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La Question de L'algèbre Mathématiques et rhétorique des hommes de droit dans la France du 16e siècle

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Giovanna C. Cifoletti*
Affiliation:
EHESS — Centre A. Koyré Paris

Extract

Dans les Regulae ad directionem ingenii, Descartes crivait :

« Il faut parcourir directement la difficult propose, en faisant abstraction de ce que certains de ses termes sont connus, d'autres inconnus, et en regardant par des parcours vrais comment ils dpendent mutuellement chacun les uns des autres ».

Descartes marquait ainsi le dbut de la mathmatisation des sciences. En effet, il constituait une nouvelle faon de concevoir la question scientifique. Pour la science ancienne, formuler un problme signifiait chercher les proprits d'une substance et relevait donc de la logique.

Summary

Summary

We have inherited from seventeenth-century philosophy of the new sciences a negative view of sixteenth-century rhetoric and dialectic. However, a close study of the French algebraic tradition shows not only that sixteenth-century rhetoric and dialectic should be considered as the conceptual framework for scientific discourse later replaced by algebra but that, in turn, algebra itself was significantly modified within this framework. Combining cultural and social history with the history of the discipline, we can see that this transformation occurred when algebra moved from the Italian and German schools, closer to abacist mathematics and the commercial context, to the French court and humanist milieu of the Collège Royal and related publishers. French dialectic, in particular, was the source of borrowings for algebraic notions. Not only was the presentation of the new discipline forged in the dialectical style, but the very idea of a scientific question was explicitly associated to that of an algebraic problem. This transition allowed better known scientists such as Viète and Descartes to generalize the form of algebraic problems and eventually to conceive of applying it to sciences beyond mathematics. A. Koyré's view of rhetoric as opposed to science stems from the cartesian legacy.

Type
Rhétorique et Civilité. L'Histoire des Sciences. 16e-17e Siècles
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1995

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References

1. René Descartes, Règles utiles et claires pour la direction de l'esprit et la recherche de la vérité, traduction selon le lexique cartésien, et annotation conceptuelle de Jean-Luc Marion, avec des notes mathématiques de Pierre Costabel, La Haye, Martinus Nijhoff, 1977, règle XVII, p. 74.

2. Les sciences à la Renaissance constituent désormais un secteur important de l'historiographie des sciences, et souvent dans une perspective de continuité avec la révolution scientifique. Dans ce sens il faut voir la réévaluation du rôle des universités et de l'aristotélisme, surtout chez Schmitt, Charles, Aristotle in the Renaissance, Cambridge, Ma., Harvard University Press, 1983.Google Scholar Voir aussi le classique Aristotelismo veneto e scienza moderna, Atti del 25e anno accademico del Centro per la storia délia tradizione aristotelica nel Veneto, sous la direction de L. Olivieri, Padoue, Antenore, 1983. Vont dans le même sens les études sur les jésuites, et particulièrement leur enseignement des mathématiques : après les travaux classiques de F. De Dainville et de G. Codina Mir, voir ceux de U. Baldini, notamment Legem impone subactis. Studi su filosofia e scienza dei gesuiti in Italia, 1540-1632, Rome, 1992, ou ceux de W. Wallace, Galileo, theJesuits, and the Médiéval Aristotle, Londres, Variorum, 1991. Pour ce qui concerne la logique, la dialectique et l'encyclopédie du savoir dans l'enseignement humaniste, voir le classique C. Vasoli, La dialettica e la retorica neU'umanesimo. « Invenzione » e « Metodo » nella cultura del XV e XVI secolo, Milan, Feltrinelli, 1968, ainsi que les travaux de L. Jardine cités plus loin. Un panorama significatif apparaît à la lecture de Reappraisals of the Scientific Révolution, D. C. Lindberg, R. S. Westman éds, Cambridge, Cambridge University Press, 1990. Pour la direction « rhétorique », qu'il suffise de citer The Literary Structure of Scientific Argument, P. Dear éd., Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 1991. Pour l'histoire sociale des sciences à la Renaissance, Biagioli, M., Galileo Courtier. The Practice of Science in the Culture of Absolutism, Chicago, University of Chicago Press, 1993.Google Scholar

3. En ce qui concerne les mathématiques dans l'Italie de la Renaissance, voir Rose, P. L., The Italian Renaissance of Mathematics : Studies on Humanists and Mathematicians from Petrarch to Galileo, Genève, Droz, 1975.Google Scholar

4. Par exemple, par rapport aux travaux de M. S. Mahoney, The Royal Road, PhD dissertation, Princeton, 1967, ainsi que M. S. Mahoney, « The Beginnings of Algebraic thought in the Seventeenth Century », dans Gaukroger, S. éd., Descartes : Philosophy, Mathematics and Physics, Brighton, 1980, pp. 141155.Google Scholar L'auteur ne se proposait pas de reconstruire le réseau parisien intéressé par l'algèbre, ni de montrer les rapports personnels directs entre Ramus et Viète.

5. Voir J. Morse, The Réception of Diophantus’ « Arithmetic » in the Renaissance, PhD dissertation, Princeton, 1981. L'auteur ne se proposait pas de traiter dans cette perspective les auteurs français avant Viète.

6. Ces thèses et la périodisation de la tradition algébrique française au 16e siècle sont développées dans Giovanna C. Cifoletti, Mathematics and Rhetoric. Jacques Peletier, Guillaume Gosselin and the French Algebraic Tradition, PhD dissertation, Princeton, 1992. Ce texte contient aussi une bibliographie sur les rapports entre l'humanisme et les sciences

7. Une autre direction à suivre consisterait à mettre les équations en rapport avec la théorie des proportions, en explicitant leurs liens avec la tradition médiévale.

8. Le corpus complet de ces ouvrages se trouve à la Bibliothèque nationale, et a fait l'objet d'une exposition à la Réserve des Imprimés. Voir Giovanna Cifoletti, C., Subtilior arithmetica ou une science briefve et claire : les algébristes français du XVIe siècle, leurs sources imprimées et leurs épigones représentés à la Bibliothèque Nationale, catalogue de l'exposition à la Réserve des livres imprimés, Paris 1991.Google Scholar

9. Le Livre dans l'Europe de la Renaissance, Actes du XXVIIIeColloque international d'études humanistes de Tours, Aquilon, P., Martin, H. J. éds, Paris, Promodis, Édition du Cercle de la Librairie, 1988Google Scholar, en particulier Isabelle Pantin, « Les problèmes de l'édition des livres scientifiques : l'exemple de Guillaume Cavellat ». Voir en outre, Imprimeurs et Libraires Parisiens au XVIesiècle, d'après les mss. de P. Renouard, t. III, « Baquelier — Billon », Paris, Service des travaux historiques de la ville de Paris, 1979, ainsi que Isabelle Pantin, Fascicule hors série « Guillaume Cavellat et Cavellat — Marnef », Paris, Bibliothèque nationale, 1986.

10. Parmi les études à ce sujet, rappelons Gordon, A. L., Ronsard et la Rhétorique, Genève, Droz, 1970 Google Scholar et Meerhoff, K., Rhétorique et poétique au XVIe siècle en France. Ramus, Peletier et les autres, Leyde, Brill, 1986.Google Scholar Autour de ces textes il y a bien entendu une vaste littérature, recueillie en partie dans la collection « Travaux d'humanisme et Renaissance ».

11. Voir, pour les collèges français de l'époque, Marie-Madeleine Compère, Chartier, Roger et Juua, Dominique, L'éducation en France du XVIe au XVIII e siècle, Paris, 1976 Google Scholar ; A. Schindling, Humanistische Hochschule und Freie Reichstadt : Gymnasium und Akademie in Strassburg, 1538-1621, Wiesbaden, 1977. Parmi les travaux plus récents, voir Brockliss, W. B., French Higher Education in the Seventeenth and Eighteenth Centuries, Oxford, 1987.Google Scholar En outre, pour l'éducation humaniste, Paul F. Grendler, Schooling in Renaissance Italy. Literacy and Learning, 1300-1600, Baltimore-Londres, Johns Hopkins University Press, 1989.

12. Quelques-uns ont été cités dans le vaste panorama de Fumaroli, Marc, L'âge de l'éloquence, Genève, Droz, 1980 Google Scholar, qui avait pourtant le souci de souligner les textes « nouveaux ».

13. Voir à ce propos l'ouvrage de Grafton, A. et Jardine, L., Front Humanism to the Humanities, Cambridge, Ma., Harvard University Press, 1986.Google Scholar

14. Qu'il suffise de penser à Cujas, explicitement cité par l'algébriste Gosselin. Dans ce domaine, aux études classiques de Kelley, Donald on doit ajouter Lean, Ian Mac, Interprétation and Meaning in the Renaissance. The Case of Law, Cambridge, Cambridge University Press, 1992.Google Scholar

15. Mans, Jacques Peletier Du, L'Algèbre, Lyon, Jean de Tournes, 1553.Google Scholar Je citerai ici l'exemplaire de la réserve de la Bibliothèque nationale de Paris, Rés. V. 2074. La version latine fut imprimée par J. Cavellat à Paris en 1560.

16. Gosselin, Guillaume, De Arte magna seu de occulta parte numerorum quae algebra et almucabala vulgo dicitur, Paris, Gilles Beys, 1577.Google Scholar

17. Fin du proème, f. 8.

18. Voir à ce sujet les ouvrages classiques d'Eugenio Garin, mais aussi les modifications apportées par Seigel, J. E., Rhetoric and Philosophy in Renaissance Humanism : the Union of Eloquence and Wisdom, Petrarch to Valla, Princeton, Princeton University Press, 1968 Google Scholar, par « The School of Guarino : Ideals and Practice », dans Grafton, A. et Jardine, L., op. cit., et par Struever, Nancy, Theory as Practice. Ethical Inquiry in the Renaissance, Chicago, University of Chicago Press, 1992.Google Scholar

19. C'est pour indiquer cette notion que nous garderons la majuscule employée par Peletier.

20. Ces nouveaux critères ont ensuite été étendus aux langues classiques, comme l'avaient déjà montré plusieurs humanistes italiens, ainsi qu'Érasme. Voir Jacques Chomarat, Grammaire et rhétorique chez Érasme, Paris, Belles Lettres, 1980, ainsi que Demonet, Marie-Luce, Les voix du signe, Paris, Champion, 1992.Google Scholar

21. Il faut ici citer le texte remarquable de Ramus à ce propos : « Selon le jugement de Platon, Aristote, Varron, Cicéron le peuple est souverain seigneur de sa langue, et la tient comme un fief de franc aleu, et nen doit reconnaissance a aucun seigneur. Lecolle de cette doctrine nest point es auditoires des professeurs Hebreus, Grecs et Latin en luniversite de Paris, comme pensent ces beaux etymologiseurs, elle est au Louvre, au Palais, aux Halles, en Grève, a la place Maubert : ainsi Cicéron a déclare qu'il se reserve la science, mais touchant l'usage, qu'il la donne au peuple » ﹛Gramere, Paris, A. Wechel, 1562, p. 30).

22. Voir L Art poétique d'Horace, traduit en vers françois par Jacques Peletier du Mans, Paris, M. Vascosan, 1545, Les œuvres Poétiques de Jacques Peletier du Mans, Paris, M. de Vascosan, pour luy et G. Corrozet, 1547 et Dialogue de l'ortografe, Poitiers, J. et E. de Marnef, 1550.

23. Nous n'entrerons pas dans le détail de la distinction entre collocation et disposition, termes que Peletier, aussi bien que d'autres, emploie comme synonymes. A ces deux termes s'ajoutait celui de jugement, employé par Cicéron dans les Topica, et méthode qui, au moins au début du siècle, soulignait la connotation pédagogique.

24. Y compris l'histoire naturelle. J'ai employé ici une définition courante au 16e siècle.

25. Voir par exemple Ann Blair, « Humanist Methods in Natural Philosophy : The Commonplace Book », Journal of the History of Ideas, 1992, pp. 541-551.

26. Le sens d'évidence des lieux communs a été étudié par Shapiro, Barbara, Probability and Certainty in Seventeenth-Century England, Princeton, Princeton University Press, 1983.Google Scholar

27. Pour la discussion des possibilités de l'imprimerie chez Érasme voir J. Chomarat, op. cit., pp. 387-393, chez Peletier voir Giovanna C. Cifoletti, Mathematics and Rhetoric, op. cit., pp. 229-230.

28. Voir le livre de Michael Stifel, Arithmetica intégra, Niirnberg, J. Petreius, 1543, qui présentait encore l'algèbre dans un contexte d'arithmétique avancée, et non pas comme discipline à part.

29. Il s'agit des problèmes de change, d'alliage des métaux des monnaies, des calculs d'intérêt et d'héritage. Ce corpus est identifié par Ars Mercatoria : Handbucher und Traktate für den Gebrauch des Kaufmanns, 1470-1820. Manuels et Traités à l'usage des marchands, 1470-1820 : eine analytische Bibliographie in 6 Bänden, Jochen Hoock, Pierre Jeannin éds, Paderborn, Schöning, 1991-1995. Voir à ce sujet W. Van Egmond, The Commercial Révolution and the Beginnings of Western Mathematics in Renaissance Florence, 1300-1500, PhD dissertation, Indiana University, 1976, ainsi que Franci, R., Toti Rigatelu, L., Introduzione all'algebra mercantile del Medioevo e del Rinascimento, Urbino, Quattro Venti, 1982.Google Scholar

30. Voir Beaujouan, Guy, « The Place of Nicolas Chuquet in a Typology of Fifteenth-Century French Arithmetics », dans Hay, C., éd., Mathematics from Manuscript to Print, Oxford, Clarendon Press, 1988.Google Scholar pp. 73-88 ainsi que, dans le même volume, Paul Benoit, « The Commercial Arithmetic of Nicolas Chuquet », pp. 96-116. Voir aussi P. BENOIT « Recherches sur le vocabulaire des opérations élémentaires dans les arithmétiques en langue française de la fin du Moyen Age », dans Documents pour l'histoire du vocabulaire scientifique, N. 1, Publications de l'Institut national de la langue française, 1985.

31. Roche, Etienne De La, L'Arithmétique, Lyon, Fradin, C., 1520.Google Scholar

32. Peletier, Jacques L'Aritmetique, Poitiers, J. et de Marnef, E., 1549.Google Scholar

33. Voir en particulier Davis, Natalie Zemon, « Sixteenth-Century French Arithmetics on the Business Life », Journal of the History of Ideas, vol. XXI, n° 1, 1960.Google Scholar

34. Voir Rider, Robin E., A Bibliography of Early Modem Algebra : 1500-1800, Berkeley, 1982.Google Scholar

35. Voir encore Natalie Zemon Davis, « Sixteenth-Century French Arithmetics on the Business Life » ainsi que « Mathematicians in the Sixteenth-Century French Académies : Some further Evidence », Renaissance News, XI, 1958.

36. Voir à ce propos Giovanna C. Cifoletti, Mathematics and Rhetoric, op. cit., chap. 1. Pour la comparaison avec Tartaglia, et pour le cas semblable de L'Aritmetique de Peletier, chap. 2.

37. Il suffit de prendre en considération les nouveaux manuels d'astronomie. Voir à ce propos Isabelle Pantin, « Jean-Pierre de Mesmes et ses institutions astronomiques », Revue de Pau et du Béarn, 13,1986. Jean-Pierre de Mesmes, lié au milieu de la Pléiade, publia ses Institutions astronomiques en 1557, à Paris, chez le premier imprimeur de Peletier, Michel de Vascosan. Pour les rapports entre Peletier et Vascosan, voir Nina Catach, L'Orthographe française à l'époque de la Renaissance. AuteursImprimeursAteliers d'imprimerie, Genève, Droz, 1968, ainsi que Natalie Zemon Davis, « Peletier and Beza part company », dans Studies in the Renaissance, 1964.

38. Voir Walker, D. P., Music, Spirit and Language in the Renaissance, Londres, Variorum Reprints, 1985.Google Scholar

39. Voir Jacques Peletier L'Aritmetique, op. cit..

40. Pour la fortune du scepticisme à Paris au 16e siècle, voir Charles Schmitt, Cicero Scepticus, La Haye, Martinus Nijhoff, 1972.

41. La dialectique devait en principe ne s'occuper que du jugement, tandis que la rhétorique concernait l'invention. Mais nous avons déjà indiqué l'importance de l'invention dans l'éducation humaniste.

42. Voir le travail classique de C. Vasoli, La dialettica, op. cit., en ce qui concerne l'enseignement de Rudolf Agricola et son influence en France, grâce à l'enseignement de Johann Sturm. La tradition décrite par C. Vasoli voit comme initiateurs Lorenzo Valla, George de Trebisonde et Politien, ensuite Giorgio Valla, Rudolf Agricola, Lefèvre d'Etaples, et finalement Vives et Sturm. Voir aussi Mack, P., Renaissance Argument. Valla & Agricola in the tradition of Rhetoric and Dialectic, Leyde, E. J. Brill, 1993.Google Scholar

43. Voir, pour un cadre plus ample, Jardine, Lisa, Francis Bacon : Discovery and the Art of Discourse, Londres, 1974 Google Scholar, et en particulier « Lorenzo Valla : Académie Skepticism and the New Humanistic Dialectic », dans The Skeptical Tradition, Burnyeat, M. éd., Berkeley, University of California Press, 1983.Google Scholar

44. Voir en particulier Nina Catach, L'Orthographe française…, op. cit..

45. Voir le livre de K. Meerhoff, Rhétorique et poétique…, op. cit. et encore Demerson, G. éd., La Notion de genre à la Renaissance, Genève, Slatkine, 1984.Google Scholar

46. Nous écrivons en effet un système en x, y, z.

47. Pour une comparaison en détail entre les deux démarches, voir Giovanna C. Cifoletti, Mathematics and Rhetoric, op. cit., chap. 3.

48. L'Art poétique de Jacques Peletier du Mans, Lyon, J. de Tournes et G. Gazeau, 1555.

49. Jacques Peletier du Mans, Les Six premiers livres des Éléments géométriques d'Euclide, Genève, J. de Tournes, 1611, p. 24, traduction française de Jacobi Peletarii Cenomani in Euclidis Elementa geometrica demonstrationum libri sex, Lyon, J. de Tournes et G. Gazeau, 1557, p. 12.

50. Ibid., p. 25.

51. Ibid.

52. Ibid.

53. Voir à ce propos Mahoney, M., « Another Look at Greek Geometrical Analysis », Archive for History of Exact Sciences, 5, 1968, pp. 318348 CrossRefGoogle Scholar, ainsi que Giovanna C. Cifoletti, Mathematics and Rhetoric, op. cit., Appendice, ou « Quaestio sive aequatio : la nozione di problema nelle Regulae di Cartesio », dans Da Democrito a Collingwood, sous la direction d'Alfonso Ingegno, Florence, Olschki, 1990.

54. Beaucoup plus récemment, Chaïm Perelman a décrit très clairement les différents passages du raisonnement du juge qui est, même dans sa forme idéale, beaucoup plus complexe qu'un simple syllogisme, Logique et Argumentation, Bruxelles, Presses Universitaires, 1971, p. 77. Voir aussi sur ce thème et d'un point de vue épistémologique Lawrence J. PRELLI, A Rhetoric of Science. Inventing Scientific Discourse, Columbia, University South Carolina Press, 1989.

55. Ensuite, Cicéron indique les deux genres de propositum (ou quaestio infinita) dont le premier est propositum cognitionis, théorique, et le second est propositum actionis, pratique. Un exemple du genre théorique de propositum serait « peut-on se fier aux sens ? », tandis qu'un exemple du genre actionis serait « par quels bons offices peut-on acquérir l'amitié ? ».

56. Partitiones oratoriae, 64.

57. Voir le livre de C. Vasoli et W. Risse, Die Logik der Neuzeit, 2 vols, Stuttgart, 1964.

58. Cicéron consacre à la quaestio une section de ses Partitiones oratoriae et de ses Topica. En effet, la doctrina dicendi comprend la vis oratoris, Yoratio et la quaestio. La vis oratoris est dans les choses et dans les mots, et comprend l'invention et la disposition, l'élocution, l'action et la mémoire. Uoratio est ensuite définie dans ses quatre parties (principium, narratio, confirmado, peroratio).

59. Cela est clair en effet dans toute la tradition qui va de Lorenzo Valla à Johann Sturm, étudiée dans le livre cité de C. Vasoli et plus récemment par Vickers, B., In Défense ofRhetoric, Oxford, Clarendon, 1988 Google Scholar, et P. Mack, Renaissance Argument…, op. cit.

60. Voir à ce propos Giovanna C. Cifoletti, Mathematics and Rhetoric, op. cit., Appendice.

61. Il faut remarquer que les caractéristiques de la question et de sa bonne formulation coïncident avec la partie de l'oraison qui s'appelait narratio : comme l'écrivait l'auteur de la Rhetorica ad Herennium, la narratio doit être brève, claire et vraisemblable.

62. Peletier n'emploie pas de lettres pour les coefficients. En outre, il ne s'occupe que d'équations du premier et du deuxième degré.

63. Il s'agit de l'algorithme de solution des équations de second degré formulé de manière semblable à la tradition orientale.

64. Il s'agissait pourtant d'un topos de l'algèbre. Récemment, Cardan l'avait repris dans sa Practica Arithmetica, mais il appartenait déjà à la tradition arabe. Il est donc particulièrement intéressant de voir le même topos se transformer dans le nouveau contexte.

65. Voir Biagioli, Mario, « The Social Status of Italian Mathematicians, 1450-1600 », History of Science, 75, mars 1989.Google Scholar

66. Sur le statut des hypothèses en astronomie, voir Jardine, Nicholas, The Birth of History and Philosophy of Science, Kepler's ‘A Defence of Tycho against Ursus', with Essays on Its Provenance and Significance, Cambridge, Cambridge University Press, 1984.Google Scholar

67. In M, Fabii Quintiliani de Institutione Oratorio libros XII… commentarii in gratiam studiosorum nunc primum editi (par Adrien Turnèbe) Parisiis, apud T. Richardum, 1554.

68. Op. cit., chap. XVIII, p. 15.

69. Les deux dernières sont des variantes aux plus célèbres quia, propter quid.

70. En effet, il n'inclut pas le texte de Quintilien, et les annotations ont un caractère plus érudit que celles qui correspondent aux notes de cours.

71. Parmi les étudiants, car l'ouvrage commenté était la base de la formation de tout juriste ; on sait que entre autres Pierre Pithou et Henri La Popelinière furent ses élèves. Voir Huppert, Georges, L'idée de l'histoire parfaite, Paris, Flammarion, 1973, p. 21.Google Scholar En outre Turnèbe écrivit de nombreux commentaires bien connus (dont un des Partitiones oratoriae, publié avec celui de Talon dans l'édition citée), et il enseignait au Collège royal. Ce texte est également fondamental chez les érudits de plusieurs générations de juristes, car il eut un rôle dans la tradition écrite.

72. Voir particulièrement Fumaroli, Marc, L'âge de l'éloquence, Genève, Droz, 1980.Google Scholar

73. là.

74. Toujours en 1577, Gilles Beys publia aussi un ouvrage de Jean Gosselin, parent de Guillaume, et un autre texte commenté par Mignault, l'Epistolarum libri duo d'Horace.

75. Ce texte est déjà intéressant pour nous parce qu'il contient une longue oratio sur les symboles qui donne des aperçus sur ce qu'un humaniste de l'époque devait entendre par langage symbolique. En outre, dans ce texte Mignault déclare avoir suggéré à Gilles Beys sa marque et la devise relative : le lilas blanc et « Casta placent superis ». Voir Imprimeurs et Libraires Parisiens au XVI e siècle, d'après les mss. de P. Renouard, t. III, « Baquelier — Billon. », Paris, Service des travaux historiques de la ville de Paris, 1979. « Gilles Beys » : pp. 312-373.

76. J'ai travaillé aussi sur la quatrième édition : M. T. Cicero, Partitiones oratoriae M. Tullii Ciceronis, et ad eas facili etaperta methodo complectendas, Tabulae et syntagmata, una cum Diatribis aliquot, quibus omnium praeceptorum vis, et usus oratoriae facultatis exprimitur, per Claudium Minoem Divisionensem Editio quarto a ceteris multo locupletior, Francofurti, Apud haeredes Andreae Wecheli, 1584, à la Bibliothèque de Wolfenbiittel.

77. Plus spécifiquement pour notre propos, dans son syntagma consacré aux notae, terme qui à l'époque désignait ce que nous appelons la notation algébrique, il en énumère les différents usages, et termine en affirmant que les notae permettent d'étudier les noms, d'opérer des déductions et de contribuer ainsi à la science.

78. Qu'il suffise de rappeler qu'il existe au moins une dizaine d'éditions des Partitiones parues à Paris à partir de la deuxième moitié du 16e siècle. En particulier, il faut noter le commentaire de Giorgio Valla (paru à son tour dans quelques éditions parisiennes) et l'édition qui inclut le commentaire d'Orner Talon, le collaborateur de Ramus : M. T. Ciceronis, Partitiones oratoriae ad veterum codicum manu scriptorum exemplaria collatae, et innumeris menais repurgatae, cum commentariis lac. Strebaei, Bartolomae Latomi, Christophori Hegendorphini, loannis Fossani, Adriani Turnebi (qui adhuc inscriptus est Commentariis incerti authoris) postremo adiectis praelectionibus Audomari Taie, Parisiis, Ex Officina Gabrielis Buonii, 1568 (je ne rappelle ici que l'édition sur laquelle j'ai travaillé, là encore à la Bibliothèque de Wolfenbiittel).

79. Voir surtout Mazarine ms 3708.

80. Id.

81. C'est de cette manière qu'il obtint de désigner sa chaire au Collège royal.

82. Orner Talon, op. cit., p. 155.

83. Cependant, si l'historiographie contemporaine dans ce domaine nous a présenté un lableau suffisamment complexe de l'évolution de la doctrine de l'invention et de la disposition, il reste encore beaucoup à faire du côté des autres aspects de la rhétorique, et notamment de la quaestio, pourtant en pleine évolution à l'époque. Il y a au moins deux raisons justifiant ce parti d'avoir privilégié et suivi la piste de l'invention et de la disposition : en premier lieu, l'intérêt pour la doctrine de la méthode, qui au sens technique est dans la vis oratoris. Ensuite, l'attention portée à l'œuvre de Ramus. Les deux aspects sont évidemment liés.

84. Ibid.

85. Il s'agit du syntagma 29, à la p. 128.

86. Ibid., p. 129. Voir aussi l'usage de la quaestio finita et infinita, p. 131.

87. Les notes de cours d'un étudiant de Claude Mignault sont conservées. Il s'agit d'un commentaire à d'autres textes, mais avec le même but d'apprendre à raisonner. Cela a fait l'objet d'une étude de Grafton, Anthony, « Teacher, Text and Pupil in the Renaissance Classroom : A Case Study from a Parisian Collège », History of Universities, 1, 1981, pp. 3770.Google Scholar

88. Ce faisant, il écarte les modèles de Stifel et Peletier, voire même ceux de Cardan luimême, dans sa Practica Arithmeticae. Dans ce dernier cas, en effet, il aurait été conduit à une démarche suivant un ordre de complexité croissante de l'extraction des racines, plutôt que suivant l'ordre de complexité croissante des équations.

89. Peletier, Jacques, De Occulta parte numerorum, Paris, Cavellat, 1560.Google Scholar La Bibliothèque nationale en possède un exemplaire qui appartenait au lecteur royal Henri de Monantheuil. Ses annotations, de lecteur et de professeur, sont précieuses.

90. Outre le texte de Peletier, celui Jean Borrel (Logistica, Lyon, G. Rouillé, 1559) et de Pedro Nunes (Libro de algebra, Anvers, Héritiers d'A. Birckman, 1567).

91. Les formules avec radicaux deviendront possibles quand Viète emploiera systématiquement des lettres pour les termes connus et les coefficients.

92. Voir J. Morse, The Réception of Diophantus, op. cit. 93. L'autre livre est L'Arithmétique de Nicolas Tartaglia Brescian, Paris, G. Beys, 1578. Il s'agit d'une traduction abrégée du General Trattato di numeri e misure de Niccolô Tartaglia, qui pourtant fut diffusé en France aussi dans sa version originale.

94. Il n'existe qu'un exemplaire de cet ouvrage, imprimé sur parchemin, conservé à la Bibliothèque nationale.

95. Depuis 1560 il y avait la traduction de Barozzi : Procli Diadochi Lycii Philosophi Platonici Euclidis Elementorum librum Commentariorum ad universam mathematicam disciplinam principium eruditionis tradentium libri IIII. A Francisco Barocio Patritio Veneto, G. Perchacinus, 1560.

96. (ff. 7-7v).

97. Voir p. 17v.

98. Cette affirmation concerne d'ailleurs tous les livres publiés avant le séjour bordelais de Peletier, qui marqua le passage définitif à l'enseignement dans les collèges.

99. C'est le terme de Viète, qui doit être interprété d'abord en termes d'impureté linguistique et stylistique, comme pour le barbarismus de Quintilien.

100. Giovanna C. Cifoletti, Mathematic and Rhetoric, op. cit.

101. Voir en particulier, sur le rapport entre les Regulae et les Seconds analytiques, Marion, J. L., L'Ontologie grise de Descartes, Paris, Vrin, 1975.Google Scholar

102. Voir Descartes, René, Exercices pour les éléments des solides. Essai en complément d'Euclide. Progymnasmata de solidorum elementis, édition critique avec introduction, notes et commentaires par Costabel, P., Paris 1987.Google Scholar

103. Koyré, Alexandre, « L'apport scientifique de la Renaissance », communication faite ler juillet 1949, reproduite dans Etudes d'histoire de la pensée scientifique, Paris, 1973, pp. 5060.Google Scholar A. Koyré développe cette idée en rappelant le cas de Ramus : « Aussi est-il extrêmement caractéristique que la grande réforme de la logique qu'elle [la Renaissance] a tentée — je pense à la logique de Ramus — ait été une tentative de substituer à la technique de la preuve de la logique classique une théorie de la persuasion ».