La question du baptême forcé, comme forme de la persécution des juifs inscrite dans la longue durée de l’histoire des sociétés occidentales, apparaît comme un lieu de fortes tensions historiographiques. Analysant les risques auxquels son étude s’expose (” conception larmoyante de l’histoire juive », optique « téléologique », « anachronique », « judiciaire »), l’article traite des tendances historiographiques qui, rejetant le paradigme de la « société persécutrice » et réduisant systématiquement la part des facteurs religieux dans l’explication des formes de la persécution, ont donné lieu à un travail spécifique sur la causalité et la temporalité historiques. Deux situations précises (la première croisade en 1096, la croisade des Pastoureaux en 1320) permettent d’observer les mécanismes de rationalisation à l’oeuvre dans cette nouvelle histoire de la persécution, et de rendre compte de la diversité de ses objets et de ses approches.