L'électricité, il y a un siècle, apparaissait comme un phénomène physique complexe et assez mystérieux aux yeux des contemporains. Elle se prêtait par excellence à de multiples interprétations. Invisible, douée d'une extraordinaire rapidité et d'une souplesse peu commune, elle a enrichi considérablement l'imaginaire social d'avant 1914 tout en laissant de grandes possibilités de choix parmi les utilisations à privilégier. Aussi les processus d'électrification urbaine à partir des années 1880 n'ont pas obéi à un modèle unique comme l'a montré T. P.Hughes pour l'Angleterre, l'Allemagne et les États-Unis. Si l'utilisation de faits techniques pour apprécier ces « passages » est indispensable, ces critères ne peuvent que partiellement rendre compte de l'attitude d'une société dont les fondements sont peu à peu bouleversés et qui, quelquefois, réagit contradictoirement. Il nous faut donc quitter les seules approches techniciennes pour la compréhension de transformations socio-techniques.