Published online by Cambridge University Press: 02 August 2005
L'étude des idées politiques est, malgré l'apparente floraison des approches, d'une homogénéité étonnante. La raison m'en semble être l'incapacité générale des formes de pensée dominantes de dépasser la distinction théorique entre le monde-langage et le “monde-monde”. Que l'on se tourne vers l'exégèse développée par Leo Strauss, vers les différentes versions contemporaines du matérialisme et de la sociocritique, ou vers les théories de moyenne portée à la Quentin Skinner ou à la Pierre Bourdieu, une constante se révèle: les “idées” et la “réalité” sont deux choses bien distinctes, et nul n'oserait se pencher sur les phénomènes de la vie politique sans l'arme cognitive que constitue cette distinction. L'incapacité théorique de dépasser cette dernière, telle est l'intuition à la base de ce texte, est liée à une méconnaissance des idées politiques comme phénomène humain. Avant de donner le détail de cette intuition et d'indiquer le plan de son exploration théorique, il faut définir les notions qui seront ici mises en oeuvre.