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Published online by Cambridge University Press: 11 October 2017
Le juge, sauf en quelques rares cas (notamment en droit répressif *) ne tranche que s'il est saisi du conflit. Il faut donc pondérer l'importance des tensions se dévoilant dans les décisions, par la prise en considération de la volonté des justiciables de se soumettre à l'ordre juridique envisagé. Cette volonté dépend de deux facteurs : l'un général, le degré d'acceptation du système juridique par les intéressés ; l'autre plus « technique », la propension à saieir la juridiction établie.
1. En fait, en droit répressif, les parquets ne poursuivent activement que les infractions les plus graves. Et certaines poursuites sont menées uniquement sur plainte des intéressés.
page 735 note 1. Taux de divorces par rapport à celui des « messalisants », donc pénétration du droit laïc étatique dans la vie religieuse et conséquence sur les relations intimes et familiales. Action judiciaire des diverses organisations (syndicats, associations professionnelles, de défense des jeunes, ligues, etc.) s'efforçant de parler au nom des classes sociales ou soutenant l'un de leurs adhérents (cf. notamment l'Association nationale pour le progrès des Noirs, contre la ségrégation). Criminologie et contexte socio-historique : localisation et typologie des infractions, et des actes de répression : opérations qui exigent une stricte pondération dès que les circonstances ne sont plus normales, et que les organes de répression se trouvent débordés (durant la « rébellion » algérienne, les parquets ont progressivement abandonné la poursuite des délits ordinaires : escroquerie, vol… pour se concentrer sur la « pacification ») : s'imposerait aussi une sociologie, plus large, de la répression.
page 735 note 2. Se dévoilent donc l'amplitude de l'échange de normes par rapport au contexte : ainsi, dans l'Algérie coloniale, le caractère religieux du droit musulman et la force obligatoire de la loi française s'affaiblissent mutuellement. Et aussi les réactions affectives ou raisonnées des divers groupes de justiciables, plus ou moins « atteints » et intéressés par la situation coloniale : ruraux, citadins, riches ou pauvres, bilingues, ralliés ou opposants. Enfin du côté du juge, réinterprétation de la norme ou de l'institution locale en fonction des méthodes judiciaires « ordinaires » et des objectifs poursuivis : humanisation, équité, « assimilation », maintien d'une souveraineté politique et d'un système économique, etc. De tels phénomènes pourraient être étudiés dans le droit musulman d'Afrique du Nord, d'Indonésie, dans VAnglo-mohammadian Law de la péninsule indienne, etc.
page 735 note 3. Affirmation d'un droit élaboré original, fondé sur la réanimation de l'authenticité locale (cf. l'actuelle codification des coutumes africaines), et des formes sociales en qui elle s'extériorisait, mais avec emprunt des facilités « techniques » du droit étranger. En pratique, une telle dynamique dépasse rarement une idéologie juridique assez floue, et la jurisprudence montre que les importations techniques (organisation et méthode judiciaires) ou de fond (législation commerciale, administrative, socialiste…) conservent souvent un rôle important.
page 736 note 1. Choix d'un statut, désir d'invoquer une norme inusitée, ou même extérieure ; l'intéressé essayant d'échapper à la structure normative ambiante entrera souvent en opposition avec son milieu : d'où un conflit porté en justice (cf. le nombre de procès relatifs à l'attribution à un seul enfant de la ferme paternelle ; à la soumission d'un musulman algérien au statut civil français, etc.).
page 736 note 2. Divorce par consentement mutuel camouflé, grâce à une lettre d'injures rédigée par l'avoué ; adoption cachant une reconnaissance d'enfant adultérin ; transaction voilant un partage amiable de succession avec mineur ; donation déguisée sous forme de contrat à titre onéreux ; déguisement d'enquête civile forclose sous forme d'instruction criminelle ; organisation d'un patrimoine de façon à créer le vide devant la loi fiscale ou les créanciers ; crimes maquillés en accidents ; correctionnalisation, et toutes les dénégations au répressif…
page 737 note 1. Par exemple, en droit musulman, un allaitement commun entre deux enfants issus de parents différents constitue un empêchement à mariage très respeeté: en pratique, les nombreuses difficultés relatives à l'existence éventuelle de cette « parenté par le lait » sont résolues par consultation préalable, et n'apparaissent pas en justice.
page 737 note 2. Dans les milieux où subsistent des traces de famille patriarcale, le pouvoir du chef de famille sur les membres de celle-ci réduit le nombre des recours à la justice « officielle », en matière d'état des personnes ou de partages internes ; dans la situation coloniale, réflexe par fierté nationale, volonté de s'affirmer, de soustraire au moins une partie des activités aux yeux de l'« occupant » ; la centralisation étatique, si elle est libérale, favorise le recours à la justice ; mais le capitalisme organisé (autonomie des forces opposées et désirs de prévision, ou l'autoritarisme techno-bureaucratique — ou purement dictatorial — le réfrènent par suite du recul du droit dans la hiérarchie des contrôles sociaux, recul dû à des raisons très diverses : efficacité estimée insuffisante, crainte du fait du prince, lequel est désireux de n'être pas lié par les textes ou les intérêts établis, etc. Bien entendu, la« litigiosité » varie aussi, en chaque type de société, selon les genres et les branches de droit.
page 737 note 3. De nombreux facteurs peuvent jouer en des sens divers : degré de confiance accordée au juge, comportement des diverses catégories d'hommes de loi : science, âpreté au gain, volonté de lutte. Possibilité d'action en justice : étendue des ressorts judiciaires, conditions d'exercice de l'action en justice, suprématie socio-juridique reconnue à certaines personnes susceptibles d'infléchir le sens dans lequel jailliront les contestations, voire de donner lieu à des abus qui camoufleront les transferts de richesses ou des inimitiés interindividuelles ou interfamiliales (le tuteur sur son pupille, le mari sur sa femme, etc.). Délai de forclusion et évolution économique (par exemple : un accroissement de la valeur des terres entraîne un mouvement de reprise de la part de propriétaires endettés ou presque évincés, qui peut être bloqué par les délais de crédit immobilier ou de prescription…). Évolution générale du service de la justice qui tend à forcer le défendeur à comparaître : cette obligation favorise la pénétration du droit dans les réglementations sociales parallèles et la coïncidence entre ordre juridique et structure normative. Coût de l'accès en justice qui réagira sur la poursuite ultérieure du procès, et l'utilisation des voies de recours : l'assistance judiciaire, par exemple, crée une discontinuité : les personnes ayant de petits revenus, juste supérieurs à la limite au-dessus de laquelle elle n'est plus accordée, n'agiront pas en justice, alors que des revenus supérieurs, ou inférieurs, bénéficiant de celle-ci, actionneraient dans un cas similaire : les strates économiques ne sont donc pas totalement stériles en matière de création du droit, puisque par leur action ou inaction dans le système juridique « officiel », elles contribuent aussi au modelage de la structure normative.
page 738 note 1. Mécanismes de prévention des conflits socio-économiques ou administratifs, arbitrages « officiels » ou privés par notables, refuge cherché par une société ou des groupes colonisés auprès de leurs « sages » (nombreux exemples en Afrique noire, en Kabylie), ou du représentant local de l'Administration, transactions et compensations émanant du milieu lui-même, etc.
page 739 note 1. Par exemple, invariant : union sexuelle par mariage ; variable : conditions de validité du mariage. Jean-Paul Chaknay, V. « Pluralisme normatif et ambiguïté dans le fiqh », Studia Islamica, 1963, fasc. XIX, p. 78 Google Scholar.
page 739 note 2. Droit romain primitif, droit musulman, kanûn-s berbères, coutumes africaines, etc. Ces systèmes de droit correspondent donc à certains types de sociétés globales, dans lesquels la formulation du droit émane d'individus ayant un pouvoir quasi absolu : soit théocraties charismatiques, soit sociétés patriarcales, soit parfois dictatures techno-bureaucratiques.
page 739 note 3. Ces systèmes de droit résultent d'un certain éparpillement des pouvoirs normatif et juridictionnel dans la société globale considérée : soit, chez les Anglo-saxons, à la fois survivance de l'émiettement judiciaire féodal et conséquence du principe antiabsolutiste de la séparation des pouvoirs ; soit, dans les sociétés planifiées selon le principe de l'étatisrae collectiviste centralisateur, affirmation de la nécessité du dépérissement de l'État et ses corollaires juridiques : pluralité des ordonnancements juridiques des divers organismes sociaux et économiques, et libre examen du juge.
page 739 note 4. La plupart des systèmes juridiques issus du droit romain élaboré, avec primauté de la loi et organisation judiciaire centralisée à fonction homogénéisatriee. Il s'agit des sociétés ayant conféré au droit une grande importance, moyen d'unification étatique, puis d'expansion du capitalisme concurrentiel.
page 740 note 1. Nous utilisons ici ce mot au sens large de décision d'application de la norme par arbitre, sages issus du milieu, etc.
page 740 note 2. Par exemple, en droit musulman, il existe chez les théologiens-juristes une multitude de normes pour décider si la répudiation prononcée par le mari est ou non valable ; le caractère plus ou moins rigoureux de ces normes dévoile la situation de la femme dans le milieu considéré, etc. Actuellement encore, l'évolution des sociétés musulmanes apparaît peut-être autant au niveau juridique dans les solutions retenues par les codifications (en général, la norme la plus « laxiste » choisie une fois pour toutes par le législateur parmi les multiples normes antérieures) que dans le jeu de la jurisprudence.
page 740 note 3. La perception que le juge a du phénomène dont il est saisi réagit sur sa façon de juger.
page 740 note 4. Cf. par exemple la tradition de la dissenting opinion : l'avis contraire du juge minoritaire est publié.
page 740 note 5. La Cour de cassation, en principe, ne juge qu'en droit ; en pratique, les considérations de fait ne la laissent jamais indifférente…
page 741 note 1. Nous schématisons ici à dessein. Il faudrait, pour chaque système, pondérer selon les genres et les branches de droit. Le droit français connaît de multiples réglementations où a été poussé le phénomène de « juridicisation » du fait. En certains pays musulmans, le amal, sorte de jurisprudence, connaît des solutions parfois extra-légales lorsque le milieu ne supporterait pas la pureté coranique. En droit romain, les jurisconsultes classiques, bien que s'efforçant de rester en contact avec la pratique, tentent surtout de donner les règles du « juste et de l'injuste », les avocats exposant le fait ; cependant, le dépistage des interpolations dans la règle abstraite ou la formule (action de la loi) permet une recherche sociologique, etc.
page 741 note 2. Principe de l'économie des moyens : le juge ne retient que les seuls éléments de droit ou de fait qui lui sont nécessaires pour fonder sa conviction sur les divers points dont il est saisi.
page 741 note 3. L'énonciation des noms et qualités des parties, l'exposé des questions de fait et de droit doivent précéder la motivation stricto sensu.
page 741 note 4. Les arrêts des anciens parlements n'étaient pas motivés, et se bornaient à résumer les allégations et prétentions des parties ; le roi cependant pouvait exiger la production de motifs ( Olivier-Martin, F., « Les motifs des arrêts des Cours souveraines », communication à la Société d'Histoire du droit, résumée in Revue historique de droit, 1935, p. 189 Google Scholar). La motivation est exigée en France (sauf pour les jurys d'assises) depuis 1790 ( Tony Sauvel, V., « Histoire du jugement motivé », Revue du droit public, 1955, p. 5 Google Scholar).
page 742 note 1. Cf. Fabreguette, La logique judiciaire et l'art de juger, Paris, 1914, Librairie générale de droit et de jurisprudence ; Gorphe, François, Les décisions de justice, étude psychologique et judiciaire, Paris, 1952, P.U.F. Google Scholar
page 742 note 2. Mesure dans laquelle il est lié par les textes (hiérarchie et force contraignante des normes et des institutions : c'est-à-dire mesure dans laquelle il peut se dégager des conditions « légales » pour juger « en fait », donc apprécier toutes les circonstances de l'espèce : relation entre le premier niveau de recherche proposé, et le second) ; en matière civile, limitation de la compétence du juge aux faits, prétentions et moyens dont il a été saisi, et qui lui interdisent, au moins officiellement, de faire état de la totalité du phénomène concret ; et aussi erreurs dans l'étendue de la saisine : si le juge oublie de statuer sur l'un des points qui lui ont été soumis, ou néglige un élément de fait ou un argument de droit.
page 742 note 3. Utilisation des virtualités des diverses sortes de preuves ( François Gorphe, V., L''appréciation des preuves en justice, essai d'une méthode technique, Paris, 1947, SireyGoogle Scholar) : le jeu des diverses sortes de preuves permet non seulement d'approcher la réalité—les multiples indices, présomptions… — mais aussi de cerner certaines attitudes des juges et des justiciables, en matière de témoignage, d'aveu, de rédaction d'actes notamment. Les différents systèmes de causalité permettent une plus ou moins facile exploitation sociologique ; la théorie de l'équivalence des conditions (von BURI), par l'analyse complète qu'elle suppose de toutes les causes du dommage, autorise une vision plus riche que la théorie de la causalité adéquate (von Kries), qui tend à pondérer l'influence, et même l'existence des causes. L'élimination de la cause, en certains actes, afin d'assurer la sécurité du crédit — effet de commerce — ne permet pas de déceler les rapports préexistants entre débiteurs et créanciers, etc. L'analyse de la « forme » donne certains éléments : le déclin de la forme oblige certes le juge à pénétrer plus avant dans le concret ; mais l'utilisation d'une forme vivante — c'est-à-dire d'une mécanique gestuelle : par exemple le « tope-là » qui, en certaines provinces sur le champ de foire, vaut vente — permet de déduire une série de conséquences parfois plus lointaines que ne l'autorise la simple description du réel. Enfin, certaines catégories juridiques postulent l'existence de tel ou tel fait : par exemple, une émancipation suppose la comparution devant le juge d'instance, donc telle démarche, tel comportement interindividuel ; le domicile suppose qu'il existe certains liens — résidence, propriété… — entre tel lieu et tel individu, etc. On pourrait multiplier la recherche du fait exigé par une norme ou une notion d'apparence fort juridique.
page 743 note 1. Présomptions irréfragables, autorité de la chose jugée, énonciations d'un acte authentique effectuées par le rédacteur, etc.
page 743 note 2. Les arrêts de principe sont préférés à la série des arrêts d'espèce : or c'est pourtant cette série qui livre l'intensité et la durée de la tension sociale ; les décisions des juridictions supérieures, moins proches des justiciables, de leurs réactions, de leurs espoirs, sont davantage publiées que celles des tribunaux inférieurs. Cependant, la progression d'un procès à travers les voies de recours permet de relever certaines attitudes psycho-sociologiques des usagers : intérêt accordé à l'objet du litige, entêtement, haine…, ou des juges : politique suivie par les divers degrés de juridiction. En fait, la parution des décisions dépend des conceptions idéologiques des rédacteurs de la revue, du sens qu'ils entendent donner à l'évolution du droit (les décisions dérogatoires sont parfois « enterrées »), des notes qui leur sont proposées…
page 744 note 1. En France, le Compte général de l'administration de la justice civile et commerciale et de la justice criminelle est publié depuis 1827 (année 1825). La publication, qui a connu un certain fléchissement, a été très améliorée. Davidovitch, V. A. et Lévy-Bruhl, H., « La statistique et le droit », Année sociologique, 1959, p. 858 Google Scholar.
page 744 note 2. Par exemple en matière criminelle, où sont fournis, outre l'âge, le sexe, la nationalité, l'état civil, la profession des délinquants, leur répartition géographique ; renseignements moindres en matière correctionnelle ou civile.
page 745 note 1. L'utilisation de certains autres instruments juridiques (dossiers des procès, pratique notariale, administrative, des entreprises, etc.) a déjà été indiquée. Il faut y ajouter les textes (lois, règlements, etc.) eux-mêmes. Ces divers instruments peuvent livrer, comme les décisions de justice, leur contenu sociologique sous trois formes différentes. D'abord, extraction du fait « juridicisé », qui pourrait aussi être tentée avec grand profit sur la coutume et les usages locaux. D'autre part, recherche de leurs causes, facilitée par l'extension du principe de motivation aux décisions d'ordre administratif, économique, financier, etc. ; cependant ces motifs ne sont pas souvent publiés. Les exposés des motifs des projets ou propositions de loi, au contraire, les documents parlementaires, les questions écrites ou orales constituent, pour le sociologue, une mine très riche dont l'exploitation exigerait la prise en considération des circonstances politiques. Enfin, troisième forme, les modifications, les remplacements successifs de ces divers instruments permettent de suivre certaines notions, certaines institutions dans leur devenir, chaque étape étant signe (sous réserve de la détermination du temps) des changements intervenus dans l'équilibre politique ou socio-économique. On pourrait suivre de telles évolutions dans bien des domaines : notion de propriété et mise en valeur rurale en fonction de l'exode démographique, protection à rencontre des accidents du travail en fonction du progrès technique, remodelage des formes de l'activité professionnelle par le droit du travail, le droit rural, la sécurité sociale : V. notamment la revue Droit social.
Des évolutions semblables pourraient être décelées dans la jurisprudence : évolution de la notion de responsabilité en tant que signe de la diffusion de la machine, etc. Ou en doctrine : l'appréhension successive d'un certain nombre de notions par les divers auteurs en fonction de leur époque ; les affinements, les reculs se révéleraient, et aussi, pour les systèmes juridiques hétérogènes coexistants dans les pays colonisés, une compréhension de plus en plus intime, mais liée aux inflexions de la politique générale.
page 745 note 2. Ainsi a-t-on pu, pour l'Algérie coloniale (Jean-Paul Charnay, La vie musulmane en Algérie, précitée) établir des rapports entre types de procès, batailles de procédure, et étendues des exploitations agricoles, modes de culture : la recherche serait encore plus fructueuse si jumelée avec la géologie, l'agronomie, la sociologie rurale, l'économie politique, la géographie physique et humaine…
page 746 note 1. D'un procès en succession, par exemple, on pourra tirer des matériaux sur les relations interindividuelles dans une famille ; sur un conflit entre les sentiments et les richesses ; mais aussi sur la lutte pour le sol (si le de cujus avait des terres) ; sur la structure d'un patrimoine (valeurs mobilières, immeubles…) en tel milieu ; sur les luttes d'influence sur les enfants, s'il y a des mineurs ; sur la diversité des rôles sociaux incombant à chacun des acteurs au procès (père, et propriétaire, et créancier ; membre d'une famille, et d'une profession, etc.) ; sur le comportement d'un homme de loi ou d'un magistrat, etc.
page 746 note 2. On donnera dans la mesure du possible —• ce qui ne va pas, eu égard à l'imprécision de certains jugements, sans déficience —• des chiffres, des sommes, des superficies, des noms de lieu, qui permettront de fixer plus facilement le volant et le volume des litiges ; et aussi les noms des parties, les patronymes (précisions de tradition dans les recueils de jurisprudence) : étiquette des individus, qui constitue une précieuse approche sociologique et ethnographique : une ville demeure fermée tant que l'on n'a pas erré entre les tombes de son cimetière — dans les pays où les stèles portent des noms — et feuilleté les pages de son annuaire…
page 747 note 1. Surface écologique, conduites collectives, rôles sociaux, idées et valeurs…
page 749 note 1. Ainsi, en matière de répression socio-politique, le temps juridique est souvent en retard sur le temps social, mais peut être en avance, en cas de poussée réactionnaire ou au niveau de l'organisation des peines (traitement thérapeutique du délinquant ou « défense sociale », alors que l'opinion publique pense encore la peine en termes de vengeance…).
page 750 note 1. Droit pénal et criminologie, attitude envers les institutions politiques et leur fonctionnement (élections), le service militaire, l'impôt, etc. : l'étude sociologique de ce contentieux administratif, fiscal ou économique serait à cet égard précieuse.
page 751 note 1. Concurrence économique, opposition d'organisations professionnelles : le jeu des strates et des classes dans la profession (patron contre ouvrier, fermier contre propriétaire), compatibilité entre État et Église, sectes, groupements politiques ; conflits entre entités administratives fonctionnelles ou locales… Revendication, affirmation de particularisme, ou union ; degré d'acceptation de la société globale et de son système juridique ; cohésion et caractère ouvert ou clos ; périodicité de l'action et dispersion des membres…
page 752 note 1. De nombreux procès en éviction de terre peuvent supposer la création d'un salariat rural, et des migrations ; des conflits opposant des débirentiers à leurs crédirentiers peuvent être signes d'un appauvrissement d'une frange de la petite bourgeoisie ; des disputes entre divorcés ou familles sur l'éducation des enfants peuvent dévoiler l'appartenance sociale, et aussi les sentiments culturels, religieux de tel milieu…
page 752 note 2. Inscrire sur la carte, pour une branche déterminée du droit (« status » familial ; régime foncier ; rapports de travail ; vie administrative, des associations ; contrats agricoles ; rapports économiques…) les types de relations juridiques les plus fréquents en une commune, une région ; les échelles, selon les résultats recherchés (vue d'ensemble ou monographie) pourraient être fort diverses. Ainsi se dégageraient des concordances entre la vie socio-économique générale ou l'ethnologie, et leur traduction juridique. Mais cette élaboration cartographique, eu égard au caractère contingent de l'utilisation des voies de recours, ne pourrait être faite qu'à partir de toutes les décisions des juridictions du premier degré, relatives au phénomène étudié.
page 753 note 1. Ces tensions constituent, si l'on ose cette comparaison, un ensemble de lignes de force : on pourrait les représenter par de multiples vecteurs mesurables et orientés dans les sens les plus divers (opposés, parallèles ou divergents) susceptibles de se rassembler plus particulièrement en certains foyers. Le graphique ainsi construit demeurerait ouvert, afin de permettre l'intégration des poussées imprévues et des données complémentaires tirées de matériels sociologiques autres, aptes à préciser hiérarchies, groupements et points d'amarrage dans la représentation plus fluide des vecteursforces.