Le texte que je voudrais vous présenter, le Journal qu'a tenu mon père, Lucien Vidal-Naquet, entre le 15 septembre 1942 et le 29 février 1944, n'est pas complètement inédit. De larges extraits en ont été reproduits dans un mensuel juif en 1960, mais accompagnés de commentaires si insultants — il n'est pas de communauté qui n'ait ses intégristes — que j'ai été obligé de protester. Dix ans plus tard, un collaborateur de ce même mensuel osa écrire dans Combat (8 avril 1970), et pour mieux m'insulter, moi, que ce « doux avocat », ce « doux Français », ce « Juif doux », s'en est allé finir sa vie à Auschwitz, dans la chambre à gaz, « comme on prend sa retraite ». Vous comprendrez que dans ces conditions j'ai, depuis trente ans, éprouvé quelque hésitation avant de parler à nouveau de ce témoignage.