Le jeune sociologue Manuel Castells réfléchit depuis quelques années sur le statut scientifique de la sociologie urbaine et sur les aspects politiques et idéologiques de l'urbanisation. Sur ces problèmes centraux il a publié plusieurs études : « Y a-t-il une sociologie urbaine ? », in Sociologie du Travail, 1968, pp. 72-90 ; « Le centre urbain, projet de recherche sociologique », in Cahiers Internationaux de sociologie, vol. XLVI, 1969, pp. 83-106 ; « Vers une théorie sociologique de la planification urbaine », in Sociologie du Travail, 1969, pp. 413-443 ; « Théorie et idéologie en sociologie urbaine », in Sociologie et Sociétés, vol. I, n° 2, novembre 1969, pp. 171-191, et le texte ronéotypé, de diffusion restreinte, Pouvoir, Participation et Politique urbaine, Laboratoire de Sociologie Industrielle de la VIe Section de l'E.P.H.E., janvier 1968, 104 p. Sans partager l'ensemble de sa problématique, nous pensons que cette réflexion importante doit retenir l'attention de tous ceux — historiens, géographes, sociologues, urbanistes, économistes, politicologues — qui s'intéressent à la ville et aux sciences de la ville.
Étudier l'urbanisation exige, à la fois, d'entrer dans le coeur de la problématique du développement des sociétés, et de se risquer dans les sables mouvants d'une imprécision conceptuelle idéologiquement déterminée. En effet, s'il est clair que le processus de formation des villes est à la base des réseaux urbains et conditionne l'organisation sociale de l'espace, trop souvent on en reste à la présentation globale et sans spécification d'un taux de croissance démographique, liant dans un même discours idéologique l'évolution des formes spatiales d'une société, et la diffusion d'un modèle culturel sur la base d'une domination politique