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Conscientiser les individus au droit: la construction sociale des besoins et demandes juridiques

Published online by Cambridge University Press:  02 January 2013

Aude Lejeune
Affiliation:
CRIS, University of Liege, Massachusetts Institute of Technology, Boston, ISP, ENS of Cachan, Université de Liège, Boulevard du Rectorat 7, B31 4000 Liège, Belgium, aude.lejeune@ulg.ac.be

Abstract

While numerous contemporary studies, in both social psychology and sociology of the law, have addressed legal socialization and legal consciousness on the part of individuals, little work has been done on the complex social construction of the need and demand for legal services. This is by no means a rhetorical question; it involves a number of competing definitions of the relationship between the legal profession and the public, and thus justifies the legal services currently offered. The author shows that policies relating to access to the law and the justice system in France today seek to focus on the user, which means that users must be able to characterize their situation in legal terms and apply to the courts. The process of raising individuals' consciousness of the law is examined against the backdrop of increasing liberalization of social policies.

Résumé

Si la socialisation juridique et la conscience du droit des individus font l'objet de nombreuses études contemporaines en psychologie sociale comme en sociologie du droit, peu de travaux portent sur la construction sociale complexe des besoins et demandes de services juridiques. Loin d'être une question rhétorique, elle renvoie à plusieurs définitions concurrentes des rapports entre les juristes et leur public et justifie par là même l'offre de services juridiques en place. Dans cet article, je montrerai que les politiques d'accès au droit et à la justice ambitionnent aujourd'hui, en France, de replacer l'usager au cœur du dispositif, ce qui implique que celui-ci soit en mesure de qualifier en termes juridiques la situation qu'il vit et de formuler une demande de droit. La conscientisation des individus au droit se trouve ainsi interrogée dans un contexte de libéralisation croissante des politiques sociales.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Canadian Law and Society Association 2011

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24 Panier, , «Les boutiques de droit», p. 153Google Scholar.

25 Il est d'ailleurs intéressant de noter que l'expression «zones de non-droit» était utilisée à l'époque par des militants qui critiquaient les difficultés que rencontraient certains publics à connaître et faire reconnaître leurs droits. Depuis quelques années, cette expression est utilisée dans le langage politique pour qualifier les zones urbaines ou périurbaines dans lesquelles le droit ne s'appliquerait plus et où régnerait le sentiment d'impunité des auteurs de délits et d'insécurité des victimes.

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31 En effet, certaines associations étudiées ici se sont constituées autour du droit alors que d'autres utilisent, parfois bien après leur création, le droit comme outil pour parvenir à leurs objectifs sociaux et politiques.

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45 Par exemple, Kristin Bumiller a montré que les victimes de discriminations ne sont pas en mesure de se mobiliser parce qu'elles ne sont pas conscientes de leurs droits: Bumiller, K., «Victims in the Shadow of the Law: A Critic of the Model of Legal Protection», Signs 12, 3 (1987), 421–39CrossRefGoogle Scholar.

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49 Cependant, ils se distinguent des initiatives françaises parce qu'ils cherchent à favoriser le développement d'une éducation juridique au niveau de la communauté, or cette caractéristique n'est pas présente dans le cas français. Kilwein, «The Decline of Legal Services Corporation».

50 Type de maison instituée comme lieu d'accueil et de concertation afin d'assurer une presence judiciaire de proximité dans les localités où le besoin s'en fait sentir, avec la mission de concourir à la prévention de la délinquance, à l'aide des victimes et à l'accès au droit. Lejeune, A., «Justice institutionnelle, justice démocratique. Clercs et profanes. Les Maisons de justice et du droit comme révélateur de tensions entre des modèles politiques de justice», Droit et Société 66 (2007), 361–81Google Scholar.

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58 Agrikoliansky, «Usages choisis du droit»; Lascoumes, «Changer le droit, changer la société».

59 Jack Katz établit déjà le même constat en 1982 à propos des services juridiques aux Etats-Unis. Selon lui, l'évaluation des différents dispositifs d'accès au droit met en évidence les difficultés liées à la mise en œuvre d'actions collectives et la tendance généralisée à revenir à des consultations plus «classiques», centrées sur le client individuel. Katz, J., The Dilemma of Legal Services: Poor People's Lawyers in Transition, New Brunswick (New Jersey), Rutgers University Press, 1982Google Scholar.

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