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Mesures auxquelles peuvent recourir les Etats pour remplir leur obligation de faire respecter le droit international humanitaire

Published online by Cambridge University Press:  19 April 2010

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La présente étude traite d'un aspect spécifique d'une question plus vaste qui est la recherche des moyens de mieux faire respecter le droitinternational humanitaire, c'est-à-dire I'exécution de l'obligation de fairerespecter ce droit, telle qu'énoncée à l'article premier commun aux Conventions de Genève de 1949 et à leur Protocole additionnel I de 1977. L'étude repose sur la prémisse qu'il n'y a pas de contestation quant à l'interprétation de cet article premier, en vertu de laquelle l'obligation de faire respecter le droit international humanitaire signifie que toute Haute Partie contractante est tenue de prendre des mesures à l'égard de toute autre Haute Partie contractante qui ne le respecterait pas. Par conséquent, l'étude ne traite pas de cette question, mais plutôt identifie et commente brièvement les différents types de mesures auxquelles peuvent recourir les Etats pour s'acquitter de cette obligation. Les exemples donnés pour les différentes mesures servent simplement à les illustrer et ne sauraient en rien être considérés comme un jugement de l'auteur sur le bien-fondé de ces mesures dans les circonstances oé elles ont été prises.

Type
Mise en œuvre du droit humanitaire
Copyright
Copyright © International Committee of the Red Cross 1994

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References

1 Pour une telle analyse, voir notamment Luigi Condorelli et Laurence Boisson de Chazournes, «Quelques remarques à propos de l'obligation des Etats de respecter et faire respecter le droit international humanitaire en toutes circonstances» dans Christophe Swinarski (ed.), Etudes et essais sur le droit international humanitaire et sur les principes de la Croix-Rouge en l'honneur de Jean Pictet, Martinus Nijhoff, Genève-La Haye, 1984, pp.Google Scholar 17 à 36; Nicolas Levrat, «Les conséquences de l'engagement pris par les Hautes Parties Contractantes de faire respecter les Conventions humanitaires» dans Kalshoven, Frits & Sandoz, Yves (ed.), Mise en aeuvre du droit international humanitaire, Martinus Nijhoff, Dordrecht, 1989, pp. 263 à 296.Google Scholar

2 «…car une telle obligation ne découle pas seulement des Conventions elles-mêmes, mais des principes généraux du droit humanitaire dont les Conventions ne sont que l'expression concrète», Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique) fond, arrêt, CIJ Recueil 1986, par. 220, p. 114. Dans l'affaire de la Barcelona Traction la Cour intemationale de justice (CIJ) a constaté que des obligations des Etats envers la communauté intemationale dans son ensemble peuvent découler des instruments intemationaux de caractère universel ou quasi universel et que tous les Etats peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces obligations soient respectées, Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited, arrêt, CIJ Recueil, 1970, par. 33 et 34.Google Scholar

3 Voir aussi la resolution XXIII de la Conférence intemationale des droits de l'homme, Téhéran, 1968, qui souligne le fait que l'obligation de faire respecter les Conventions incombe même aux Etats qui ne sont pas directement impliqués dans un conflit armé. On notera également qu'aucune réserve ni déclaration interprétative concemant l'article premier n'a été faite. De même, aucun Etat n'a contesté la validité des appels lancés par le CICR en 1983 et 1984 au titre dudit article à tous les Etats parties aux Conventions, en relation avec le conflit entre l'Iran et l'Irak. En outre, tant l'Assemblée générale que le Conseil de sécurité des Nations Unies ont fait référence à ladite obligation en vertu de l'article premier, comme la résolution 681 du 20 décembre 1990 du Conseil de sécurité concemant les territoires arabes occupés par Israël qui, au paragraphe 5, demande aux Hautes Parties contractantes à la IVe Convention de Genève: «…de veiller à ce qu'Israël, puissance occupante, s'acquitte des obligations qu'il a contractees aux termes de l'article premier de la Convention»; et la résolution 45/69, du 6 decembre 1990, de l'Assemblée générale relative au soulèvement (intifada) du peuple palestinien [qui] demande [également ], au paragraphe 3, à tous les Etats parties à la IVe Convention de veiller à ce qu'Israël respecte la Convention, en conformité avec les obligations que leur impose l'article premier de celle-ci.

4 Comme le constatent L. Condorelli et L.Boisson de Chazournes, cet aspect (à l'égard d'autres Etats) de l'obligation de faire respecter porte sur ce qui est requis des Etats face aux violations du droit humanitaire imputables à un autre Etat.Supra, note 1, p. 26.

5 Sandoz, Yves, «Ce serait tout de même un comble de voir le droit international humanitaire, dont la philosophie est de ne pas lier son application au jus ad bellum, devenir lui-même un prétexte à intervention armée». Annales de droit international médical, no 33, 1986, p. 47.Google ScholarVoir également le préambule du Protocole I, considérants 2 et 4. En ce qui concerne les droits de l'homme, «l'emploi de la force ne saurait être la méthode appropriée pour vérifier et assurer le respect de ces droits», Arrêt Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique, CIJRecueil, 1986, par. 268, p. 134.Google Scholar Pour un aperçu général, avec des références détaillées, de l'interdiction de la force en droit international, voir la Commission du droit international: Troisième rapport sur la responsabilité des Etats, chapitre X-A., «L'interdiction de la force» (Doc. A/CN.4/440/Add. 1, 14juin 1991).

II convient de souligner ici que l'inadmissibilité du recours à la force par les Etats se limite à un tel recours entrepris unilatéralement (article 2, par. 4, de la Charte des Nations Unies) et par conséquent, est sans préjudice des cas où interviennent les Nations Unies, conformément aux articles 42 et 43, par. 1, de la Charte. En outre, elle ne porte pas sur le droit de légitime défense individuelle ou collective (article 51 de la Charte).

6 «L'illicéité d'un fait d'un Etat non conforme à une obligation de ce dernier envers un autre Etat est exclue si ce fait constitue une mesure légitime d'après le droit international à l'encontre de cet Etat, à la suite d'un fait internationalement illicite de ce dernier Etat». (Commission du droit international, projet d'article 30 sur la responsabilité des Etats), Annuaire de la Commission du droit international, 1979, vol. 2, p. 128. Concernant l'extinction d'un traité ou la suspension de son application comme conséquence de sa violation, voir article 60, par. 1 à 4, de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Voir aussi la sentence arbitrale de l'affaire concernant l'accord relatif aux services aériens du 27 mars 1946 entre les Etats-Unis d'Amérique et la France, décision du 9 décembre 1978, par. 81. «En présence d'une situation qui comporte à son avis la violation d'une obligation intemationale par un autre Etat, l'Etat a le droit, sous la réserve des règles générales du droit international relatives aux contraintes armées, de faire respecter son droit par des contre-mesures», Recueil des Sentences Arbitrates, vol. XVIII, p. 483. Pour une étude détaillée, voir Frits Kalshoven, Belligerent Reprisals, Sijthoff, Leyden, et Institut Henry-Dunant, Genève, 1971, 389 pp.

7 Cela concerne principalement les représailles. Pour la jurisprudence traitant de la licéité des représailles, se référer aux affaires «Naulilaa» et «Lysne», sentences arbitrales du 31 juillet 1928 et du 30 juin 1930 respectivement, Recueil des Sentences Arbitrales, vol. II, p. 1023 et p. 1052. Cependant, les considérations suivantes s'appliquent aussi, par analogie, aux mesures de rétorsion qui, bien qu'intrinsèquement licites ne devraient toutefois pas dépasser les limites de la licéité. Par exemple, elles doivent respecter le principe de la proportionnalité en relation avec l'objectif poursuivi. Elles ne peuvent être utilisées dans un but autre que celui de mettre fin à l'acte illicite qui est à leur origine. Néanmoins, ni la pratique ni la jurisprudence ne donnent d'indications précises quant aux limites de la licéité des mesures de rétorsion. Pour plus de détails sur la licéité et les considérations connexes relatives aux mesures de rétorsion et aux contre-mesures, voir la Commission du droit international: Troisième rapport sur la responsabilité des Etats, chapitre I.B. «Mesures de rétorsion» (Doc. A/CN.4/440, 10 juin 1991) et Quatrième rapport sur la responsabilité des Etats, chapitre V. «Les contre-mesures interdites» (Doc. A/CN.4/444/Add. 1, 25 mai 1992).

8 Conformément, entre autres, à l'article 60, par. 5, de la Convention de Vienne sur le droit des traités. En outre, le paragraphe4 du même article réserve les dispositions spéeifiques de chaque traité applicable en cas de violation. Aux termes du droit international humanitaire, l'interdiction de prendre certaines mesures a l'egard de personnes protégées est mentionnée dans les articles 46, 47, 13(3) et 33(3) des quatre Conventions de Genève respectivement et dans certains articles du Protocole additionnel I, comme les articles 20, 51(6), 54(4). Voir aussi supra, note 7, le Quatrième rapport sur la responsabilité des Etats, chapitre V.C. «Contre-mesures et respect des droits de l'homme» où le rapporteur observe que «…les limitations imposées pour des considérations d'ordre humanitaire au droit de réaction unilatérale à des faits internationalement illicites ont pris de nos jours (…) une valeur restrictive qui ne le cède qu'à celle de la condamnation du recours à la force» (par. 78). Parmi les exemples qu'il cite à l'appui, on trouve l'arrêt total des relations commerciales avec la Libye décrété en 1986 par les Etats-Unis, qui ont interdit l'exportation vers la Libye de tous biens, technologie ou services en provenance des Etats-Unis à l'exception des publications et des dons d'articlés destinés à soulager des souffrances humaines, tels que denrées alimentaires, vêtements, médicaments et fournitures médicales strictement réservées à des fins médicales (par. 79).

9 II conviendrait aussi d'interpréter cette condition en tenant compte de la résolution 2131 (XX) de l'Assemblée générale du 21 décembre 1965 sur l'inadmissibilité de l'intervention dans les affaires intérieures de l'Etat et la protection de son indépendance et de sa souveraineté, et de la résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970 sur la déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la Charte des Nations Unies, qui toutes deux condamnent l'usage de mesures économiques et politiques par les Etats pour contraindre un autre Etat à subordonner l'exercice de ses droits souverains ou pour obtenir de lui des avantages de quelque ordre que ce soit.

10 Cette expression semble la plus appropriée pour couvrir l'éventail complet des mesures en la matière, plutôt que l'emploi de termes plus restrictifs comme «embargo», qui strictement parlant ne concerne que les exportations, ou «boycott», qui de la même manière se rapporte uniquement aux importations.

11 sujet, A ce, Schindler, voir Dietrich, «Le Comité international de la Croix-Rouge et les droits de l'homme», Revue Internationale de la Croix-Rouge, no 715, janvierfévrier 1979, pp. 3 à 15.Google Scholar

12 Voir les remarques générates qui suivent l'introduction.

13 Voir aussi l'étude récente réalisée sur ce sujet et des sujets connexes par Hans-Peter Gasser, «Ensuring respect for the Geneva Conventions and Protocols : The role of Third States and the United Nations», Meyer, Hazel Fox et Michael M. (eds.) Armed Conflict and the New Law, vol. II, Effecting Compliance, The British Institute of International and Comparative Law, Londres, 1993, pp. 15 à 49.Google Scholar

14 La Charte des Nations Unies : Commentaire article par article, Jean-Pierre Cot et Alain Pellet (ed.), Economica/Bruylant, Paris/Bruxelles, 1985, p. 651 ss.Google Scholar

15 Ibid., p. 654.

16 Supra, note 5.

17 Pour cette raison, le droit international humanitaire s'applique également àtoutes les parties à un conflit armé et indépendamment de considérations relatives à la légitimité du recours à la force (Interventions du CICR sur l'applicabilité du droit international humanitaire aux forces de maintien de la paix des Nations Unies, 47e et 48e sessions de l'Assemblée générale, 1992 et 1993 respectivement). Voir aussi le Rapport sur la protection des victimes de la guerre, préparé par le CICR pour la Conférence internationale pour la protection des victimes de la guerre, publié dans la Revue internationale de la Croix-Rouge, no 803, septembre-octobre 1993, par. 3.1.3. En fait, s'il était admis que le droit international humanitaire permet bien l'emploi de la force armée pour mettre fin aux violations de ce droit, on pourrait aussi soutenir que tout usage de la force armée qui est conforme audit droit à la lettre est de ce fait «licite» en vertu de ce droit, indépendamment des dispositions de la Charte. Ce serait absurde, ce qui est précisément une des raisons pour lesquelles le droit international humanitaire ne peut et ne doit en aucune manière être associe à la 1égitimité du recours à la force.

18 Interprétation des traités de paix, Avis consultatif, C1J, Recueil, 1950, p. 72, où la CIJ fait savoir qu'il lui serait impossible d'exprimer un avis lorsque la question qui lui est posée concerne directement le point essentiel d'un différend actuellement né entre deux Etats de sorte qu'y répondre équivaudrait en substance à trancher un différend entre les parties.

19 Pour plus de détails, voir Sylvie Stoyanka-Junod, La protection des victimes du conflit armé des îles Falkland-Malvinas (1982): Droit international humanitaire et action humanitaire, CICR, Genève, 1984, 45 pp.Google Scholar

20 Voir partie II, par. 11 de la Déclaration finale in RICR, no 803, septembre-octobre 1993, p. 404.