Au cours d'une enquête sur les origines et l'évolution de l'opinion politique des classes populaires, il est fréquent de recueillir des jugements attribuant une large influence à l'action de l'instituteur et de l'enseignement primaire. L'enseignement, d'abord congréganiste, puis simplement libre, mais toujours d'inspiration religieuse, expliquerait le caractère conservateur de certaines régions, dans l'Ouest surtout ; au contraire, l'action de l'instituteur laïque aurait conquis aux idées «avancées” d'autres populations, dans d'autres régions, surtout dans les campagnes. Cette façon de voir ne date pas d'hier. Qu'on songe aux discussions qui s'engagèrent, dès la Restauration, autour de l'enseignement mutuel, plus tard à propos de la loi Falloux, enfin, sous la troisième République, pour ou contre la laïcité, le monopole ou la liberté de l'enseignement primaire. Querelles toutes engagées avec la conviction que, de la solution adoptée, dépendrait largement l'opinion des masses, décisive en régime de suffrage universel.