Hostname: page-component-78c5997874-mlc7c Total loading time: 0 Render date: 2024-11-10T15:25:26.626Z Has data issue: false hasContentIssue false

Éditorial : Concrétisation de la vision. L’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement, une initiative stratégique des Instituts de recherche en santé du Canada*

Published online by Cambridge University Press:  01 September 2009

Anne Martin-Matthews*
Affiliation:
Institute of Aging, Canadian Institutes of Health Research, and University of British Columbia
Linda Mealing
Affiliation:
Canadian Longitudinal Study on Aging, Canadian Institutes of Health Research
*
Correspondance à : / Correspondence to: Anne Martin-Matthews, Ph.D. CIHR Institute of Aging University of British Columbia 6303, NW Marine Drive Vancouver, BC, V6T 1Z1 amm@exchange.ubc.ca
Rights & Permissions [Opens in a new window]

Abstract

The Canadian Longitudinal Study on Aging has progressed from a vision initiated by the CIHR Institute of Aging in 2001 to a federally funded national research platform in 2008. The development of the CLSA protocol was enhanced through a series of international peer reviews, a multisectorial Steering Committee, and a CIHR Ethical, Legal, and Social Issues committee; each was essential to the excellence of the science and to making the CLSA relevant to multiple sectors. The CLSA research team, led by three co-principal investigators (Kirkland, Raina, and Wolfson), has developed a unique protocol focusing on aging from cell to society, designed to follow 50,000 people aged 45 to 85, for 20 years. A strategic partnership with Statistics Canada has been crucial to the development and launch of the CLSA. The CLSA will contribute to our understanding of transitions and trajectories within an aging population, and will differ from longitudinal studies of aging worldwide through the breadth of its scope, the early age of recruitment into the study (age 45), the ethno-cultural diversity of Canada’s population, and the potential to link collected data to health administrative data at the provincial level. The CIHR is a novel longitudinal population-based study that will be an unprecedented research resource underpinning multidisciplinary research and evidence-based decision making in aging in Canada.

Résumé

L’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ÉLCV) a progressé à partir d’une vision lancée par l’Institut du vieillissement des IRSC en 2001 à une plateforme nationale de recherche subventionnée par le fédéral en 2008. Le développement du protocole d’ÉLCV a été mis en valeur par une série d’examens internationaux par les pairs, un comité de coordination multisectoriel, et un comité des IRSC des questions d’éthique, juridiques, et sociales; chacun était essentiel à l’excellence de la science et à rendre l’ÉLCV pertinente aux secteurs multiples. L’équipe de recherche de l’ÉLCV, menée par trois cochercheurs principaux (Kirkland, Raina, et Wolfson), a développé un protocole unique se concentrant sur le vieillissement de la cellule à la société – conçue pour suivre 50 000 personnes âgées entre 45 à 85 ans, sur une période de 20 ans années. Une association stratégique avec Statistique Canada a été cruciale au développement et au lancement de l’ÉLCV. L’ÉLCV contribuera à notre compréhension des transitions et de la trajectoire chez une population qui vieillit, et différera des études longitudinales du vieillissement dans le monde entier par rapport á l’ampleur de sa portée, le recrutement des moins âgés dans l’étude (âge 45), la diversité ethno-culturelle de la population du Canada, et au potentiel de lier des données rassemblées aux données administratives de santé au niveau provincial. L’étude d’IRSC est une étude novatrice longitudinale, basée sur la population, qui sera une ressource de recherche sans précédent soutenant la recherche multidisciplinaire et la prise de décision fondée sur des faits dans le domaine du vieillissement au Canada.

Type
Editorial / Éditorial
Copyright
Copyright © Canadian Association on Gerontology 2009

Cette édition spéciale de la Revue canadienne du vieillissement constitue un jalon important pour l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ÉLCV), car elle documente les résultats des études pilotes qui ont contribué au développement de l’ÉLCV. Le rôle destiné à l’ÉLCV est celui de plateforme nationale de recherche, laquelle fournira des renseignements importants à propos de l’état de santé des Canadiens au fur et à mesure qu’ils vieillissent et générera des données qui serviront à de nombreux projets de recherche à l’avenir. Bien que dans d’autres articles du présent numéro se trouve la description de la vision de l’ÉLCV et les détails sur les résultats des études de recherche essentielles à son lancement, le présent document met l’accent sur le procédé de développement de l’ÉLCV ainsi que sur les divers moyens utilisés pour concrétiser cette initiative stratégique de « grande science ».

La vision et le procédé

En 2001, la vision de l’ÉLCV était celle d’un réseau national pancanadien d’infrastructure permettant d’effectuer des recherches interdisciplinaires à la fine pointe basées sur la population, en matière de vieillissement. Cette vision a pris naissance avec Réjean Hébert, premier directeur scientifique (2001–2003) de l’Institut du vieillissement, lequel fait partie des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), avec l’appui du premier conseil consultatif de l’InstitutFootnote 1. L’ÉLCV va beaucoup plus loin que les approches communes qui consistent à se concentrer sur les aspects sociaux ou sur des maladies particulières. Elle se focalise non seulement sur les personnes qui ont atteint un certain âge, mais aussi sur le phénomène du vieillissement lui-même, y compris l’adaptation et les transitions liées au vieillissement. Malgré l’existence d’autres études longitudinales sur le vieillissement dans le monde, l’ÉLCV profite d’un statut particulier en raison de l’unique diversité ethnoculturelle du Canada, des systèmes nationaux de prestation de soins de santé (ce qui peut donner accès à des données administratives sur la santé) ainsi que des éléments distincts du climat, de l’environnement, de la géographie, et des politiques en matière de retraite et des programmes de pension.

À la fin de 2001, l’Institut du vieillissement, en partenariat avec Santé Canada, a commandité un atelier sur invitation nommé Le vieillissement – de la cellule à la société – atelier de planification de l’ÉLCV, qui a eu lieu à Aylmer, Québec, Canada. Cet atelier a rassemblé bon nombre de membres de divers milieux de recherche sur le vieillissement, qui ont discuté des étapes essentielles à la mise en place d’une étude longitudinale canadienne sur le vieillissement, y compris la conception du protocole, les partenaires clés et la formation d’un comité directeur. Un appel de demandes (AD) pour la conception du protocole de l’ÉLCV a été lancé en 2001Footnote 2. Bien que l’Institut du vieillissement ait été le principal institut des IRSC pour l’AD, 10 des 12 autres instituts des IRSC ainsi que l’organisme des IRSC lui-même ont été des partenaires financiers dans cette initiative, tout comme Santé Canada. Une demande a été reçue en réponse à l’AD, et l’étendue de l’équipe demanderesse était réellement pancanadienne et multidisciplinaire, ce qui correspondait exactement aux espérances lors de la diffusion de l’AD. L’équipe était constituée de trois cochercheurs principaux (Kirkland, Raina et Wolfson), appuyés par des directeurs de thème, des conseillers scientifiques principaux et des conseillers institutionnels principaux, et comprenait plus de 200 cochercheurs à la grandeur du pays. Travaillant sur huit thèmes différents, cette équipe a développé l’ébauche d’un protocole de recherche, de 2002 au début de 2004. Un comité directeur multisectorielFootnote 3 a été établi, ayant comme mandat de superviser l’évolution et la concrétisation du protocole de l’ÉLCV. Présidé par le directeur scientifique de l’Institut du vieillissement des IRSC, le comité était formé de représentants de Santé Canada, de Statistique Canada, de l’Association canadienne de gérontologie, de l’Institut canadien d’information sur la santé, du Conseil canadien des organismes bénévoles en santé, de Merck Frosst Canada et des directeurs scientifiques des instituts des IRSC suivants : l’Institut de la santé publique et des populations, l’Institut de l’appareil locomoteur et de l’arthrite ainsi que l’Institut des services et des politiques de la santé. D’autres spécialistes, par exemple feue Betty Havens, directrice de l’étude longitudinale du phénomène du vieillissement au Manitoba, faisaient partie des membres du comité directeur. Des consultations auprès de différents ministères fédéraux, entre autres Ressources humaines et Développement des compétences Canada, ont également eu lieu.

À l’époque où l’ébauche du protocole et un plan pour le développement du travail considérable à effectuer ont été soumis au comité directeur au début de 2004, Anne Martin-Matthews a succédé à Réjean Hébert au poste de directeur scientifique de l’Institut du vieillissement. En mars 2004, le protocole, le plan et le budget ont fait l’objet d’un examen par un comité international d’experts. Cet examen était importante tant pour les IRSC que pour l’ÉLCV, car les commentaires recueillis constituaient une évaluation du mérite et fournissaient des recommandations permettant d’optimiser les aspects scientifiques et techniques de l’ébauche du protocole. Le comité a conclu que l’équipe demanderesse démontrait suffisamment d’engagement et de connaissance pour préparer l’initiative et réussir son lancement. Il a également recommandé une révision et une nouvelle soumission de l’ébauche du protocole après avoir appliqué ses commentaires. Les recommandations du comité comprenaient la rectification de la chronologie afin de mener d’autres études pilotes clés et des observations à propos de la structure d’administration. Par ailleurs, le comité encourageait fortement la continuité des efforts en vue de bâtir une relation avec Statistique Canada.

Le contexte des IRSC

Au moment même où l’équipe de recherche de l’ÉLCV travaillait pour réviser et développer l’ébauche du protocole, des développements ont été effectués en parallèle aux IRSC. Ceux-ci ont aidé à constituer une base pour appuyer l’initiative. L’approbation de l’ÉLCV en tant qu’« initiative stratégique transsectorielle » par le conseil scientifique des IRSCFootnote 4 (formé de treize directeurs scientifiques d’instituts, ainsi que des vice-présidents et du président des IRSC) a été un événement crucial. L’ÉLCV et une étude connexe de cohortes sur les naissances fut dorénavant menées sous l’égide de l’Initiative sur la santé des Canadiens à tous les stades de la vie (ISCSV)Footnote 5. Le plan stratégique de 2004 des IRSC, Investir dans l’avenir du Canada : Plan stratégique des IRSC pour l’innovation et la recherche en santé, a cerné l’engagement de l’organisme dans le développement de plateformes et d’initiatives nationales de recherche. L’ISCSV était une des quatre principales initiatives transsectorielles définies dans le Plan stratégique, et il était reconnu que l’échelle de mise en œuvre de ces initiatives était conditionnelle à la disponibilité du financement des IRSC et des partenaires. Pendant la plus grande partie de son développement historique aux IRSC, l’ÉLCV était valorisée et soutenue dans l’optique qu’elle sera liée (d’une quelconque manière) à une étude nationale sur les naissances, sous l’égide de l’ISCSV, dont l’objectif était de faciliter la mise en place d’un programme de recherche afin de mener de grandes études longitudinales sur les Canadiens à partir de plusieurs centres. De telles études améliorent la compréhension 1) du rôle et de l’interaction que jouent divers facteurs génétique et environnementaux, lesquels constituent des facteurs au développement humain et aux processus de vieillissement au cours de la vie, 2) des causes multifactorielles et de l’évolution des maladies communes et 3) l’utilisation des services de soins de santé.

Phase de développement I : 2004–2006

Au printemps 2004, le rapport du comité international d’examen par les pairs sur le protocole révisé a été reçu. En plus de la révision de l’ébauche du protocole, le comité a fourni des conseils importants aux IRSC au sujet de l’engagement qui devait alors être pris pour continuer le travail de développement nécessaire à la mise en place de cette initiative nationale, ce qui requérait un financement d’au moins deux ans. Le message était clair : la prochaine phase de développement de l’ÉLCV ne devait pas tarder, et le financement devait être obtenu sans interruption.

À ce moment, un tournant stratégique important dans l’histoire de l’ÉLCV a eu lieu. Les avancées notoires de l’ÉLCV ainsi que son concept et sa valeur salués internationalement ont été reconnus par les IRSC. Des ressources largement supérieures à ce qui est normalement accordé à l’Institut du vieillissement (même si on compte les ressources partenaires provenant d’autres instituts) étaient nécessaires pour continuer le développement de l’ÉLCV : le conseil d’administration des IRSC a donc été approché pour l’obtention d’un soutien financier. En avril 2004, le comité directeur du conseil d’administration a approuvé une subvention intérimaire de 250 000 dollars pour soutenir le développement de l’ÉLCV, à condition qu’une discussion en profondeur ait lieu lors de la réunion du conseil d’administration en juin de la même année. Conscients qu’ils travaillaient dans un environnement jamais vu en matière de développement et de financement pour ce type d’initiative par les IRSC à ce stade de son évolution, les cochercheurs principaux ont produit un plan actualisé pour le développement de l’ÉLCV, comprenant un budget d’envergure. Après la révision du plan par des arbitres externes et les IRSC, la directrice scientifique de l’Institut du vieillissement et le vice-président de la recherche aux IRSC à l’époque, Mark BisbyFootnote 6, ont présenté les arguments soutenant l’ÉLCV lors de la réunion du conseil d’administration de juin 2004. Le résultat : l’approbation de 1,7 million de dollars additionnels en financement pour le développement de l’ÉLCV. Les projets financés devaient représenter des études de faisabilité méthodologiques pertinentes et utiles pour d’autres initiatives de cohortes dans les IRSC, en lien avec l’ISCSV, et non seulement avec l’ÉLCV. Toutes les études de faisabilité publiées dans le présent numéro ont été financées à ce moment. Grâce au soutien du conseil d’administration, l’ÉLCV a effectué une transition importante : elle est passée d’une initiative de l’Institut du vieillissement à une initiative profitant de l’appui et des ressources de l’ISCSV transsectorielle stratégique des IRSC.

Phase de développement II : 2006–2008

Deux ans plus tard, les études de faisabilité étaient terminées, et il était nécessaire d’obtenir un soutien financier pour la réalisation du pilote de l’ébauche du protocole ainsi que pour se rapprocher du lancement de l’initiative. Le comité international d’examen par les pairs a de nouveau été convoqué pour évaluer le rapport sur les résultats des études pilotes (phase I de développement) et la demande de financement de la phase II de développement. Le comité a accueilli positivement les améliorations effectuées à la soumission originale et a souligné que l’approche de l’ÉLCV pour traiter tant les aspects biologiques que sociaux était bien planifiée, solide, de très grande valeur, et qu’elle possédait suffisamment de potentiel pour avoir des répercussions sur les politiques et les pratiques. Le comité a mentionné que l’ÉLCV contribuera à la science sur le vieillissement au Canada et ailleurs en liant divers secteurs de recherche différents. De plus, l’étude générera des données qui serviront à informer le domaine de la santé publique et des politiques sociales sur des sujets comme la gestion des maladies chroniques, le lien de l’état de santé avec le passage à la retraite, et la prestation de soins de santé. L’étude comporte de nombreux bienfaits, par exemple la création de nouveaux emplois, l’augmentation de la capacité de la recherche, le maintien des scientifiques au Canada et – l’objectif principal – l’amélioration de la santé des Canadiens vieillissants.

En juin 2006, après avoir pris en considération la récente révision internationale, le conseil d’administration des IRSC a accordé un appuie financier de 2,1 millions de dollars pour la période de 2006 à 2008. Ces fonds ont été attribués spécialement au projets pilote et aux études de faisabilité dans le but de finaliser le protocole de l’ÉLCV, par exemple l’analyse des attitudes adoptées par les Canadiens au sujet de la participation à long terme dans l’ÉLCV, ainsi que pour améliorer le processus de consentement éclairé, en traitant certains problèmes comme la déficience cognitive parmi les participants de l’étude. Le développement d’un partenariat avec Statistique Canada (décrit ci-dessous) a été un élément critique dans l’obtention de ce soutien additionnel du conseil d’administration.

L’engagement des IRSC envers l’ÉLCV a été démontré non seulement par le financement des phases de planification et de faisabilité de l’ÉLCV, mais aussi par l’attribution de ressources à l’intérieur des IRSC pour former un comité sur les questions éthiques, juridiques et sociales (avec le mandat de conseiller les dirigeants des IRSC et de l’ISCSV sur les actions et les pratiques d’excellence à adopter en ce qui concerne les problèmes de l’ISCSV) et la création, en 2006, du poste de directeur général de l’ÉLCV. Cette position a marqué une autre étape stratégique déterminante pour l’ÉLCV, car elle signifiait que les IRSC reconnaissaient l’importance du développement de partenariats et de la supervision de grandes initiatives stratégiques (au-delà de l’étendue des rôles des scientifiques). Cela a également été d’une importance stratégique dans la négociation de la collaboration entre l’ÉLCV et Statistique Canada, pendant laquelle une proposition a été formulée voulant que l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes 4.2 (ESCC 4.2) soit centrée sur le vieillissement et devienne le moyen de recrutement de 20 000 personnes, à titre de cohorte initiale (globale) pour l’ÉLCV. Le détachement pendant un an d’un directeur de Statistique Canada pour occuper le poste de directeur général dans l’organisation des IRSC a facilité la relation entre l’équipe de recherche de l’ÉLCV et Statistique Canada, et ce, à un moment crucial, au cours duquel le protocole de l’ÉLCV était en période d’adaptation pour permettre son utilisation avec l’ESCC 4.2.

Sécuriser le soutien pour le lancement

Le partenariat avec Statistique Canada est devenu encore une fois stratégiquement important au printemps 2008, alors que l’ESCC 4.2. se trouvait à ses dernières étapes de planification. Un financement additionnel était nécessaire afin de diminuer la fourchette d’âge de l’échantillon proposé pour l’ESCC, soit de réduire l’âge limite minimal de 55 ans à 45 ans, car il s’agissait de l’âge minimum d’admission idéal à l’ÉLCV. De plus, Statistique Canada a réclamé à l’équipe de l’ÉLCV une confirmation que le financement du deuxième cycle de collecte de données sur les 20 000 individus âgés de 45 à 85 ans recrutés pour l’ÉLCV était assuré. Sans cette confirmation, Statistique Canada ne pouvait pas fournir les données des participants de l’ESCC 4.2 qui avaient accepté de partager avec l’ÉLCV les renseignements relatifs à leur identification dans le but d’être recrutés par l’ÉLCV. En fonction des politiques et procédures rigoureuses maintenant en place aux IRSC relatives au traitement de telles demandes de financement, les cochercheurs principaux de l’ÉLCV et le personnel de l’Institut du vieillissement ont travaillé assidument tout au long du printemps 2008 pour garantir l’engagement de financement de 3,85 millions de dollars par les IRSC, lequel était nécessaire pour renforcer le partenariat avec Statistique Canada, et ainsi recruter la cohorte initiale de l’ÉLCV.

Un autre défi restait à relever : l’obtention du financement nécessaire au lancement d’une « cohorte complète » de 30 000 personnes supplémentaires, afin de pouvoir effectuer des évaluations cliniques durant la période de 20 ans de l’ÉLCV. Plusieurs facteurs augmentaient le défi. L’ÉLCV et le développement d’une cohorte nationale sur les naissances progressaient maintenant à une vitesse différente et, d’une certaine façon, indépendamment l’un de l’autre. De plus, leur lien éventuel dans le cadre de l’ISCSV devenait de moins en moins probable à court terme (les IRSC maintiennent toutes possibilités potentielles de collaboration à l’avenir). Au printemps 2008, une grande étude de cohortes sur le cancer importante a été lancée, où il fut alors reconnu que d’autres cohortes nationales de grande échelle, possédant chacune un objectif distinct, mais ciblant des groupes d’âge quelque peu similaires, pouvaient éprouver de la difficulté à obtenir le soutien nécessaire à long terme.

Cependant, un certain nombre de facteurs ont annoncé le soutien des IRSC à l’ÉLCV. En 2008, le Conseil des sciences, de la technologie et de l’innovation, relevant du ministre de l’Industrie, a recommandé quatre domaines sous-prioritaires de recherche à l’intérieur du domaine prioritaire « sciences et technologies de la santé et sciences de la vie connexes ». Parmi ces domaines se trouve la santé dans une population vieillissanteFootnote 7. Les recommandations ont été acceptées par le ministère de l’Industrie en septembre 2008. Stratégiquement, il s’agissait d’une étape très importante. De plus, le conseil consultatif de l’Institut du vieillissement a continué d’offrir un soutien non négligeable à l’ÉLCV. Par exemple, il a créé en 2007 un concours semestriel de bourse pour l’ÉLCV (ce programme pluriannuel vise à construire et à renforcer la capacité et l’expertise en matière de recherche au Canada dans les études de mesure de la santé, en focalisant sur l’ÉLCV et d’autres études longitudinales similaires) et il s’est engagé en mai 2008 à verser 2,5 millions de dollars de plus en financement pour les projets de recherche qui utiliseront les données de l’ÉLCV pour la période de 2011 à 2013. Le soutien continu des partenaires de l’initiative, surtout l’Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada, le Réseau québécois de la recherche sur le vieillissement (financé par le Fonds de la recherche en santé du Québec), le réseau de recherche sur le vieillissement de la Colombie-Britannique (financé par la Michael Smith Foundation for Health Research de la Colombie-Britannique), ainsi que l’Université McMaster, l’Université McGill, et l’Université Dalhousie aux trois cochercheurs principaux, a été, depuis 2002, un élément essentiel au succès des efforts de partenariat de l’ÉLCV.

En plus de ces facteurs, trois enjeux ont été particulièrement importants dans les décisions prises par les IRSC pour financer l’ÉLCV. L’engagement de Statistique Canada pour des contributions en nature à la conception de l’ÉLCV et au recrutement de la cohorte initiale ont indiqué aux IRSC 1) à quel point l’étude a de l’importance sur le plan national, 2) sa faisabilité opérationnelle et 3) le niveau d’intérêt manifesté par les autres partenaires fédéraux au sujet des données longitudinales sur le vieillissement. De plus, la valeur scientifique de l’ÉLCV et ses répercussions potentielles sur les politiques et les pratiques étaient bien définies, et confirmées par les nombreux examens internationaux par les pairs. Par ailleurs, la ténacité et le dévouement de l’équipe fondamentale de l’ÉLCV depuis les six dernières années de développement du projet – à travers les multiples étapes d’examens rigoureux par les pairs, les hauts et les bas des discussions concernant les initiatives de cohortes indépendantes ou la collaboration et l’engagement des membres de l’équipe s’étalant sur une période considérable de leur carrière universitaire – ont été pris en considération. Le 25 juin 2008, le conseil scientifique des IRSC a voté pour un soutien financier additionnel de 19,65 millions de dollarsFootnote 8 afin de mettre en application le volet complet de l’ÉLCV à travers dix sites pancanadiens. Cet engagement de financement a finalement été approuvé en décembre 2008. L’engagement total des IRSC dans le soutien de la phase de mise en œuvre de l’ÉLCV totalise maintenant 23,5 millions de dollars, ce qui permet à l’ÉLCV de se positionner fermement en tant que plateforme de recherche et de données nationale et longitudinale. La vision s’est concrétisée.

Réalité, risque et rendement de l’investissement

Le lancement de l’ÉLCV signale une nouvelle ère dans la recherche sur le vieillissement au Canada. L’ampleur, l’étendue et la durée de cette étude changeront la façon dont les études sur le vieillissement seront menées partout au pays, et sa création a déjà changé la manière dont le Canada est perçu sur le plan mondial. En effet, le Canada se distingue comme un joueur majeur dans la recherche, non seulement en raison de son engagement dans le domaine de la recherche sur le vieillissement, mais aussi en raison de son investissement dans une initiative scientifique de cette échelle. Quelques mois après l’obtention du financement, l’ÉLCV a participé à plusieurs réunions internationales axées sur l’harmonisation et la comparaison transnationales des données et des accès.

Par ailleurs, le financement de l’ÉLCV représente une approche différente du soutien de la recherche au Canada. Il ne s’agit pas d’un projet de recherche entamé par un chercheur, mais d’une « plateforme » de recherche stratégiquement amorcée, laquelle fournira des données pour de nombreuses recherches futures sur le vieillissement et pour les parties prenantes pertinentes. Sa nature unique et l’ampleur de son échelle défient les modèles traditionnels d’opération et de financement de la recherche. Cette initiative n’était qu’un rêve pour l’Institut du vieillissement, et sa mise en application en 2008 a été possible uniquement parce que les IRSC ont reconnu, à un moment critique, que son développement ne pouvait être garanti qu’en tant qu’initiative transversale stratégique, moyennant un investissement considérable en ressources et en financementFootnote 9.

De plus, la concrétisation de la vision de l’ÉLCV comporte un historique de risques reconnus et encourus. Les membres de l’équipe, en particulier les cochercheurs principaux, ont pris des risques en investissant considérablement de leur capital scientifique et en respectant leur engagement dans un projet qui a tardé à démarrer, dont les résultats étaient souvent incertains, et qui allaient prendre quelques années avant d’être entièrement mis en œuvre. L’Institut du vieillissement et les IRSC ont assumé des risques non négligeables au cours du processus : les risques associés au financement de 2002, 2004 et 2006 alors que l’objet de ces investissements, soit le lancement réussi de l’ÉLCV, n’était pas garanti. Encore aujourd’hui, bien que l’étude soit amorcée, il est reconnu que la durabilité d’une initiative comme l’ÉLCV fait l’objet d’éléments se trouvant bien au-delà des capacités des IRSC à eux seuls.

Malgré tout, durant les sept années qui se sont écoulées, de la première réunion en novembre 2001 à l’approbation du financement de la mise en œuvre de l’ÉLCV en décembre 2008, les avantages de cette initiative stratégique ont indéniablement été reconnus par les chercheurs, les partenaires gouvernementaux et non gouvernementaux, les investisseurs et les membres du domaine. Parmi les avantages de cette initiative se trouve le potentiel de contributions permettant d’aider à cerner des façons de prévenir des maladies et d’améliorer les services sanitaires et sociaux offerts aux personnes âgées, ainsi que de mieux comprendre les répercussions de certains facteurs non médicaux, comme les changements économiques et sociaux, sur les individus au fur et à mesure qu’ils vieillissent. L’énorme banque de données recueillies générera également de nouvelles connaissances sur les nombreux facteurs biologiques, cliniques, psychosociaux et sociétaux interreliés qui viennent influencer le vieillissement sain. De plus, trois forces soulignées par les réviseurs lors des examens internationaux par les pairs ont grandement contribué au succès de l’obtention du soutien nécessaire à cette initiative : l’amorce de l’étude sur des participants dès la mi-vie, la capacité à contribuer à la compréhension du vieillissement dans le contexte de diversité ethnoculturelle du Canada, et la possibilité de lier les données fournies par les participants de l’étude aux données administratives sur la santé de leur province.

Le lancement de l’ÉLCV symbolisait la concrétisation de la vision. Les objectifs qui poussent la science sont maintenant à notre portée, et les applications des connaissances peuvent maintenant être décelées. Tant de possibilités motivantes et vivifiantes! Maintenant, le vrai travail ardu commence.

Footnotes

*

Les auteurs sont reconnaissantes de conseiles et contributions utiles de Christine Fitzgerald, vice-présidente exécutive actuelle aux IRSC, lors de la préparation de cet article.

1 Parmi les membres du premier conseil consultatif de l’Institut du vieillissement se trouvait feue Betty Havens, chercheuse principale dans l’étude longitudinale du phénomène du vieillissement au Manitoba, ainsi que des personnes familières avec les trois cycles de collecte de données de l’Étude sur la santé et le vieillissement au Canada (1991–1992, 1996–1997 et 2001–2002), y compris N. Chappell, P. Durand, R. Hébert, Y. Joanette et K. Rockwood. Leur expérience sur ces études et leurs connaissances sur les défis associés à la mise en place et au maintien d’une recherche longitudinale ont été des facteurs importants durant les discussions de la première commission consultative, ainsi que pour appuyer l’ÉLCV. A. Martin-Matthews était la vice-présidente du premier conseil consultatif de l’Institut à l’époque de ces discussions.

2 Il est possible de consulter l’ADO à l’adresse suivante : http://www.cihr-irsc.gc.ca/f/4169.html. La date limite de la soumission était janvier 2002. Le financement offert était de 462 024 dollars.

3 Ce comité a supervisé le développement du protocole. Santé Canada, Statistique Canada, l’Institut canadien d’information sur la santé, l’Association canadienne de gérontologie, le Conseil canadien des organismes bénévoles en santé, Merck Frosst Canada et les autres institutions des IRSC, en tant que membres du comité directeur de l’ÉLCV entre 2002 et 2006, se sont joints à la planification et à la supervision du développement du protocole de l’étude. Cette approche était essentielle pour établir la pertinence de l’ÉLCV dans divers secteurs. Ce comité a été officiellement dissous en 2006, après l’acceptation de l’ébauche (à l’époque) du protocole de l’ÉLCV, conformément aux exigences de l’ADO de 2002.

4 À divers moments de son histoire, ce groupe était connu sous le nom de Comité de planification et des priorités de recherche (CPRR) et de Comité de la recherche et de l’application des connaissances (CRAC) des IRSC. Le groupe a reçu l’appellation de conseil scientifique depuis septembre 2008, mais d’autres termes peuvent lui faire référence dans des documents diffusés antérieurement.

5 Quatre directeurs scientifiques figuraient comme chefs de « cohortes » dans les IRSC. Ils ont travaillé en vue de faire évoluer une initiative coordonnée de cohortes : John Frank (Institut de la santé publique et des populations), Michael Kramer (Institut du développement et de la santé des enfants et des adolescents), Anne Martin-Matthews (Institut du vieillissement) et Rod McInnes (Institut de génétique).

6 Au nom des membres de la recherche sur le vieillissement au Canada, les auteures du présent document tiennent à remercier sincèrement Mark Bisby pour l’appui qu’il a fourni à l’ÉLCV pendant les étapes déterminantes de l’étude lors du procédé de développement et des demandes de financement adressées aux IRSC.

7 Le rapport du Conseil des sciences, de la technologie et de l’innovation peut être consulté à l’adresse suivante : http://www.stic-csti.ca/eic/site/stic-csti.nsf/fra/h_00007.html (date de consultation : 7 avril 2009).

8 En autorisant ce financement, le conseil scientifique reconnaissait que ce montant représente environ 86 pour cent du financement exigé pour couvrir les cinq premières années de l’ÉLCV. Il est prévu que d’autres partenaires de financement soient intéressés par cette initiative.

9 Des initiatives scientifiques d’envergure requièrent également la supervision d’une gestion complexe, de partenariats et de structures organisationnelles. Partant de cette réalité, les IRSC ont nommé Linda Mealing au poste de directrice adjointe de l’ÉLCV pour la période 2009–2012.

References

Référence

Instituts de recherche en santédu Canada (2004). Investir dans l’avenir du Canada: Plan stratégique des IRSC pour l’innovation et la recherche en santé, Ottawa: IRSC.Google Scholar