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Unité domestique et reproduction sociale : la communauté huasipungo

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Andrés Guerrero*
Affiliation:
Consejo Latinoamericano de Ciencias Sociales, Quito

Extract

Ce travail se propose d'analyser les stratégies de reproduction que mettent en œuvre les unités familiales nouvellement formées en vue de leur reproduction sociale dans un cadre communal. Pour ce faire, nous avons considéré le cas, socialement très précis, d'un type d'unités familiales, connues dans la région andine équatorienne sous le nom d'apegadas (qui signifie collées), en une phase déterminée de leur cycle de développement et en un moment historique particulier : une communauté huasipunguera, inhérente à la forme de production de l'hacienda de la Cordillière ‘. Dans le cas étudié, par stratégies de reproduction nous entendons l'ensemble des pratiques des agents sociaux appartenant à des structures familiales et communales agraires (huasipungueras), mises en œuvre pour constituer de nouvelles unités familiales et parvenir à un déroulement continu du cycle vital domestique. Pour réaliser ses stratégies de reproduction, le groupe social des apegados va mobiliser l'ensemble des possibilités dont il dispose, par héritage ou par acquisition : ressources économiques, mercantiles ou non, relations de parenté, sanguine ou rituelle, alliances, tout le tissu d'obligations et de droits de type inter-domestique ou communal.

Summary

Summary

This article analyses strategies adopted by newly formed familles in rural communales in Equador's Andies to assure their social reproduction. The family cycle consists in two successive phases, the first called “apegada” and the second “huasipunga”. This bipartite process allows each family group to participate in the network of ties of reciprocity based on land ownership; it also allows the community as a whole to resolve the crucial problem of balancing the amount of available labor power which arises from the workings of the family demographie cycle.

Type
Les Structures Familiales
Copyright
Copyright © Copyright © École des hautes études en sciences sociales Paris 1986

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References

Notes

Cet article est extrait des travaux que j'ai pu entreprendre et que je poursuis grâce à l'appui financier du Social Science Research Council, à New York.

1. Cette analyse de cas est le résultat d'un travail sur le terrain que j'ai effectué en 1976 dans les haciendas de la vallée d'Olmedo-Cayambe, en particulier dans l'ex-hacienda Moyurco, aujourd'hui Coopérative Ruminahui. Conceptuellement, j'utilise la notion de « stratégie de reproduction » dans un sens proche de celui que lui donne P. Bourdieu, à savoir, les pratiques qui tendent à la reproduction des bases d'une quelconque formation sociale qui forment le cadre dans lequel s'effectuent les activités productives ; ces pratiques sont le produit de stratégies déployées par les individus ou les familles dans le but (conscient ou inconscient) de maintenir ou d'améliorer leur position dans la structure sociale (qu'elle soit de classe ou non), et qui, ce faisant, reproduisent à leur tour la structure sociale. Bourdieu, P., « Trois études d'économie kabyle », dans Esquisse d'une théorie de la pratique, Genève, Droz, 1972, p. 119;CrossRefGoogle Scholar La distinction, Paris, Éditions de Minuit, 1979, p. 145.

2. Sur ce point, on peut consulter Crespi, M., Les patrons et les peones de Pesillo : une hacienda traditionnelle, Ann Arbor, Université Microfilms, 1968;Google Scholar Garcia, A., « Structure d'une hacienda seigneuriale dans la Cordillère équatorienne », Sciences politiques et sociales, n° 33, septembre 1964, Mexico, pp. 359444;Google Scholar Guerrero, A., « L'hacienda pré-capitaliste en Amérique latine : le cas de l'Equateur », Études rurales, n° 62, 1976;Google Scholar CIDA, Propriété de la terre et développement socio-économique du secteur agraire en Equateur, Washington, OEA, 1966.

3. Fao/Onu, Plan de recolonisation des haciendas de l'Assistance Sociale, Rome, 1964.

4. L'enquête de population de Moyurco ne permet malheureusement pas de reconstituer toutes les structures familiales qui vivaient sur les huasipungos, car chaque unité diadique a été traitée séparément. On peut légitimement utiliser les données relevées à Pesillo : Pesillo et Moyurco sont en effet deux haciendas contiguës qui ne forment qu'une seule et même unité productive jusqu'au début du siècle. On trouvera des données globales sur les groupes domestiques de Pesillo dans les travaux de M. Crespi, op. cit.

5. Entretien de M.L., ex-huasipunguero, et données relevées sur le terrain, septembre 1976, Moyurco. Pour l'hacienda Pesillo, voir M. Crespi, op. cit., pp. 282-283.

6. Yanapa vient du mot quechua yana, qui veut dire serviteur. Relation avec l'hacienda : le yanapero doit un certain nombre de journées de travail par mois et il a un droit de pâturage pour ses bêtes sur les terres de l'hacienda. Il y a relation entre yanaperos et peones sueltos : quand le maître en a besoin, il fait appel aux yanaperos et les fait travailler en leur payant leur journée comme à des peones sueltos. Entretien de F.A., ex-huasipunguero, Moyurco, octobre 1976, et de A.L., ex-huasipunguero, septembre 1976, Moyurco.

7. Ces chiffres ne comprennent ni les apegados morts avant d'avoir atteint le statut de huasipungo, ni ceux qui ont émigré ; ils ne portent que sur ceux qui ont survécu et qui se trouvent dans l'hacienda au moment de l'enquête.

8. Il faut tenir compte de la baisse de la fécondité féminine d'une part, d'autre part du fait qu'au bout de 13-15 ans de mariage (31-36 ans, âge de l'épouse), plus de la moitié du temps de fécondité est déjà passé.

9. Nous supposons égale à une unité la capacité de travail d'un homme ou d'une femme entre 16 et 50 ans. Les membres de la famille, des deux sexes, entre 10 et 15 ans, comptent pour un demiproducteur. La « capacité de travail », c'est l'addition des deux groupes.

10. Étant donné le caractère structurel de cette situation, la « photographie » révélée par les données statistiques ne peut se modifier que dans une marge plutôt étroite. Il faudrait une transformation de la structure des relations sociales pour arriver à un changement radical de la situation.

11. A. Guerrero, op. cit., 1977.

12. L'hacienda exigeait cinq jours de travail par semaine, en dehors des grands travaux collectifs qui occupaient toute la famille. Cela laissait deux jours de liberté au titulaire, mais comment considérer ce temps comme pleinement productif, puisque son caractère intermittent ne permet aucune continuité dans le travail ?

13. A. Garcia, op. cit., p. 444 et F. Franco, op. cit., pp. 5-17.

14. Cl. Meiixassoux, op. cit., p.69.

15. Les travaux agricoles sont à faire en même temps partout, sur les terres de l'hacienda et sur les lots huasipungos. Quand il s'agit évidemment du même produit et du même milieu écologique.

16. A. Guerrero, op. cit., 1977, p. 88.

17. Cl. Meiixassoux, op. cit., p. 94.

18. Le chroniqueur espagnol Polo de Ondegardo nous a laissé, au xvie siècle, une remarquable analyse de la différence entre la rente variable, exigée des communautés de la côte péruvienne par les autorités communales et l'État Inca et la rente fixe implantée par l'État espagnol. Dans le premier cas, la rente est levée sur un terrain mis en culture, dont la dimension varie avec la capacité de travail disponible et dont la production reste aux mains des autorités. Alors que dans le second cas, ce sont les fonctionnaires coloniaux qui, en principe, fixent la rente en produit ou en travail que chaque homme en âge productif doit honorer. P. Ondegardo, Relation des fondements au sujet du dommage remarquable qui résulte du fait de ne pas conserver aux Indiens leurs coutumes, 26 juin 1571, Lima, 1916. De son côté, Garcilaso de la Vega donne un modèle presque idéal du prélèvement de la rente variable dans son analyse : « L'ordre qu'ils avaient pour travailler la terre », chap. n à xvi, livre De LA Vega, V. Garcilaso, Inca, Los commentarios reaies de los incas, 1609, Biblioteca Ayacucho, 1976, Venezuela.Google Scholar

19. Entretien de L.L., apegado, octobre 1976.

20. Entretien de L.C., ex-apegado, octobre 1976 : « Ils avaient des enfants, alors forcément ils avaient des apegados, de la famille elle-même, un fils, une fille, alors moitié-moitié » (al-partir, « en métayage »). Entretien de R.A., ex-huasipunguero, août 1983.

21. Entretien de L.C., ex-apegado, octobre 1976. Entretien de L.A., ex-huasipunguero, septembre 1976. Entretien de LA., ex-huasipunguero, septembre 1976.