, cette catégorie n’a jusqu’à présent pas constitué une échelle d’analyse pertinente de la production de la littérature, l’histoire littéraire étant d’une part largement dominée par la « fonction auteur » identifiée par Michel Foucault, d’autre part focalisée sur l’idée de sociabilité qui conçoit les groupes auxquels appartiennent les auteurs de manière restrictive. Deux livres importants viennent combler cette lacune. Le premier porte sur une famille au nom fameux, les Perrault ; le second envisage la question plus large de la « littérature familiale » à travers un cadre conceptuel solide, étayé par une myriade d’exemples empruntés à la France de la première modernité.

L’ouvrage brillant d’Oded Rabinovitch est tiré d’une thèse de doctorat soutenue à l’université de Brown en 2011. L’historien entre dans le fait social de la littérature de l’âge classique par le nom d’une famille : « les » Perrault, Jean, Pierre, Claude, Nicolas et Charles. Le premier chapitre rappelle que les hommes de lettres des xviie et xviiie siècles, et notamment Charles Perrault, furent toujours envisagés dans les ana et dictionnaires à partir de leur condition : parenté, patronage, positions officielles, caractères moraux. Leurs contemporains ont bien perçu les Perrault comme un groupe. Des « concepts puissants de la famille et de la maison » (p. 35), O. Rabinovitch dégage dès lors une invitation à penser les modes d’articulation du groupe et de ses membres. Son livre s’y applique en suivant la chronologie d’une ascension, depuis l’arrivée à Paris du père, Pierre Perrault, son mariage avec Paquette Le Clerc, fille d’un bourgeois parisien, jusqu’à l’examen rapide, dans l’épilogue, de la « sortie » des lettres pour les enfants de Charles.

Quatre phases se distinguent dans l’histoire de cette élévation, clairement délimitées par les écrits de chacun des frères et leurs parcours dans les institutions du temps : la première, brève, est centrée sur la reproduction sociale permise par le domaine juridique dans lequel s’illustre Jean, le moins connu des cinq frères, avocat comme son père. La deuxième période voit l’ascension de la famille par la finance avec Pierre, l’aîné, à qui son mariage en 1654 permet d’acheter la charge de Receveur général des finances de Paris, un office qui le place au cœur du système financier du royaume et de ce que George V. Taylor puis Gail BossengaFootnote 1 ont appelé le « capitalisme de cour », ici défini comme un marché des offices dans lequel faveur personnelle et patronage ont autant d’influence que le strict calcul pécuniaire. Jusqu’en 1662, année où Colbert se débarrasse d’un certain nombre d’officiers généraux en les contraignant à vendre leur office, la réussite familiale s’organise à travers l’ascension de Pierre, de qui la subsistance de Charles, plus encore que celle de Claude, dépend presque entièrement.

La « disgrâce » de Pierre coïncide avec la transformation de Charles en courtier culturel (cultural broker) de Colbert, la faillite de l’aîné conduisant à déplacer le centre de la stratégie familiale de la finance vers les lettres. C’est la troisième phase, celle où les actions et les relations de Charles le placent au centre de la politique culturelle de Colbert et lui permettent de recevoir des gratifications exceptionnelles en comparaison des hommes de lettres contemporains, qu’ils se nomment Molière, Pierre Corneille ou Valentin Conrart. De son côté, Claude, qui a fait des études de médecine, de physiologie et d’anatomie, entre à la toute nouvelle Académie royale des sciences (créée en 1666) et s’investit dans l’architecture et les projets scientifiques, tandis que Pierre engage de nouveaux projets – scientifiques, dans le domaine de l’hydrologie (il a laissé un traité sur les fontaines), et littéraires (il donne une critique de Don Quichotte, publiée en 1679). Si la deuxième phase a joué un grand rôle dans l’ascension sociale et la sociabilité lettrée de la famille Perrault, c’est la troisième – le moment où ses revenus ne viennent plus de l’office mais des services littéraires, artistiques et scientifiques rendus à la monarchie – qui voit l’accomplissement des Perrault comme « famille de lettres ». La dernière phase correspond à la carrière de Charles, après la disparition de Colbert et jusqu’à sa propre mort, en 1703.

Un des points forts du livre d’O. Rabinovitch réside dans l’affirmation que c’est l’institution qui a fait de Charles Perrault un écrivain, de même que c’est son réseau de connaissances, bien plus que son goût personnel, qui détermine l’acquisition des œuvres artistiques permise par son enrichissement. La prise des écrits dans la vie sociale et politique du xviie siècle n’installe cependant pas un auteur pour toujours au sommet d’un tas d’argent fin et, quand Colbert meurt en 1683, alors que Charles n’est plus « que » membre de l’Académie française, c’est bien la famille de sa femme, Marie Guichon – épousée tardivement à 45 ans, suivant l’exemple de Pierre –, qui lui permet de stabiliser sa carrière d’homme de lettres. Par ailleurs, si les carrières des frères Perrault ne peuvent entièrement s’expliquer par leur formation initiale, celle-ci a pu servir leur parcours social : avocat de formation, Pierre est passé par la finance avant de s’intéresser à l’origine de l’eau des sources ; médecin et physicien de formation, Claude écrit des mémoires et participe à l’élaboration du Louvre, mais il peut développer ses talents dans le cadre de l’Académie des sciences, où il dissèque des animaux avec un petit groupe d’anatomistes – sa Mécanique des animaux (1680), dont O. Rabinovitch étudie les traits saillants au regard des publications scientifiques de l’époque, apparaît à la rencontre des deux activités principales de l’académie, la physique et les mathématiques. Également formé au barreau, Charles écrit dans toutes sortes de genres, sert d’intermédiaire entre le ministre et Jean Chapelain, devient le bras droit du premier et collecte des informations qu’il utilise parfois aussi pour lui-même, supervise les projets des monuments royaux, recommande Claude à la commission chargée de la façade orientale du Louvre, etc.

Le livre met en relief une façon collective et individuelle de se mouvoir dans les changements sociopolitiques du xviie siècle. Cela donne notamment un très intéressant chapitre sur Versailles, traité comme un foyer de production d’écrits divers, mais aussi comme une ressource sociale : pour Charles, qui le fait visiter à la famille de son ami Christiaan Huygens ; pour Claude encore, puisque les animaux qu’il dissèque à l’Académie des sciences lui sont précisément fournis par le château. Aucun centre d’action ne s’envisage de manière univoque, et pas plus que Versailles n’absorbe toutes leurs forces et leurs activités, l’écriture des Perrault ne se résume à servir la propagande louis-quatorzienne.

Dans cette histoire sociale d’une ascension familiale, l’écriture apparaît donc comme un des lieux de l’agency individuelle et collective des Perrault, une des forces de l’ouvrage étant la capacité d’O. Rabinovitch à interroger la pluralité des pratiques d’écriture des frères, du point de vue des genres pratiqués comme de celui de leurs supports. Au sein de leurs autres pratiques sociales (mariages, alliances, acquisitions), des écrits n’ont en effet cessé de marquer l’investissement des frères Perrault dans diverses institutions : l’Académie française pour Charles, l’Académie des sciences pour Claude, la faculté de théologie pour Nicolas. Leurs travaux leur ont donné matière à récits, leur ont permis d’entretenir des réseaux de sociabilité et d’amitié ou encore de capitaliser des bénéfices acquis. Les « lettres » englobent ici carrière et réseaux des littérateurs, actions d’écriture dans des genres différents, production de connaissances et situation dans des champs du savoir, tout ce que, citant William H. Sewell, O. Rabinovitch appelle la « culture », la « sphère intellectuelle consacrée à la création du sens » (p. 161, n. 7). Une « famille de lettres » se définit dès lors comme une famille dont les membres ont construit leur carrière par l’écrit, se sont engagés dans les formes d’institutionnalisation de la culture mises en place par le pouvoir, ont eu des pratiques de littérarisation pour construire la réception de l’histoire familiale. Et si la capacité à dire le sens social de ce parcours, voire peut-être, si l’on en croit « Le Maître Chat ou le Chat botté » (imprimé en 1697 dans les Histoires ou contes du temps passé), celui d’une trajectoire personnelle – meunier ou littérateur, le dernier des fils étant, dans le conte comme dans la vie, celui qui s’est le plus approché du centre du pouvoir –, semble attribuée à Charles dont un fragment de conte ouvre chaque chapitre du livre, c’est plutôt à propos de Claude qu’est plusieurs fois envisagée la question du « talent ».

L’idée de réseau (network) est placée au cœur de la démonstration et du travail critique que propose O. Rabinovitch concernant ces lieux historiographiques que sont la parenté (non résumable au sang ou à la transmission des biens), les stratégies (non le calcul, mais des manières de faire, des réactions au changement), le salon (non une « institution » étiquetée par des types d’activité et de discours, mais le site d’une sociabilité d’élite, investi de multiples couches de sens par ceux qui en produisent l’image et la réputation), les institutions, ou encore l’auctorialité (authorship). Il en ressort l’image d’un xviie siècle moins fixiste que ce qu’ont produit les ors de l’historiographie du Grand Siècle, mais aussi la division de l’histoire en domaines distincts (histoire sociale, histoire de la famille, histoire culturelle, histoire de la littérature). Déplaçant ces cadres avec brio, The Perraults laisse ouverte la question de savoir quel niveau de généralisation peut être construit à partir de cette histoire d’une ascension de groupe par l’écrit, d’autant plus sans doute que celle-ci n’est pas sans renvoyer à une représentation très contemporaine de la réussite comme capacité à « rebondir ».

Aux perspectives ouvertes par cette étude de cas fortement située dans l’âge classique, l’ouvrage très riche de Neil Kenny, professeur de littérature moderne à l’université d’Oxford, apporte à la fois une profondeur historique et un ensemble de catégories de pensée originales, fondées sur des lectures d’histoire sociale qui lui permettent d’interroger l’existence des « familles de lettres » dans la première modernité, jusque dans les années 1630-1640. Quelles furent socialement les familles productrices de lettres ? Quel rôle la littérature a-t-elle joué à cette échelle importante du point de vue de la reproduction sociale et de la transmission des biens et de la dignité que fut la famille ? Comment a-t-elle été un instrument de la pratique sociale des membres des familles, soit au profit de la famille comme groupe cherchant à se perpétuer, soit au bénéfice de certains de ses membres en particulier, y compris parfois contre le groupe ? C’est tout un pan de la production de la littérature, antérieure à la formation du premier champ littéraire, qui se voit ici éclairé d’une manière inédite.

Dans un premier temps, le cadre conceptuel précise l’ambition statistique et historique de l’enquête : N. Kenny mobilise la catégorie de « familles littéraires » en donnant à l’expression une définition large qui englobe de tout petits groupes de producteurs littéraires (l’expression pouvant désigner les auteurs, éditeurs ou traducteurs d’œuvres littéraires ou didactiques), depuis les cas isolés jusqu’aux familles, plus rares, comprenant plusieurs producteurs, comme l’étonnante famille Sainte-Marthe qui fait l’objet d’un chapitre à part entière. D’autre part, N. Kenny pose la notion de « fonction familiale », qu’il articule à la « fonction auteur » et dont il montre qu’elle a pu être promue par des ouvrages aussi célèbres que la Bibliothèque française de La Croix du Maine ou les Elogia des Sainte-Marthe, occasion de préciser le sens que ces écrits donnent à une lignée fondée sur la littérature ou le savoir (c’est alors la doctrina, érudition exceptionnelle en lien avec des disciplines de prestige comme le droit, qui fonde en ce sens la lignée). Enfin sont interrogées d’autres traditions nationales (anglaises, italienne, allemande), qui ont plus ou moins favorisé l’éclosion d’une « littérature familiale » et permettent de réfléchir à la spécificité de l’expérience française.

S’attachant à identifier quelles sont les familles de ceux qui produisent de la littérature, N. Kenny note qu’elles correspondent la plupart du temps aux niveaux élevés de la hiérarchie sociale, particulièrement caractérisés par l’héritage patrilinéaire. Les familles de « savants » lui apparaissent ainsi comme les premières familles des sociétés chrétiennes d’Europe occidentale dont la reproduction sociale a dépendu de la combinaison de la reproduction familiale et de la transmission de l’enseignement supérieur. Parmi les producteurs littéraires envisagés à partir de la famille, N. Kenny trouve très peu de femmes dans la période considérée, à l’exception de deux familles – les Rohan et les Valois.

La réflexion s’appuie donc sur trois pôles – hiérarchie, littérature, famille – que cette enquête méthodique et profonde tient de bout en bout et dont elle montre les articulations changeantes, différenciées à travers les très nombreux exemples examinés dans le livre. Un des bénéfices de l’angle adopté est de mettre l’accent sur la question hiérarchique plutôt que sur celle des réseaux. N. Kenny interroge ainsi la place de la littérature dans les constructions dynastiques, montrant comment certaines familles comme les Sainte-Marthe ont pu marginaliser leurs femmes « savantes » par souci de privilégier l’office dans l’ascension du patrilignage. Un autre intérêt est de penser la fabrication du statut social à plusieurs échelles, à l’intérieur mais aussi à l’extérieur de la famille, pour certains de ses membres qui vont parfois à l’encontre du plan familial. Autour de l’œuvre littéraire, comprise comme un bien transmissible et donc héritable, pouvaient se négocier les rapports entre identité familiale et identité individuelle, ainsi que le montre la mise en relation d’une « fonction auteur » (pouvant masquer la famille à laquelle elle n’est jamais référencée) et d’une « fonction familiale » (souvent, en revanche, renvoyée à l’individu auteur). Plusieurs exemples, ceux des écrits et traduction de Laurent Joubert, médecin d’Henri IV, montrent ainsi la pertinence d’étudier les médiations familiales d’un texte « d’auteur ».

De manière intéressante, N. Kenny ne cherche pas à définir « la littérature » ou « le littéraire », mais il s’attache à clarifier les concepts de l’histoire sociale sur lesquels il s’appuie : hiérarchie, héritage, transmission (ce dernier concept étant situé dans le prolongement du précédent, mais en dehors de la loi). Travailler la littérature comme héritage à l’intérieur même de la famille implique de la penser comme un bien, de penser le potentiel qu’elle signifie, une signification qui dépend en partie de ce qui en est fait par ceux qui en héritent. C’est donc plutôt la catégorie anthropologique, plus large et plus centrée sur l’apprentissage, de littératie qui permet ici d’envisager les modalités de la transmission de l’écrit.

Sont ainsi observées dans cette enquête des pratiques d’écriture générique transmises (telle l’épître en vers dans la famille de Navarre) qui permettent de publier d’imaginaires perpétuations ou de façonner le sens de l’héritage. Le temps de la littérature est pris en charge, non comme une réalité à part des pratiques sociales de l’époque, mais comme constitutif des discours sur le temps de la famille. N. Kenny souligne la conscience qu’avaient les familles – en particulier dans les couches supérieures de la société, dont provenait en grande partie la littérature familiale – d’être des entités fondamentalement diachroniques et transgénérationnelles, regardant à la fois en avant et en arrière dans le temps. À ce titre, la « littérature familiale » a pu encourager le sentiment de faire partie de collectivités plus larges que celles des vivants proches, des collectivités formées par la transmission et l’héritage.

Le livre examine les lieux de l’imprimé où se développe la littérature familiale. Certains sont attendus, tels les paratextes ; d’autres moins identifiés, comme la grande taille et le « bricolage » des imprimés, à savoir dédicaces qui modulent la publication de la parenté en faisant apparaître certains membres plutôt que d’autres (ainsi des Œuvres d’Adrien Turnèbe, publiées en 1600 à la suite d’ajouts et de modifications par son fils Pierre), incorporation à un imprimé d’ajouts de membres de la famille (Jean de La Taille ouvrant un programme de « littérature familiale » avec son frère décédé, Jacques), ascension du père publiée par le travail d’un fils jouant un véritable rôle d’agent de transmission (les Audebert), création d’une renommée déliée du patrilignage (les Des Roches, mère et fille), utilisation de la « page de titre comme zone sans dignité » (p. 123) pour masquer la conflictualité confessionnelle dans une perspective de « campagne patrilinéaire » (p. 128, à propos des Opuscules francoises des Hotmans, publiés en 1616). Les tensions familiales peuvent aussi se servir de la littérature comme « preuve », ainsi que le montre l’histoire de Nicolas Vauquelin Des Yveteaux, dont un poème fut cité à comparution dans un factum familial. Deux études de cas – les Marot et les Béroalde – permettent enfin de travailler la relation entre la littérature, la transmission familiale et le statut social. Comment transformer la célébrité en statut ? C’est une des questions que pose le cas de Clément Marot, à propos duquel N. Kenny propose une intéressante lecture de la poésie, pastorale en particulier, comme lieu d’expression, d’élaboration et de partage de l’expérience sociale de la hiérarchie.

La multiplicité des facteurs qui font, selon N. Kenny, la complexité de l’expérience de la hiérarchie rencontre une observation importante du livre d’O. Rabinovitch : pour celui-ci, aucun fait pris isolément ne suffit à envisager un succès que seules expliquent, pour la famille Perrault, des stratégies de consolidation, par l’alliance comme par la publication, par la mobilisation de réseaux d’amitié comme par l’investissement de qualités et de savoirs dans des activités culturelles diverses. Parce que l’enquête est plus large dans ses perspectives et plus resserrée sur l’imprimé et les familles, Born to Write donne évidemment moins de place que ne le fait The Perraults à l’ensemble des pratiques sociales dans lesquelles s’insèrent culture et littératie. Mais la réflexion de N. Kenny sur la hiérarchie ouvre d’autres perspectives, qui déplacent fortement une approche de l’histoire littéraire par la valeur des écrits. C’est d’ailleurs un des apports des deux ouvrages que de ne pas réduire le fait littéraire à « la littérature », mais de le comprendre comme une ressource sociale mobilisable dans une stratégie de groupe (O. Rabinovitch) et dans l’élaboration du statut (N. Kenny). En revanche, de la différence de méthode entre ces livres résulte deux mises en œuvre, deux compréhensions distinctes même du fait familial, et plus largement peut-être de la société : dans la mesure où l’étude de cas pense la famille comme une des ressources de l’agency des individus, The Perraults tend à maintenir l’individu au centre du monde social, là où Born to Write fait sans doute plus nettement apparaître la famille comme une structure travaillant la production littéraire et, à travers elle, la société française de la première époque moderne.

References

1 George V. Taylor, « Types of Capitalism in Eighteenth-Century France », The English Historical Review, 79-312, 1964, p. 478-497 ; Gail Bossenga, « Markets, the Patrimonial State, and the Origins of the French Revolution », 1650-1850: Ideas, Aesthetics, and Inquiries in the Early Modern Era, 11, 2005, p. 443-509.