Published online by Cambridge University Press: 24 December 2009
La loi musulmane n'admet, en principe, que des baux à courte durée pour les awqāf. Toutefois, les juristes dans les différentes parties du monde musulman admettaient, dans certaines circonstances, des baux divers à long terme équivalant à une quasi-aliénation. Quelques-uns de ces contrats, par exemple le ḥikr égyptien, l'inzāl tunisien, les djalsa et djazā' marocains, ont été traité d'une manière approfondie. Le contrat d'‘anā’ — le bail à long terme le plus répandu à Alger à l'époque turque — n'a cependant pas suscité une attention analogue de la part des chercheurs, à cause, peut-être, du manque d'intérêt dans un contrat, qui ne signifiait plus grand chose sous l'égide de la législation française, laquelle supprima le caractère inaliénable des awqāf.
1 1 e.g. Clavel, Eug., Le Wakf ou Habous, 2 vols.,le Caire, 1896Google Scholar: Abribat, J., ‘Essai sur les contrats de quasi-aliénation et de location perpétuelle auxquels l'institution du hobous a donné naissance’, Revue Algérienne et Tunisienne de Législation et de Jurisprudence, xvii, 1901. 121–51;Google ScholarMilliot, L., De'membrements du Habous, Paris, 1918:Google ScholarBaer, G., ‘Hikr’, Encyclopaedia of Islam, second ed., Supplement, 368–70.Google Scholar
2 Sauf la question de Ľorigine de Ľ‘anā’ étudiée par Worms, Recherches sur la constitution de la Propriété territoriale dans les Pays musulmans, et subsidiairement en Algérie, Paris, 1846, voir en particulier la deuxieme partie, 349–499Google Scholar. Sa thése a été corrigée ' on attaquée par nombre d'auteurs, e.g. Pouyanne, M.La Propriete fonciere en Algérie, Alger, 1900, 143–8, 231–2Google Scholar; Terras, J., Essai sur les Biens habous en Algérie et en Tunisie, Lyon, 1899, 89–96Google Scholar; Pröbster, E., Privateigentum und Kollelctivismus irn mohammedanisehen LiegenscJuiftsrecht insbesondere des Maghrib, Leipzig, 1931, 358–60.Google Scholar Voir aussi p. 253 ci-dessous.
3 Baer ‘Hikr’, 369; Baer, G., ‘The dismemberment of Awqāf in early 19th century Jerusalem’, Asian and African Studies 13, 1979, 235ℰ6Google Scholar; Baer, G., ‘Jerusalem's families of notables and the Waqf in the early 19th century’, paper submitted to the conference on the Legacy of Ottoman Palestine, University of Haifa, 17–21. 12. 1979, 14–16.Google Scholar
4 Les majuscules representent le premier (A) et le deuxieme document (B). Les chinres qui les suivent indiquent les lignes dans chacun des documents. Planches I et II = document A; planches III-IV = document B
5 De Ľétude des registres du waqf al-Haramayn á Alger, il résulte que, quand il s'agissait de deux parties du même immeuble on les désiguait commé ‘la maison avec Ľétage supérieur ’ ou ‘ avec son étage supérieur ’—Archives Nationales (AN), 228 Mi 20. vols. 74, 75. La formulation dans notre texte e s t ‘ la maison et Ľétage supérieur ’, done sans aucune indication d'une relation physique possible entre les deux propriétés.
6 Pour une discussion critique de ce point voir Mercier, E., Le code du hobous ou ouakf selon la legislation musulmane, Constantine, 1899, 27–31.Google Scholar
7 Clavel, i, 277–9; Zeys, E. et Muhammed Ould Sidi Said, Recueil d' Actes et de Jugements arabes, 2e ed., Alger, 1946, exemple no. 21 (texte arabe), 28–30.Google Scholar Sous la domination française cette régie n'était pas toujours strictement appliquée﹘voir les exemples de jurisprudence dans Sabatery, A., Éléments de droit musulman, Alger, 1867, 62–3Google Scholar; Siband, G., Répertoire alphabétique de jurisprudence musulmane, le série, années 1945 á 1950, Alger, 1957, 110Google Scholar
8 Pour le jugement de validation voir Heffening, ‘ Wakf ’, Encyclopaedia of Islam, first ed., 1097; Mercier, Code, 49–
9 Mercier, E., Le hobous ou ouakof ﹘ ses régies et sa jurisprudence, Alger, s.d., 21Google Scholar; Terras, 12; Clavel, I, 277–9; II, 234. Pour une discussion approfondie de ces avantages voir Layish, A. ‘ The Maliki family waqf according to wills and waqfiyyāt’, BSOAS, XLVI, 1, 1983Google Scholar
10 Entre parenthéses se trouve le texte paralléle du document
11 Devoulx, A., Notice sur les corporations religieuses d'Alger (extrait de la Reoue Africaine), Alger, 1862, 32Google Scholar; Campbell, T., Letters from the South, London, 1837, i, 24Google Scholar
12 Voir Ľappellation ‘ awqdf al-Sāqiya ’ ou ‘ aṥibās al-Sāqiya’ dans les registres de cette institution, AN, 228 Mi 19, vol. 71, p. 239; vol. 72, pp. 53, 60, 63; 228 Mi 33. vol. 190, p. 61
13 ‘Abidīn, Ibn, Radd al-Muhtār, vol. 4, 2e éd. Misr, 1386/1966, 209–11Google Scholar; Pasha, Mubammad Qadri, Kitāb qānūn al-'adl wa'l inṣāf li'l-qaḍā' ‘alā mushkildt al-awqāf, 3e ed., Bulaq, 1320/1902, p. 81, § 271, 272Google Scholar; p. 55, § 182; p. 122, § 474, 475. Pour une discussion de ce sujet voir Mercier, Code, 83–4, 90–93; Clavel, n, 34–5
14 Ibn ' Ābidīn, 400; Qadrī Pasha, p. 81 § 276; Mercier, Code, 95–6; Clavel, ii, 88–90; Baer, ‘ Dismemberment ’, 237
15 Qadrī Pasha, p. 92, § 332; Mercier, Code, 97
16 Voir note 5 ci-dessus
17 Voir ci-dessous
18 Qadri Pasha, p. 92, § 332; Mercier, Code, 97
19 II fallait écriré ‘ administrates ’ et non pas ‘ bénéficiaire ’ qui, comme nous avons remarqué plus haut, ne peut pas intervenir dans la gérance de la propriété. La faute est probablement due au cumul des deux titres par la même personne
20 Le texte ne nous permet pas de déterminer avec certitude s'il s'agit de Ľun ou de Ľautre patrimoine. Voir note 12 ci-dessus
21 Qadri Pasha, p. 59, § 198; p. 64, § 213; Clavel, i, 257; ii, 57. Voir aussi note 23 ci-dessous
22 Parfois les actes constitutifs sont muets sur le sujet de Ľadministrateur dans ce stade. Parfois le fondateur indique que la propriété sera administrée par le gérant de Ľoeuvre pie. Sur les administrateurs des awqāf dans ce stade voir M. Hoexter, ‘ The Waqf and the State — a preliminary, comparative analysis ’, in G. Baer et G. Gilbar (ed.), Social and economic aspects of the Muslim waqf (sous presse)
23 Qadrī Pasha, p. 110, § 424; p. 64, § 213, s'appuvant sur Ibn ‘Ābidin, 361 qui ajoute Ľexplication suivante de cette régie: Pour les opinions — essentiellement analogues — des juristes du rite malikite, voir Pesle, O., La Théorie et la pratique des habous dans le rite malékite, Casablanca, s.d., 152–62Google Scholar
24 Clavel, ii, 152 et passim
25 Dans les registres du waqf al-Haramayn on rencontre des listes de réparations de divers propriétés, sans qu'il y ait allusion á une comptabilité de Ľactif et du passif des propriétés partieuliéres
26 Ibn ‘Ābidīn, 366–7; Qadrī Pasha, p. 106, § 408
27 AN, 228 Mi 33, vol. 190, p. 61. Pour les détails voir Hoexter, M., ‘Waqf al-Haramayn and the Turkish Government in Algiers ’ in Baer, G. and Gilbar, G. (ed.). Social and economic aspects.Google Scholar
28 Contrairement á ce que constate Bussy, P. Genty de, De Ľ Établissement des Français dans la Régence d'Alger et des moyens d‘ en assurer la prospérité, 2 vols., Paris, 1835, I. 354, pGoogle Scholar
29 Signalons qu'au leiu de (et ses déruvés) on trouve dans le document A (et ses dérivés). Comparez B 23, 27, 30, 34, avec A 24, 30, 33, 36. Dans tous ces cas le reste de la phrase est identique dans les deux documents. II ne s'agit done pas de signification différente. Comme la forme est la forme normative, nous avons employé cette forme dans les citations.
30 cf. L'udjral al-mithl du ḥikr ﹘ Qadri Pasha, p. 92. §, 336; Clavel, II, 97–100, 164.
31 La moyenne du revenu de 107 jardins dans le patrimoine du waqf al-Ḥaramayn en 1799–1807 était de 31.641 riyāl. Ces chiffres sont calculées á partir des registres de cette insitiution pour les dites époques — AN, 228 Mi 20, vols. 74,75.
32 L'erreur commence, en effet, á la ligne 38 de ce document, qui finit par lemot (omis dans la citation) lequel devait çtre précédé par ou — cf. texte B. II est clair qu'il ne s'agit pas d'un bail pour un nombre limité déannees (cf. A 16), ce qui aurait été la signification de la phrase sans cette correction
33 C'est pourquoi les juristes musulmans discutaient de la question de savoir s'il était permis de constituer en waqf une telle propriété sous le chapitre qui traite de la constitution en waqf d'un immeuble ou d'un arbre á Ľexclusion de son tréfonds — Ibn ‘Ābidīn, 389–91; Qadrī Pasha, pp. 17–18, § 57, 58. Voir les définitions de ce droit complexe dans Milliot, 56 (djazā’); Clavel, II, 171 (ṥtcr)
34 ibid. ii, 168–9 (ṥikr); p. 155 (citant d'Ohsson pour Ľ idjāratayn); Terras, 201–4 (inzāl)
35 cf. les droits reconnus au preneur du ṥikr — Qadrī Pasha, p. 92, § 333
36 Worms, 473–7. La traduction et les conclusions principales de Worms sont reproduites dans Pouyanne, piéce justificative no. 6, pp. 1000–3
37 Worms, 477–8. II est clair, mçme de la traduction de Worms, que la concession n'est pas faite par le souverain. Celui-ci paraīt dans la procédure en tant que demandeur, tout comme les administrateurs du waqf dans nos textes. Toutefois, comme le souverain lui-mçme ne parait pas devant la justice, il communique au madjlis son intention de livrer la propriété en ‘anā’ par la voie de son interpréte (cf. A 15–16; B 12–13). Ce n'est pas lui non plus, mais le preneur qui demande au madjlis Ľouverture de la procedure judiciaire (cf. A 25–6; B 25–6). Nous nous pennettons de douter de Ľexactitude de la traduction du passage sur lequel Worms s'appuie pour sa thése, selon laquelle Ľ‘anā’ préexistait, et certainement de son interpretation de ce passage. Déailleurs, il est clair que le prix de Ľanā’, dans son texte, était fixé par une procédure analogue á celle constatée dans nos documents
38 ibid., 459
39 ibid., 484, 496
40 ibid., 478 ff. L'analogie avec le malikāne est basée sur Ľetymologie suivante: selon Worms si on réunit les deux mots arabes mulk et ‘anā’ (représentant le droit de Ľacquéreur sur Ľédifice qu'il élévera et le cens annuel qu'il s'engage á payer pour le tréfonds) on obtiendrait le terme malikdne (pp. 478, 484). II s'agit, en fait d'un terme turc, compose du mot mālik et du suffix turc ane (et non pas), qui donne littéralement ‘ pertaining to an owner ’ — Redhouse, J., A Turkish and English lexicon, new impression, Beirut, 1974, s.v. (voir aussi s.v. ane)Google Scholar; et qui signifiait, dans la pratique administrative: ferme viagére — voir e.g. Inalcik, H., The Ottoman Empire: the classical age, 1300–1600, London, 1973, 47–9Google Scholar
41 Nous n'avons choisi que les ouvrages principaux qui traitent de Ľ‘anā’ d'une facon un peu détaillée
42 P. Genty de Bussy, ii, piéce justificative no. 5, p. 18; voir aussi p. 17, ainsi que I, 353–4
43 Guerre, Ministére de la, Tableau de la situation des établissements franqais dans Ľ Algérie, Paris, Fév. 1838 (Tableau 1837 dans les notes suivantes), p. 258, reproduit dans Terras, p. 88Google Scholar
44 Sabatery, 346
45 Dans les registres du waqf al-Ḥaramayn cette nouvelle situation est exprimée par une modification de la maniçre dont la propriété est enregistrée. Avant la passation du contrat de Ľanā’ elle est enregistrçe comme: ‘ la maison x ’. Dés lors, elle paraīt comme: Ľ‘anā’ de la maison x ' — AN, 228 Mi 20, vols. 74, 75 passim
46 Voir, e. g. Clavel, ii, 156–7Google Scholar; Mercier, Code, 98–9; Milliot, 13–14; Cattan, H., ‘ The law of waqf’ dans Khadduri, M. and Liebensy, H. J. (ed.), Law in the Middle East, Washington, 1955, 1, 210Google Scholar
47 Voir, e. g. Clavel, ii, 152–3Google Scholar, 157–8 etc
48 Voir e. g. Mercier, Code, 41–2; Mercier, Hobous, 12; Qadri Pasha, p. 7, § 17
49 Voir e.g. Mercier, Code, 41; Terras, 53–4, 180
50 Sur la qurba voir Anderson, J. N. D., ‘ The religious elements in the waqf endowments ’, Journal of the Royal Central Asian Society, xxxviii, 4, 1951, 292–9CrossRefGoogle Scholar
51 Delphin, G., ‘ Histoire des Pachas d'Alger de 1515 a 1745 — extrait d'une chronique indigéne traduit et annoté, Journal Asiatique, 19, 1922, 220Google Scholar; Paradis, Venture de, Alger au xviiie siecle(édité par E. Fagnan), Alger, 1898, 11, 157 (qui Ľappelle madjlis sharīf)Google Scholar; Voulx, A. De, Tachrifat, recueil de notes historiques sur Ľ administration de ' ancienne Regence d'Alger, Alger, 1852, 77Google Scholar
52 Le qādī hanafite est identifié par sa fonction dans les deux textes (A 21; B 19), alors que le qādī malikite ne Ľest que dans le document B (B 20–) et les deux muftīs ne le sont dans aucun de nos textes. Pour la composition du madjlis voir Sabatéry, 18; Paradis, Venture de, 11, 157; Tableau 1837, 218.Google Scholar Voir aussi note 56 ci-dessous
53 Sur le role du madjlis et du qādī voir aussi Sabatéry, 14, 18; AN, F 80 1623, le procureurgénéral au gouverneur-général, Rapport sur la réorganisation de la justice musulmane, 10. 3. 1849; Tableau 1837, 218Google Scholar
54 e. g. Tyan, E., ‘ Kadi’, Encyclopaedia of Islam, second ed., iv, 373–4.Google Scholar
55 sur le madjilis tunisien voir Brunschvig, R., ‘ Justice religieuse et justice laique dans la Tuisie des Deye et des Beys jusqu'au milieu du xixe siécle ’, Studia islamica, xxiii, 1965, 27–70.CrossRefGoogle Scholar
56 Selon Delphin, 220, le madjlis algérien comptait á Ľorigine quelques ‘ulamā’ locaux. A cause d'un conflit, qui a eu lieu pendant le régne du Dey Husayn Mezzo Morto (1683–1689), oes ‘ulamā’ s'absentaient des reunions du madjlis. Depuis lors sa composition se limitait á deux muftis et deux qādīs
57 Alger: Venture de Paradis, 157; Delphin, 220; Tableau 1837, 218; Sabatéry, 18. Tunis, : Brunschvig, 30,. 47–18.Google Scholar
58 Pour Alger voir les citations pp. 253–4 ci-dessus; pour le reste du monde musulman voir e. g. Qadrī Pasha, p. 82, § 277; Ibn ‘Abidin, 400–1; Clavel, n, 161; Mercier, Code, 97; Mercier, Ilobmis, 77–80
59 Voir Brunschvig, 48.
60 Pour un tel conflit en 1811, voir AN, 228 Mi 14, vol. 13, p. 3; voir aussi De Voulx, Tachrifat, 77. Pour le role du bos yayabasi voir Delphin, 220; Sabatery, 21
61 AN, F 80 1623, le procureur-general au gouverneur-géneral, Rapport sur la réorganisation de la justice musulmane, 10. 3. 1849.Google Scholar
62 Clavel s'appuie sur la jurisprudence de la cour d'Alexandrie á la fin du 19e siécle. La nécessité d'obtenir le consentement de Ľoeuvre pie pour le ṥikr ĽidjdreUayn et le khulū constitua á ses yeux Ľargument principal á Ľappui de aa these, selon laquelle la nue-propriété passe immediatement á ĽceuvTe pie (Clavel, i, 39–43, 144–7; ii, 162–3; voir aussi Terras, 29–37). Cette thése était acceptée par la jurisprudence et la législation française en Algérie (Abribat, 121; Terras, 21–2). Toutefois, elle n'est pas acceptée par la plupart des auteurs, et Clavel a fini par admettre qu'il faut la revoir. Pour sa discussion á ce sujet avec Mercier, et Ľopinion de ce dernier voir Mercier, Code, i-iii. Voir aussi á ce sujet Cattan, 208; Heffening, 1097; Schacht, J., Introduction to Islamic law, Oxford, 1964, 126, 135.Google Scholar
63 Tel fut le destin, probablement plus généralisé, de Ľinzāl tunisien — cf. Clavel, ii, 185, 197.