Longtemps, les pratiques de la mesure ont été prises comme des techniques autorisées qui traversent particulièrement bien et facilement les frontières culturelles, des techniques prises aussi comme un signe et une cause de la prédominance apparente des modes occidentales des sciences. L’attention aux rituels de la mesure et à l’émergence des formes de savoir qui accompagnaient la mesure, les sciences de métrologie notamment, aide à remettre en cause ces présupposés. On peut utiliser des récits du commerce silencieux, souvent situés en Afrique occidentale, et des histoires des origines rituelles de la mesure, développées par l’anthropologie et par l’histoire conjecturelle, pour sonder comment les pratiques de la mesure voyageaient et se transformaient. En particulier, les recherches de Marc Bloch, historien éminent des cérémonies et du pouvoir, peuvent aider à éclairer les rapports entre la géographie historique de la métrologie et l’étendue des sciences. Sa brillante analyse du rituel royal des anneaux magiques et de sa fortune donne un exemple et un précédent importants des épisodes cérémoniels et culturellement considérables dans l’histoire longue de la science de la mesure.