L'article qui suit tente d'analyser au seuil du XIXe siècle le stéréotype de la « féminité » qui va dominer la société française jusque bien au-delà de la Grande Guerre, et qui agonise lentement de nos jours, non sans soubresauts. Pour le saisir dans ses origines, il faudrait remonter aux Pères de l'Église et à Aristote. On se contentera ici de chercher quelle forme il a prise à un moment donné, et pourquoi il a réussi à s'imposer si fortement, non seulement aux hommes, mais aux femmes.
La Révolution et l'Empire marquent une régression relative de la condition féminine ; des droits nouveaux sont créés pour les hommes seuls, ce qui accroît l'inégalité traditionnelle entre les deux sexes : le droit de voter au niveau national, c'est-à-dire de participer à la vie politique, est accordé aux hommes, pas aux femmes ; l'Université et les lycées qui font de l'enseignement un service public sont ouverts aux hommes, pas aux femmes ; et on sait que le Code civil prive la femme mariée de droits considérés comme « naturels » peu de temps auparavant. Or les femmes semblent s'être vite résignées à ces exclusions.