L'étude des notions passe par celle des mots utilisés pour les exprimer. Cet aphorisme, tellement évident qu'il fait figure de truisme, fut parfois négligé par les historiens des idées. L'élan nouveau imprimé depuis plusieurs années à l'histoire des mentalités a mis l'accent sur l'intérêt des recherches historiques de vocabulaire. L'examen des vocables désignant des groupes sociaux, des notions, concepts ou systèmes de valeurs revêt pour l'historien une importance d'autant plus grande qu'il risque toujours, s'il s'en dispense, de transporter dans le passé qu'il scrute des conceptions plus modernes, commettant ainsi le redoutable anachronisme.
C'est ce qui est arrivé, nous semble-t-il, pour la notion de chevalerie. On a trop longtemps, à la suite de travaux pourtant fort décriés, attribué aux mots chevalerie et chevalier des acceptions sociales, juridiques, voire honorifiques ou culturelles qui, vraies pour le XIVe siècle ou peut-être pour le XIIIe siècle, ne peuvent être attribuées sans nuances et réserves à la chevalerie des XIe et XIIe siècles.