Lorsqu'ils étudient l'immigration en France, historiens et sociologues ne manquent pas de faire référence implicitement ou explicitement aux États- Unis, exemple type d'une société formée par l'immigration. L'essentiel de cette comparaison s'organise en général autour de deux pôles, l'un positif, l'autre négatif. Il s'agit ainsi de montrer la puissance centralisatrice de l'État français en soulignant le caractère « silencieux » et absolu de l'assimilation des étrangers en France qui, contrairement au cas américain, ne laisse pas de trace de l'ethnicité d'origine. La notion d'ethnicité n'a d'ailleurs pas lieu en France, la seule catégorie nationale étant française et indivisible. Le modèle américain sert alors surtout de contre-exemple ou d'illustration a contrario du bienfait de l'assimilation républicaine. En revanche, à propos du phénomène contemporain de la « deuxième génération », issue de l'immigration nord-africaine notamment, dont la résistance au schéma que l'on croit classique d'assimilation semble indiquer un dysfonctionnement (ou une mise en échec) du pouvoir assimilateur de la culture et des institutions françaises, c'est encore vers les États-Unis que l'on se tourne. Cette fois-ci l'exemple américain est invoqué de manière positive : il illustre le cas d'une société qui aurait su préserver le caractère ethnique des immigrants au-delà de la première génération tout en favorisant leur intégration à la nation.