Published online by Cambridge University Press: 19 April 2010
The first Nobel Peace Prize was awarded a century ago to Henry Dunant and Frédéric Passy, thus honouring two different aspects of the struggle against war: the endeavour to limit the suffering of war victims through humanitarian action, in particular the creation of the Red Cross; and the fight against war itself, or pacifism. The article traces the history of Dunant's candidacy and the uneasiness to which it gave rise in Geneva. Indeed, while recognizing the merits of Henry Dunant for promoting the idea of what subsequently became the Red Cross Movement, the ICRC with Gustave Moynier as its President considered that the International Committee itself should be a candidate for the Peace Prize. The attempt to put forward the institution (and not the person of Henry Dunant) failed, as did the candidacy of Moynier in the following year. The ICRC did, however, receive the Nobel Peace Prize in 1911, 1944 and, together with the International Federation of Red Cross and Red Crescent Societies, in 1963 (the centenary of the Red Cross).
1 Ministère des Affaires étrangères suisse — Alphonse Dunant (1869–1944), fils du conseiller d'État genevois Albert Dunant, était un cousin éloigné d'Henry Dunant.
2 Les Prix Nobel en 1901, Imprimerie nationale, P. A. Norstedt et fils, Stockholm, 1904Google Scholar. Le Prix Nobel de la Paix est attribué par le Comité Nobel du Parlement norvégien (Storting).
3 Association de la Paix par le Droit, Almanach de la Paix pour 1898, Paris, 1897Google Scholar.
4 Alphonse Dunant à Paul Des Gouttes, 23 février 1901: «Mr. le Président de la Confédération ayant consulté le Conseil fédéral, cette Autorité a été d'avis qu'il ne lui appartenait pas de s'arroger un jugement dans cette question et qu'il y avait, dès lors, lieu pour elle de s'abstenir de toute démarche en faveur de tel ou tel concurrent. (…) Comme vous le voyez, le Conseil fédéral désire rester complètement neutre et laisser au Comité norvégien le soin d'apprécier librement les mérites respectifs des institutions et personnes qui se sont mises sur les rangs pour obtenir le prix dont il s'agit.» Dans une lettre personnelle adressée à Paul Des Gouttes et datée du même jour, Alphonse Dunant précisait: « Si le Conseil fédéral l'avait fait pour vous, il n'y aurait pas eu de raison pour refuser sa recommandation à un autre candidat suisse.» Archives du CICR (ACICR), CR 99/0.
5 Dans un premier article paru dans la livraison de Die Friedens-Warte du 28 octobre 1901, soit avant la proclamation des résultats, Alfred-Hermann Fried conteste la qualification de Dunant pour le Prix Nobel: « Certes, Henry Dunant a passé tambour battant dans le camp des pacifistes ces dernières années; toutefois, la portée de son action ne se situe pas dans la sphère du pacifisme, mais plutôt dans le fait qu'il a créé l'œuvre de la Croix-Rouge; bien qu'il y ait tout lieu de reconnaitre qu'elle signifie un immense pas en avant dans la société, celle-ci n'a pas le moindre rapport avec la notion de pacifisme. Bien au contraire, couronner Henry Dunant en lui décernant le Prix Nobel porterait un coup à l'idée de paix; celle-ci veut faire cesser l'état de guerre et ne se contente pas d'atténuer, par une humanité toujours tardive, les dommages qu'elle cause. L'œuvre d'Henry Dunant présuppose la guerre et c'est pourquoi le Prix Nobel ne pourra jamais lui être attribué, car il doit l'être à celui qui « aurait travaillé le plus et le mieux à la fraternization des peuples et à la suppression ou à la diminution des armées permanents ainsi qu'à la formation et à la propagation des congrès de la paix (…) comme le prescript le texte du testament d'Alfred Nobel.» A.-H. Fried, Die Friedens-Warte, 3e année, 26 octobre 1901, p. 141, Bibl. de l'ONU, Genève, fonds Suttner-Fried. (Traduction CICR). Après l'attribution du Prix, Fried, tout en reconnaissant que, grâce à l'action de Dunant, «l'on a pris conscience pour la première fois de la solidaritè humaine, après de longs siècles de tènèbreuse lutte», réitère son opposition. «Le fait d'attribuer le Prix Nobel à Dunant nous paraît non seulement comme une interprétation erronée des efforts que nous déployons, mais qui plus est, comme une annihilation directe, comme si l'on nous jetait le gant.» Ibid., No 39/40, 23 décembre 1901, p. 154. — Alfred-Hermann Fried reçut le Prix Nobel de la Paix en 1911, conjointement avec Tobias Michael Carel Asser.
6 Baronne Bertha de Suttner, fondatrice de la Société de la Paix autrichienne, Prix Nobel 1905.
7 Bertha de Suttner à Henry Dunant, 7 octobre 1895, BPU, Genève, Ms. fr..2112, p. H2. Voir A. Durant, «l'éevolution de l'idée de paix dans la pensée d'Henry Dunant», De l'utopie à la réalité, Actes du Colloque Henry Dunant (3–5 mai 1985), Société Henry Dunant, Genève, 1988, pp. 353–395.
8 Henry Dunant à Bertha de Suttner, 10 octobre 1895, ONU, Genève, collection Suttner-Fried. Lettre essentielle pour connaître les idées pacifistes d'Henry Dunant.
9 Sur les rapports de la Croix-Rouge et de la paix, J. Pictet, « La Croix-Rouge et la Paix», RICR, No 387, mars 1951, pp. 191–201, Lossier, J.-G., La Croix-Rouge et la Paix, CICR, Genève, 1973Google Scholar, et Durand, A., Le Comité international de la Croix-Rouge, Centre de Recherches européennes de l'Université de Lausanne, Lausanne, 1980Google Scholar, ch. 10, publié dans RICR, mars à août 1981; 2e éd.: CICR, 1982. Voir également du même auteur: «Gustave Moynier et les Sociétés de la Paix »RICR, No 821, septembre–octobre 1996, p. 575 et suiv.
10 Note concernant le Comité international de la Croix-Rouge, siégeant à Genève, ACICR, CR 99/0 (2).
11 Voici la liste des 13 candidats présentés par Christian Lange: W. Randal Cremer, Chevalier Descamps, Elie Ducommun, Henry Dunant, Dr Albert Gobat, Fr. de Martens, Marquis Pandolfi, Frédéric Passy, W. T. Stead, Léon Tolstoï, Bureau international de la Paix, Institut de Droit international, Union interparlelementaire (Bureau interparlementaire). Voir Heudtlass, W., J. Henry Dunant, Gründer des Roten Kreuzes, Urheber der Genfer Konvention, 4e édition, W. Kohlhammer, Stuttgart/Berlin/Köln/Mainz, p. 212Google Scholar.
12 Voir la notice concernant Henry Dunant présentée au Comité Nobel norvégien par le secrétaire de ce Comité. Notice citée en allemand par Willy Heudtlass, ibid., p. 215 et suiv.
13 Dr Gunnar Ahlström, « La petite histoire de l'attribution du Prix Nobel à Sully Prudhomme », dans Le Prix Nobel de littérature, par le Dr Anders Österling, secrétaire perpétuel de l'Académie suédoise, pp. 23–31. Tolstoï était candidat au Prix Nobel de la Paix.
14 « Le Prix Nobel dit de la Paix», Bulletin international des Sociétés de la Croix-Rouge, No 129, janvier 1902, pp. 43–44. Un second article, intitulé «Le fondateur de la Croix-Rouge », parut dans le numéro du Bulletin, No 130, avril 1902. Voir également de Senarclens, J., Gustave Moynier le bâtisseur, Slatkine, Genève, 2000, pp. 283–296Google Scholar.
15 Renseignements obligeamment communiqués par l'Institut Nobel norvégien, Oslo. Le rapport de présentation de la candidature de Gustave Moynier fut écrit par le professeur Herzberg, l'un des principaux conseillers du Comité Nobel, d'après les notices biographiques fournies par Richard Kleen.
16 Paul Des Gouttes, au nom du Comité, avait remercié Maurice Dunant en ces termes: « Le Comité international m'a chargé de vous exprimer sa reconnaissance de l'initiative que vous avez eu l'amabilité de prendre en sa faveur, en votre qualité de neveu et exécuteur testamentaire de Jean Henri Dunant, un des fondateurs de la Croix-Rouge. (…) Le Comité international se plaît à rendre hommage à la générosité de sentiment qui vous a fait agir, et ne manquera pas, lors de sa prochaine séance, de prendre acte devotre démarche désintéressée.», Paul Des Gouttes à Maurice Dunant, 28 avril 1916, ACICR, B CR 99–1.
17 Aujourd'hui Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.