Published online by Cambridge University Press: 20 January 2017
La question du transbordement maritime des migrants – en transit à travers l’Atlantique – s’est constituée en problématique humanitaire internationale au début du XXe siècle. Elle fait notamment l’objet d’une mobilisation importante dans la société italienne, où les émigrants à destination de l’Amérique sont en grand nombre et se trouvent souvent piégés dans des formes graves de dépendance économique à l’égard des agents d’émigration qui les recrutent et des compagnies maritimes qui les transportent. Analyser comment l’Italie s’est efforcée d’élaborer un dispositif d’action publique pour encadrer et protéger sa population en partance pour l’Amérique, particulièrement dans l’espace-temps très spécifique qu’est la traversée maritime, permet de reconsidérer plusieurs enjeux mis au jour par les études consacrées aux migrations internationales, au gouvernement des populations et à la mondialisation marchande. Tout en rappelant le rôle très actif qu’eurent certains pays d’origine dans la protection de leur ressortissants migrants, ce cas montre que le sort de ceux-ci ne se jouait pas dans le seul face à face entre états émetteur et récepteur, mais aussi dans la nécessaire régulation du marché du transbordement, et tout autant dans l’opposition et l’arbitrage entre des acteurs et des intérêts divergents à l’intérieur même de la société italienne.
The maritime transshipment of migrants across the Atlantic became an international humanitarian issue at the beginning of the 20th century. It inspired a widespread mobilization in Italian society, where many emigrants to America found themselves trapped in serious forms of economic dependency on the emigration agents who recruited them and the maritime companies who transported them. An analysis of the ways Italy attempted to elaborate modes of public intervention to supervise and protect its emigrating citizens, particularly in the specific space-time of maritime travel, sheds new light on several issues prominent in studies of international migrations, of population government and of commercial globalization. While recalling the very active role certain countries played in the protection of their emigrating citizens, the Italian case underlines that the fate of these migrants was played out not only in the confrontation between an issuing State and a receiving State, but also in the necessary regulation of the transshipment market as well as in the opposition (and resulting arbitration) between the parties and the diverging interests within Italian society itself.
Je remercie pour leurs suggestions les participants des séminaires de l’équipe Esopp (UMR CRH) et de l’UMR IDHE au cours desquels certains aspects de ce travail ont été présentés, ainsi que Paul-André Rosental, Claude Didry, Philippe Minard et étienne Anheim. L’enquête archivistique a été réalisée avec le soutien de la Mission Recherche du ministère des Affaires sociales.
1- Green, Nancy et Weil, François (dir.), Citoyenneté et émigration. Les politiques du départ, Paris, éd. de l’EHESS, 2006.Google Scholar
2- Cette perspective, insistant sur la manière dont les migrants sont traversés par les rapports de forces internationaux et ainsi placés dans une « double domination », celle de l’état émetteur comme celle de l’état récepteur, a été développée, à partir du cas de l’Algérie, par Sayad, Abdelmalek, « Immigration et conventions internationales», Peuples Méditerranéens, 9, 1979, p. 29–52;Google Scholar et « L’ordre de l’immigration entre l’ordre des nations », ibid., 29, 1984, p. 187-207 (rééd. in L’immigration ou les paradoxes de l’altérité, Bruxelles, De Boeck, 1991, p. 259-288 et p. 289-311). Il reste à discuter les conditions de généralisation de cette analyse, proposée à partir d’un cas qu’on peut considérer comme emblématique ou comme singulier.
3- Kraut, Alan M., Silent traveler: Germs, genes, and the immigrant menace, New York, Basic Books, 1994;Google Scholar Weindling, Paul (dir.), International health organisations and movements, 1918-1939, Cambridge, Cambridge University Press, 1995.CrossRefGoogle Scholar
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6- Dans des modalités très variées de contrat (souvent tacite) qui transforment l’enchaînement par la dette en travail contraint, notamment dans les plantations d’Amérique du Sud. Les migrants européens transatlantiques ne sont pas les seules populations engagées dans des formes de salariat bridé qui persistent jusqu’au XXe siècle : voir Northrup, David, Indentured labor in the age of imperialism, 1834-1922, Cambridge, Cambridge University Press, 1995;Google Scholar Stanziani, Alessandro (dir.), « Labour, coercion, and contracts», International Review of Social History, 54–3, 2009.Google Scholar
7- Pour la présentation de ces réseaux et les références bibliographiques, voir l’article de Paul-André Rosental dans ce numéro.
8- Bourdelais, Patrice et Fassin, Didier (dir.), Les constructions de l’intolérable. études d’anthropologie et d’histoire sur les frontières de l’espace moral, Paris, La Découverte, 2005;Google Scholar Damien DE BLIC et Cyril Lemieux, « Le scandale comme épreuve. éléments de sociologie pragmatique », Politix, 71, 2005, p. 9-38 ; Boltanski, Luc et al.(dir.), Affaires, scandales et grandes causes. De Socrate à Pinochet, Paris, Stock, 2007;Google Scholar Boltanski, Luc, La souffrance à distance. Morale humanitaire, médias et politique, Paris, Métailié, 1993.Google Scholar
9- C. Douki, « L’état libéral italien face à l’émigration… », art. cit.
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14- La plus importante est la Navigazione Generale Italiana, née de la fusion, sous l’égide de l’état, de sociétés génoises et napolitaines en 1881 : Molinari, Augusta, « Porti, trasporti, compagnie», in Bevilacqua, P., De Clementi, A. et Franzina, E. (dir.), Storia dell’emigrazione italiana.T. 1, Partenze, Rome, Donzelli, 2001, p. 237–255.Google Scholar
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19- Les représentants de l’administration italienne de l’émigration le rappellent sans cesse, par exemple lors de la discussion du budget des services de l’émigration à la session de juin 1912 : Archivio Storico Diplomatico, Ministero degli Affari Esteri [ASMAE] (Rome), CGE, Affari generali, b. 8 ; tout comme les observateurs britanniques : The National Archives (Kew), Foreign Office, 881/8948.
20- Pecorari, Paolo et Per Ballini, Luigi, « Luigi Luzzatti », Dizionario Biografico degli Italiani, Rome, Trecani, 2006, vol. 66, p. 724–733 Google Scholar. Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti (Venise), Archivio Luzzatti, Atti, b. 204, II-IV : en tant que ministre du Trésor, il s’est lui-même occupé des subventions publiques destinées à soutenir la structuration, en 1898, de la principale compagnie maritime italienne, la Società di Navigazione Generale Italiana.
21- Archivio Luzzatti, Atti, b. 174, fasc. 4.
22- Ces formes de médiation apparaissent en détail dans l’enquête ministérielle de 1884 : MINISTERO AGRICOLTURA INDUSTRIA E COMMERCIO, DIREZIONE GENERALE DELLA STATISTICA, Statistica della emigrazione italiana per gli anni 1884-1885, Rome, 1885, et sont présentées par Amoreno MARTELLINI, « Il commercio dell’emigrazione: intermediari e agenti », inP. BEVILACQUA, A. DE CLEMENTI et E. FRANZINA (dir.), Storia dell’emigrazione italiana.T. 1, Partenze, op. cit., p. 295-299. Pour une approche comparative avec d’autres espaces d’émigration : Stephanie JONES, « The role of the shipping agent in migration: A study in business history », inK. FRIEDLAND (dir.), Maritime aspects of migrations, Cologne, Böhlau Verlag, 1989, p. 333-353 ; Gunther PECK, Reinventing free labor: Padrones and immigrant workers in the North American West, 1880- 1930, Cambridge, Cambridge University Press, 2000.
23- A. Martellini, « Il commercio dell’emigrazione… », art. cit., p. 293.
24- On en retrouve, par exemple, dans les archives privées de Luzzatti : Archivio Luzzatti, Atti, b. 307, fasc. 1 et 4.
25- L’argumentaire des entreprises maritimes, italiennes ou étrangères, est longuement rappelé lors de l’examen parlementaire de la loi de 1901 : A.Martellini, « Il commercio dell’emigrazione… », art. cit., p. 304-305.
26- Archivio Luzzatti, Atti, b. 307, fasc. 1.
27- C’est ainsi qu’à la suite du « décret Prinetti » de mai 1902 qui interdit par voie exécutive les autorisations de s’embarquer pour le Brésil par le système de l’engagement, les compagnies maritimes qui étaient subventionnées par des groupements de planteurs brésiliens ou des collectivités publiques régionales, comme l’état de São Paolo, ont perdu leur licence.
28- Sont accréditées certaines des plus grandes firmes britanniques (Anchor Line, White Star Line), françaises (Compagnie générale transatlantique, Compagnie Cyprien Fabre, Société générale des transports maritimes de Marseille) et allemandes (Norddeutscher Lloyd Bremen, Hamburg Amerikanische Linie), une entreprise autrichienne (l’Union autrichienne de navigation), une compagnie espagnole (Transatlantica de Barcelone).
29- Vers 1912, les compagnies italiennes peuvent avancer 44 paquebots répondant aux normes, pouvant transporter 393 000 émigrants par an, ce qui correspond à peu près au nombre d’embarqués en Italie vers 1910. Mais, d’une part, il a fallu une dizaine d’années pour qu’elles arrivent à ce niveau ; d’autre part, lorsqu’elles l’atteignent, c’est, de toute façon, de justesse, ce qui empêche toute élasticité de l’offre de transport sur un marché où le nombre de départs est particulièrement fluctuant (ainsi, en 1906, les compagnies italiennes n’auraient pu faire face aux 414 000 embarquements enregistrés dans la péninsule).
30- Ce que les compagnies étrangères non agréées ne se privent d’ailleurs pas de faire, en exploitant les limites pratiques du dispositif réglementaire italien. Les Italiens s’efforcent d’y remédier dans la péninsule (ASMAE, CGE, Aff. Gen., b. 8) ou par des actions conjointes avec les autorités françaises (Archives diplomatiques, Paris, Correspondance politique et commerciale, nouvelle série, Italie, vol. 22), ce qui n’est pas le cas avec les Britanniques qui se contentent d’observer : The National Archives (Kew), Foreign Office, 371/469.
31- De Michelis, Giuseppe, L’emigrazione italiana dal 1910 al 1923. Relazione presentata a S. E. il Ministro degli Affari Esteri dal Commissario Generale dell’Emigrazione, Rome, Commissariato Generale dell’Emigrazione, 1927, vol. 1, p. 409–415.Google Scholar
32- L’article 31 de la loi de 1901 institue un délit d’« incitation à l’émigration » et, en général, la justice procédera à des condamnations pour peu que l’on puisse clairement établir une action personnelle, délibérée et suivie d’effet : « Massimario di giurisprendenza in materia di emigrazione compilato per cura del dott. Giuseppe Giani. Parte 1. Giurisprudenza penale », Bollettino dell’Emigrazione, 10, 1909, p. 27.
33- Ibid.: jugement de la Cour de cassation de Rome, section pénale, 14 mars 1907.
34- Ibid.
35- C. DOUKI, D. FELDMAN et P.-A. ROSENTAL, « Pour une histoire relationnelle… », art. cit.
36- A. MARTELLINI, « Il commercio dell’emigrazione… », art. cit., p. 298.
37- Les compagnies qui n’ont pas de licence pour embarquer des migrants dans les ports italiens ne peuvent légalement disposer de représentants actifs sur le territoire italien ; ce qu’elles tenteront de faire malgré tout, mais de manière clandestine, donc avec des difficultés de mise en oeuvre que les autorités espèrent suffisantes pour limiter leur influence réelle. Les archives policières ont conservé de nombreuses traces de leurs activités clandestines et des réels efforts déployés pour les entraver : par exemple Archivio Centrale dello Stato (Rome), Ministero Interno, Polizia Giudiziaria, fasc. 11900.3.
38- De fait, le nombre de représentants des compagnies maritimes officiellement déclarés s’est accru entre 1901 (où ils sont estimés à 10 000) et 1910 (où l’on en recense environ 13 000) : Commissariato Generale Dell’Emigrazione, Relazione sui servizi dell’emigrazione per l’anno 1909-1910, Rome, Tip. nazionale, 1910, p. 547–548.Google Scholar
39- Par décision administrative, les compagnies ne pourront plus employer des fonctionnaires municipaux comme représentants.
40- A. Molinari, « Porti, trasporti, compagnie », art. cit., p. 250
41- Le rapport annuel du Commissaire général à l’émigration, Luigi Bodio, insiste, dès 1904, sur ces abus qui annulent les effets positifs attendus de cette mesure : Bollettino dell’Emigrazione, 7, 1904.
42- ASMAE, CGE, Aff. Gen., b. 41.
43- Pour une comparaison avec le transport et l’espace ferroviaires, voir Sauget, Stéphanie, À la recherche des pas perdus. Une histoire des gares parisiennes, Paris, Tallandier, 2009.Google Scholar Pour une analyse de ces nouveaux principes techniques d’organisation de structures temporelles plus denses, avec leurs effets sociaux collectifs et individuels, contraignants ou émancipateurs, voir Rosa, Hartmut, Accélération. Une critique sociale du temps, Paris, La Découverte, [2003] 2010,Google Scholar chap. 8.
44- Interprétation avancée par A. Molinari, « Porti, trasporti, compagnie », art. cit., p. 253-255.
45- Voir dans une bibliographie abondante sur ce thème : Strange, Carolyn et Bashford, Alison (dir.), Isolation: Places and practices of exclusion, Londres/New York, Routledge, 2003,CrossRefGoogle Scholar et le dossier « étrangers : la mise à l’écart », Politix, 69, 2004.
46- Ainsi les fonctionnaires des services d’immigration américains en vantaient les vertus, notamment pour les conditions de sécurité sanitaire et matérielle et pour l’ordre qui y régnaient. Voir par exemple le rapport Powderly, cité par Dorothee SCHNEIDER, « Les états-Unis et l’émigration européenne : enquêtes à l’époque de la politique de ‘la porte ouverte’ », inN. GREEN et F. WEIL (dir.), Citoyenneté et émigration…, op. cit., p. 229. Des émissaires italiens ont visité les locaux du port d’Hambourg et cet exemple est maintes fois commenté, comme référence ou contre-modèle, lorsque le Conseil supérieur de l’émigration débat de l’opportunité ou non de construire des bâtiments d’accueil dans les ports de Naples ou Gênes
47- Just, Michael, Ost und südosteuropäische Amerika-Auswanderung 1881-1914, Stuttgart, Steinert Verlag, 1988.Google Scholar
48- Cherubini, A. et Piva, I., Dalla libertà all’obbligo…, op. cit.,Google Scholar chap. 6 ; Quine, Maria Sophia, Italy's social revolution: Charity and welfare from liberalism to fascism, New York, Palgrave, 2002, p. 80–95.CrossRefGoogle Scholar
49- G. De Michelis, commissaire général à l’émigration après guerre, a eu l’occasion, dès 1916, de poser les bases d’une nouvelle politique d’émigration, dirigée et administrée mais encore protectrice : L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 104. Pour l’évolution internationale dans le sens d’une administration des flux migratoires : Paul-André ROSENTAL, « Géopolitique et état-Providence : le BIT et la politique mondiale des migrations dans l’entre-deux-guerres », Annales HSS, 61-1, 2006, p. 99-134.
50- Günter Moltmann, « Steamship transport of emigrants from Europe to the United States, 1850-1914: Social, commercial and legislative aspects », in Friedland, K. (dir.), Maritime aspects of migration, op. cit.,p. 309–320.Google Scholar
51- Les associations de protection des migrants, sur des bases communautaires (allemandes par exemple), ont joué un grand rôle dans le mouvement qui a conduit aux premiers Passenger Actsaux états-Unis : voir Maldwyn JONES, « Aspects of North Atlantic migration: Steerage conditions and American law, 1819-1909 », in Friedland, K. (dir.), Maritime aspects of migration, op. cit., p. 321–331.Google Scholar
52- Les états-Unis sont en pointe en ce domaine depuis les années 1880 et sont suivis de près par le Canada puis l’Argentine. Peirce, Paul S., « The control of immigration as an administrative problem», The American Political Science Review, 4–3, 1910, p. 374-389, ici p. 375-377 et 381;Google Scholar M. Jones, « Aspects of North Atlantic migration… », art. cit. ; Catherine COLLOMP, « Regard sur les politiques de l’immigration. Le marché du travail en France et aux états-Unis (1880-1930) », Annales HSS, 51-5, 1996, p. 1107-1135, ici p. 1121-1126 ; Kelley, Ninette et Trebilcock, Michael, The making of the mosaic: A history of Canadian immigration policy, Toronto, University of Toronto Press, 1998;Google Scholar Philippe RYGIEL, « Indésirables et migrants désirés. Notes sur les pratiques de sélection des migrants dans quelques grands pays d’immigration (1850-1939) », in Rygiel, P. (dir.), Le bon grain et l’ivraie. La sélection des migrants en Occident, 1880-1939, La Courneuve, Aux Lieux d’Être, 2006, p. 21–35.Google Scholar
53- G.Moltmann, « Steamship transport of emigrants… », art. cit. ; D. Keeling, « The transportation revolution… », art. cit. ; Id., « International networks, corporate strategy, and the improvement of travel conditions for migrants crossing the North Atlantic, 1890- 1914 », communication à l’European Business History Association annual conference, septembre 2007, Genève.
54- Pour les décrire, on se fonde sur les dispositions de la loi et du règlement sur l’émigration de 1901, sur les rapports relatifs aux services sanitaires d’émigration publiés chaque année par les Annali di Medicina Navaleet sur la description qu’en propose, après une dizaine d’années d’expérience, le médecin de la marine royale italienne attaché au consulat italien de New York : Docteur SERRATI, « Sanitary service on ships carrying Italian emigrants », Fifteenth international Congress on hygiene and demography, held in Washington DC, s. l., 1913 (section 7 : Hygiène du transport et trafic).
55- Art. 131 du règlement de l’émigration de 1901 puis décret ministériel du 18 mai 1911.
56- Cela est aussi à replacer dans le contexte d’affirmation des enjeux sanitaires et économiques de l’organisation de la sécurité alimentaire au début du XXe siècle : Martin BRUEGEL et Alessandro STANZIANI, « Pour une histoire de la ‘sécurité alimentaire’ », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 51-3, 2004, p. 7-16.
57- En 1902, les navires de plus de 15 ans représentent 36% du total de la flotte accréditée pour le transport des émigrés italiens, cette proportion tombe à 30% en 1907 et à 11% en 1914. Même évolution pour la vitesse des navires : ceux qui ont une vitesse inférieure à 13 miles représentent 72% du total en 1902, 51% en 1907 puis à peine 18% en 1914 : De Michelis, G., L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 414–415.Google Scholar
58- Parmi de nombreux exemples : Minard, Philippe, La fortune du colbertisme. état et industrie dans la France des Lumières, Paris, Fayard, 1998;Google Scholar Viet, Vincent, Les voltigeurs de la République. L’inspection du travail en France jusqu’en 1914, Paris, éd. du CNRS, 1994.Google Scholar
59- Leurs observations ont ainsi contribué au repérage des affections par la tuberculose au retour des villes américaines. Serrati, Docteur, « Sanitary service… », art. cit., et De Michelis, G., L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 539–540.Google Scholar
60- De Michelis, G., L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 541.Google Scholar
61- « Rendiconti delle sedute del Consiglio d’Emigrazione tenute nell’anno 1902 », Bollettino dell’Emigrazione, 8, 1904, p. 13-21.
62- Docteur SERRATI, « Sanitary service… », art. cit.
63- Certains commissaires relèvent que les émigrants viennent de plus en plus souvent évoquer avec eux des problèmes de santé débordant le moment immédiat de la traversée, notamment lors des retours en Italie : quand le refoulement pour cause médicale n’est plus à craindre, certains n’hésiteraient plus à exposer des symptômes ou des lésions qu’ils n’ont jamais montrés aux médecins durant leur séjour à l’étranger, par manque de temps, d’argent, de confiance, de capacité à parler dans une autre langue : ibid.
64- D’autres fonctionnaires ont ensuite cherché à construire une relation de proximité sur le désintéressement économique : seule personne fiable dans un espace où la crainte du vol et de l’escroquerie est omniprésente, le commissaire peut, parce qu’il séjourne à proximité des émigrants mais dans une cabine individuelle fermée, garder leur argent en sécurité durant la traversée : De Michelis, G., L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 533.Google Scholar
65- Les capitaines de navire se préoccupaient surtout d’empêcher l’accès des passagers de troisième classe aux espaces et aux prestations réservés aux classes supérieures. Par contraste, cette nouvelle réglementation, qui proscrit une circulation inverse à la hiérarchie sociale, exprime un souci moral, et notamment la peur de la séduction ou de la prostitution où les passagers fortunés pourraient attirer les émigrantes. Parallèlement à son inscription dans des prescriptions réglementaires à bord, cette peur sociale et morale est médiatisée par les milieux philanthropiques italiens de protection des femmes migrantes, liés aux réseaux qui ont constitué « la traite des blanches » en question humanitaire internationale au début du XXe siècle. Voir, à propos des femmes seules à bord des navires rejoignant l’Amérique du Sud, Raniero PAULUCCI DI CALBOLI, «La traite des jeunes filles italiennes » et « Encore la traite des petites Italiennes et la conférence internationale de Paris », in Larmes et sourires de l’émigration italienne, Paris, F. Jouven, 1909, p. 243 et p. 255. Pour une lecture de ces réseaux internationaux sur le long terme : Jean-Michel CHAUMONT, Le mythe de la traite des blanches. Enquête sur la fabrication d’un fléau, Paris, La Découverte, 2009.
66- La séparation des sexes, pendant la nuit, est effectivement contrôlée et, en cas de défaillance, les compagnies sont poursuivies au pénal : « Massimario di giurisprudenza… », art. cit., p. 68-69.
67- En atteste la remontée vers les autorités italiennes de dénonciations ou de plaintes contre l’absence de respect des règles de circulation dans les espaces réservés aux femmes, formulées non plus seulement par des associations de protection des femmes, mais aussi de plus en plus par des migrantes qui se sont trouvées importunées (parmi de nombreux exemples : ASMAE, CGE, Aff. Gen., b. 59).
68- Sur les processus réformateurs et économiques qui conduisent à l’évolution des rythmes quotidiens de l’alimentation populaire, pour la mettre en accord avec de nouvelles formes de mobilité et les conditions de travail, voir Aymard, Maurice, Grignon, Claude, Sabban, Françoise(dir.), Le temps de manger. Alimentation, emploi du temps et rythmes sociaux, Paris, éd. de la MSH/INRA, 1993.CrossRefGoogle Scholar
69- Le décret du 18 mai 1911, qui rehausse les normes de diversité et de qualité de la nourriture servie en troisième classe, l’« italianise » en prescrivant, à côté des protéines animales, la présence plus marquée de légumes et de légumineuses méditerranéens (tomates notamment, même si c’est en conserve ; pois chiche, fèves et petits pois), d’huile d’olive, de pâtes de blé dur (pour lesquelles on prescrit des modes de préparation régionale « pâtes à l’ail, huile et anchois », « Minestrone alla lombarda »), de riz spécifié « italien ». Le tableau des rations alimentaires prévoit deux formules distinctes selon que les passagers italiens de troisième classe sont en majorité originaires du sud ou du nord de la péninsule.
70- Bruegel, Martin, « Le repas à l’usine : industrialisation, nutrition et alimentation populaire», Revue d’histoire moderne et contemporaine, 51-3, 2004, p. 183–198.CrossRefGoogle Scholar
71- Si les obligations sont souvent, surtout au début, contournées par les compagnies qui tentent, en cas de contrôle, de faire retomber la responsabilité de l’infraction sur la défaillance de leurs fournisseurs, les autorités italiennes s’efforcent de les faire respecter en verbalisant ou en envoyant les affaires au pénal (jugement du tribunal de Naples, 17 juillet 1903, in« Massimario di giurisprudenza… », art. cit., p. 68).
72- Cela contraste avec la longue valorisation publique de la frugalité populaire et ouvrière en Italie, au début du XXe siècle : Paolo Sorcinelli, « Identification process at work: Virtues of the Italian working-class diet in the first half of the twentieth century », in Scholliers, P. (dir.), Food, drink and identity: Cooking, eating and drinking in Europe since the Middle Ages, Oxford, Berg Publisher, 2001, p. 81–97.Google Scholar
73- Les dimensions massives de la vie collective durant la traversée sont illustrées par quelques données officielles : soucieuse de mesurer l’évolution des capacités des navires accrédités, et les taux d’occupation des espaces de troisième classe, l’administration italienne a calculé le nombre moyen d’émigrants transportés par paquebot : en 1910, 850 pour une traversée entre l’Italie et les états-Unis, et 677 pour une traversée vers le Brésil ou l’Argentine ; en 1911, respectivement 1 128 et 700 ; en 1913, 1 410 et 873 : G. DE MICHELIS, L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 417. 74 - La procédure, fixée par l’article 14 de la loi de 1901, est régulièrement commentée et justifiée : « Notizie sulla esecuzione della legge e del regolamento per l’emigrazione », Bollettino dell’Emigrazione, 1, 1902, p. 8 et 17 ; discours de Giulio Prinetti en ouverture de la première séance du CSE le 21 février 1902, « Rendiconti delle sedute del Consiglio d’Emigrazione tenute nell’anno 1902 », Bollettino dell’Emigrazione, 8, 1904, p. 7, ou chaque fois que les compagnies ont demandé des assouplissements (séance du CSE, 6 avril 1908, Bollettino dell’Emigrazione, 8, 1908, p. 69-71).
75- De Michelis, G., L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 429.Google Scholar
76- L’adéquation entre l’amélioration des performances des navires et des conditions de transport des migrants, et les hausses de prix consenties par l’administration italienne des migrations, est explicitement affichée comme une nécessité pour tous les intérêts en jeu (compagnies, migrants, état italien) à l’occasion d’un long débat au CSE, le 6 avril 1908 : « Rendiconti delle sedute del Consiglio d’Emigrazione, dec. 1907-aprile 1908 »), Bollettino dell’Emigrazione, 8, 1908, p. 69-71. L’autorisation d’augmenter les tarifs sur les navires les plus modernes est justifiée pour le CGE qui y voit un moyen d’encourager les investissements de renouvellement de la flotte par les compagnies ; tandis que les prix plus hauts sur les navires les plus rapides se justifient aussi par leur consommation plus élevée de charbon : De Michelis, G., L’emigrazione italiana…, op. cit., vol. 1, p. 434–435.Google Scholar
77- Sur les stratégies de coalition des compagnies pour la fixation des prix des traversées pour lesmigrants : D. KEELING, « International networks, corporate strategy… », art. cit. ; sur les stratégies des compagnies dans l’Atlantique Nord, voir par exemple Boyce, Gordon, Information, mediation, and institutional development: The rise of large-scale enterprise in British shipping, 1870-1919, Manchester, Manchester University Press, 1995.Google Scholar
78- D. KEELING, « International networks, corporate strategy… », art. cit.
79- Les compagnies étrangères accréditées pour les ports italiens, qui essayaient de s’appuyer sur le fait qu’elles émettaient de l’étranger les billets de retour, se sont particulièrement démenées pour contester l’interprétation en ce sens de la loi de 1901 par le CGE, en se pourvoyant régulièrement en cassation. Elles ont parfois obtenu gain de cause (voir par exemple le jugement de la Cour de cassation de Rome du 23 mars 1909 en faveur de la Société générale des transports maritimes de Marseille, signalé dans le Journal du droit international, 1915, p. 276). Mais à chaque fois, la 4e section du Conseil d’état italien a réaffirmé que, dans l’esprit de la législation sur l’émigration, les prix de retour ne pouvaient pas légitimement excéder les prix de l’aller.
80- Même si cette rationalité commerciale trouve des défenseurs dans les corps consultatifs (le CSE), voire dans le CGE lui-même, l’impératif de protection des migrants reste fondamental dans les arbitrages et il a toujours été confirmé, en dernière instance, par les arbitrages du ministère de tutelle (les Affaires étrangères) ou par ceux du Conseil d’état lui-même. Bollettino dell’Emigrazione, 2, 1907, et ASMAE, CGE, Aff. Gen, b. 41.
81- Gratuité de la traversée pour les nourrissons, quart du prix pour les enfants de 1 à 5 ans, et moitié pour ceux de 5 à 10 ans (art. 74 du règlement de l’émigration de 1901).
82- Par exemple, Alberto Beneduce, « Capitali personali e valore economico degli emigranti », Giornale degli economisti, juillet 1905, p. 31-44 ; Giuffrida, Vincenzo, Emigrazione e trasporti maritimi, Rome, 1906;Google Scholar Francesco Coletti, Dell’emigrazione italiana, Milan, Hoepli, 1911. La statistique d’état l’atteste elle-même en multipliant en même temps, soit au sein de la Direction générale de la statistique, soit au sein du ministère du Trésor, les tentatives d’estimation des profits des compagnies maritimes faisant le « service d’émigration », et des transferts financiers opérés par les migrants depuis ou en provenance de l’étranger.
83- Camera dei deputati, legislatura XXI, Ia Sess, 1900-1902, Disegni di legge e relazioni, vol. 2, no 44-B, All. no 2, Relazione presentata il 3 febbraio 1900, p. 40-41 ; Disegno di legge e relazione della Commissione parlamentare, seduta del 28 marzo 1912.
84- Dans une bibliographie de plus en plus développée, montrant comment les pratiques et la définition du service public ont varié et se sont construites sur une longue durée, en amont même des régulations propres à l’état social de l’époque contemporaine, voir Gilles GUGLIELMI (dir.), Histoire et service public, Paris, PUF, 2004 ; Olivier DARD et MichelMARGAIRAZ (dir.), « Le service public, l’économie, la République (1780- 1960) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 52-3, 2005 ; Dominique MARGAIRAZ, « Service public », inA. STANZIANI (dir.), Dictionnaire historique de l’économie-droit, XVIIIe- XXe siècles, Paris, LGDJ, 2007, p. 239-247 ; et Paolo NAPOLI, « Le service public au prisme du discours gestionnaire », ibid., p. 249-257. Pour des études de cas : Denis VARASCHIN, « De la concession en Espagne et en Italie, XIXe-XXe siècles », inD. BARJOT, S.PETITET et D. VARASCHIN (dir.), « La concession, outil de développement », Entreprises et histoire, 31, 2002, p. 54-70.
85- Le transport maritime a été, au tournant des XIXe et XXe siècles, un champ très important de diffusion du régime des conventions d’exploitation et des concessions de service public (notamment pour les services postaux et l’accessibilité des territoires impériaux), et il a rapidement donné lieu à une systématisation de la réflexion juridique et doctrinale dans de nombreux pays : V. GIUFFRIDA, Emigrazione e trasporti maritimi…, op. cit. ; Léon BOYER, Des conventions conclues entre l’état et les compagnies de navigation pour l’exploitation des services maritimes d’intérêt général, Paris, M. Giard et E. Brière, 1918 ; Fabry, G., De l’intervention directe de l’état dans les compagnies de navigation maritime, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1934;Google Scholar Harcourt, Freda, «British oceanic mail contracts in the age of steam, 1838-1914», The Journal of Transport History, 9, 1988, p. 1–18.CrossRefGoogle Scholar
86- Caroline DOUKI, « Les retombées financières de l’émigration et le développement régional en Italie entre XIXe et XXe siècle », in Chastagnaret, G. (dir.), Crise espagnole et nouveau siècle en Méditerranée. Politiques publiques et mutations structurelles des économies dans l’Europe méditerranéenne (fin XIXe-début XXe siècle), Aix-en-Provence/Madrid, Publications de l’université de Provence/Casa de Velázquez, 2000, p. 131–145.Google Scholar
87- P.-A. Rosental, « Géopolitique et état-Providence… », art. cit.
88- C. Douki « L’état libéral italien et l’émigration de masse… », art. cit.
89- Le degré et les formes spécifiques de l’intervention régulatrice de l’état dans ce service d’émigration fait l’objet de débats permanents entre les acteurs économiques, administratifs ou politiques engagés dans la définition ou la mise en oeuvre de la politique de l’émigration. Certains, comme le premier commissaire général à l’émigration, L. Bodio, souhaitent en rester à des formes de régulation organisant des conditions minimales à l’intérieur du marché et rappellent régulièrement, à ceux qui en sont partisans (notamment, au CSE, Angiolo Cabrini et Francesco Nitti), qu’ils sont opposés à ce qu’on en vienne à l’« étatisation des services » : séance du CSE du 7 avril 1908, Bollettino dell’Emigrazione, 8, 1908, p. 77.
90- On rejoint ici une question devenue importante dans l’historiographie de la protection sociale des populations : avant même les formes spécifiques définies dans le cadre de l’état social contemporain, mais également quand celui-ci se constitue au tournant du XIXe et XXe siècle, il apparaît que protection sociale des populations les plus fragiles et économie de marché ont pu s’articuler. Sur l’articulation entre libéralisme, régulation et protection sociale, le débat lancé par les analyses de Polanyi, Karl, La grande transformation. Aux origines politiques et économiques de notre temps, Paris, Gallimard, [1944] 1983,Google Scholar est en permanence réinvesti.
91- Pour un panorama de longue durée : P. RYGIEL, « Indésirables et migrants désirés… », art. cit. Sur ces effets systémiques, encore accentués dans l’entre-deux-guerres : P.-A. ROSENTAL, « Géopolitique et état-Providence… », art. cit.
92- ASMAE, CGE, Aff. Gen., b. 17 et b. 22.
93- Rosoli, Gianfausto, « Il conflitto sanitario tra Italia e Argentina del 1911», in Devoto, F.et Rosoli, G.(dir.), L’Italia nella società argentina. Contributi sull’emigrazione italiana in Argentina, Rome, Centro studi emigrazione, 1988, p. 294.Google Scholar
94- Ces enjeux majeurs ont été soulignés par A. SAYAD, « Immigration et conventions internationales », art. cit