Cette chronique s'assigne un but limité, différent de celui que se sont imposé les chroniques de finances publiques des numéros précédents. Au lieu de présenter une description et une analyse détaillées des comptes du pouvoir central en 1963, nous nous bornerons à examiner l'équilibre général des finances publiques, le financement du déficit global et l'influence tant de l'impasse que de sa méthode de financement sur l'économie du pays. L'analyse est donc ambitieuse, par l'ampleur des problèmes de politique économique qu'elle soulève, mais modeste par l'abondance et la précision des renseignements statistiques qu'elle fournit.

En 1963, plus encore qu'au cours des années précédentes, la demande extérieure a constitué pour l'économie belge le principal facteur d'entraînement à la haute conjoncture. Par rapport à leur niveau déjà élevé de 1962, les ventes de biens et de services ont en effet progressé de 9 %, alors que la hausse des dépenses privées intérieures de consommation et d'investissement n'atteignait que quelque 6 %, soit un taux légèrement inférieur au développement du produit national brut à prix courants. Quant aux dépenses publiques, qui se sont elles aussi développées aux rythmes élevés de l'année antérieure, elles n'ont exercé aucune influence contracyclique; au contraire, elles ont contribué à exacerber les tensions apparues au second semestre dans le dispositif des prix.

La situation sociale en 1963 doit être appréciée dans le contexte de l'évolution économique et politique générale d'une part, et dans le cadre des relations sociales paritaires d'autre part.

Sur le plan économique, il a été suffisamment exposé que l'année 1963 fut caractérisée par la poursuite de la haute conjoncture, c'est-à-dire en premier lieu, au niveau social, par le maintien d'un plein emploi des forces du travail: au 30 juin 1963 on ne recensait plus que 58.931 chômeurs complets, soit le chiffre le plus bas enregistré depuis bien longtemps: ce total ne comporte d'ailleurs qu'environ 20.000 chômeurs réellement aptes au travail.

La conjoncture ascendante que la Belgique vit actuellement, a provoqué une hausse de l'emploi pendant quatre années consécutives et il n'est nullement déraisonnable de croire que la tendance puisse se poursuivre en 1964. Une période aussi longue de hausse de l'emploi ne s'était pas produite depuis la guerre; la dernière hausse ne s'était marquée nettement que pendant trois ans (1955-56-57) et le retournement avait provoqué une chute de l'emploi total de plus de 3%. Aussi est-il évident que l'année 1963 se caracté¬rise par un épuisement des réserves de main-d'œuvre immédiatement disponibles et même par une résorption progressive des séquelles de la récession antérieure (section I).

La recherche constante d'un équilibre entre l'offre et la de¬mande a toujours été, pour l'industrie charbonnière, un problème ardu. Il en était déjà ainsi au temps où le charbon subissait fort peu la concurrence des autres combustibles. Maintenant que cette concurrence est devenue, — pourrait-on dire, — virulente, la réalisation d'un équilibre satisfaisant est une tâche de plus en plus malaisée. D'une part, la demande de charbon connaît parfois des fluctuations importantes, tandis que l'offre se caractérise par une grande rigidité due aux facteurs de production.

Comme en témoignent sans doute les autres articles de cette livraison, l'année 1963 a été pour la plupart des secteurs de la vie économique belge une année d'expansion et de prospérité. Tous ont participé, dans une mesure variable, à une évolution conjoncturelle généralement favorable.

Dans ce tableau optimiste, la sidérurgie jette une note discordante. Pour elle, l'année dernière a été, dans sa plus grande partie, la prolongation d'une période de stagnation de l'activité et de détérioration des prix. Tandis qu'à de nombreuses reprises dans le passé la sidérurgie a été un secteur en pointe dans le progrès, elle est restée en 1963, comme en 1962, nettement en arrière de l'évolution générale.

Comment s'est présentée l'industrie chimique belge en 1963 ? A cette question, posée chaque année par les lecteurs de cette revue, nous nous efforçons d'apporter une réponse dans les limites où les données objectives permettent d'établir le diagnostic avec suffisamment de clarté.

Il semble superflu de rappeler une fois de plus l'extrême diversité du secteur et partant la multiplicité des influences et des interactions qui jouent au cours d'une année et contribuent à rendre très difficile une analyse complète du sujet.

L'industrie textile a été en 1963 un des secteurs les plus actifs de l'économie belge. Tout au long de l'année, la fermeté de ses marchés et la vigueur de son expansion ont contrasté avec l'allure quelque peu freinée de la conjonture générale. En fait, comme la plupart des industries de biens de consommation semi-durables, l'industrie textile a bénéficié d'une forte expansion de la demande, suscitée et entretenue par le développement rapide des revenus professionnels, lui-même lié à la haute prospérité qui a caractérisé le pays au cours des années récentes.

Après avoir sommairement décrit quelques caractéristiques du climat (I), nous examinerons comment a évolué le volume des diverses productions (II), ainsi que les prix, les coûts et les revenus (III). Nous développerons un peu plus longuement, en raison de leur importance croissante d'année en année, les faits saillants de la politique agricole, et ce, tant à l'échelle de la politique intérieure, qu'au sein du Marché Commun (IV). Enfin, nous jetterons sur l'avenir un bref regard prospectif (V).

Au cours de l'année 1963, le commerce extérieur de l'Union Economique Belgo-Luxembourgeoise (U.E.B.L.) a connu une expansion remarquablement rapide. Les exportations ont atteint le chiffre de 242,0 milliards de francs soit un accroissement de 25,8 milliards ou 11,9% par rapport à l'année précédente; à titre de comparaison, il convient de rappeler qu'en 1961 — année déjà très favorable cependant — l'accroissement correspondant n'avait pas dépassé les 20 milliards (environ 10%).

En ce qui concerne les importations, le développement a été tout aussi rapide: elles se sont élevées à 255,6 milliards de francs, soit une augmentation de 27,8 milliards ou 12,2% par rapport à l'année 1962. Comparé à l'accroissement de 16,9 milliards, enregistré au cours de cette dernière année par rapport à 1961, le gonflement des importations en 1963 est très sensible et significatif.

L'année qui vient de se terminer a vu une modification appréciable dans le régime des prix en Belgique.

Tout d'abord, les prix de gros, qui antérieurement avaient accusé une stabilité remarquable, à peine troublée à la fin de 1962, se sont animés dès le premier semestre, pour connaître en fin d'année et au début de 1964 une hausse dont les causes sont composites.

La moyenne annuelle basée sur la période 1936-1938, s'était établie à 424 en 1961. Elle est passée à 428 en 1962 et à 438 en 1963. Ainsi qu'on le verra au tableau I, en janvier 1964, le niveau s'était élevé à 453.