Aucune réponse claire n'a été apportée, à ce jour, à la question du type de désorganisation du langage schizophrénique. Les résultats concernant les compétences lexicales et syntaxiques des schizophrènes restent controversées. Cependant l'existence de données en faveur d'une atteinte de ces compétences impose de ne pas abandonner trop vite ce champ d'études mais d'interroger plutôt les conditions méthodologiques dans lesquelles elles ont été réalisées. L'hétérogéneité probable des malades évalués dans ces études nous à conduit a opter pour une étude de cas individuel. Il est en effet permis de penser que seuls certains schizophrènes peuvent présenter ce type d'anomalies. L'utilisation de plusieurs tâches expérimentales mettant toutes en jeu les compétences lexicales et syntaxiques mais évaluant chacune des stratégies lexicales et syntaxiques différentes devait permettre une meilleure caractérisation des stratégies linguistiques employées par les sujets de notre échantillon. Afin d'apprécier les performances des 10 sujets schizophrènes éva-lués, par rapport aux performances de sujets normaux, nous avons suivi la méthodologie utilisée par J. Segui (1974, 1976) et M. Kail (1974, 1979) et pris comme point de référence pour l'intérpretation des résultats ceux obtenus chez des sujets normaux par ces auteurs lors de tâches similaires. Les résultats de l'ensemble des sujets de notre échantillon sont comparables. Dans les tâches de production d'énoncés à partir d'une suite de lexèmes et dans les tâches de complétement de phrases, les performances des schizophrènes sont comparables à celles du sujet normal, Dans les tâches de rappel, les performances de nos sujets sont moins bonnes que celles du sujet normal, mais il existe chez le schizophréne comme chez le sujet normal une tendance à organiser le matériel et les stratégies d'organisation impliquant les compétences lexicales et syntaxiques qui possèdent, quand elles sont mises en œuvre, les mêmes caractéristiques que celles miscs en évidence chez le sujet normal (organisation hiérarchique ou organisation formelle). Ces résultats (résumés dans le Tableau III) vont davantage dans le sens d'une difficulté à découvrir ou à appliquer des stratégies permettant d'exploiter les caractéristiques structurelles du matériel plutôt que dans celui d'une atteinte de ces compétences ellesmêmes chez nos sujets schizophrènes.