Depuis une dizaine d'années, l'historiographie du politique retrouve un second souffle. Sous son impulsion, le thème de la genèse médiévale de l'État moderne mobilise les chercheurs. Une vaste enquête collective approfondit les principaux éléments du nouveau système de gouvernement, dont sont redevables, encore de nos jours, les sociétés occidentales : renforcement des institutions monarchiques, fiscalité accrue, apparition des assemblées représentatives, triomphe de la royauté sur le Saint-Siège, découverte de l'aristotélisme politique… Ce profond bouleversement, qui intervient autour des années 1280-1360, ne va pas sans heurts : la guerre, monopole royal, justifiant des prélèvements fiscaux obligatoires, contribuant à l'éclosion du patriotisme, est la toile de fond sur la scène de la naissance des structures étatiques, où épidémies et disettes ne sont pas de moindres comparses. Les cavaliers de l'Apocalypse — conflits, peste et famine — se jettent, à bride abattue, sur l'Occident.