Hostname: page-component-cd9895bd7-dk4vv Total loading time: 0 Render date: 2024-12-27T11:51:44.412Z Has data issue: false hasContentIssue false

Condition de classe et position de classe

Published online by Cambridge University Press:  28 July 2009

Get access

Extract

Les sociologues mettent-ils toujours un sens sous le mot structure lorsqu'ils parlent de « structure sociale » (1) ? Il faut pourtant se demander si et dans quelle mesure les parties constitutives d'une société stratifiée, classes ou groupes de statut, forment une structure, c'est-à-dire, pour s'en tenir provisoirement à une définition minimale, si et dans quelle mesure elles entretiennent des relations autres que de simple juxtaposition et, en conséquence, manifestent des propriétés qui résultent de leur appartenance à la totalité ou, plus précisément, de leur position dans le système complet des relations qui commande le sens de chaque relation particulière.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Archives Européenes de Sociology 1966

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

(1) “Structure sometimes has its common-sense meaning, as when we speak of the structure of a dance. Sometimes it emphazises form; sometimes organization; as in the term “social structure” which is tending to replace “social organization”, without appearing to add either content or emphasis of meaning.” Kroeber, A.L., Structure, Function and Pattern in Biology and Anthropology, The Scientific Monthly, LVI (1943) 98120.Google Scholar

(2) « Ainsi, écrit Radcliffe-Brown […] quand nous nous occupons d'un système structural, nous avons affaire à un système de positions sociales, tandis que dans une organisation nous avons affaire a un systeme de rôles. » (Structure and Function in Primitive Society 5 (Londres 1963), p. 11.)Google Scholar

(3) “Rather than use it [the word “peasant”], as some have, for any community of small-scale producers for market, let us reserve it for this new type. It required the city to bring it into existence. There were no peasants before the first cities. And those surviving primitive peoples who do not live in terms of the city are not peasants […]. The peasant is a rural native whose long established order of life takes important account of the city.” Redfield, R., The Primitive World and its Transformations4 (New York, Cornell University, 1961), p. 31.Google Scholar

(4) Ibid. p. 36.

(5) Wertheimer, , «Untersuchungen zur Lehre von der Gestalt », Psychologische Forschung, I (1921) 4560.Google Scholar

(6) Lipset, S.M. and Bendix, R., Social Status and Social Structure: A Re-examination of Data and Interpretations: II, The British Journal of Sociology, II (1951) 230254.CrossRefGoogle Scholar

(7) Ainsi, du fait que la signification et la fonction que chaque classe sociale confere a la photographie se défmissent par opposition à celles que lui confèrent les autres classes, la pratique photographique que les hautes classes, surtout à Paris et dans la region parisienne, tendent à refuser comme vulgaire parce que divulguée peut retrouver, en d'autres contextes, sa valeur de signe de « distinction » statutaire: plus éloignée du foyer des valeurs culturelles et moins pourvue en occasions de distractions nobles, la bourgeoisie des villes moyennes de province peut trouver dans une pratique voisine de celle des classes moyennes de Paris un moyen d'exprimer une position différente dans une structure sociale différente, tandis que la petite bourgeoisie d'émancipés d'un bourg du sud-est de la Corse trahit par une adhésion parfois fervente à cette pratique empruntée à la société urbaine, maîtresse de toute distinction, le désir d'échapper aux loisirs coutumiers, rencontres au café ou soirées familiales, et de rompre avec la routine monotone d'une société traditionnelle qui organise les rencontres sociales selon les relations de parenté plutôt que selon la diversité des conditions (cf. Bourdieu, P. et al. , Un art moyen, essai sur les usages sociaux de la photographie, (Paris, Ed. de minuit, 1965).Google Scholar

(8) Cf. Radcliffe-Brown, A. R., “The Comparative Method in Social Anthropology” in Method in Social Anthropology, ed. by Srinivas, M.N. (Chicago, The University of Chicago Press, 1958), pp. 109110Google Scholar et Lévi-Strauss, C., “La sociologie française”, in La sociologie du XXe siècle (Paris, PUF, 1947), p. 536.Google Scholar

(9) « Le démocrate, parce qu'il représente la petite bourgeoisie, par conséquent une classe intermédiaire, au sein de laquelle s'émoussent les intérêts des deux classes opposées, s'imagine d'être au-dessus des antagonismes de classe. » (Marx, K., Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte (Paris, Ed. Sociales, 1963), p. 45.Google Scholar

(10) Le chapitre de Wirtschaft und Gesellschaft intitulé « Stände, Klassen und Religion », enferme des exemples particulièrement typiques de propositions générales sur les classes dans leur universality (Köln-Berhn, , Kiepenheuer, und Witsch, , 1964, vol. I, pp. 368 sq.).Google Scholar

(11) Cf. Radcliffe-Brown, A. R., “The study of Kinship systems”, in Structure and Function in Primitive Society (Londres 1963), pp. 5354Google Scholar et aussi ibid. pp. 86–87 et 194.

(12) Ceci est également vrai des langues ou des cultures: « Deux cultures, ecrit C. Kluckhohn, peuvent avoir des inventaires presque identiques et être néanmoins extrêmement différentes », Mirror for Man, (New York, McGraw Hill, 1949), p. 34.Google Scholar

(13) Dumézil, G., L'héritage indoeuropéen à Rome (Paris, Gallimard, 1949), p. 38.Google Scholar

(14) Ruesch, J., “Social Technique, Social Status and Social Change in Illness”Google Scholar, in Kluckhohn, C. and Murray, H. A., Personality in Nature, Society, and Culture2 (New York, Alfred Knopf, 1964), p. 131132Google Scholar; Wilensky, H. L. and Edwards, H., The Skidder: Ideological Adjustmerits of Downward Mobile Workers, American Journal of Sociology, XXIV (1959), 315331.Google Scholar

(15) Wright, L. B., Middle-class Culture in Elisabethan England (Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1935)Google Scholar. Préface, VII. C'estmoi qui souligne.

(16) Ibid. p. 44.

(17) De même, Dina Bertoni Jovine montre qu'en Italie, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, la littérature de vulgarisation atteint surtout les classes moyennes: « C'était là le public le plus disposé à subir l'influence de ces livres: un public qui reconnaissait volontiers dans les exemples de travail et d'honnêteté le reflet de sa propre existence et de celle de ses propres parents et qui abhorrait la violence et le désordre; des gens qui étaient sortis de l'incertitude économique ou d'une condition sociale modeste au prix de patience, Constance, intelligence et activité, de sacrifices et de renoncements.», Storia dell'educazione popolare in Italia (Bari, Universale Laterza, 1965), p. 318.Google Scholar

(18) Cf. par exemple Davis, A. and Havigurst, R. J., Father of the man, (Boston 1947)Google Scholar, et Social class and color differences in Child-Rearing, , American Sociological Review, XI (1946), 698710Google Scholar; Ericson, M. C., Child-Rearing and social status, American Journal of Sociology, LII (1946), 190192CrossRefGoogle Scholar. On a pu montrer qu'à des formes différentes de répression correspondent des formes différentes de maladies mentales: « La culture des basses classes, écrit J. Ruesch, favorise des conditions de désordre et de rébellion, la culture de classe moyenne la formation de symptômes physiques et de réactions psychosomatiques et la culture de haute classe des psychonévroses et psychoses du type maniaco dépressif.» (“Social Technique, Social Status, and Social Change in Illness”, in Kluckhohn, C. and Murray, H. A., Personality in Nature, Society and, Culture (New York 1964), pp. 123136)Google Scholar. Dans un autre sens, Duvall, E. M. remarque que les classes moyennes insistent sur le «développement » tandis que les classes populaires sont plus « traditionnelles» (Conceptions of Parenthood, American Journal of Sociology, LII (1946), 193203.CrossRefGoogle Scholar

(19) Du fait que « l'esthétique » spontanée est le plus souvent une dimension de l'ethos, on comprend aussi que les classes moyennes fassent du travail de l'artiste un des critères fondamentaux de l'appréciation artistique.

(20) Groethuysen, B., Origines de l'esprit bourgeois en France, I, L'Eglise et la bourgeoisie (Paris, N.R.F., 1927), p. 116.Google Scholar

(21) Cité par Groethuysen, B., op., cit, pp. 200 et 223.Google Scholar

(22) Ranulf, Svend, Moral Indignation and Middle Class Psychology (Copenhague 1938)Google Scholar. Miller, Nearl E. et Dollard, John montrent aussi que l'agressivité (qui trouve un exutoire « légitime » dans la reprobation morale) se rencontre surtout chez les personnes en forte ascension sociale (Social Learning and Imitation8 (Yale 1964), p. 6)Google Scholar; cf. aussi Davis, A. and Dollard, J., Children of Bondage, (Washington, American Council on Education, 1940).Google Scholar

(23) « Imaginez le bourgeois forme selon les regies de l'Eglise. Il se couche et se lève a des heures régulières. Il a ses heures de travail et de repos. Il ne fera jamais de trop grands efforts et ne dépassera jamais les limites qu'il s'est tracées. L'esprit de sa vie est la régularité. Il faut que les journées se suivent dans une parfaite uniformité et que rien ne soit dérangé dans l'ordré établi. Le travail pour lui fait partie du rythme général de vie; il ne travaille pas pour le besoin d'aboutir, il travaille pour donner consistance à sa vie, qui autrement n'en aurait pas. L'Eglise le bénit à cause de son sérieux et parce qu'il s'en tient à ce qui est établi. Ce bourgeois, certes, il existe; c'est l'employé modèle. L'Eglise a contribué a former un certain type de bourgeoisie moyenne et à peupler les bureaux. Honnête homme, ce bourgeois modeste et rangé va tous les dimanches à la messe, comme tous les jours de la semaine a son bureau. » Groethuysen, B., op. cit. pp. 218219.Google Scholar

(24) Dans la logique de la pensée de Saussure qui tenait la langue — c'est-à-dire, par opposition au langage, une langue particulière, comme le français ou l'allemand, — pour le seul objet concret de la linguistique, Kenneth L. Pike oppose l'eéique qui, établissant des propositions généralisées sur les données, permet d'identifier, de décrire et de classifier systématiquement toutes les données comparables de toutes les langues et de toutes les cultures du monde grâce à un système de critères (élaboré par l'analyste antérieurement à l'étude de la culture particulière où il puise ses données) et d'organiser en types les éléments ainsi classés a l'émique qui se propose de découvrir et de décrire le modèle d'une langue ou d'une culture particulière « en prenant en compte la manière particulière selon laquelle les différents éléments de cette culture sont reliés les uns aux autres dans le fonctionnement d'un modèle particulier ». (Pike, K. L., Language in Relation to a Unified Theory of the Structure of Human Behavior, I (Glendale, Summer Institute of Linguistics, 1965), p. 8).Google Scholar

(25) Weber, M., op. cit., t. II, p. 688.Google Scholar

(26) Il s'ensuit, observe Max Weber, que les «différences entre les classes s'entrecroisent de mille façons avec les distinctions de statut »: en d'autres termes, si la possession de biens tend toujours à devenir, à la longue, la condition nécessaire de l'appartenance à un groupe de statut, elle n'est jamais une condition suffisante et l'honneur d'un ordre statutaire n'est pas nécessairement lié a une situation de classe, puisque au contraire il se distingue radicalement, en règie générate, des prétentions de la pure et simple propriété.

(27) Weber, M., op. cit., t. II, p. 686.Google Scholar

(28) McGuire, , Social Stratification and Mobility Patterns, American Sociological Review, XV (1950), 195204.CrossRefGoogle Scholar

(29) Hjelmslev, , Essais linguistiques. Travaux du cercle linguistique de Copenhague (Copenhague 1959), vol. XII, p. 106.Google Scholar

(30) Cf. Lévi-Strauss, C., Le cru et le cuit (Paris, Plon, 1964), p. 60.Google Scholar

(31) Simmel, G., Fashion, International Quarterly, X (1904), 130135Google Scholar, réédité in American Journal of Sociology, LXII (1957), 541558.Google Scholar

(32) Barber, B. and Lobel, L.S., loc. cit.Google Scholar

(33) Si les règies qui régissent les choix esthétiques de chaque classe s'expriment volontiers sous la forme de préceptes négatifs, elles peuvent être négatives, ou mieux oppositives, sans se reduire à la négation des règies auxquelles obéissent les autres classes. Le refus de la « vulgarité » comme recherche de la distinction s'exprime selon une logique propre à chaque classe, du fait qu'il doit sa forme et sa coloration particulière à l'ethos de chaque classe. Ainsi, de même que l'opposition entre les vieilles families et les families de vieille fortune s'organise autour du principe objectif des différences qui les séparent et des valeurs associées à ce principe, soit, très grossièrement, l'hérédité et l'argent, de mêae la désinvolture détachée avec laquelle les membres des classes supérieures s'adonnent, quand ils le font, à la photographie s'oppose a l'ascèse laborieuse de l'acquisition qui s'exprime par exemple dans le verbe « faire » de « faire l'Italie », comme la distinction naturelle à l'effort besogneux.

(34) Tout se passe done comme si les différentes sociétés et les différentes classes sociales proposaient à leurs membres autant de systèmes différents d'indices de différentiation. Ainsi, tandis que dans nos sociétés, les pratiques culturelles doivent à leur haut rendement symbolique d'être le moyen d'expression par excellence de la recherche de la différence pour la différence, celle-ci a pu s'exprimer aussi, à d'autres époques, en d'autres domaines, celui de la religion par exemple: «Aussi, s'il arrive que ceux qui autrefois étaient de simples croyants adoptent le langage des gens éclairés, est-ce bien pour se prouver à eux-mêmes et aux autres, qu'ils sont d'une classe plus élevée, qu'ils sont devenus à leur tour des « gens d'une certaine façon ». C'est là une preuve de plus que la religion est devenue l'affaire du peuple. Pour être bourgeois il faut ne pas croire. Cet homme qui « regarde avec mépris et comme du haut de sa grandeur, ce pauvre peuple qui assiste avec respect aux saints Mystères», cet homme qui « se croit un personnage distingué parce qu'il ne fait pas comme les autres des inclinations, des génuflexions, des prières, […] en même temps qu'il renie sa religion, établit une distinction entre deux classes sociales, il fait en quelque sorte une déclaration, pour faire reconnaître ses droits de bourgeoisie. » (Groethuysen, B., Origines de l'esprit bourgeois en France, I, L'Eglise et la bourgeoisie (Paris, NRF, 1927), p. 31).Google Scholar

(35) Troubetzkoy, N. S., Principes de phonologie (Paris, Klincksieck, 1957), pp. 2122.Google Scholar

(36) Genette, G., Figures (Paris, Seuil, 1966), p. 209.Google Scholar

(37) Ibid. p. 22.

(38) Cf. Bourdieu, P. et Darbel, A., L'Amour de l'Art, le musée et son public (Paris, Ed. de Minuit, 1965).Google Scholar

(39) Ibid. p. 22.

(40) «On parle d'un visage commun, dit Kant, par opposition à un visage distingue.» (Kant, E., Anthropologic du point de vue pragmatique (Paris, Vrin, 1964), p. 147.)Google Scholar

(41) Pieris, Ralph, Speech and Society: A Sociological Approach to language, American Sociological Review, XVI (1951), pp. 499505.CrossRefGoogle Scholar

(42) Loc. cit. p. 26.Google Scholar

(43) «En pensant ouvrier, Citroën prétendait séparer d'un coup la fonction matérielle de l'automobile et sa valeur symbolique. Une Jaguar type E, par exemple, est un pur symbole. Elle est trop chère, elle va trop vite, elle n'offre pas assez de place, elle est trop fragile, etc., bref, elle est rigoureusement inutile […]. La «2 CV» devait être un outil […]. Mais beaucoup d'idéalistes et d'intellectuels s'y laisserent prendre […]. La «2 CV» se voulait libre de tout symbole: elle devient un symbole à l'envers.» (Held, J. F., Quatre roues sous un parapluie, Le Nouvel Observateur, 24 11 1965).Google Scholar

(44) Bernard Barber et Lyle S. Lobel décrivent fort bien le «shopping pattern» selon lequel, avec l'aide des magazines, les femmes américaines s'efforcent d'obtenir au moindre prix les vêtements les plus chargés de valeur symbolique, c'est-à-dire les plus haut situés dans la hiérarchie des valeurs de mode (cf. Barber, Bernard and Lobel, Lyle S., Fashion in Women's Clothes and the American Social System, Social Forces, XXXI (1952), 124131.)CrossRefGoogle Scholar

(45) Davis, Allison, Gardner, Burleigh B. and Gardner, Mary R., Deep South, Chicago (University of Chicago Press, 194), pp. 6072Google Scholar, cité par Korhauser, Ruth Rosner, «The Warner Approach to Social Stratification»Google Scholar, in Bendix, and Lipset, , op. cit. p. 249.Google Scholar

(46) On observerait de la même façon que la référence aux différences de style de vie est infiniment plus rare, à tous les niveaux de la hiérarchie sociale, dans une société économiquement peu développée, comme l'Algérie, où les déterminismes économiques pèsent de manière plus brutale en sorte que les criteres subjectifs et objectifs de stratification se réfèrent tous, directement ou indirectement, à l'ordre é conomique.